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Décisions

CA Limoges, ch. corr., 20 mars 1998, n° 97-00108

LIMOGES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Association régionale de développement des élevages de petits animaux en Limousin, Syndicat professionnel agricole Lim'Lapin, Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de la Haute-Vienne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Payard

Conseillers :

Mme Renon, M. Vernaduchi

Avocats :

Mes Andrieu-Filliol, Rigault.

TGI Limoges, ch. corr., du 26 févr. 1997

26 février 1997

Décision dont appel :

Sur l'action publique :

Le tribunal a déclaré A Marc, C Denis, D Yves, G Michel, G Hubert, M Jean-Michel, P Jean coupables des faits qui leurs sont reprochés, en répression :

- les a condamnés chacun à une peine d'amende de 8 000 F ainsi qu'au paiement d'un droit fixe de procédure de 600 F,

- a ordonné la publication et l'affichage du jugement dans les termes du communiqué suivant : " Par jugement du 26 février 1997, MM. G, D, P, A, C, M et G, en leur qualité de dirigeants des magasins X ou Y de Chalus, Limoges (adresse), Saint-Mathieu, Limoges (adresse), Magnac Laval, Bessines-sur-Gartempe et Chateauponsac, ont été condamnés chacun à une peine d'amende de 8 000 F avec diffusion du présent communiqué, pour publicité mensongère et tromperie sur l'origine de 3 768 lapins vendus du 7 au 17 juin 1995 dans le cadre d'une campagne publicitaire promouvant les produits du Limousin, comprenant, selon leur critère géographique et régional, Haute-Vienne, Creuse, Corrèze, alors que les lapins vendus sous la dénomination lapin du Limousin provenaient d'élevages de Charente, " terroir " voisin de " Charente-Poitou ", mais autre que celui annoncé ;

Qu'ils ont ainsi trompé le consommateur sur l'origine des lapins achetés et fait grief aux éleveurs limousins ;

Ils ont en outre été condamnés à payer 20 000 F à titre de dommages et intérêts à l'association ARDEPAL et au Syndicat professionnel Lim'Lapin " :

- la publication dans les journaux Le Populaire du Centre, La Montagne, LSA, journal de distribution, Produits frais, magazine des professionnels du rayon frais et froid, pour un coût maximum de 5 000 F par insertion, aux frais des condamnés ;

- l'affichage du jugement dans les termes du communiqué, aux portes principales d'entrée des sept magasins concernés durant sept jours, affiche Format Colombin, aux frais des condamnés pour un coût maximum de 5 000 F par affiche ;

Sur l'action civile :

Le tribunal a :

- reçu l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en Limousin (ARDEPAL) en sa constitution de partie civile ;

- déclaré MM. D Yves, A Marc, G Michel, M Jean-Michel, C Denis, P Jean et G Hubert solidairement responsables du préjudice subi par l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en Limousin (ARDEPAL),

- les a condamnés solidairement à payer à l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en Limousin (ARDEPAL) la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 1 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

- reçu le Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " en sa constitution de partie civile ;

- déclaré MM. D Yves, A Marc, G Michel, M Jean-Michel, C Denis, P Jean et G Hubert solidairement responsables du préjudice subi par le Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " ;

- les a condamnés à payer au Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 1 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

- condamné MM. D Yves, A Marc, G Michel, M Jean-Michel, C Denis, P Jean et G Hubert aux dépens de l'action civile ;

Appels :

Appel de cette décision a été interjeté par :

- M. C Denis, le 4 mars 1997,

- M. D Yves, le 4 mars 1997,

- M. P Jean, le 4 mars 1997,

- M. G Michel, le 5mars 1997,

- M. le Procureur de la République, le 5 mars 1997,

- M. G Hubert, le 6 mars 1997,

LA COUR,

Yves D, Michel G, Jean-Michel M, Denis C, Jean P, Hubert G et le Ministère public ont interjeté appel du jugement dont le dispositif est ci-dessus rapporté rendu le 26 février 1997 par le Tribunal correctionnel de Limoges.

Comparants en personne, assistés de leur conseil, Yves D, Michel G, Jean-Michel M, Denis C et Jean P demandent, à titre principal, à la cour, de constater la nullité des citations et des procès-verbaux et sollicitent à titre subsidiaire leur relaxe.

Bien que régulièrement cités Hubert G et Marc A ne comparaissent pas.

Le Ministère public requiert la confirmation du jugement entrepris sur la culpabilité mais ne s'oppose pas à une réduction du montant des amendes prononcées par le tribunal et à la suppression de la mesure d'affichage.

L'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en Limousin (ARDEPAL) et le Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin ", parties civiles, sollicitent la confirmation du jugement entrepris outre la somme de 3 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Marc A a été condamné par jugement de défaut lequel a été signifié à parquet le 25 mars 1997.

Si le prévenu qui n'a pas eu connaissance de cette signification, a pu être régulièrement cité à sa personne le 4 février 1998 pour l'audience du 20 février 1998 devant la cour, cette citation, qui ne constitue pas un acte d'exécution du jugement, n'a pu avoir pour effet de faire courir le délai d'opposition prévu par l'article 492 du Code de procédure pénale, de telle sorte que la cour ne peut en ce qui le concerne que surseoir à statuer sur l'appel du Ministère public jusqu'à expiration du délai d'opposition.

Les appels des autres prévenus et du Ministère public apparaissent recevables pour avoir été interjetés dans les formes et délais prévus par la loi.

Sur l'action publique :

Contrairement à ce qui est soutenu par les prévenus, les procès-verbaux établis par les fonctionnaires de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, mentionnent la date des constatations et diligences effectuées et leur date de clôture le 5 mars 1996 et ne comportent aucune erreur.

Si par contre la citation délivrée à chacun des prévenus vise de manière erronée des faits commis " courant septembre 1995 " alors que l'opération publicitaire incriminée s'est déroulée du 7 au 17 juin 1995, cette erreur de date ne peut compte tenu de ce que les faits reprochés sont ensuite précisément articulés, avoir eu pour effet d'induire les prévenus en erreur ni de porter atteinte aux droits de la défense et c'est donc à juste titre que les premiers juges ont rejeté l'exception de nullité soulevée.

Le tribunal apparaît avoir exactement analysé les faits qui lui étaient soumis et en avoir justement déduit que les infractions de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur et de tromperie sur l'origine d'une marchandise, telles que spécifiées dans le jugement attaqué, étaient établies.

En effet, il ne peut être contesté que l'information donnée aux consommateurs sur l'origine des produits vendus était inexacte, dans la mesure où les investigations menées auprès du fournisseur établissent que sur 3 768 lapins commercialisés au cours de l'opération publicitaire, 25 seulement avaient été élevés en Haute-Vienne, les autres provenant de la Charente, département qui non seulement n'est pas inclus dans la région Limousin prise en tant que circonscription administrative mais ne peut faire partie d'un bassin de production qui n'existe pas en matière de production cunicole.

De même les prévenus ne peuvent invoquer l'absence d'élément intentionnel résultant de l'impossibilité pour eux de connaître la provenance exacte de la marchandise, dans la mesure où la certification ou l'affirmation d'une origine par celui qui commercialise un produit implique nécessairement qu'il a été en mesure de vérifier celle-ci ; or, en l'espèce, la consultation du contrat fournisseur-distributeur des bons de livraisons et des factures démontre qu'aucune mention sur l'origine des lapins fournis n'y figure et que celle-ci a, par conséquent, été affirmée par les annonceurs sans qu'ils soient en possession de la moindre garantie la concernant.

Par ailleurs, s'agissant d'Yves D, celui-ci ne peut utilement invoquer la délégation de pouvoir donné à son chef boucher dans la mesure où en sa qualité d'annonceur pour une opération publicitaire qui ne se limitait pas aux produits vendus au rayon boucherie, il n'avait pas mis à la disposition de M. P, ledit chef boucher, les moyens lui permettant de vérifier l'origine des lapins livrés par la centrale d'achat, comme le démontre l'audition de M. P.

Dans ces conditions, la décision entreprise sera confirmée quant à la culpabilité.

Eu égard aux éléments de l'espèce, le montant des amendes prononcées apparaît excessif et doit être individualisé pour chaque prévenu.

Par ailleurs, seule la publication du jugement par extraits dans LSA, journal de distribution, produits frais, magasine des professionnels du rayon frais et froid sera ordonnée.

Sur l'action civile :

Les premiers juges ont à juste titre déclaré l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en limousin (ARDEPAL) et le Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " recevables en leurs constitutions de partie civile.

Ces deux organismes qui regroupent des producteurs cunicoles du limousin ont directement subi du fait des infractions commises par les prévenus un préjudice certain que le tribunal apparaît cependant avoir surévalué dans son quantum qui eu égard aux éléments d'appréciation dont dispose la cour sera ramené à 10 000 F pour chacune des parties civiles.

L'équité commande de faire bénéficier les parties civiles des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale et de leur allouer à ce titre la somme de 1 500 F chacune.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de C Denis, D Yves, G Michel, M Jean-Michel, P Jean, ARDEPAL, Syndicat Lim'Lapin, et la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, par arrêt contradictoire à signifier à l'égard de A Marc et de G Hubert, Sursoit à statuer sur l'appel interjeté par le Ministère public à l'encontre de Marc A jusqu'à expiration du délai d'opposition, Reçoit Yves D, Michel G, Jean-Michel M, Denis C, Jean P, Hubert G et le Ministère public en leurs appels respectifs ; Sur l'action publique : Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de la citation ; Le confirme également en ce qu'il a déclaré Yves D, Michel G, Jean-Michel M, Denis C, Jean P, Hubert G coupables des faits qui leur sont reprochés ; Emendant quant à la peine et statuant à nouveau, Condamne : - Yves D à une amende de deux mille (2 000) francs ; - Michel G à une amende de mille (1 000) francs ; - Jean-Michel M à une amende de deux mille (2 000) francs ; - Denis C à une amende de mille (1 000) francs ; - Jean P à une amende de mille (1 000) francs ; - Hubert G à une amende de mille (1 000) francs ; Ordonne aux frais des condamnés la publication par extrait du présent arrêt dans les journaux : LSA, journal de distribution, Produits frais, magazine des professionnels du rayon frais et froid, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder trois mille (3 000) francs ; Condamne D Yves, G Michel, M Jean-Michel, C Denis, P Jean et G Hubert au paiement d'un droit fixe de procédure d'un montant de huit cent francs (800 F) chacun ; Le tout par application des articles L. 213-1, L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1, L. 121-4, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation, 473 et 800 du Code de procédure pénale. Sur l'action civile : Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en limousin (ARDEPAL) et le Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " recevables en leur constitution de partie civile et déclaré les prévenus solidairement responsables du préjudice par eux subi ; Emendant pour le surplus et statuant à nouveau : Condamne solidairement D Yves, G Michel, M Jean-Michel, C Denis, P Jean et G Hubert à payer : - à l'Association régionale de développement des élevages de petits animaux en limousin (ARDEPAL) la somme de dix mille (10 000) francs à titre de dommages et intérêts et celle de mille cinq cent (1 500) francs en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; - au Syndicat professionnel agricole " Lim'Lapin " la somme de dix mille (10 000) francs à titre de dommages et intérêts et celle de mille cinq cent (1 500) francs en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.