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CCE, 23 décembre 1977, n° 78-253

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Campari

CCE n° 78-253

23 décembre 1977

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85 ; vu le règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962 (1), et notamment ses articles 4 à 8 ; vu les demandes d'attestation négative et les notifications effectuées les 20 et 27 octobre 1962 des contrats de licence de marque que la société Davide Campari-Milano SpA, ayant son siège à Milan, Italie, dénommée ci-après " Campari-Milano ", a passés le 19 septembre 1957 avec la société Ognibeni & Co à Amsterdam, Pays-Bas, le 1er janvier 1960 avec l'entreprise Hans Prang à Hambourg, république fédérale d'Allemagne, le 8 janvier 1962 avec la société Soval - aujourd'hui Campari-France SA - à Nanterre, France, et le 11 octobre 1962 avec la société Sovinac SA à Bruxelles, Belgique ; vu la notification du 27 juin 1973 du contrat de licence de marque que Campari-Milano a conclu le 14 avril 1966 avec la société Johs. M. Klein & Co à Copenhague, Danemark ; vu les modifications que les parties ont apportées aux contrats au cours de la procédure pour que ceux-ci répondent aux dispositions de l'article 85 paragraphe 3 ; vu la publication de l'essentiel du contenu des notifications conformément à l'article 19 paragraphe 3 du règlement n° 17 dans le Journal officiel des Communautés européennes n° C 198 du 19 août 1977 ; vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, recueilli conformément à l'article 10 du règlement n° 17, le 25 novembre 1977,

I. LES FAITS

Considérant que les faits essentiels pour l'appréciation de l'affaire sont les suivants :

Campari-Milano est titulaire des marques internationales Bitter Campari et Cordial Campari, qui servent à distinguer des apéritifs fabriqués à l'aide de certains concentrés secrets (mélanges spéciaux d'herbes broyées).

En vue de promouvoir l'exploitation de ses marques à l'étranger, Campari-Milano a constitué, notamment dans tous les pays de la Communauté économique européenne à l'exception du Royaume-Uni et de l'Irlande, un réseau de licenciés chargés de la fabrication et de la vente de ses produits. Pour ces deux derniers pays, elle a concédé à la société FS Matta Ltd le droit exclusif d'importer et de distribuer ses apéritifs aux termes d'un accord dont la version actuelle bénéficie de l'exemption par catégorie accordée par le règlement n° 67-67-CEE de la Commission du 22 mars 1967 (2).

A. L'activité des parties en cause à l'intérieur du Marché commun est réglée par les contrats de licence susvisés qui ont été notifiés à la Commission et qui, dans leur version en vigueur depuis le 1er novembre 1977, prévoient notamment ce qui suit :

1. Campari-Milano concède aux entreprises suivantes une licence exclusive d'exploitation de ses marques en vue de la fabrication de ses apéritifs, d'après ses procédés secrets et sur la hase de ses concentrés, et en vue de leur vente dans les territoires ci-après :

- pour Ognibeni & Co : Pays Bas,

- pour Hans Prang : RF d'Allemagne,

- pour Campari-France SA : France, principauté de Monaco et certains territoires d'outre-mer,

- pour Sovinac SA : Belgique et grand-duché de Luxembourg,

- pour Johs M. Klein & Co : Danemark.

1. Campari-Milano s'engage à ne pas fabriquer elle-même ses apéritifs pendant la durée de validité des contrats dans ces territoires.

2. Les licenciés s'engagent à ne pas s'intéresser pendant la durée des accords à d'autres produits concurrents, notamment à certaines boissons dénommées Bitter ou à des boissons gazeuses similaires au Campari soda.

3. Les licenciés et Campari-Milano s'engagent à n'entreprendre aucune politique active de vente, à ne pas établir de succursales et à n'effectuer aucune publicité, les premiers en dehors des territoires qui leur sont respectivement concédés, Campari-Milano à l'intérieur de ces territoires.

Toutefois, les licenciés et Campari-Milano prendront toute mesure en vue de donner une suite favorable à toute demande spontanée de livraison à l'exportation à l'intérieur de la Communauté économique européenne concernant des produits Campari qu'ils fabriquent selon les caractéristiques (teneur en alcool, habillage, contenance, etc.) spécifiques des territoires concédés, pour les licenciés, ou du territoire italien, pour Campari-Milano. De telles livraisons seront effectuées aux prix et conditions correspondant à ceux pratiqués par le licencié exportateur sur son propre territoire exclusif et par Campari-Milano sur le marché italien, prix majorés pour cette dernière des frais supplémentaires de redevance et de publicité qui incombent aux licenciés.

Au cas où de telles demandes spontanées devaient concerner du Bitter à fabriquer selon les caractéristiques spécifiques du marché de destination, tes parties restent libres de les accepter ou non ; l'exigence primaire de satisfaire les territoires exclusifs voire te marché italien doit de toute façon être sauvegardée et, pour ce qui est des licenciés, ils doivent d'abord demander à Campari-Milano les formules indispensables pour de telles fabrications. Campari-Milano se réserve le droit d'exécuter les commandes qui lui sont directement adressées par les agents appartenant aux corps diplomatiques et aux forces armées étrangères.

Les licenciés et Campari-Milano s'engagent à aider dans toute la mesure du possible leurs acheteurs désireux d'exporter les produits à l'intérieur de la CEE à obtenir le remboursement de l'accise perçue sur l'alcool dans la mesure permise par le régime fiscal national.

Enfin, chaque licencié s'engage à ne pas exporter, tant directement qu'indirectement, des produits Campari hors de la CEE (ainsi que, pour ce qui est de Campari-France, hors de ceux des pays tiers faisant partie du territoire concédé).

4. Tous les contrats comportent l'obligation pour les licenciés de livrer le produit original italien au lieu de celui de leur propre fabrication pour les fournitures aux corps diplomatiques, aux avitailleurs de navires, aux forces armées étrangères et en général à tous les organismes bénéficiant de la franchise de droits.

5. La fabrication des produits Campari par les licenciés français, belge, danois et néerlandais a lieu dans leurs usines respectives de Nanterre, de Bruxelles, de Copenhague et d'Amsterdam.

Tout changement du lieu de fabrication doit être communiqué à Campari-Milano qui pourra s'y opposer si l'établissement proposé n'est pas apte à garantir la qualité des produits.

6. Les licenciés sont tenus de suivre exactement les instructions du concédant concernant la fabrication des produits, de veiller à ce que la qualité des matières premières utilisées réponde aux prescriptions imposées par le concédant, d'acheter au concédant certaines matières premières, à savoir les mélanges d'herbes et les colorants dont la composition est secrète, de soumettre à son approbation un échantillon de chaque fabrication indiquant la date de filtrage ainsi que le numéro des caisses d'herbes employées et de ne pas divulguer les procédés de fabrication.

7. Les licenciés s'engagent à développer le plus possible la vente des produits et, en particulier, à faire une campagne publicitaire adéquate en y investissant chacun le même montant fixe prédéterminé par bouteille-litre de Bitter vendue.

8. Les licenciés sont tenus de signaler à Campari-Milano les fraudes ou les contrefaçons dont ils auraient connaissance. Campari-Milano pourra charger les licenciés d'agir contre les contrefacteurs en leur conférant à cet effet les pouvoirs nécessaires.

9. En aucun cas, les droits concédés ne pourront être cédés à des tiers.

10. Tout différent concernant l'interprétation et l'exécution des contrats sera tranché par trois arbitres qui statueront comme amiables compositeurs. L'arbitrage aura lieu normalement à Milan ; toutefois, l'un des contrats prévoit que l'arbitrage pourra avoir lieu en dehors de la Communauté, et notamment en Suisse.

11. Tandis que le contrat conclu avec te licencié français impose à celui-ci, à titre de rémunération pour l'usage de la marque, le versement de redevances fixes pour chaque bouteille-litre vendue, les contrats conclus avec les autres licenciés prévoient que les redevances sont comprises dans le prix d'achat des matières premières livrées par Campari Milano.

12. Les contrats sont renouvelables tacitement d'année en année, ou tous les deux ans, sauf dénonciation avec préavis par l'une ou l'autre des parties.

B. Dans leur version notifiée, les accords comportaient notamment l'obligation pour les licenciés de limiter strictement la fabrication des produits à certains établissements et l'obligation de s'approvisionner exclusivement auprès du concédant en matières premières non secrètes ; ces accords comportaient aussi l'obligation de ne pas exporter, pour les licenciés, vers d'autres pays de la CEE, et pour Campari-Milano vers les territoires de ces licenciés. Toutefois, après que la Commission eut fait savoir par une lettre de communication des griefs du 27 juillet 1976, qu'elle considérait ces obligations comme incompatibles avec l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE, les parties les ont modifiées de manière que leurs accords puissent bénéficier de l'exemption prévue par le paragraphe 3 de l'article précité. En particulier, elles ont remplacé l'interdiction d'exporter dans la CEE par l'engagement de prendre toute mesure en vue de donner une suite favorable aux demandes de livraison spontanées à l'intérieur de la CEE, conformément aux charges que la Commission avait indiquées dans sa communication des griefs.

C. Les autres éléments d'appréciation recueillis au cours de l'instruction de l'affaire sont les suivants :

1. Les relations d'exclusivité établies par Campari-Milano remontent à la période d'avant-guerre pour ce qui est des accords avec les entreprises Campari-France SA, Sovinac SA et Ognibeni SA et, à la période de 1949-1953, pour les accords avec les entreprises Hans Prang et Johs. M. Klein & Co. Il n'existe aucun lien financier entre les parties contractantes.

Le Bitter Campari est le seul des produits à être fabriqué à l'heure actuelle par les licenciés. Le volume annuel de la fabrication du Bitter se situe à l'heure actuelle, d'après les différents licenciés, entre un et trois millions de bouteilles. Grâce à la construction de nouvelles fabriques et aux agrandissements des ateliers de production déjà réalisés ou en cours de réalisation, tous les licenciés ont pu, durant les dernières années, augmenter considérablement leurs capacités de production. La vente du Bitter Campari représente actuellement la totalité des activités du licencie français - celui-ci ayant encore récemment importé régulièrement des vins et des vermouths - ainsi que la partie la plus importante des activités des licenciés néerlandais, allemand et belge ces derniers ainsi que le licencie danois distribuent toute une gamme de boissons (notamment des spiritueux, du genièvre et des vins) qu'ils fabriquent eux-mêmes ou qu'ils importent en général de France et d'italie. Des quantités peu importantes de Campari Soda et de Cordial Campari sont directement importées par certains des licenciés.

2. Outre les mélanges d'herbes secrets, l'essence de Bigarade et l'albumine, les licenciés utilisent pour la fabrication du Bitter Campari notamment du sucre, de l'alcool et de l'eau distillée qu'ils achètent sur place. Les dosages de chacun des composants du Bitter varient d'après la teneur alcoolique du produit : cette teneur est actuellement de 20° pour le Bitter fabriqué et écoulé en France par le licencié français, de 21,5° et 25° pour le Bitter fabriqué par le licencié belge respectivement pour la vente en Belgique et au Luxembourg, de 25° pour le Bitter fabriqué par les licenciés néerlandais et danois ainsi que par Campari-Milano pour les ventes sur les marchés italien et anglais et de 30° pour le Bitter écoulé en république fédérale d'Allemagne. Ces dosages font l'objet de formules de fabrication détaillées, de façon à assurer sur les différents marchés un produit le plus semblable possible au produit original italien, tant pour la qualité que pour la présentation extérieure. Les bouteilles de Campari sont fabriquées selon les dessins et modèles de Campari-Milano.

D'après les renseignements dont dispose la Commission, pour qu'une fabrication selon l'une ou l'autre teneur alcoolique soit rentable, il faut au moins la capacité d'une cuve de 28 000 litres. De même que le degré, la capacité de la bouteille de Bitter utilisée varie d'un État membre à l'autre. Elle est d'un litre en Italie et en France, de 98 centilitres au Luxembourg, de 70 centilitres en république fédérale d'Allemagne, de 72 centilitres au Danemark et de 75 centilitres aux Pays-Bas, en Belgique et au Royaume-Uni. Des bouteilles de petit format, dites mignonnettes, sont aussi utilisées. Enfin, les bouteilles livrées par Campari-Milano pour les ventes aux ambassades et aux avitailleurs ont toutes une capacité de 92 centilitres et un degré d'alcool de 28,5°.

3. Jusqu'à présent, l'activité des licenciés a été limitée aux territoires respectivement concédés. Dans ces territoires, ainsi qu'en Italie, les ventes à la consommation ordinaire - c'est-à-dire celle du Biner soumis au paiement des droits et taxes exigibles sur l'alcool - sont effectuées directement par les licenciés et Campari-Milano ou par l'intermédiaire de distributeurs indépendants qui sont soumis seulement au respect des conditions générales de vente des fabricants. À l'heure actuelle, ces conditions ne contiennent pas l'obligation pour les acheteurs de ne pas exporter la marchandise livrée. Les ventes au Luxembourg sont assurées par un importateur exclusif. Auparavant tous les licenciés étaient soumis à l'obligation de vendre certaines quantités minimales de produits par an. Cette obligation a pris fin dans le courant de 1977.

Campari-Milano n'intervient pas dans la détermination des prix de vente des licenciés. Les prix de cession des licenciés aux revendeurs sur le marché intérieur ou à l'exportation sont déterminés essentiellement par les mêmes éléments de coûts, notamment pour ce qui est des matières premières, et ne présentent pas de différences substantielles entre eux. À l'heure actuelle, les licenciés ne fixent plus de prix de vente au consommateur final, ceux-ci se situant en général au même niveau en France, en Belgique et aux Pays-Bas et, à un niveau plus élevé, eu Allemagne et au Danemark, en raison notamment de la charge fiscale dans ces deux pays, tandis qu'au Luxembourg ces prix se situent à un niveau moins élevé en raison de la charge fiscale qui y est plus réduite. Au cours des dernières années, ces prix sont demeurés pratiquement stables malgré l'augmentation sensible des salaires et du coût des matières premières.

Au cours des dernières années les ventes du Bitter ont augmenté régulièrement à l'intérieur de la CEE grâce, d'une part, à la constitution d'un réseau de distribution capillaire qui a vu augmenter considérablement le nombre des détaillants et, d'autre part, à la stimulation de la demande auprès des gros clients et des grandes surfaces ; entre 1970 et 1977, ces ventes ont doublé, voire même triplé, au Benelux et en république fédérale d'Allemagne. Le coût moyen de la campagne publicitaire supporté chaque année par les licenciés se situe au même niveau pour chacun de ceux-ci. Par contre, les investissements en publicité de Campari-Milano se situent à un niveau inférieur de moitié.

Les ventes des produits à la consommation en franchise de droits et taxes, à savoir les ventes aux corps diplomatiques, aux forces armées étrangères ou organismes similaires jouissant des droits d'extra-territorialité, ainsi qu'aux navires et aéronefs se rendant directement à l'étranger ou aux comptoirs de vente des ports et aéroports placés sous régime douanier sont en général effectuées par l'intermédiaire d'avitailleurs. Les conventions conclues par ces derniers avec les licenciés ou avec Campari-Milano n'ont pas été notifiées à la Commission et ne font pas l'objet de la présente procédure. Les ventes des produits à la consommation en franchise de droits ne représentent pour la plupart des licenciés qu'une petite partie de leurs ventes totales.

Au cours des dernières années, des quantités de Bitter Campari ont été importées et écoulées notamment en Belgique et aux Pays-Bas par des importateurs parallèles, après paiement des accises exigées dans ces pays. Ces importateurs ont été approvisionnés tant par des avitailleurs que par des grossistes bénéficiant du régime de vente en suspension des droits de consommation.

4. À l'intérieur du Marché commun, le Bitter Campari est assujetti au régime fiscal applicable à l'alcool ainsi qu'à des réglementations publiques concernant les indications devant figurer sur les bouteilles et la protection de la santé publique.

a) Dans chaque État membre, le Bitter Campari est soumis au paiement de droits et taxes, assis sur les quantités exprimées en alcool pur de produits imposables et grevant ainsi plus lourdement les produits fabriqués à plus haute teneur alcoolique. Les droits et taxes perçues à l'importation sont en général les mêmes qu'en régime intérieur ; ils s'élèvent à un peu moins de la moitié à deux tiers du prix franco usine. Eu égard au montant élevé de ces droits, il est exclu qu'un Bitter fabriqué dans l'un des États membres puisse, de façon économiquement rentable, être exporté dans un autre, s'il ne peur pas dans le premier État être exempté du paiement ou bénéficier du remboursement des droits normalement exigibles.

D'après les réglementations nationales, pour que l'alcool entrant dans la fabrication du Bitter puisse être exempté du paiement de ces droits, il faut qu'il soit déclaré lors de l'achat par le fabricant comme étant destiné à l'exportation. Aux exportations proprement dites sont assimilées les ventes des produits en vue de leur consommation en franchise de droits et taxes.

Selon les informations dont la Commission dispose, le Bitter non déclaré comme étant destiné à l'exportation doit, dans tous les pays de la CEE, à l'exception de la France et du Royaume-Uni qui connaissent un régime de vente en suspension des droits de consommation, supporter tous les droits lors de la sortie de l'usine de fabrication ou lors de l'utilisation de capsules ou banderoles représentatives des droits sur les spiritueux. Les droits une fois acquittés ne sont en général pas remboursés en cas d'exportation ultérieure, sauf en Italie et en France, dans ce dernier pays toutefois uniquement par l'entremise du fabricant, à qui la direction générale des impôts rembourse l'impôt correspondant aux attestations fournies par le revendeur exportateur.

Il est à noter que, afin d'éliminer ces obstacles à la libre circulation et sans distorsion de concurrence des produits alcooliques entre les États membres, la Commission a soumis au Conseil une proposition de directive concernant l'harmonisation des accises sur l'alcool et, entre autres, des conditions de détention des spiritueux par les négociants (3). Aux termes de cette proposition de directive, les négociants pourraient, sous certaines conditions, détenir des spiritueux en suspension d'accise et pratiquer des exportations parallèles.

b) Les réglementations nationales en matière de santé publique ou de circulation des boissons soumises aux droits et taxes sur l'alcool exigent plusieurs mentions à porter sur les bouteilles mises en vente. Il s'agit en général, outre l'indication du produit, du nom et de l'adresse du fabricant ou de l'importateur et du degré d'alcool (en outre, dans certains États membres sont exigées la mention " spiritueux " et l'indication de la contenance, des composants et des produits d'addition).

c) Certaines législations nationales imposent une teneur minimale en alcool pour des boissons telles que le bitter (notamment 17° en France, 20° au Danemark et 30° en république fédérale d'Allemagne).

Comme la teneur en alcool du Bitter Campari requise par les dispositions en vigueur en république fédérale d'Allemagne n'est pas atteinte par le bitter produit dans les autres États membres, ces dispositions ont notamment pour conséquence d'interdire toute importation en république fédérale d'Allemagne, hormis le cas d'une production de Bitter spécialement destinée au marché allemand. Il y a toutefois lieu de noter que, à la suite de plaintes présentées à la Commission par des importateurs, et de l'avis motivé que la Commission a ensuite adressé en application de l'article 169 du traité CEE à la république fédérale d'Allemagne, celle-ci a supprimé les dispositions en cause à l'égard de certains produits alcooliques importés en république fédérale d'Allemagne, autres que le biner et dont la teneur en alcool est inférieure à 30°.

d) D'autres dispositions nationales réglementent la publicité des boissons alcooliques, limitent le nombre des débits de boissons ou y interdisent la vente, notamment en Belgique, d'apéritifs et de bitter dépassant un certain degré alcoolique ou déterminent la capacité effective des bouteilles (notamment en France où les capacités autorisées étant de 0,35, 0,5, 0,7 et 1 litre, la commercialisation des bouteilles de 0,75 litre utilisées par les licenciés belges et néerlandais n'est pas autorisée).

5. D'après les explications fournies par Campari-Milano, l'obligation pour les licenciés de signaler toutes les contrefaçons parvenant à leur connaissance ne concerne pas les importations dans chaque territoire concédé du produit d'origine italienne ou de produits fabriqués sous licence dans un autre État membre.

6. Dans les territoire concédés, le Bitter Campari est concurrencé par des produits substituables au nombre desquels figurent le Punt e Mes Carpano, le Bitter Cinzano, le Bitter Gambarotta, le Bitter Negroni, le Bitter Moroni, le Bitter San Pellegrino, le Bitter Rossi, l'Amer Picon, le Suze, l'Amer Khuri, le Cynar et l'Amer Claquesin.

Bien que la part de marché du Bitter Campari n'ait pu être déterminée avec précision, il n'est pas douteux que cette marque a acquis une grande renommée internationale. D'autre part, le chiffre d'affaires réalisé par Campari-Milano et l'ensemble de ses partenaires est considérable ;

7. Considérant qu'aucune observation de tiers n'a été communiquée à la Commission après la publication du contenu essentiel des notifications ;

II. Applicabilité de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE

Considérant que l'article 85 paragraphe 1 dudit traité dispose que sont incompatibles avec le Marché commun et interdits tous accords entre entreprises qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet et pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun ;

A. Considérant que les accords en cause, qui sont conclus entre entreprises, comportent aux points 1 à 4 sous I A des dispositions qui ont pour objet et pour effet de restreindre de manière sensible le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun ;

1. Considérant que l'exclusivité concédée aux licenciés empêche Campari-Milano d'offrir à des tiers des licences de marque pour ses produits dans les territoires néerlandais, allemand, français, belgo-luxembourgeois et danois ainsi que de fabriquer elle-même ces produits dans ces territoires ;

Considérant que la marque confère à son titulaire le droit exclusif d'user du signe distinctif pour la première mise en circulation du produit et de protéger ce produit contre la contrefaçon ; que le titulaire de la marque peut, par des accords de licence, autoriser l'usage par des tiers du signe protégé ; que, toutefois, s'il s'engage à ne concéder le droit d'user de sa marque qu'à une seule entreprise dans un territoire en s'interdisant d'y fabriquer ses produits de marque, il perd la faculté de contracter avec d'autres demandeurs de licence et l'avantage concurrentiel résultant de la possibilité de fabriquer lui-même dans ce territoire ;

Considérant que, en l'occurrence le caractère exclusif de la licence a pour conséquence de restreindre la liberté de Campari-Milano dans l'usage de ses marques, ainsi que d'exclure pour les tiers, et notamment les fabricants de boissons alcooliques, l'usage de ces marques en tant que licenciés, malgré tout l'intérêt qu'ils pourraient y trouver ;

2. Considérant que l'interdiction de concurrence (voir point I A 2) empêche les licenciés de fabriquer ou de commercialiser d'autres produits concurrents pendant la durée de validité des contrats;qu'ils sont ainsi exclus en tant qu'acheteurs de ces produits ou preneurs de licence pour leur fabrication, ainsi qu'en tant que vendeurs de ces produits;que cette restriction a des effets sensibles, eu égard au fait que tous les licenciés, sauf actuellement le licencié français, distribuent déjà toute une gamme de boissons autres que le Bitter Campari et que tous atteignent, pour l'ensemble de leurs activités, un chiffre d'affaires non négligeable ;

3. Considérant que l'interdiction pour Campari-Milano et ses licenciés d'entreprendre une politique active de vente hors de leurs territoires respectifs empêche les licenciés ainsi que le concédant lui-même de rechercher des acheteurs dans le territoire des autres parties;qu'ils sont ainsi exclus en tant que concurrents actifs de ces territoires, tandis qu'à l'intérieur de leur propre territoire ils bénéficient d'une protection relative, seules des importations à la suite de demandes spontanées pouvant y être effectuées; que cette interdiction doit être considérée comme ayant des effets sensibles, étant donné que non seulement Campari-Milano, mais aussi tous les licenciés disposent de capacités de production considérables leur permettant d'approvisionner d'autres marchés à l'intérieur de la CEE; que, si de telles livraisons pourraient concerner en premier lieu des produits fabriqués d'après les caractéristiques de gradation, de contenance et d'étiquetage requises sur le marché du fabricant, elles pourraient concerner de même du bitter à fabriquer selon des caractéristiques différentes, requises sur le marché d'exportation ; que, en effet, les fabricants ont la possibilité d'acheter l'alcool en exemption de droits en vue de l'exportation du produit fini; que, en outre, ils sont en mesure de modifier la teneur en alcool du produit ou la présentation de celui-ci, au cas où l'importance de la commande ou, en tout cas, la possibilité d'établir des courants de vente stables leur ferait apparaître une telle fabrication ainsi que l'utilisation de nouvelles étiquettes ou bouteilles comme rentables ;

4. Considérant que l'obligation de livrer le produit original italien pour les fournitures aux corps diplomatiques, aux avitailleurs de navires, aux forces armées étrangères et en général à tous les organismes bénéficiant de la franchise de droits, empêche les licenciés de fournir le bitter de leur propre fabrication à ces catégories de consommateurs; que, compte tenu des capacités de production dont les licenciés disposent, cette restriction a également des effets sensibles;

B. Considérant que l'exclusivité concédée par Campari-Milano empêche celle-ci de mettre des tiers, par l'octroi d'autres licences, en mesure d'exploiter également ses marques dans chacun des territoires concédés et, par conséquent, d'effectuer éventuellement des exportations au départ de ces territoires à destination d'autres parties du Marché commun ; qu'elle empêche en outre Campari-Milano elle-même de fabriquer du bitter dans ces territoires et, par conséquent, d'effectuer éventuellement des exportations au départ de ces territoires; que l'exclusion des produits concurrents prive les licenciés de la possibilité de commercialiser de tels produits au-delà des frontières des États membres ou de conclure pour ceux-ci des licences avec des entreprises d'autres Etats membres; que l'interdiction de faire une politique active de vente hors de leurs territoires respectifs empêche Campari-Milano et ses licenciés d'écouler librement le bitter de leur fabrication dans l'ensemble du Marché commun sauf sur leur territoire exclusif et affecte ainsi les échanges internationaux de ce produit ; que l'obligation de livrer le produit original italien à certains consommateurs au lieu du produit de leur propre fabrication oblige les licenciés à s'approvisionner en Bitter Campari provenant d'Italie, et affecte ainsi également les échanges internationaux de ce produit ;

Considérant que ces restrictions doivent être considérées comme susceptibles d'affecter le commerce entre États membres, puisqu'elles ont pour effet que le commerce entre États membres se développe dans d'autres conditions qu'il ne l'aurait fait sans ces restrictions et que leur influence sur les conditions du marché revêt quelque importance ;

Considérant que les accords en cause entrent donc dans le champ d'application de l'article 85 paragraphe 1 du traité ;

C. Considérant que les autres dispositions des accords conclus entre Campari-Milano et ses licenciés ne sont pas visées dans le cas d'espèce par l'article 85 paragraphe 1, parce qu'elles n'ont pas pour objet ni pour effet de restreindre d'une manière sensible le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun ;qu'il en est ainsi notamment :

- de l'obligation pour chaque licencié de ne pas exporter, tant directement qu'indirectement, le Bitter Campari en dehors du Marché commun ; que, certes, cette obligation a pour conséquence non seulement de supprimer la liberté des licenciés et de leurs revendeurs d'exercer une activité commerciale pour ce produit en dehors de la CEE, mais aussi d'empêcher tout distributeur situé dans un pays tiers d'acheter ce produit aux licenciés ou à leurs revendeurs pour l'écouler ensuite dans le Marché commun , que, toutefois, tout acheteur établi dans une partie de la Communauté peut être approvisionné en produits visés aux contrats, non seulement directement par le licencié de ce territoire mais également, directement ou indirectement, par les autres licenciés ainsi que par Campari-Milano elle-même ; que, au regard de ces possibilités d'approvisionnement, la réimportation dans le Marché commun de Bitter préalablement exporté par les licenciés ou leurs revendeurs hors de la Communauté paraît peu vraisemblable parce que cette opération serait soumise à l'incidence de facteurs économiques supplémentaires tels que l'accumulation des marges commerciales et des droits et taxes sur l'alcool exigés dans le pays d'importation ainsi que les droits résultant du franchissement des frontières douanières de la Communauté économique européenne ; que cette appréciation vaut également en ce qui concerne les États avec lesquels la CEE a conclu des accords de libre échange, compte tenu notamment du fait que les échanges de boissons alcooliques telles que le Bitter Campari entre la Communauté et ces États continuent à être soumis à des droits de douane,

- de la limitation de la licence aux seules usines aptes à garantir la qualité des produits, puisque les effets de cette restriction de la liberté du choix des licenciés ne vont pas, dans le cas d'espèce, au-delà de l'intérêt justifié du contrôle de la qualité ;que cette obligation des licenciés n'est pas en particulier une limitation régionale absolue de la production, puisqu'elle ne donne à Campari-Milano un droit d'opposition au changement du lieu de fabrication que dans les cas où le nouvel établissement proposé risquerait de compromettre la qualité des produits ; qu'un tel contrôle de qualité présente de l'importance pour le concédant, l'intérêt au maintien de la qualité relevant de l'existence du droit de marque,

- de l'obligation pour les licenciés de suivre les instructions du concédant relatives à la fabrication du produit et à la qualité des composants, ainsi que d'acheter au concédant lui-même certaines matières premières secrètes ;que, en effet, le contrôle de la qualité des produits fabriqués sous licence et de leur identité au produit original italien présente, dans le cas d'espèce, de l'importance pour le concédant, dans ce sens qu'il est lié également à l'intérêt au maintien de la qualité qui relève de l'existence du droit de marque ; que, d'après les indications fournies par les intéressés, les normes de qualité n'obligent pas les licenciés à s'approvisionner en albumine, en essence de Bigarade et en autres produits auprès d'une source déterminée, mais uniquement à choisir parmi différents produits en fonction de critères qualitatifs objectifs ;que, par contre, pour ce qui est du colorant et des mélanges d'herbes, l'intérêt justifié du concédant à l'identité de qualité entre produit original et celui fabriqué sous licence ne peut être sauvegardé que par l'achat exclusif au concédant ;que, en effet, il s'agit de produits dont la composition, qui est caractéristique pour le Bitter Campari, constitue un secret d'affaires que du concédant n'est tenu d'après le droit communautaire de révéler à ses licenciés,

- de l'obligation de ne pas divulguer à des tiers les procédés de fabrication, cette obligation étant une condition indispensable pour permettre la communication de techniques ou recettes secrètes à d'autres entreprises en vue de leur exploitation,

- de l'obligation d'entretenir des contacts suivis avec la clientèle et de faire de la publicité pour le Bitter Campari pour un même montant minimal puisque rien ne permet de constater en l'espèce que les licenciés seraient empêchés, de par le niveau de ce montant minimal, de développer d'autres activités ou d'effectuer également leur propre publicité,

- de l'interdiction de céder les droits concédés, puisque cette interdiction ne fait que sauvegarder le droit pour le concédant de choisir librement ses licenciés ;que, en effet, la conclusion de ces accords est étroitement liée à la personne des partenaires du concédant et que celui-ci doit être libre dans le choix de ces derniers ;

III. Applicabilité de l'article 85 paragraphe 3 du traité CEE

Considérant que, en vertu du paragraphe 3 de l'article 85, les dispositions du paragraphe 1 de cet article peuvent être déclarées inapplicables aux accords entre entreprises qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans:

a) imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs;

b) donner à ces entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence;

A. Considérant que les restrictions de concurrence visées aux points 1 à 4 sous II A répondent aux conditions de l'article 85 paragraphe 3 ;

I. Considérant que l'engagement d'exclusivité pris par Campari-Milano contribue à améliorer la production et la distribution des produits; que, en garantissant à chaque licencié qu'aucune autre entreprise n'obtiendra de licence à l'intérieur du territoire concédé et que ni Campari-Milano ni aucun des autres licenciés ne pourra fabriquer dans ce territoire des produits revêtus de la marque du concédant, cet engagement confère à chaque licencié un avantage territorial; que cet avantage territorial est de nature à permettre une rentabilité suffisante des investissements entrepris par chaque licencié en vue d'assurer la fabrication du produit de marque dans des conditions d'exploitation irréprochables aux yeux du concédant et titulaire de la marque, d'augmenter ses capacités de production et d'améliorer constamment le réseau de distribution établi depuis longtemps;

Considérant que, en fait, l'exclusivité concédée a permis la réalisation par chaque licencié de perfectionnements dans les ateliers de fabrication et la construction de nouvelles usines ; qu'elle a permis en outre à chaque licencié d'intensifier ses efforts de promotion de la marque en accroissant notamment au Benelux et en république fédérale d'Allemagne de plus du double le volume total de ses ventes au cours des six dernières années, d'atteindre par la constitution d'un réseau de distribution capillaire un nombre toujours plus élevé de clients et d'assurer ainsi l'approvisionnement sur toute l'étendue du territoire concédé ;

2. Considérant que l'interdiction de concurrence contribue également à l'amélioration de la distribution des produits sous licence, en évitant la dispersion des efforts de vente, en favorisant la constitution de stocks et en raccourcissant les délais de livraison; que, en effet, en restreignant la liberté des licenciés de commercialiser d'autres produits en même temps que les produits en cause, elle empêche ces licenciés, en cas de conflit entre la promotion des ventes du Bitter Campan et un intérêt particulier éventuel à la vente d'un autre produit, de négliger le premier ; que si une clause de non-concurrence dans des contrats de licence de droits de propriété industrielle fondés sur le résultat d'une activité créatrice, tels que les brevets, constitue plutôt une entrave au progrès technique et économique en empêchant les licenciés de s'intéresser à des techniques et des produits différents, il en va autrement dans les accords de licence en cause ; que, en effet, le but poursuivi par les parties, tel qu'il ressort de l'ensemble des dispositions des contrats, est de promouvoir, par la décentralisation de la fabrication à l'intérieur de la CEE et la rationalisation de la distribution qui s'y relie, la vente du bitter de Campari-Milano, fabriqué à partir d'un même concentre fourni par cette dernière, d'après les mêmes procédés de mélange et les mêmes composants et revêtu de la même marque du concédant ;

Considérant que, dès lors l'interdiction de s'intéresser à des produits concurrents présente, aux fins de l'intensification de la distribution du produit en cause, les mêmes avantages que ceux qui, pour une telle clause dans des accords de distribution exclusive, sont reconnus de façon automatique par le règlement d'exemption n° 67-67-CEE (4), de sorte qu'il paraît justifié de relever cette clause de l'interdiction prévue à l'article 85 paragraphe 1 ;

3. Considérant que les effets d'amélioration de la distribution seront également atteints par l'interdiction imposée à toutes les parties d'entreprendre une politique active de vente hors de leurs territoires respectifs ; que l'imposition de cette restriction aux licenciés contribuera à la concentration de leurs efforts de vente et à un meilleur approvisionnement des utilisateurs dans le territoire qui leur est attribué et pour lequel ils sont plus particulièrement responsables, sans que des acheteurs d'autres territoires de la Communauté soient empêchés de s'approvisionner librement chez l'un ou l'autre des licenciés ; que, d'autre part, l'imposition de cette même restriction à Campari-Milano a des incidences favorables sur les efforts entrepris par les licenciés en vue de promouvoir la fabrication et la distribution du bitter à l'intérieur de chaque territoire concédé, ceux-ci jouissant ainsi d'une relative protection à l'égard de la forte position de Campari-Milano sur le marché ;

4. Considérant que l'obligation pour les licenciés de livrer le produit original italien au lieu de celui de leur propre fabrication pour les ventes au corps diplomatique, aux avitailleurs de navires, aux forces militaires étrangères, et, en général, à tous les organismes jouissant de la franchise de douane, contribue également à promouvoir la vente du bitter de Campari-Milano ; que, en effet, en restreignant la liberté de chaque licencié de livrer le produit de sa propre fabrication, elle assure que des catégories particulières de consommateurs, étant considérées comme en dehors du territoire de ce licencié et étant normalement soumises à des déplacements d'un territoire à l'autre, puissent toujours retrouver le même produit, celui d'origine, avec toutes ses caractéristiques traditionnelles de composition et d'habillage ; que, malgré l'observation des normes de qualité, il n'est notamment pas possible d'empêcher des différences de goût entre les produits des différents fabricants ; que cette obligation vise ainsi à empêcher que ces consommateurs ne se tournent vers d'autres produits concurrents, mais qu'ils continuent à s'approvisionner en Bitter Campari tout en pouvant s'adresser au revendeur le plus proche; que, par ailleurs, ces consommateurs ne sont pas empêchés de se procurer librement les produits offerts par les licenciés même si c'est aux conditions normales réservées à la clientèle habituelle ;

B. Considérant que les accords de licence en cause ont entraîné une augmentation des quantités de Bitter Campari offertes aux consommateurs et une amélioration des conditions d'approvisionnement dont ceux-ci bénéficient directement ; que, par ailleurs, la présence sur le marché d'autres producteurs de bitter et l'existence d'une concurrence efficace renforcée en l'espèce par l'offre croissante des licenciés de Campari-Milano laissent présumer que les améliorations découlant des accords et les profits qu'en retirent les licenciés sont transférés aux consommateurs ; que ces derniers se trouvent en mesure, grâce à des livraisons de bitter d'autres territoires à la suite de demandes spontanées de faire pression sur les prix éventuellement trop élevés du licencié exclusif de leur territoire ;

C. Considérant que les restrictions de concurrence susmentionnées imposées aux parties en cause doivent être considérées comme indispensables pour atteindre les objectifs favorables énumérés aux paragraphes précédents ; que, en effet, aucune de ces restrictions ne pourrait être éliminée sans que le but poursuivi par les parties de promouvoir les ventes du Bitter Campari par la concentration de l'activité des licenciés sur ce produit et par l'offre du même produit d'origine à certains consommateurs déterminés ne soit compromis ; que, en particulier, aucun des licenciés et, selon toute probabilité, aucune autre entreprise dans le secteur des spiritueux, n'auraient consenti à faire les investissements nécessaires pour développer considérablement les ventes du bitter, s'ils n'avaient pas eu l'assurance d'être protégés contre la concurrence d'autres licenciés ou de Campari-Milano elle-même ;

D. Considérant que les accords de licence visés par la présente décision ne donnent pas à Campari-Milano et à ses licenciés la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des bitter en cause ; que à cet égard, l'on peut constater notamment qu'il existe dans les pays de la CEE un assez grand nombre d'autres marques renommées de bitter, toutes susceptibles de concurrencer le Bitter Campari ; qu'à cette circonstance s'ajoute la liberté pour les licenciés de Campari-Milano et pour Campari-Milano elle-même de vendre les produits Campari à l'intérieur du Marché commun en dehors de leur territoire, pour lequel ils sont plus particulièrement responsables ;

Considérant que, en l'état actuel de l'affaire, toutes les conditions d'une décision d'application de l'article 85 paragraphe 3 sont réunies à l'égard des contrats de licence que Campari-Milano a conclus avec les entreprises Ognibeni & Co, Hans Prang, Campari-France SA, Sovinac SA et Johs. M. Klein & Co ;

IV. Application des articles 6, 7 et 8 du règlement n° 17

I. Considérant que, tels qu'ils étaient en vigueur dans leur version notifiée et qui avait fait l'objet de la communication précitée des griefs de la Commission, les cinq contrais de licence conclus par Campari-Milano ne remplissaient pas les conditions d'application de l'article 85 paragraphe 3 ; que, en effet, les clauses énumérées au point I B ci-dessus, contenues dans les cinq contrats alors en vigueur, constituaient des restrictions sensibles de la concurrence ne pouvant pas être considérées comme relevant de l'existence du droit des marques données en licence ou comme contribuant à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique ; que ces obligations qui faisaient obstacle à l'application de l'article 85 paragraphe 3 ont été supprimées le 1er novembre 1977 sur demande de la Commission ; que, dans ces conditions, il est possible, en vertu de l'article 6 paragraphe 1 du règlement n° 17, de faire coïncider la date de prise d'effet de la décision d'application de l'article 85 paragraphe 3 avec la date à laquelle les contrats ont été modifiés, à savoir le 1er novembre 1977;

Considérant que, pour fixer la durée de validité de la décision prévue à l'article 8 paragraphe 1 du règlement n° 17, il y a lieu de tenir compte du fait que les restrictions de concurrence retenues dans la présente décision ne font pas obstacle à la libre circulation des produits en cause entre Etats membres de la CEE et que, en particulier, les parties se sont engagées à donner dès le 1er novembre 1977 une suite favorable aux demandes spontanées de livraison a l'intérieur de la CEE; que cette durée doit être suffisante pour permettre aux accords ainsi modifiés de développer leurs effets et qu'une période de 9 ans paraît raisonnable à cet égard ;

2. Considérant que les contrats de licence exclusive conclus par Campari-Milano avec les entreprises Ognibem & Co, Hans Prang, Campari-France SA et Sovinac SA remplissent les conditions d'application de l'article 7 paragraphe 1 du règlement n° 17 ; qu'il s'agit en effet d'accords existant à la date d'entrée en vigueur dudit règlement n° 17 (13 mars 1962), toutefois pour ce qui est de l'accord conclu avec Sovinac SA dans une version antérieure à celle notifiée; que ces accords ont été notifiés dans les délais fixés à l'article 5 paragraphe 1 du règlement n° 17 ; qu'ils ne remplissaient pas les conditions d'application de l'article 85 paragraphe 3, mais ont été modifiés comme il a été exposé ci-dessus de façon à remplir ces conditions ;

Qu'il en résulte que, à l'égard des versions de ces accords antérieures aux modifications, l'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 ne s'applique que pour la période fixée par la Commission ; que, à cet égard, il y a lieu de tenir compte en l'occurrence du fait que les intéressés ont modifié spontanément ou ont accepté de modifier les contrats précités conformément aux suggestions de la Commission ; que ces circonstances sont suffisantes pour justifier la non-application de l'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 pour toute la période antérieure à la date de prise d'effet de la décision d'inapplicabilité de l'article 85 paragraphe 1 pour chacun des accords en cause;

Considérant que les observations qui précèdent s'appliquent aussi au contrat conclu le 14 avril 1966 avec Johs. M. Klein & Co ; que, en effet, une interdiction d'exporter imposée à une entreprise établie dans un pays tiers et visant des livraisons dans la CEE peut constituer une restriction de concurrence susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres ; que, cependant, en l'espèce, avant l'adhésion du Danemark, une telle interdiction d'exporter n'était pas sensible puisque les difficultés à l'importation ayant trait aux réglementations douanières et fiscales empêchaient en pratique des exportations de Bitter Campari dans la Communauté ; que, dès lors, conformément à l'article 25 du règlement n° 17, le contrat conclu entre Campari-Milano et Johs. M. Klein & Co et dûment notifié le 27 juin 1973 remplit aussi les conditions d'application de l'article 7 paragraphe I du même règlement ;

3. Considérant que, par ailleurs, eu égard à l'importance et à la renommée internationale acquise par la marque Campari, aux effets restrictifs pour la circulation du Bitter Campari entre les Etats membres qui résultent des législations nationales en vigueur et, enfin, à ce que les exportations par les fabricants du Bitter Campari ou par leurs clients dépendent essentiellement de la volonté des fabricants eux-mêmes, il est opportun de permettre à la Commission d'apprécier en temps utile l'évolution de la situation découlant des accords modifiés sur le marché des produits en cause ; qu'il y a donc lieu de prévoir conformément à l'article 8 paragraphe 1 du règlement n° 17, à charge de Campari-Milano et de chacun de ses licenciés, l'envoi à la Commission d'un rapport établi annuellement à compter du 15 décembre 1978, contenant tous les éléments nécessaires pour apprécier l'évolution de l'application des accords en cause, notamment du point de vue de la libre circulation du Bitter Campari à l'intérieur de la CEE ; que ceci s'applique en particulier aux exportations à l'intérieur de la Communauté ;

Considérant que, d'autre part, il convient de prendre des dispositions visant à garantir que la Commission soit informée des sentences rendues sur la hase de la clause d'arbitrage, celles-ci pouvant comporter le risque d'une interprétation des contrats qui ne tiendrait pas compte de la portée de la présente décision et pouvant amener la Commission à la modifier ; que, en effet, la procédure d'arbitrage expose plus que la procédure judiciaire normale au risque d'une interprétation des contrats qui outrepasse les limites de l'exemption, notamment lorsque les arbitres, qui comme en l'espèce agissent en qualité d'amiables compositeurs, ne sont pas tenus d'appliquer le droit matériel ; que, d'autre part, le réexamen d'une sentence arbitrale du point de vue de sa compatibilité avec les articles 85 et 86, considérés en tant qu'éléments constitutifs de l'ordre public de la CEE, n'est pas assuré dans les pays tiers,

A ARRÊTÉ LA PRÊSENTE DÉCISION :

Article premier

Les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne sont déclarées inapplicables, conformément à l'article 85 paragraphe 3 aux contrats de licence de marque conclus par la société Davide Campari-Milano SpA à Milan, respectivement le 19 septembre 1957 avec la société Ognibeni & Co à Amsterdam, le 1er janvier 1960 avec l'entreprise Hans Prang à Hambourg, le 8 janvier 1962 avec la société Soval - aujourd'hui Campari-France SA - à Nanterre, le 11 octobre 1962 avec la société Sovinac SA à Bruxelles et le 14 avril 1966 avec la société Johs. M. Klein & Co à Copenhague, dans leur version modifiée le 1er novembre 1977.

Article 2

La présente décision prend effet au 1er novembre 1977 et est valable jusqu'au 1er novembre 1986.

Article 3

Les entreprises précitées communiqueront sans délai à la Commission toute sentence rendue sur la base de la clause d'arbitrage. En outre, elles soumettront annuellement à la Commission, à compter du 15 décembre 1978, des rapports sur

1. le volume de leurs exportations de Bitter Campari à l'intérieur de la CEE,

2. les cas où elles auraient refusé :

a) de donner suite à des demandes de livraisons à l'exportation de Bitter Campari à l'intérieur de la CEE,

b) de faire obtenir le remboursement de l'impôt correspondant à des attestations fournies par un client ayant exporté des produits Campari à l'intérieur de la CEE.

Article 4

L'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1ne s'applique pas aux versions des contrats de licence conclus par la société Davide Campari-Milano avec la société Ognibeni & Co, l'entreprise Hans Prang, la société Soval - aujourd'hui Campari-France SA -, la société Sovinac SA et la société Johs. M. Klein et Co, qui étaient en vigueur avant la date de prise d'effet de la présente décision indiquée à l'article 2.

Article 5

La présente décision est destinée aux entreprises ci-après :

- Davide Campari-Milano SpA à Milan (Italie),

- Ognibeni & Co à Amsterdam (Pays-Bas),

- Hans Prang à Hambourg (Allemagne),

- Campari-France SA à Nanterre (France),

- Sovinac SA à Bruxelles (Belgique),

- Johs. M. Klein & Co à Copenhague (Danemark).

(1) JO n° 13 du 21.2.1962, p. 204/62

(2) JO n°57 du 25.3.1967, p. 849/67 et suivantes.

(3) JO n° C 43 du 29.4.1972, p. 25.

(4) JO n° 57 du 25.3.1967, p. 849/67.