CA Rennes, 8e ch. prud'homale, 25 novembre 1999, n° 98-07756
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Rumfels
Défendeur :
Saint-Ferdinand (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Segondat
Conseillers :
Mme L'Henoret, M. Patte
Avocats :
Mes Mayeton, Lisfranc, Paty.
Faits et procédure
Monsieur Marc Rumfels a été engagé suivant contrat écrit du 3 janvier 1996 par la SARL Saint-Ferdinand en qualité de VRP exclusif à carte unique et à temps partiel.
Il était prévu contractuellement qu'un minimum de 32 commandes par mois devait être réalisé.
Alors qu'il se trouvait en arrêt de maladie, Monsieur Rumfels, le 3 avril 1997, a saisi le Conseil de prud'hommes de Nantes pour voir requalifier son contrat en contrat à temps plein, pour obtenir un rappel de salaire et des heures supplémentaires et pour voir prononcer la rupture du contrat aux torts et griefs de l'employeur avec toutes conséquences de droit ;
La société Saint-Ferdinand s'est opposée à ces prétentions.
Par jugement en date du 7 juillet 1998 le Conseil de prud'hommes de Nantes, présidé par le juge départiteur, a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes.
Monsieur Rumfels a interjeté appel de ce jugement.
Objet de l'appel et moyens des parties
Monsieur Rumfels conclut à l'infirmation de la décision déférée et, devant la cour, présente les demandes suivantes :
- requalifier le contrat en contrat à temps plein;
- constater que la SARL Saint-Ferdinand n'a pas respecté la rémunération minimale garantie des VRP;
- constater que la rupture du contrat est imputable à l'employeur;
- rappel de salaire : 30 534,19 F;
- indenmité de congés payés: 5 498,65 F;
- heures supplémentaires et congés payés y afférents : 66 939,56 F + 6 693,95 F;
- préavis et congés payés y afférents : 13 142,13 F + 1 314,21 F;
- frais professionnels : 4 675,32 F;
- indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 6 571 F;
- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 35 000 F;
- dommages-intérêts : 50 000 F;
- article 700 du nouveau Code de procédure civile : 6 000 F.
Il fait valoir :
- que la notion de temps partiel oblige l'employeur à se référer à la durée du travail et que le contrat de VRP n'échappe pas à cette règle,
- que le contrat qu'il a signé ne comporte aucune des mentions obligatoires prévues par l'article L. 212-4-3 du Code du travail et se trouve donc présumé avoir été conclu à temps plein,
- que la durée effective du travail était à temps complet et que la société Saint-Ferdinand ne rapporte pas la preuve contraire,
- qu'il est en droit d'obtenir le minimum garanti fixé par l'article 5 de l'Accord interprofessionnel du 3 octobre 1975 ainsi que le paiement des heures supplémentaires qu'il a accomplies,
- que le non-respect par l'employeur de ses obligations rend imputable à ce dernier la rupture des relations contractuelles,
- que le préjudice qu'il a subi du fait de la faute de la société Saint-Ferdinand qui l'a mis dans une situation financière catastrophique est important.
La société Saint-Ferdinand conclut à la confirmation du jugement dont elle adopte pour l'essentiel les motifs mais à titre reconventionnel sollicite une somme de 10 023 F au titre du préavis non effectué ainsi qu'une indemnité de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Après avoir rappelé que l'activité des représentants s'apprécie au regard des stipulations contractuelles et du volume d'affaires traitées et non en fonction d'un horaire particulier qui n'est susceptible d'aucun contrôle de la part de l'employeur, elle maintient :
- que Monsieur Rumfels a toujours travaillé à temps partiel conformément aux dispositions de son contrat de travail,
- qu'il ne peut prétendre ni à un rappel de salaire ni à des heures supplémentaires,
- qu'elle ne peut être tenue responsable ni de l'état de santé du salarié ni de ses résultats.
Elle ajoute que l'intéressé, par lettre du 28 septembre 1998, l'a informée qu'il avait quitté l'entreprise depuis le 7 septembre 1998 date à laquelle il avait recommencé à travailler pour le compte d'un autre employeur et qu'il se trouvait redevable d'une indemnité de préavis.
Discussion
Considérant que Monsieur Rumfels a été engagé comme VRP exclusif, carte unique, à temps partiel par contrat écrit en date du 3 janvier 1996 lequel prévoyait un minimum de 32 commandes à réaliser par mois ;
Considérant qu'un VRP dispose d'une entière liberté dans l'organisation de son activité professionnelle et n'est soumis à aucun horaire de travail précis ;
Considérant que l'article 5 de l'avenant n° 4 de l'accord interprofessionnel du 3 octobre 1975 qui prévoit que lorsqu'un représentant est engagé à titre exclusif par un seul employeur, il a droit au titre de chaque trimestre d'emploi à plein temps à une ressource minimale forfaitaire, comporte un renvoi aux termes duquel "l'expression "à plein temps" a pour objet, non d'introduire une notion d'horaire de travail généralement inadaptée à la profession de représentant de commerce, mais d'exclure de la présente disposition les représentants de commerce qui, bien qu'engagés à titre exclusif, n'exercent qu'une activité réduite à temps partiel" ;
Qu'il s'ensuit qu'un VRP exclusif peut parfaitement exercer une activité à temps partiel;, que cette activité doit s'apprécier en fonction des stipulations contractuelles et du travail réellement fourni; et que les dispositions relatives à la durée du travail ne peuvent être applicables;
Considérant que Monsieur Rumfels a signé un contrat de travail à temps partiel et avait un objectif minimum de 32 commandes par mois alors que l'objectif minimum des VRP à temps plein était de 48 commandes par mois;
Qu'il est dès lors présumé avoir travaillé à temps partiel, peu importe que la mention de la durée du travail et la répartition des horaires, incompatibles avec la spécificité de la profession de représentant, n'aient pas été indiquées dans le contrat;
QueMonsieur Rumfels, pour prétendre au minimum garanti, doit démontrer qu'il a travaillé à temps complet ;
Que force est de constater que les chiffres produits font apparaître que le salarié atteignait juste les objectifs qui lui étaient assignés et était loin de réaliser les quotas impartis aux VRP à temps plein ;
Qu'il ne peut en conséquence bénéficier du minimum conventionnel ni revendiquer le paiement d'heures supplémentaires insusceptibles à l'évidence du moindre contrôle;
Considérant d'autre part que Monsieur Rumfels par courrier du 24 septembre 1998 a informé la société Saint-Ferdinand que, compte tenu de la situation financière particulièrement difficile dans laquelle il se trouvait et du délai d'appel, il ne faisait plus partie de l'entreprise à compter du 7 septembre 1998 car il occupait un nouvel emploi à compter de cette date ;
Considérant que la rupture du contrat ne peut être rendue imputable à la société Saint-Ferdinand qui, pendant toute la procédure, a toujours considéré que Monsieur Rumfels continuait à faire partie de ses effectifs et qui n'a commis aucun manquement à l'égard de ce dernier et doit s'analyser en une démission d'autant que le salarié s'est fait engager par un autre employeur ;
Qu'il ne peut en conséquence prétendre ni à une indemnité de préavis ni à des dommages-intérêts et se trouve au contraire redevable à l'égard de son ancien employeur d'une indemnité de délai-congé, son état de santé lui permettant de travailler depuis le 7 septembre ;
Considérant que Monsieur Rumfels qui succombe supportera ses propres frais irrépétibles et les dépens ;
Qu'enfin, il n'y a pas lieu de faire application au profit de l'intimée des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris. Y additant, - Constate que la rupture du contrat est intervenue le 24 septembre 1998, qu'elle est imputable au salarié et s'analyse en une démission ; - Condamne Monsieur Rumfels à verser à la société Saint-Ferdinand la somme de 10 023 F au titre du préavis ; - Déboute les parties de leurs autres demandes ; - Condamne Monsieur Rumfels aux dépens..