Cass. com., 11 mars 2003, n° 00-12.124
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Marie Brizard Berger diffusion (SA), Berger (SA)
Défendeur :
Teisseire France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Champalaune
Avocat général :
M. Viricelle
Conseillers :
MM. Boinot, Sémériva, Truchot
Avocat :
Me Guinard
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 17 décembre 1999), que la société Teisseire France, qui commercialise notamment des sirops, a assigné sa concurrente, la société Berger, ainsi que la société Marie Brizard Berger diffusion qui commercialise les produits fabriqués par la société Berger, sur le fondement de la concurrence déloyale en faisant valoir que ces sociétés ne respectaient pas les prescriptions de l'article L. 121-35 du Code de la consommation relatif aux ventes avec primes en vendant des sirops destinés à une clientèle enfantine conditionnés dans des bidons surmontés d'une coiffe à l'intérieur de laquelle était dissimulée une figurine miniature représentant un personnage créé par Walt Disney, dès lors que la valeur de la figurine excédait les limites résultant des dispositions réglementaires applicables;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société Berger et la société Marie Brizard Berger diffusion à faire retirer de la vente tous les bidons métalliques de sirop de la marque Sirop sport comportant une figurine Disney à titre de prime, ainsi qu'à verser à la société Teisseire une somme de 1 000 000 de francs à valoir sur son préjudice "éventuel", alors, selon le moyen : 1°) que la valeur maximale d'une prime dans le cadre d'une vente est déterminée en fonction du coût intrinsèque de l'objet offert en prime à l'exclusion des coûts extrinsèques nécessaires à la mise en place de l'opération de vente avec prime; qu'en intégrant dans le calcul de la valeur de la prime des éléments extrinsèques au coût de fabrication des figurines Disney, la cour d'appel a violé les articles L. 121-35 et R. 121-8 du Code de la consommation ; 2°) que le conditionnement d'un produit ne constitue pas une prime lorsqu'il n'est pas susceptible de réutilisation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a intégré dans la valeur de la prime le coût lié au message d'information des consommateurs, celui de l'opercule de maintien et celui de la coiffe destinée à recevoir une figurine, quand ces éléments autonomes de la figurine n'avaient pas vocation à être réutilisés, a violé les articles L. 121-35 et R. 121-8 du Code de la consommation ;
Mais attendu que la détermination de la valeur de la prime visée aux articles L. 121-35 et R. 121-8 du Code de la consommation doit prendre en compte le coût intrinsèque de l'objet ou du service offert en prime ainsi que l'ensemble des coûts nécessaires à l'offre de cet objet ou de service au consommateur qui ne seraient pas exposés si cette offre n'était pas consentie ;
Que l'arrêt, qui retient que doit être pris en compte le coût d'insertion dans la coiffe couvrant le bidon, dès lors que ces opérations d'assemblage étaient indispensables pour que l'acheteur des bidons de conditionnement puisse bénéficier des figurines proposées en prime, compte tenu de la configuration de ces produits, qui ajoute qu'il y a lieu d'inclure dans le coût, l'ensemble des opérations permettant de disposer les figurines dans le capot des bidons telles que le message d'information destiné au consommateur et imposé par la réglementation et l'opercule maintenant les figurines dans la coiffe, dès lors que ces éléments n'avaient de raison d'être que parce que la société Berger voulait offrir aux jeunes consommateurs en plus de son produit, un cadeau placé à l'intérieur de la coiffe, et qui estime que la coiffe sur le bidon ne constituait pas un mode de conditionnement habituel mais n'était destiné qu'à placer les figurines à l'intérieur de l'emballage afin qu'elles soient solidaires des produits au moment de la vente et en déduit que le coût de cette coiffe doit être inclus dans l'évaluation de la valeur de la prime, a statué à bon droit ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches : - Attendu qu'il est encore fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen : 1°) que seule est prohibée la vente avec prime faite aux consommateurs ; qu'en l'espèce où les ventes intervenues à l'initiative des sociétés Berger et Marie Brizard diffusion ont été faites au profit de détaillants commerçants, alors que la vente des bidons aux consommateurs a été assurée par ces détaillants à des conditions de prix que les sociétés Berger et Marie Brizard Berger diffusion ne peuvent maîtriser, la cour d'appel en retenant la responsabilité de ces sociétés, a violé l'article L. 121-35 du Code de la consommation ; 2°) qu'en présumant que les sociétés Berger et Marie Brizard diffusion ont nécessairement le pouvoir d'obliger les vendeurs intermédiaires à pratiquer un prix de vente au détail compatible avec les dispositions du Code de la consommation sans tenir compte de l'aléa tenant à leur liberté dans la fixation de leur propre prix aux consommateurs, la cour d'appel a violé l'article L. 121-35 du Code de la consommation ensemble les articles 1137 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que le producteur qui propose au consommateur, fût-ce par l'intermédiaire d'un revendeur, un produit donnant droit à l'attribution d'une prime, est soumis aux dispositions des articles L. 121-35 et R. 121-8 du Code de la consommation;
Qu'en retenant que tant la société Berger, qui fabriquait les boissons en vue de leur vente au public, que la société Marie Brizard Berger diffusion, qui était chargée de leur commercialisation, devaient respecter ces obligations légales, la cour d'appel a statué à bon droit ;
Et attendu, d'autre part, qu'en énonçant que lorsque l'entreprise qui propose à la vente des produits donnant droit à l'attribution d'une prime n'est pas directement en rapport avec les acheteurs consommant ces produits, il lui appartient, dans ses rapports avec les vendeurs intermédiaires, de prendre les dispositions nécessaires pour qu'ils ne pratiquent pas des prix de vente au détail incompatibles avec les articles L. 121-35 et R. 121-8 du Code de la consommation, faisant ainsi ressortir qu'il appartient à l'entreprise qui propose à la vente des produits donnant droit à l'attribution d'une prime, de limiter la valeur de la prime par rapport à son propre prix de vente, l'arrêt n'encourt pas le grief de la seconde branche du moyen ; qu'il suit de là que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.