Cass. 1re civ., 24 novembre 1993, n° 91-17.753
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Puccini
Défendeur :
Rouy
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grégoire
Rapporteur :
M. Forget
Avocat général :
Me Lesec
Avocats :
Me Vincent, SCP Tiffreau, Thouin-Palat.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : - Attendu que M. Puccini, arboriculteur, a acheté à M. Rouy, pépinièriste, 6 008 plants de pommiers Starkrimson S 106 premier choix, qu'il a plantés en janvier 1981 ; qu'à la première floraison des arbres, il s'est aperçu que ces pommiers n'appartenaient pas à la même variété ; qu'une expertise judiciaire a établi que 68 % des plants n'étaient pas conformes à la commande ; que M. Puccini a alors réclamé à M. Rouy une somme de 600 000 francs en réparation de son préjudice ; que l'arrêt attaqué (Montpellier, 29 mai 1991), faisant application d'une clause conventionnelle limitant la garantie de l'authenticité des variétés au remboursement du prix facturé, a condamné M. Rouy à payer à M. Puccini la somme de 50 048,12 francs ;
Attendu que M. Puccini reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors que la non-conformité constitue un vice caché lorsqu'elle n'a pu apparaître que plus de deux ans après la livraison, alors que, la cour d'appel ne s'est pas expliquée sur la notion d'authenticité des variétés pour appliquer la clause limitative de responsabilité, et n'a pas non plus précisé en quoi la qualité de professionnel de M. Puccini devait lui permettre de s'apercevoir d'un vice indécelable lors de la livraison, et alors, enfin, que la clause litigieuse serait abusive ;
Mais attendu que, devant les juges du fond, l'acquéreur des plants n'a pas fondé son action en indemnité sur l'existence du prétendu vice caché d'hétérogénéité dont serait atteint la variété Starkrimson, mais sur un manquement du vendeur à son obligation de livrer exclusivement, conformément à la commande, des plants appartenant à cette variété et que la cour d'appel n'était pas tenue de modifier le fondement juridique de la demande qui lui était présentée ;
Attendu ensuite, qu'ayant constaté que dans la proportion de 68 % les plants livrés par M Rouy n'appartenaient pas à la variété Starkrimson mais à la variété standard Red Delicious, la cour d'appel a, par une interprétation implicite des termes de la convention, retenu que ce manquement à son obligation de délivrance entraînait pour le vendeur celle de garantir "l'authenticité" de la variété des plants livrés, au sens de la clause limitative de responsabilité, qu'elle a, dès lors, appliquée à bon droit ;
Attendu, encore, que cette clause limitant la responsabilité de M. Rouy à raison non des vices cachés de la chose vendue, mais des défauts de conformité de la marchandise livrée, la cour d'appel n'avait pas à rechercher, pour déclarer la clause opposable à M. Puccini, si ce dernier était un professionnel de même spécialité que le vendeur ;
Attendu, enfin, que le caractère prétendument abusif de la clause litigieuse ne peut, aux termes des articles 35, alinéa 3 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978, devenu L. 132-1 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, relative au Code de la consommation et 2 du décret n° 78-464 du 24 mars 1978, être invoquée à propos d'un contrat de vente conclu entre des professionnels ;d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : - Attendu que M. Rouy sollicite, sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de dix mille francs ;
Mais attendu qu'en équité il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi. Rejette également la demande présentée par M. Rouy sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.