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Décisions

CE, 2e et 6e sous-sect. réunies, 23 juin 1999, n° 148671

CONSEIL D'ÉTAT

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Long (Sté)

Défendeur :

Sucy-en-Brie (Commune)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. Mary

Avocats :

SCP Ryziger, Bouzidi.

CE n° 148671

23 juin 1999

LE CONSEIL : - Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 juin 1993 et 7 octobre 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour la société Long dont le siège social est 21 rue Saint-Hilaire ZI du Vert Galant à St-Ouen-l'Aumone (95130) ; la société Long demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler le jugement du 7 janvier 1993 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 31 juillet 1991 par lequel le maire de Sucy-en-Brie a ordonné la dépose des panneaux publicitaires situés aux numéros 1 et 5 place Fernande Doudot à Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 76-148 du 11 février 1976 ; Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Sur la régularité du jugement attaqué : - Considérant qu'aux termes des articles 6 et 11 du décret du 11 février 1976 dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : "Sont interdites la publicité et les enseignes, enseignes publicitaires et préenseignes qui sont de nature, soit à réduire la visibilité ou l'efficacité des signaux réglementaires, soit à éblouir les usagers des voies publiques, soit à solliciter leur attention dans des conditions dangereuses pour la sécurité routière. Toute infraction aux dispositions du présent décret est punie d'une amende de 600 F à 1 000 F et de l'emprisonnement pendant huit jours au plus ou l'une de ces deux peines seulement. En cas d'urgence, dès la constatation de l'infraction, l'autorité investie du pouvoir de police peut ordonner soit la suppression des dispositifs non conformes à la réglementation, soit leur mise en conformité et, le cas échéant, la remise en état des lieux " ;

Considérant que le maire de Sucy-en-Brie a, par un arrêté du 31 juillet 1991, ordonné à la société Long d'enlever les panneaux publicitaires situés aux 1 et 5 place Fernande Doudot à Sucy-en-Brie et dont il estimait que l'implantation sollicitait l'attention des usagers de la voie publique dans des conditions dangereuses pour la circulation routière; qu'en prenant un tel arrêté, le maire a agi, non pas sur le fondement de la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes mais pour des fins relatives à la sécurité de la circulation, dans le cadre des pouvoirs de police qu'il exerce au nom de la commune sur le fondement des dispositions précitées et de l'article L. 131-3 du Code des communes, relatif à la police de la circulation à l'intérieur des agglomérations; qu'ainsi la circonstance que la commune et non l'Etat ait été appelée en défense au recours de ladite société, n'est en tout état de cause pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué ;

Sur la légalité de la décision attaquée : - Considérant que la société Long, dans sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris, s'est bornée à invoquer, d'une part, un détournement de pouvoir, d'autre part, l'erreur d'appréciation dont serait entachée la décision d'ordonner l'enlèvement des panneaux litigieux en l'absence de toute situation d'urgence ; que si elle a fait valoir, dans ses conclusions devant le Conseil d'État, qu'en ordonnant cet enlèvement sans faire dresser au préalable un procès-verbal de constat de l'infraction, le maire a entaché sa décision d'un vice de procédure, ces prétentions, fondées sur une cause juridique distincte, constituent une demande nouvelle qui, formée pour la première fois en appel, n'est pas recevable ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à leur emplacement et à leur taille les panneaux publicitaires litigieux étaient de nature à créer un danger pour les usagers de la voie publique ; que l'urgence justifiait que soit ordonnée leur dépose immédiate ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la société Long n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 31 juillet 1991 par lequel le maire de Sucy-en-Brie a ordonné d'enlever deux panneaux publicitaires implantés sur le territoire de cette commune ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 : - Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-1 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner la société Long à payer à la commune de Sucy-en-Brie la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Article 1er : La requête de la société Long est rejetée.

Article 2 : La société Long est condamnée à payer à la commune de Sucy-en-Brie la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-1 de la loi susvisée du 10 juillet 1991.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Long, à la commune de Sucy-enBrie et au ministre de l'Intérieur.