CA Paris, 13e ch. A, 14 mars 2001, n° 00-04743
PARIS
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guilbaud
Conseillers :
M. Nivose, Mme Fouquet
Avocats :
Mes Desanti, Mercier.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE:
LA PREVENTION:
S Jean-Michel est poursuivi, pour avoir:
- à Pierrelevée, Paris, Tonnerre: en mars et avril 1995 en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur en l'espèce en faisant diffuser une annonce dans la Centrale des Particuliers présentant abusivement le véhicule Ford Escort XR3 Pack comme étant de première main et en faisant sciemment paraître des petites annonces dans la rubrique "particuliers" alors qu'il agissait en qualité de professionnel de la vente automobile";
- à Paris, Pierrelevée, Tonnerre, le 8 avril 1995, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, trompé Yann Riand sur la nature d'un véhicule, en l'espèce sans procéder à la remise en état nécessaire qui s'imposait pour que ce véhicule Ford XR3 puisse être qualifié de sain loyal et marchand et en ne restituant pas la plaque constructeur dans le compartiment moteur.
LE JUGEMENT:
Le tribunal, par jugement contradictoire, a:
- dit que l'opposition de S Jean-Michel était régulière et recevable en la forme,
- mis à néant le jugement rendu le 29 septembre 1998,
et, statuant à nouveau,
déclaré S Jean-Michel coupable de publicité mensongère ou de nature a induire en erreur,
faits commis de mars 1995 à avril 1995, à Paris, Pierrelevée, Tonnerre,
infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation,
coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise,
faits commis le 8 avril 1995, à Paris, Pierrelevée, Tonnerre,
infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation,
et, en application de ces articles,
Vu les articles 132-29 à 132-53 du Code pénal,
l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant 18 mois et 5000 F d'amende avec sursis, avec les obligations spéciales de réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l'infraction, même en l'absence de décision sur l'action civile, conformément à l'article 132-45 du Code pénal,
Statuant sur l'action civile,
condamné S Jean-Michel à payer à Yann Riand la somme de 28 000 F à titre de dommages-intérêts,
condamné S Jean-Michel à payer à la société Hebdo Mag France, éditeur de "la Centrale des Particuliers" une somme de un franc à titre de dommages-intérêts,
Dit que cette décision était assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné,
DÉCISION:
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur les appels du prévenu et du ministère public, interjetés à l'encontre du jugement entrepris;
Considérant que Jean-Michel S régulièrement cité, n'a pas comparu à l'audience des débats; qu'il a, par un fax adressé à la cour, le 20 février 2001, demandé le renvoi de l'affaire, arguant de l'impossibilité dans laquelle il était de se défendre, aux motifs que sa demande d'aide judiciaire, trop tardive, n'aurait pu être satisfaite pour l'audience du 21 février 2001;
Considérant toutefois que, Me Serge Desanti, avocat désigné d'office dans le cadre de l'aide juridictionnelle, s'est présenté pour lui à l'audience, précisant qu'il n'avait pu joindre son client malgré ses efforts; que la cour ne reconnaissant pas l'excuse fournie par Jean-Michel S comme valable, ce dernier sera jugé contradictoirement, en application des dispositions de l'article 410 du Code de procédure pénale;
Considérant que Yann Riand, partie civile, représentée par son avocat, a déposé des conclusions; que la décision sera donc contradictoire à son égard;
Considérant que la société Hebdo Mag, partie civile, bien que régulièrement citée n'a pas comparu à l'audience; qu'il sera statué par défaut à son égard;
RAPPEL DES FAITS ET DEMANDES:
Yann Riand demande à la cour, par voie de conclusions, de confirmer le jugement entrepris et y ajoutant, de condamner Jean-Michel S à lui verser 28 000 F à titre de dommages intérêts, outre 8 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, pour les frais engagés en cause d'appel;
Le ministère public requiert la confirmation du jugement déféré;
SUR CE
Sur l'action publique:
Considérant qu'à la suite d'une annonce parue dans le journal "la Centrale des Particuliers", au nom de P, Yann Riand a acquis pour une somme de 22 000 F un véhicule automobile Ford Escort auprès de la société X; que ce véhicule, qu'il a fait expertiser par le Cabinet Houdart à Paris, le 26 juin 1995, à la suite d'un petit accident, s'est révélé inapte à la circulation publique, ayant subi antérieurement à son acquisition, des chocs sur la face et le train avant, alors que le rapport de contrôle technique effectué le 31 mars 1995 qui lui avait été remis, lors de l'achat mentionnait seulement "véhicule présentant des traces de réparation"; que ce véhicule vendu comme étant de "première main" selon l'annonce, avait été immatriculé pour la première fois en juillet 1987, revendu une première fois en avril 1992, puis acquis le 15 janvier 1995 par le garage Y, pour la somme de 5 000 F et revendu le 9 février 1995 à la société X, dont Jean-Michel S était le gérant, pour une somme de 3 000 F; puis mis en vente par l'intermédiaire d'annonces dans la presse spécialisée au nom de Mme P, concubine de Jean-Michel S; qu'enfin ce véhicule était dépourvu de plaque constructeur, et que le certificat de cession avait été établi directement par le garage Y;
Considérant que si dans un premier temps, Jean-Michel S a tenté de réfuter toute responsabilité, expliquant qu'il avait bien précisé à la société Yann Riand que la plaque constructeur manquait mais que ce dernier étant pressé, ne voulait pas attendre qu'il s'en procure une autre, affirmant que le véhicule, même s'il présentait des traces de réparation, était en parfait état de marche et enfin que la mention "première main" était une erreur de la Centrale des Particuliers, il a reconnu les faits à l'audience du tribunal correctionnel et s'est engagé à dédommager la victime Yann Riand;
Considérant qu'eu égard à la qualité de professionnel de l'automobile du prévenu, et compte tenu du prix d'achat de la voiture, Jean-Michel S ne peut prétendre qu'il ait été de bonne foi, ni qu'il ait été victime d'une erreur de la part du journal "La Centrale des Particuliers", son intention frauduleuse étant, en outre, parfaitement établie par l'insertion d'une annonce, au nom de sa concubine, dans la rubrique "particuliers" du journal et non dans la rubrique "professionnels"; que les infractions étant caractérisées dans tous leurs éléments, c'est dès lors à bon droit que les premiers juges l'ont retenu dans les liens de la prévention; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité; que le prévenu n'ayant pas fait l'objet de condamnations antérieurement aux faits délictueux, la cour estime devoir confirmer la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis avec mise à l'épreuve pendant 18 mois avec obligation d'indemniser les victimes, mais pour mieux prendre en compte la nature des faits et la personnalité du prévenu, ne pas assortir du sursis la peine d'amende prononcée par le jugement dont appel;
Considérant que, par ailleurs, eu égard à la nature du délit et à la personnalité du prévenu, la Cour ordonnera, en application de l'article L. 122-4 du Code de la consommation, la publication du présent arrêt, ainsi que précisé au dispositif;
Sur l'action civile:
Considérant que les premiers juges ont fait une exacte appréciation des préjudices résultants directement pour les parties civiles, des agissements délictueux du prévenu;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement attaqué sur les dommages intérêts alloués,
Considérant que la demande formulée par Yann Riand, partie civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, est justifiée dans son principe, mais doit être ramenée à la somme de 6 000 F;
Par ces motifs: LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement en application de l'article 410 du Code de procédure pénale à l'encontre du prévenu, contradictoirement à l'égard de Yann Riand, partie civile, par défaut à l'égard de la société Hebdo Mag, partie civile; Reçoit les appels du prévenu et du ministère public; Sur l'action publique: Confirme le jugement entrepris, sur la déclaration de culpabilité; L'infirme pour partie sur les peines; Condamne Jean-Michel S à 3 mois d'emprisonnement avec sursis avec mise à l'épreuve pendant 18 mois sous l'obligation spéciale prévue à l'article 132-45 5° du Code pénal, d'indemniser les victimes, et à une amende de 5 000 F; Vu l'article L. 122-4 du Code de la consommation, Ordonne l'insertion du présent arrêt, par extraits, et aux frais du condamné, dans les journaux Le Parisien et la Centrale des Particuliers; Sur l'action civile: Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions civiles, Y ajoutant, Condamne Jean Michel S, à payer à Yann Riand, partie civile, la somme de 6 000 F, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.