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Décisions

CA Fort-de-France, 1re ch. civ., 16 mai 1997, n° 1060-95

FORT-DE-FRANCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Société d'exploitation de l'Anse Azerot (SARL)

Défendeur :

Association Sakitanou

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gayet

Conseillers :

Mme Civalero, M. Dior

Avocats :

Mes Driguez, Nicolas.

T. com. Fort-de-France, du 31 oct. 1995

31 octobre 1995

LA COUR,

Par jugement du 31 octobre 1995 auquel il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits, le Tribunal mixte de commerce de Fort-de-France a statué en ces termes :

Dit que l'Association Sakitanou (Groupe Wapa) a capacité à agir en justice ;

Dit que le contrat du 4 novembre 1993, conclu entre M. Desrues, directeur de l'hôtel Primevère, et l'Association Sakitanou (Groupe Wapa), est opposable à la société d'exploitation Anse Azerot Hôtel Primevère ;

Dit que la résiliation unilatérale émanant de la société d'exploitation Anse Azerot - Hôtel Primevère, en date du 17 mai 1994, du contrat de parrainage, en date du 4 novembre 1993, liant celle-ci à l'Association Sakitanou (Groupe Wapa), est fautive ;

Dit que la société d'exploitation Anse Azerot - Hôtel Primevère est tenue, en conséquence d'indemniser le préjudice subi par l'association susnommée, suite à la résiliation du 17 mai 1994 ;

Condamne la société d'exploitation Anse Azerot - Hôtel Primevère à payer à l'Association Sakitanou :

1°) - 148 360 F avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

2°) - 10 000 F en application de l'article 700 du NCPC ;

Rejette tous autres chefs de demande ;

Condamne la société d'exploitation Anse Azerot - Hôtel Primevère aux entiers dépens ;

Par déclaration enregistrée au greffe le 14 décembre 1995, la SARL société d'exploitation de l'Anse Azerot (ci-après nommée SARL Anse Azerot) a relevé appel de cette décision pour que la cour l'infirme et condamne l'Association Sakitanou à régler 10 000 F à titre de dommages-intérêts et 15 000 F en application de l'article 700 du NCPC.

L'appelante reprend son moyen de première instance tenant à l'inopposabilité de la convention signée par M. Desrues qui n'avait pas ce pouvoir et soutient par ailleurs que l'article 7 du contrat est imprécis, que le comportement fautif du responsable de l'association justifiait la rupture immédiate, que la convention ne prévoyait pas de dommages-intérêts en cas de résiliation si bien qu'aucune indemnité n'aurait dû, en application de l'article 1150 du Code civil, être allouée, que le paiement de billets d'avion utilisés après résiliation ne pouvait être accordé, qu'enfin, en toute hypothèse, le coût du transport aérien a été pris en charge par des tiers si bien que l'association ne peut en obtenir remboursement sans que cette solution aboutisse à un enrichissement sans cause.

Pour conclure à la confirmation du jugement déféré sauf à solliciter en outre 20 000 F en application de l'article 700 du NCPC, l'Association Sakitanou se réfère aux motifs retenus par le premier juge en ce qui concerne le signataire du contrat, M. Desrues ;

L'intimée soutient, par ailleurs, que les motifs invoqués par l'appelante ne justifiaient pas la résiliation unilatérale et sans préavis du contrat et qu'une telle résiliation est abusive, faute d'avoir été judiciairement prononcée.

L'Association Sakitanou fait valoir enfin que les engagements relatifs au voyage qui devait donner lieu au financement des billets d'avion par la SARL Anse Azerot avaient été pris avant la résiliation si bien que l'appelante ne saurait se prévaloir de cette résiliation fautive ou même du fait que le déplacement projeté ait pu, malgré sa défaillance, être réalisé grâce à l'aide de tiers, pour se dérober à l'exécution de son engagement, à savoir le règlement de trente billets d'avion.

Sur ce,

La recevabilité de l'appel :

Elle n'est pas contestée et aucun élément ne conduit la cour à évoquer d'office un moyen d'irrecevabilité.

Le fond :

Par des motifs pertinents et en conséquence adoptés, le premier juge a retenu qu'était opposable à la SARL Anse Azerot le contrat signé avec l'Association Sakitanou par M. Desrues, en raison du mandat apparent détenu par celui-ci l'allégation selon laquelle le président de l'association aurait été pleinement informé de ce que M. Desrues n'avait plus pouvoir d'engager l'hôtel ne constituant qu'une pétition de principe que la cour écartera à défaut de tout élément venant la corroborer.

C'est également à juste titre que le tribunal a estimé que le premier motif invoqué à l'appui de la résolution, tenant au défaut de clarté de la convention, ne pouvait constituer une cause de rupture du contrat tandis que le second, relatif aux injures et menaces proférées par le président de l'association n'étant pas étayé.

Les deux pièces produites par l'appelante sur ce dernier point, qui ne sont que des déclarations faites par M. Pelage et Mme Taboureau, cadres de la structure gérée par la SARL Azerot et protagonistes de la vive discussion à la suite de laquelle est intervenue la rupture ne sauraient, à elles seules, constituer la démonstration de la faute imputée au dirigeant de l'Association Sakitanou, la parfaite impartialité de tels témoins ne pouvant être considérée comme acquise.

La cour confirmera la décision des premiers juges en ce qu'elle a retenu l'obligation de l'appelante d'indemniser l'Association Sakitanou pour les conséquences de la rupture unilatérale de la convention abusivement mise en œuvre.

Dès lors qu'elle a manifesté son intention délibérée de ne pas exécuter son obligation en résiliant abusivement la convention et qu'elle a ainsi commis une faute dolosive, la SARL Anse Azerot ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 1150 du Code civil, ce texte excluant sa propre application en cas de dol du débiteur.

Toutefois, même en cas de dol du débiteur, les dommages-intérêts alloués au créancier de l'obligation ne peuvent être que la réparation de la perte éprouvée ou du manque à gagner en application de l'article 1149 du Code civil.

Il est incontestable d'abord que l'association a subi un manque à gagner en se voyant privée de la rémunération des spectacles qu'elle devait donner à l'hôtel Primevère du mois de mai au mois d'octobre 1994, la somme de 54 400 F allouée par le premier juge de ce chef (sur la base de 3 400 F par samedi) devant être confirmée, le décompte présenté par Sakitanou n'ayant d'ailleurs fait l'objet d'aucun critique en cause d'appel.

La cour infirmera, en revanche, le jugement déféré en ce qu'il a alloué une somme de 93 960 F en paiement de trente billets d'avion.

La clause n° 7 du contrat prévoit en effet " qu'en cas de voyage (participation à différents voyages à l'étranger) le sponsor s'engage à subventionner le groupe à concurrence de 30 billets (aller-retour) paiement des billets d'avion ".

Un tel libellé, qui ne fait référence à aucune destination précise, a aucun plancher ou plafond de dépense ne peut être considéré comme l'engagement de régler une somme d'argent déterminée mais s'analyse comme la promesse de pourvoir au transport aérien des membres de l'association à l'occasion d'un déplacement à l'étranger.

L'association qui reconnaît expressément avoir pu effectuer ce voyage grâce à d'autres concours ne justifie d'aucune perte ou manque à gagner et ne peut, en conséquence, obtenir aucune indemnité.

En l'état des motifs qui précèdent, l'appelante ne peut qu'être déboutée de toutes ses demandes et condamnée aux dépens, une somme de 6 000 F étant allouée à l'Association Sakitanou en application de l'article 700 du NCPC.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort ; Déclare l'appel recevable partiellement fondé ; Réformant partiellement le jugement déféré ; Condamne la SARL Exploitation de l'Anse Azerot à régler à l'Association Sakitanou la somme de cinquante quatre mille quatre cent francs (54 400 F) à titre de dommages-intérêts ; Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires ; Condamne l'appelante aux dépens et au paiement d'une somme de six mille francs (6 000 F) en application de l'article 700 du NCPC