DĂ©cisions

CA Toulouse, 3e ch., 19 dĂ©cembre 2002, n° 02-00783

TOULOUSE

ArrĂȘt

Confirmation

PARTIES

DĂ©fendeur :

Organisation générale des consommateurs, Union fédérale des consommateurs de Toulouse - Que choisir ?, Confédération syndicale des familles

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

PrĂ©sident :

M. Selmes

Substitut gĂ©nĂ©ral :

M. Chazottes

Conseillers :

MM. Lamant, Couste

Avocats :

Mes Gadrat, Dumaine

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le tribunal, par jugement en date du 13 mai 2002, a déclaré C Claudie coupable de :

- Exercice illégal de la médecine, le 9 mars 2000, à Toulouse, infraction prévue par les articles L. 4161-1, L. 4161-5 du Code de la santé publique et réprimée par l'article L. 4161-5 du Code de la santé publique

- Publicité mensongÚre ou de nature à induire en erreur, le 9 mars 2000, à Toulouse, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

Et, en application de ces articles, a :

- prononcé la jonction des dossiers 0092453 et 0098426,

- 600 euros d'amende avec sursis.

Sur l'action civile :

- a allouĂ© Ă  l'Organisation gĂ©nĂ©rale des consommateurs 150 euros Ă  titre de dommages intĂ©rĂȘts, 75 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procĂ©dure pĂ©nale

- a allouĂ© Ă  l'Union fĂ©dĂ©rale des consommateurs de Toulouse - Que choisir ? 150 euros Ă  titre de dommages intĂ©rĂȘts et 75 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procĂ©dure pĂ©nale

Les appels :

Appel a été interjet par :

Madame C Claudie, le 22 mai 2002

Monsieur le Procureur de la RĂ©publique, le 22 mai 2002 contre Madame C Claudie

DĂ©cision :

Madame C est la gĂ©rante d'une SARL "X" qui exploite un salon d'esthĂ©tique Ă  Bordeaux et un autre Ă  Toulouse sous l'enseigne "Y" <adresse>; Ă  l'occasion d'une enquĂȘte destinĂ©e Ă  vĂ©rifier la rĂ©alitĂ© d'une publicitĂ© parue dans un journal local mentionnant spĂ©cialement "Laser Epil ... une mĂ©thode d'Ă©pilation dĂ©finitive garantie ... satisfait Ă  100 % ou remboursĂ©e", il est apparu que des esthĂ©ticiennes effectuaient des Ă©pilations au moyen d'un laser, opĂ©ration rĂ©alisĂ©e Ă  la cire suivie d'une application Ă  base de plantes et d'huiles essentielles, puis d'un balayage de la zone traitĂ©e par un faisceau de type laser destinĂ© selon les explications fournies, Ă  faciliter la pĂ©nĂ©tration des huiles dans la peau, la synergie des deux opĂ©rations permettant la destruction du bulbe du poil.

Une procédure pour publicité mensongÚre était établie par la DGCCRF puis une seconde pour exercice illégal de la médecine. Madame C a déclaré que sur une activité d'environ dix huit mois 20 % des clients avaient demandé le remboursement de cette opération et que ce procédé était utilisé par la concurrence ; elle précisait en outre que l'appareil laser n'avait qu'une fin de soins esthétiques et qu'il n'intervenait que comme soin post-épilatoire.

CitĂ©e Ă  comparaĂźtre devant le Tribunal correctionnel de Toulouse s'agissant de l'Ă©tablissement situĂ© dans cette ville sous la double prĂ©vention de publicitĂ© mensongĂšre et d'exercice illĂ©gal de la mĂ©decine, elle Ă©tait dĂ©clarĂ©e coupable le 13 mai 2002 de ces deux dĂ©lits et condamnĂ©e Ă  une peine d'amende avec sursis sur l'action civile, elle Ă©tait condamnĂ©e Ă  verser des dommages et intĂ©rĂȘts Ă  l'UFC Que Choisir, l'Union FĂ©dĂ©rale des Consommateurs et Ă  l'ORGECO (Organisation GĂ©nĂ©rale des Consommateurs).

Elle interjetait appel de cette dĂ©cision le 22 mai 2002 ainsi que le MinistĂšre Public ; Ă  l'audience de la cour, les deux parties civiles ont confirmĂ© leurs demandes initiales, l'OGC rĂ©clamant 150 euros Ă  titre de dommages-intĂ©rĂȘts et 150 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procĂ©dure pĂ©nale, l'UFC rĂ©clamant 200 euros Ă  titre de dommages-intĂ©rĂȘts et 150 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procĂ©dure pĂ©nale, la ConfĂ©dĂ©ration Syndicale des Familles, intervenante Ă  l'audience, non citĂ©e, et ne s'Ă©tant pas constituĂ©e en premiĂšre instance rĂ©clamait des dommages et intĂ©rĂȘts ainsi qu'une somme sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procĂ©dure pĂ©nale.

Monsieur l'Avocat Général a conclu à la confirmation de la décision quant à la culpabilité sur les deux délits et à la confiscation du matériel litigieux ; la prévenue a fait plaider sa relaxe en invoquant le défaut d'élément intentionnel pour la publicité mensongÚre et le défaut de caractérisation du délit d'exercice illégal de la médecine, le laser n'intervenant que postérieurement à l'épilation ; s'agissant des constitutions de partie civile, il était demandé de constater l'irrecevabilité de la constitution de la Confédération Syndicale des Familles, intervenant pour la premiÚre fois en appel.

Sur quoi, LA COUR,

Attendu sur l'action publique qu'une publicitĂ© parue dans le magasine TV de la DĂ©pĂȘche du Midi du mois de mars 2002 indiquait "Osez, Laser Epil, en exclusivitĂ© sur Toulouse, Y vous propose une mĂ©thode d'Ă©pilation dĂ©finitive garantie sans aucun risque de brĂ»lure ou de dĂ©pigmentation, satisfait Ă  100 % ou remboursĂ©" ;

Que s'agissant du dĂ©lit d'exercice illĂ©gal de la mĂ©decine, l'arrĂȘtĂ© du 6 janvier 1962 fixant la liste des actes mĂ©dicaux ne pouvant ĂȘtre pratiquĂ©s que par des mĂ©decins ou pouvant ĂȘtre pratiquĂ©s par des auxiliaires mĂ©dicaux ou par des directeurs de laboratoires d'analyses mĂ©dicales non mĂ©decins inclut en son article 2-5° "tout mode d'Ă©pilation sauf les Ă©pilations Ă  la pince ou Ă  la cire ; que le seul intĂ©rĂȘt de l'encart publicitaire Laser Epil fait de l'utilisation de cet appareil une condition nĂ©cessaire et essentielle de ce traitement et que son utilisation ne peut s'analyser, ainsi que le soutient la prĂ©venue, que comme une phase postĂ©rieure Ă  l'Ă©pilation ; qu'au surplus les documents d'accompagnement sont sans Ă©quivoque "avec le laser attirez de nouvelles clientes" ; qu'ainsi l'utilisation de cet appareil sans prĂ©caution particuliĂšre, sans formation particuliĂšre du personnel alors que son coĂ»t d'achat est incompatible avec la notion de simple balayage cutanĂ© est en contradiction avec les dispositions de l'arrĂȘtĂ© prĂ©citĂ© ; que le dĂ©lit d'exercice illĂ©gal de la mĂ©decine est ainsi caractĂ©risĂ© ;

Que s'agissant du délit de publicité mensongÚre ou de nature à induire en erreur, la prévenue reconnaßt que le traitement proposé n'était pas efficace et que des clients ont demandé le remboursement ;que les documents d'accompagnement fournis à la prévenue par le vendeur font d'ailleurs référence à des résultats supérieurs à 80 %, en contradiction avec la mention d'épilation définitive ;que le but poursuivi est en fait d'attirer la clientÚle par le biais d'un traitement nouveau ; qu'il convient par ailleurs d'observer les contradictions entre les déclarations de la prévenue faisant référence à l'utilisation par la concurrence de ce type d'appareil alors que la publicité indique "en exclusivité à Toulouse" ;

Qu'en droit le dĂ©lit est caractĂ©risĂ© par le simple fait d'imprudence ou de nĂ©gligence du prĂ©venu, qui n'a pas vĂ©rifiĂ© ou n'a pas tenu compte de l'exactitude de l'annonce ; par ailleurs, la garantie de remboursement Ă©tait accordĂ©e Ă  titre onĂ©reux et soumise Ă  condition, mentions absentes de la publicitĂ© ;que les termes de l'article L. 121-1 du consommateur faisant rĂ©fĂ©rence aux conditions de vente de biens ou services et de rĂ©sultats qui peuvent ĂȘtre attendus de leur utilisation ne sont pas respectĂ©s et que le dĂ©lit est ainsi caractĂ©risĂ© ;

Que s'agissant de la sanction,

Que sur la sanction prononcée, il convient de tenir compte de la gravité des faits reprochés qui sont attentatoires à l'information du consommateur et à sa sécurité, l'utilisation sans précaution préalable d'un matériel réservé au corps médical expose autrui à un risque grave. Qu'en conséquence, il y a lieu de réformer la décision déférée et de prononcer d'une part, une condamnation à une amende de 1 500 euros et d'autre part, d'ordonner la confiscation du matériel laser.

Attendu sur l'action civile que la constitution de la ConfĂ©dĂ©ration Syndicale des Familles qui intervient pour la premiĂšre fois dans le dossier en appel doit ĂȘtre en consĂ©quence dĂ©clarĂ©e irrecevable ;

Que sur les constitutions de l'Organisation Générale des Consommateurs et de l'Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse - UFC Que Choisir ?, le tribunal a fait une juste et exacte appréciation de leur recevabilité et de l'évaluation du préjudice subi ; qu'il convient en conséquence de confirmer les sommes ainsi allouées.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort. En la forme, Déclare recevables les appels de la prévenue et du MinistÚre Public ; Au fond, Sur l'action publique : Confirme la décision entreprise quant à la culpabilité et la réformant pour le surplus ; condamne C Claudie à une amende de 1 500 euros ; ordonne en outre la confiscation du matériel laser. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euros dont chaque condamné est redevable ; Fixe la contrainte par corps, s'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale ; le tout en vertu des textes sus-visés ; Sur l'action civile : Déclare irrecevable la constitution de la Confédération Syndicale des Familles et confirme pour le surplus le jugement déféré.