CA Paris, 13e ch. A, 1 mars 1999, n° 98-03057
PARIS
Arrêt
Infirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guilbaud
Avocat général :
M. Blanc
Conseillers :
Mme Petit, M. Reménieras
Avocat :
Me Chevallier
RAPPEL DE LA PROCEDURE :
La prévention :
M. Jean-Maurice est poursuivi pour avoir, à Toulouse, du 31 octobre 1996 au 13 novembre 1996, mis en vente en solde des marchandises détenues depuis moins d'un mois hors période autorisée.
Le jugement :
Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré M. Jean-Maurice coupable de vente en solde de marchandises en dehors des périodes autorisées, faits commis du 31 octobre 1996 au 13 novembre 1996 à Toulouse, infraction prévue et réprimée par les articles 28, 31 de la loi 96-603 du 5 juillet 1996 ; article 11 du décret 96-1097 et, en application de ces articles, l'a condamné à 30 000 F d'amende, dit que la décision était assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 600 F dont est redevable chaque condamné.
DECISION :
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur les appels relevés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il convient de se référer pour l'exposé de la prévention ;
Par voie de conclusions, Jean-Maurice M. demande à la cour, par infirmation, de le renvoyer des fins de la poursuite ;
Il fait valoir essentiellement que le décret du 16 décembre 1996 ne pouvait être visé à la prévention et ne pouvait recevoir application en l'espèce, les faits poursuivis ayant été commis antérieurement à la publication de ce décret ;
Que les termes de " soldes " n'ont jamais été employés à l'occasion de l'opération litigieuse qui n'a pas été expressément annoncée, comme tendant à l'écoulement accéléré de marchandises en stock ;
Que seuls 76 % des articles mis en vente ont été payés au moins un mois avant la date de début de la période considérée ;
Il soutient en définitive avoir simplement réalisé, en l'espèce, une opération promotionnelle qui ne peut recevoir la qualification de soldes ;
M. l'Avocat général requiert de la cour la confirmation du jugement entrepris en faisant observer notamment, que l'opération critiquée ne peut recevoir la qualification de vente promotionnelle, laquelle ne peut concerner qu'une catégorie de produits déterminés et que compte tenu de l'existence d'un prix attractif tendant à l'écoulement accéléré d'un stock spécialement acquis en vue de cette opération il s'agissait bien, même en l'absence de qualification expresse, d'une opération de soldes ;
Considérant qu'il convient de rappeler que, le 7 novembre 1996, des agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes procédant à une enquête relative à l'application des articles 26 à 33 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 se présentaient au magasin à l'enseigne " X " <adresse> à Toulouse ;
Qu'ils y constataient que des affiches d'une dimension d'environ 150 cm x 100 cm ainsi que des panonceaux disposés sur les vitrines du magasin annonçaient une opération commerciale intitulée " Top 10 " " 10 jours super machin chose du 31 octobre au 13 novembre ", avec mention en gros caractères assortis d'un renvoi précédé d'un astérisque ainsi libellé " sur une sélection d'articles signalés en magasin par l'étiquette couleur, remis par escompte de caisse " ;
Qu'ils constataient également à l'intérieur du magasin la présence d'affichettes rondes de dimension approximative de 10 cm apposées sur les articles ou à proximité immédiate qui comportaient les mentions " moins 50 % " sur fond rouge et " moins 30 % " sur fond bleu ;
Considérant qu'après avoir effectué diverses investigations comportant notamment l'audition du responsable du magasin et l'étude des modalités de paiement des articles mis en vente, un procès-verbal de délit était dressé en retenant que cette opération accompagnée ou précédée d'une publicité annoncée comme tendant par une réduction de prix à l'écoulement accéléré des marchandises en stock devait s'analyser comme une opération de soldes anticipée, les soldes de la collection automne/hiver commençant le 6 janvier 1997 dans le département concerné de la Haute-Garonne ;
Considérant que le prévenu maintient devant la cour qu'il s'agissait en réalité d'une campagne promotionnelle tendant à fidéliser la " clientèle de base " qui pouvait être tentée de différer ses achats vers d'autres concurrents lors des soldes légales et ne portant que sur certaines catégories de produits de la saison, spécialement achetés pour la circonstance ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 alinéa 1 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 seul texte auquel il convient de se référer sont considérées comme soldes les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix à l'écoulement accéléré de marchandises en stock ;
Considérant que la cour observe en effet que c'est à tort que le décret n° 96-1097 du 16 décembre 1996, postérieur aux faits reprochés a été visé dans la prévention ;
Considérant que si comme cela est relaté dans le procès-verbal de délit les ventes incriminées sont bien accompagnées de publicité comportant une réduction de prix elles ne sont cependant pas annoncées comme tendant par celle-ci à l'écoulement accéléré de marchandises en stock ;
Considérant, en effet, qu'un tel objectif n'apparaît nullement mentionné de manière explicite sur les divers supports publicitaires qui se bornent à annoncer une réduction de prix sur une sélection d'articles ;
Considérant, dès lors, que la qualification de " soldes " ne peut être retenue en l'espèce sans qu'il soit nécessaire d'examiner, par ailleurs, les conditions dans lesquelles les marchandises ont été achetées et stockées ;
Considérant, en conséquence, que l'infraction n'est pas constituée, et qu'il convient, infirmant le jugement entrepris, de renvoyer le prévenu des fins de la poursuite ;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, infirme le jugement dont appel, renvoie Jean-maurice M. des fins de la poursuite.