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Décisions

CA Dijon, ch. civ. B, 24 septembre 2002, n° 01-00610

DIJON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cyclo Services (EURL), Gastaldo (Epoux)

Défendeur :

Chevalier (Consorts)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Littner (conseiller faisant fonction)

Conseillers :

M. Richard, Mme Roux

Avoués :

SCP Bourgeon & Kawala, Me Gerbay

Avocats :

SCP Fernoux-Masue-Pilière-Thepot, Me Naime.

TGI Chalon-sur-Saône, du 20 mars 2001

20 mars 2001

EXPOSE DE L'AFFAIRE

L'EURL Cyclo Services, M. Dominique Gastaldo et Mme Brigitte Chauville, son épouse, ont fait appel du jugement rendu le 20 mars 2001 par le Tribunal de grande instance de Chalon-sur-Saône, qui les a condamnés solidairement à payer aux consorts Chevalier la somme de 99 091,86 euros à titre de dommages-intérêts plus celle de 762,25 euros au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions du 27 juillet 2001, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, les appelants exposent qu'au décès de feu Louis Chevalier, lequel avait créé le fonds de commerce litigieux en 1956, ses héritiers n'ont pas en 1998 fait état de ce dernier dans la déclaration de succession, démontrant ainsi son absence de valeur, qu'en 1999 lors de la résiliation du contrat de location gérance, personne ne pouvait ou voulait reprendre ce fonds, que la disposition prévoyant qu'en cas de décès des époux Chevalier la clause de non-concurrence ne serait pas appliquée confirme l'inexistence dudit fonds et que subsidiairement sa valeur ne peut qu'être symbolique, n'excédant pas une année de location moins le loyer actuel des murs.

Ils concluent à l'infirmation du jugement, dont appel, et à la condamnation des consorts Chevalier à leur verser une somme de 762,25 euros (5 000 F) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les consorts Chevalier par des écritures du 1er février 2002, auxquelles il est pareillement fait référence, répondent que les appelants ne sauraient contester l'importance de la clientèle car ils ont renouvelé pendant dix ans le contrat de location gérance et accepté en 1992 une augmentation substantielle du loyer, que la déclaration de succession est une formalité fiscale sans conséquence sur le présent litige, que ce fonds aurait pu être vendu en 1999, s'il n'avait pas été vidé de sa substance par les appelants, qui ont ouvert un magasin concurrent dans la même rue, et que le mode d'évaluation retenu par le tribunal n'est pas discuté.

Ils concluent à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation solidaire des appelants à leur verser une somme de 770 euros au titre des frais irrépétibles.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que les époux Chevalier ont donné selon acte reçu le 7 novembre 1992 par Me Eglin en location gérance à l'EURL Cyclo Services un fonds de commerce de fabrication, vente et réparation de cycles et motocycles exploité à Chalon-sur-Saône, 131 avenue Boucicaut, le locataire s'interdisant à l'issue du contrat de se rétablir ou de s'intéresser dans un commerce de même nature à Chalon-sur-Saône pendant cinq ans;

Que dans le même acte les appelants se sont engagés comme cautions solidaires du locataire gérant ;

Attendu que cette clause de non-concurrence a été confirmée lors du renouvellement du bail le 17 novembre 1993, l'interdiction étant portée à dix kilomètres mais la clause n'étant plus applicable en cas de décès de M. et Mme Chevalier ;

Attendu que Me Franck Patricot, huissier à Givry, a constaté le 5 novembre 1999, jour où le contrat a pris fin, que figuraient sur le magasin situé 131 avenue Boucicaut cinq affiches ainsi libellées :"Le magasin Cyclo Services a été transféré au 79 avenue Boucicaut, Chalon-sur-Saône et qu'à cette dernière adresse sont vendus des cycles, cyclomoteurs et accessoires ;

Attendu qu'ainsi les appelants, qui devaient en fin de contrat restituer le fonds de commerce dans son intégralité, y compris la clientèle, à ses propriétaires, ne pouvaient détourner cette clientèle en se réinstallant dans la même avenue en violation des stipulations contractuelles;

Attendu que seul feu Louis Chevalier étant alors décédé, la clause est applicable ;

Qu'en outre il importe peu que le fonds de commerce ne figure pas dans la déclaration de succession de ce dernier, s'agissant d'une formalité fiscale sans rapport avec le présent litige et que le chiffre d'affaires de 1988 et 1989 soit inconnu, puisque le locataire gérant doit restituer aux bailleurs le fonds, y compris la clientèle, peu importe que celle-ci ait augmenté par son activité;

Attendu que les agissements déloyaux des appelants ont occasionné aux consorts Chevalier un préjudice égal à la valeur du fonds en novembre 1999, époque à laquelle ils auraient pu le céder, valeur qui est égale à environ trente pour cent des chiffres d'affaires 1998 ou 1999, fourchette basse du mode d'évaluation des services fiscaux, soit 99 091,86 euros (650 000 F) ;

Attendu que l'équité commande de porter à 1 200 euros l'indemnité allouée aux intimés en remboursement de leurs frais irrépétibles ;

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris sauf à préciser que la somme allouée à titre de dommages-intérêts aux consorts Chevalier est de 99 091,86 euros et que celle accordée au titre de l'article 700 est portée 1 200 euros, Condamne solidairement l'EURL Cycle Services et les époux Gastaldo-Chevalier aux dépens d'appel et dit que Me Gerbay pourra les recouvrer conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.