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Décisions

CA Versailles, 6e ch. soc., 27 février 2001, n° 99-20989

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Dossche France (SARL)

Défendeur :

Gonnet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ballouhey

Conseillers :

M. Thony, Mme Legras

Avocats :

Mes Basilios, Moreuil, SCP Moreuil, Thevenet.

Cons. prud'h. Saint-Germain en Laye, sec…

14 décembre 1998

FAITS, PROCEDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES

Statuant sur l'appel régulièrement formé par la SARL Dossche France, d'un jugement du Conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye, section Encadrement, en date du 14 décembre 1998, dans un litige l'opposant à M. Emmanuel Gonnet, et qui, sur la demande de celui-ci en " indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, indemnité conventionnelle de rupture, indemnité de clientèle, rappel de commission " a :

- Condamné la SARL Dossche France à payer à M. Emmanuel Gonnet les sommes de :

* 70 000 F au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

* 15 000 F au titre de l'indemnité de clientèle ;

- Débouté M. Emmanuel Gonnet du surplus de ses demandes.

EXPOSE DES FAITS

Pour l'exposé des faits la Cour renvoie au jugement.

PRETENTIONS DES PARTIES

Considérant que la SARL Dossche France, par conclusions écrites déposées et visées par le greffier à l'audience, conclut :

- à l'infirmation de la décision attaquée ;

- au débouté de l'ensemble des demandes de M. Emmanuel Gonnet ;

- à la condamnation de M. Emmanuel Gonnet à lui rembourser la somme de 3 087 F de trop perçu de commissions ;

Qu'elle expose que M. Emmanuel Gonnet a été engagé le 4 janvier 1994 en qualité de VRP, avec pour secteur : environs de Paris, le contrat de travail précisant que "cette attribution de secteur n'est donc pas exclusive, les activités de chacun étant réparties suivant les instructions et les programmes de travail établis par le responsable de secteur" que si M. Gonnet a réalisé des Ventes en progression de 1994 à mi-1996, ses résultats se sont alors dégradés ; qu'après lui avoir adressé des avertissements, la société a été contrainte de le licencier par lettre du 16 septembre 1997 ; que l'insuffisance de résultats de M. Gonnet est établie par les chiffres des ventes, qui ont baissé de 63,49 % entre 1996 et 1997 ; que si la SARL Dossche France a changé le secteur de M. Emmanuel Gonnet en 1996, cela était permis par son contrat et résultait précisément des insuffisances de résultats constatés ; qu'il convient donc de le débouter de l'ensemble de ses demandes ;

Considérant que M. Emmanuel Gonnet par conclusions écrites déposées et visées par le greffier à l'audience conclut :

- à la confirmation de la décision entreprise en ce qui concerne l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- à la condamnation de la SARL Dossche France à lui payer au surplus les sommes de :

* 2 885 F au titre de rappel de commissions du 4/01/1994 au 30/09/1997,

* 95 144 F au titre de l'indemnité de clientèle,

* 5 491 F au titre de l'indemnité de rupture conventionnelle.

- à la condamnation de la SARL Dossche France à lui payer la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Qu'il fait valoir que depuis son embauche, ses résultats avaient progressé de manière satisfaisante jusqu'au jour où il lui a été interdit de démarcher son secteur de Yvelines ; qu'il a été licencié au motif prétendu d'une baisse de résultat, alors que l'attestation ASSEDIC mentionne un licenciement pour cause économiques ; que la lettre de licenciement est insuffisamment motivée ; qu'il ne peut lui être reproché une baisse des résultats, alors que son secteur de démarchage lui a été retiré, ce qui constitue une modification unilatérale de son contrat de travail ; que la baisse de résultat est la conséquence directe de cette modification qu'en ce qui concerne l'indemnité de clientèle et de l'indemnité conventionnelle de rupture, le conseil de prud'hommes a fait une appréciation erronée de leur principe et de leur montant ;

Que pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la Cour, conformément aux articles 455 et 95-l du nouveau Code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'a leurs prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement :

Considérant que courant octobre 1996, la SARL Dossche France a demandé à son VRP de changer sa zone de prospection, de ne plus prospecter dans les Yvelines, et en revanche de couvrir les 16e et 17e arrondissements de Paris; que ces secteurs d'activités ne sont pas ceux prévus aux contrat, qui fixe comme secteur d'activité " environs de Paris " et non Paris même que la mention dans le contrat de travail selon laquelle l'attribution de secteur n'est pas exclusive signifie que M. Emmanuel Gonnet n'est pas le seul VRP de la société à intervenir sur le secteur concerné, et non pas qu'il peut être appelé à couvrir d'autres secteurs que celui qui lui est attribué par son contrat de travail ; que la possibilité laissée au responsable de secteur de répartir les activités en fonction des programmes de travail s'apprécie à l'intérieur d'un secteur et n'ouvrent pas la possibilité d'affecter le VRP à d'autres zones sans opérer une modification du contrat de travail ; qu'en attribuant à M. Emmanuel Gonnet les l6e et 17e arrondissements de Paris alors que son contrat de travail l'avait affecté aux environs de Paris, la SARL Dossche France a pratiqué une modification unilatérale de son contrat de travails/; qu'elle ne peut dès lors lui reprocher une baisse de résultat consécutive à cette modification unilatérale, alors qu'il résulte des pièces versées aux débats comme des termes de la lettre de licenciement que la baisse de résultats est pour la plus grande partie postérieure à la modification du contrat de travail ; que c'est par des motifs pertinents que le Conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye a considéré que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris sur ce point tant sur le principe que sur le montant des sommes allouées au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur l'indemnité de clientèle :

Considérant qu'aux termes de l'article L 751-9 du Code du travail, le VRP a droit en cas de résiliation de son contrat de travail à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui ; qu'il résulte des débats que M. Emmanuel Gonnet a bien créé et développé une clientèle au sein de la SARL Dossche France ainsi que les résultats de la période 1994-1996 le font apparaître, même si le changement de secteur s'est traduit par une baisse de CA en 1997 ; que la SARL Dossche France a d'ailleurs reconnu le principe de cette indemnité en lui versant la somme de 10 185 F à la fin de ce contrat qu'il convient, compte tenu des éléments de l'espèce d'allouer à M. Gonnet la somme de 74 203 F au titre de l'indemnité de clientèle ;

Sur l'indemniré conventionnelle de rupture :

Considérant qu'il résulte de l'article 13 de l'Accord National Interprofessionnel des VRP qu'en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité conventionnelle de rupture est allouée; que selon les termes de cet article, cette indemnité conventionnelle de rupture n'est cumulable ni avec l'indemnité légale de licenciement ni avec l'indemnité de clientèle ;

Considérant que M. Emmanuel Gonnet soutient que l'indemnité de clientèle et l'indemnité conventionnelle de rupture peuvent se cumuler dans la mesure où l'indemnité conventionnelle de rupture n'est calculée que sur la partie fixe de la rémunération, et que l'indemnité de clientèle est calculée sur la partie variable, c'est à dire sur les commission ; mais considérant qu'il résulte du dernier alinéa de ce même article que l'indemnité conventionnelle de rupture n'est calculée sur la partie fixe de la rémunération que lorsque l'intéressé bénéficie également de l'indemnité spéciale de rupture prévue à l'article 14 que cette indemnité spéciale n'est due que si l'intéressé a renoncé expressément à l'indemnité de clientèle ; que tel n'est pas le cas en l'espèce; qu'il convient de le débouter de sa demande de ce chef ;

Sur les rappels de commissions :

Considérant que M. Gonnet demande la condamnation de la SARL Dossche France au paiement de la somme de 2 885 F au titre de rappels de commission ; qu'il expose qu'après avoir repris les calculs résultant des relevés informatiques de la SARL Dossche France, il a constaté un moins-perçu égal à ce montant ; que la SARL Dossche France expose quant à elle que selon ses propres calculs, M. Gonnet a trop perçu un total de 3 087 F de commissions dont elle demande le remboursement ; mais considérant que les chiffrages versés à l'appui des demandes respectives ne permettent d'établir la preuve du bien fondé ni de l'une, ni de l'autre ; qu'il convient de débouter les parties de ces chefs ;

Considérant que l'équité commande de mettre à la charge de la SARL Dossche France une somme de 5 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de M. Emmanuel Gonnet au titre de l'instance d'appel :

Par ces motifs : La COUR, Statuant publiquement par arrêt contradictoire, Réforme le jugement et statuant à nouveau : Condamne la SARL Dossche France à paver à Monsieur Emmanuel Gonnet la somme de 74 203 F (soixante quatorze mille deux cent trois francs) au titre de l'indemnité de clientèle ; Confirme pour le surplus le jugement en ses autres dispositions ; Y ajoutant, Déboute Monsieur Emmanuel Gonnet du surplus de ses demandes ; Déboute la SARL Dossche France de sa demande reconventionnelle ; Condamne la SARL Dossche France à payer à Monsieur Emmanuel Gonnet la somme de 5 000 F (cinq mille francs) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour les frais en appel ; Condamne la SARL Dossche France aux dépens.