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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 3 octobre 2002, n° 2000-11665

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Pétale de Rose (SARL)

Défendeur :

DR Au Nom de la Rose (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Main

Président de chambre :

Mme Pezard

Conseiller :

M. Faucher

Avoués :

SCP Monin, SCP Menard-Scelle-Millet

Avocats :

Mes Lehman, Marchal.

T. com. Paris, 20e Ch., du 31 mars 2000

31 mars 2000

La cour est saisie d'un appel formé par la société à responsabilité limitée Pétale de Rose contre un jugement rendu contradictoirement le 31 mars 2000 par le Tribunal de commerce de Paris, qui l'a notamment condamnée à payer à la société anonyme DR la somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et celle de 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, lui a fait interdiction de poursuivre la mise en œuvre sous la forme qu'ils avaient lors de l'introduction de l'instance de ses emballages et de ses panneaux de vitrine indiquant les prix des produits à peine d'une astreinte de 5 000 F par jour de retard à compter du trentième jour suivant la signification du jugement, a ordonné l'exécution provisoire, sauf pour la condamnation fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et a mis les dépens à la charge de la société Pétale de Rose.

La société DR, qui exerce son activité sous l'enseigne "Au nom de la rose diffusion", est spécialisée dans la commercialisation de fleurs et plus particulièrement de roses ; à ce titre, elle utilise un savoir-faire et des techniques caractéristiques qu'elle concède dans certains cas sous la forme de contrats de franchise.

Monsieur Bosquet, actuel dirigeant de la société Pétale de Rose a envisagé à une époque d'ouvrir un magasin à Rouen dans le cadre d'un tel contrat de franchise,

Les pourparlers n'ayant pas abouti, en juin 1999 Monsieur Bosquet a ouvert rue de Vaugirard à Paris, sous le nom de "Pétale de Rose", un magasin qui, selon la société DR, utilise les méthodes caractéristiques de celle-ci, qui, estimant fautive l'attitude de la société Pétale de Rose, a fait dresser un constat d'huissier puis a assigné le 11 octobre 1999 pour concurrence déloyale.

Dans ses dernières écritures signifiées le 4 septembre 2000, la société Pétale de Rose, appelante, demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter la société DR de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 40 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, signifiées le 1er juin 2001, la société DR, intimée, conclut à la confirmation du jugement sur le principe mais à sa réformation sur le montant du préjudice. Elle demande à la Cour de condamner la société Pétale de Rose à lui payer la somme de 950 000 F en réparation du préjudice subi, et celle de 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Cela étant exposé,

Considérant que l'appelante fait valoir que la société intimée ne peut s'opposer au principe de la liberté du commerce, quand bien même certaines des caractéristiques de son magasin présentent une vague similitude, que les faits reprochés ont un caractère banal, en l'absence de monopole de la société DR, que particulièrement l'activité mono-produit de la société Pétale de Rose s'imposait dans la dénomination sociale de la société, que la représentation figurative de la marque des deux sociétés est très différente, le nom Pétale de Rose étant représenté par une rose rouge, dont un pétale se détache, celui de Au Nom de la Rose, étant constitué d'une feuille verte dans un rectangle blanc.

Considérant que la cour observe que les contestations opposées par la société Pétale de Rose ne sont pas justifiées dès lors que la société DR rapporte la triple preuve d'un comportement fautif, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; qu'en effet, grâce aux informations collectées auprès de la société DR lors des pourparlers pré-contractuels (qui n'ont pas abouti, Pétale de Rose a reproduit les caractéristiques essentielles du réseau "Au nom de la Rose", ainsi que l'atteste le procès verbal établi par Maître Duparc Guissard le 14 septembre 1999, les éléments caractéristiques copiés ou imités étant l'emballage, les produits vendus et la pratique de prix d'appel, l'inscription des prix sur la devanture, la devanture elle même, la présentation des fleurs dans le magasin, les articles proposés à la vente; que les faits imputés à la société Pétale de Rose ne sont pas des pratiques régulières courantes chez les fleuristes ; qu'en effet, contrairement aux allégations de ladite société, notamment la devanture de son magasin couleur vert d'eau, la présentation des fleurs à l'intérieur et à l'extérieur du magasin, et celle de l'emballage des fleurs manifestent une inspiration commune aux parties et ne sont pas des éléments repris dans toute la profession de fleuriste; que les actes de l'appelante constituent une violation fautive des usages de commerce, d'autant plus notable que les parties avaient eu des négociations préalables infructueuses; que ces faits de parasitisme ne relèvent pas de la liberté du commerce et de l'industrie, mais constituent des actes de concurrence déloyale, que la confusion générée à dessein par la société Pétale de Rose a causé un préjudice à la société DR, du fait d'un détournement de clientèle.

Considérant toutefois, sur le montant du préjudice subi, que la société DR ne fournit pas d'éléments suffisants susceptibles de justifier d'une part que son manque à gagner équivaut au chiffre d'affaires réalisé par la société Pétale de Rose pendant huit mois au cours de l'année 1999, d'autre part que le trouble commercial ajouté à la perte d'une chance de développement du réseau atteint un montant total de 950 000 F.

Que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice en le fixant à la somme de 50 000 F, soit 7 622,45 euros.

Considérant qu'il est équitable d'allouer, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, une indemnité complémentaire de 3000 euros à l'intimée, l'appelante, qui succombe et devra supporter les dépens d'appel, ne pouvant prétendre à aucune somme de ce chef.

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré, Condamne la société Pétale de Rose à payer à la société DR une somme complémentaire de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Déboute les parties de leurs autres demandes, Condamne la société Pétale de Rose aux dépens d'appel et admet Maitre Monin, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.