Cass. 1re civ., 26 mai 1993, n° 92-16.327
COUR DE CASSATION
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Duguy (Époux)
Défendeur :
CRESERFI
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. de Bouillane de Lacoste
Rapporteur :
Mme Delaroche
Avocat général :
Mme Le Foyer de Costil
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : - Vu l'article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ; - Attendu qu'il résulte de ce texte que sont réputées non écrites les clauses relatives à la charge du risque lorsqu'elles apparaissent imposées aux non-professionnels ou consommateurs par un abus de la puissance économique de l'autre partie et conférent à cette dernière un avantage excessif ;
Attendu que les époux Duguy, adhérents du Crédit social des fonctionnaires CSF, ont obtenu par son intermédiaire un prêt de 10 000 francs, assorti de la caution solidaire de CRESERFI, organisme financier de cette association ; qu'à titre de dépôt destiné à alimenter le fonds mutuel, ils ont versé 3 % du montant de leur prêt, soit 300 francs, somme stipulée remboursable après retenue de la part du risque constitué par les défaillances de certains débiteurs dans leurs remboursements ; qu'après avoir honoré tous leurs engagements, les époux Duguy ont obtenu la restitution de la seule somme de 60 francs ;
Attendu que, pour accueillir la demande en paiement de la somme de 240 francs formée par ces emprunteurs, la décision attaquée (TI Bar-sur-Aube, 19 mars 1992) a retenu que l'article 16 du règlement intérieur du CSF-CRESERFI, prévoyant une retenue d'un montant égal à la part du risque supporté par les adhérents, s'analysait en une clause conférant un avantage excessif à cet organisme pour lequel cette part du risque est extrêmement faible, voire nulle, puisqu'il s'adresse à des fonctionnaires dont la stabilité de l'emploi et donc du revenu est assurée, et qui, en contrepartie, n'offre pas à ses adhérents des prêts à un taux d'intérêts concurrentiel ;
Attendu qu'en se déterminant par ces motifs alors que le CRESERFI avait retenu la somme litigieuse en vertu d'un contrat fondé sur le principe de mutualisation des risques constitués par les prêts non remboursés par les emprunteurs et que ce contrat n'était pas imposé par un abus de puissance économique et ne conférait pas à cet organisme un avantage excessif, le tribunal d'instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, la cassation encourue n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond ;
Par ces motifs : casse et annule le jugement rendu le 19 mars 1992, entre les parties, par le Tribunal d'instance de Bar-sur-Aube ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Déboute les époux Duguy de leur demande.