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Décisions

CE, 2e et 6e sous-sect. réunies, 10 novembre 1997, n° 161158

CONSEIL D'ÉTAT

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Grand Quevilly (Commune)

Défendeur :

Union des chambres syndicales de la publicité extérieure

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. de L'hermitte

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Peignot, Garreau.

CE n° 161158

10 novembre 1997

LE CONSEIL : - Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 septembre 1994 et 18 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État, présentés pour la commune du Grand Quevilly, représentée par son maire en exercice; la commune demande au Conseil d'État: 1°) d'annuler le jugement du 29 juin 1994 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure, l'arrêté du maire du Grand Quevilly en date du 15 octobre 1990 réglementant l'affichage publicitaire sur le territoire de la commune; 2°) de rejeter la demande présentée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure devant le Tribunal administratif de Rouen; 3°) de condamner l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure à lui verser la somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991; (...); - Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979; - Vu le décret n° 80-923 du 21 novembre 1980; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991; Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel; - Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987;

Sur la fin de non-recevoir opposée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure: - Considérant que la commune du Grand Quevilly, qui était partie au litige de première instance, a qualité pour relever appel du jugement du Tribunal administratif de Rouen annulant l'arrêté en date du 15 octobre 1990 par lequel le maire du Grand Quevilly, agissant au nom de la commune, a réglementé la publicité sur le territoire de ladite commune; que par suite, la fin de non-recevoir opposée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure doit être rejetée;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué; - Considérant qu'en vertu des articles 7 à 9 de la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes, il peut être institué dans tout ou partie d'une agglomération des zones de publicité restreinte, où la publicité est soumise à des prescriptions spéciales, arrêtées par le maire après délibération du conseil municipal, plus restrictives que celles prévues par le décret en Conseil d'Etat mentionné à l'article 8 de la même loi; que les dispositions de l'article 10 de la loi susmentionnée du 29 décembre 1979 confèrent, en vue de la protection du cadre de vie, aux autorités locales compétentes un large pouvoir de réglementation de l'affichage en leur permettant notamment " de déterminer dans quelles conditions et sur quels emplacements la publicité est seulement admise " et même " d'interdire la publicité ou des catégories de publicité définies en fonction des procédés et des dispositifs utilisés"; que tant sur la délimitation des zones de publicité restreinte que sur les prescriptions spéciales qui y sont édictées, l'appréciation portée par l'autorité administrative ne peut être censurée par le juge que si elle est entachée, notamment, d'une erreur manifeste;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire du Grand Quevilly, en instituant par l'arrêté litigieux trois zones de publicité restreinte couvrant en totalité l'agglomération du Grand Quevilly, dont la première, dite " zone de protection absolue " où l'affichage publicitaire est interdit sur d'autres supports que le mobilier urbain mis en place par la commune, correspond aux quartiers résidentiels de la commune, ait commis une erreur manifeste d'appréciation ni institué une discrimination illégale en faveur du mobilier urbain; que par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le Tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce qu'en édictant une interdiction absolue de la publicité dans la majeure partie de l'agglomération, le maire du Grand Quevilly aurait méconnu la portée des dispositions susmentionnées de la loi du 29 décembre 1979;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens de la demande présentée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure devant le Tribunal administratif de Rouen;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi; que la circonstance que l'arrêté attaqué aurait également pour effet d'améliorer la sécurité de la circulation routière n'est pas révélatrice d'un tel détournement;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune du Grand Quevilly est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté municipal du 15 octobre 1990 réglementant la publicité sur le territoire de la commune;

Sur les conclusions de la commune du Grand Quevilly tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991; - Considérant qu'il y a lieu de faire droit à ces conclusions et de condamner l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure à verser à la commune du Grand Quevilly la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens;

Article 1er: Le jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 29 juin 1994 est annulé.

Article 2: La demande présentée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure devant le Tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3: L'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure est condamnée à verser à la commune du Grand Quevilly la somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4: La présente décision sera notifiée à la commune du Grand Quevilly, à l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure et au ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement.