CA Paris, 13e ch. B, 22 mars 2002, n° 01-03803
PARIS
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Barbarin
Avocat général :
M. Laudet
Conseillers :
M. Nivose, Mme Geraud-Charvet
Avocat :
Me Auque
Rappel de la procédure :
La prévention :
X Stéphane est poursuivie pour vente en solde en dehors des périodes autorisées le 21 août 2000 à Thiais.
Le jugement :
Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré X Stéphane et la SA Y coupable de vente en solde en dehors des périodes autorisées, 21 août 2000, à Thiais, infraction prévue par les articles L. 310-5 al. 1 3°, L. 310-3§1 du Code de commerce, l'article 11 du Décret 96-1097 du 16 décembre 1996 et réprimée par l'article L. 310-5 du Code de commerce et, en application de ces articles, a condamné la SA Y à une amende de 30 000 F (4573,47 euros) ; Stéphane X à une amende de 10 000 F (1 524,49 euros).
Rappel des faits et demandes :
Le 21 août 2000, à 14 heures 50, les agents de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes se sont présentés dans le centre commercial de Belle Epine à Thiais (94320), au magasin "Z" dont la responsable est Stéphane X, présidente du Conseil d'administration de la société Y SA ;
Ils ont constaté sur la vitrine la présence d'un écriteau mentionnant les indications suivantes : "et pour finir ... 3 prix*, 50 F, 100 F, 150 F, (*Sur les articles munis d'une contremarque Z) ; à l'intérieur du magasin, sur les portants de la collection d'été, des écriteaux portants les mentions 100 F, 50 F, et 60 F, étaient posés ; sur les étiquettes des articles de la collection d'été, une gommette avec un nouveau prix était apposée sur le prix d'origine ;
Les éléments recueillis par les enquêteurs ont permis de faire ressortir que les réductions de prix pratiquées allaient de 20 à 87,47% et concernaient environ la moitié des vêtements offerts à la vente ;
La Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes a considéré qu'il s'agissait d'une vente de marchandises, accompagnée de publicité, tendant par une réduction de prix à l'écoulement accéléré des marchandises en stock ce qui correspond à la définition des soldes telle qu'elle est donnée à l'article L. 310-3 du Code de commerce ; le deuxième alinéa de texte précise que ces ventes ne peuvent être réalisées qu'au cours de deux périodes par année civile d'une durée maximale de six semaines dont les dates sont fixées dans chaque département par le préfet ; en l'occurrence, pour l'année 2000, l'arrêté 99-4446 du 18 novembre 1999 prévoyait une période des soldes d'été du mardi 27 juin 2000 au lundi 7 août 2000.
La DGCCRF soutient qu'en agissant ainsi, la prévenue a voulu attirer artificiellement la clientèle en pratiquant une concurrence déloyale vis à vis de ses concurrents par la prolongation des périodes de soldes autorisées par la réglementation ; elle a agi pour le compte de la société Y SA qui doit être tenue pour responsable de l'infraction conformément aux dispositions de l'article L. 310-6 du Code de commerce ;
Le Ministère public requiert la confirmation du jugement déféré ;
Stéphane X et la société Y SA, prévenues, représentées par leur avocate qui a déposé des conclusions, soutiennent que le principe du commerce est celui de la liberté des prix, que l'opération effectuée après la période des soldes, devait réanimer les ventes de la fin de saison avant que soit mise en place la collection d'hiver, et qu'aucune réduction de prix n'a été annoncée au consommateur, la seule apposition d'une gommette sur le prix d'origine n'étant pas de nature à constituer une annonce de réduction du prix ; elles demandent à la cour de juger que les éléments constitutifs du délit de soldes prohibés ne sont pas réunis, d'infirmer le jugement et de les relaxer des fins de la poursuite.
Sur ce,
Considérant qu'il ressort des éléments de l'enquête qu'après une période de soldes de six semaines fixée par le préfet pour l'année 2000, expirant le lundi 7 août 2000, Stéphane X, responsable de la société Y SA, a mis en place à l'intérieur des magasins Z, une opération commerciale sur les marchandises de la collection d'été entraînant des réductions de prix de 20 à 87,47% sur la moitié environ des vêtements offerts à la vente, accompagnée de la publicité suivante sur la vitrine : "et pour finir ... 3 prix*, 50 F, 100 F, 150 F, (*Sur les articles munis d'une contremarque Z) avec, à l'intérieur du magasin, des écriteaux posés sur les présentoirs qui portaient les mentions 100 F, 50 F, et 60 F, les étiquettes de chaque article comportant une gommette mentionnant un nouveau prix apposée sur le prix d'origine.
Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 410-2 du Code de commerce, les prix des biens, produits et services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence, sauf dans les cas où la loi en dispose autrement ; que dès lors, le rabais consenti par un commerçant est licite, s'il est pratiqué sans tromperie et s'il est l'expression du libre jeu de la concurrence ;
Considérant que les prévenues ont été poursuivies pour vente en soldes en dehors des périodes autorisées, qu'aux termes de l'article L. 310-3, I) du Code de commerce : " Sont considérées comme soldes les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock. Ces ventes ne peuvent être réalisées qu'au cours de deux périodes par année civile d'une durée maximale de six semaines dont les dates sont fixées dans chaque département par le préfet selon des modalités fixées par le décret prévu à l'article L. 310-7 et ne peuvent porter que sur des marchandises proposées à la vente et payées depuis au moins un mois à la date de début de la période de soldes considérée" ;
Considérant qu'en l'espèce, les ventes réalisées par les magasins Z postérieurement à la période des soldes autorisés, ont été accompagnées de la publicité "Et pour finir..., 3 prix..." ;que la cour constate que cette mention révèle l'objectif suivi par les prévenues d'écouler leur stock en pratiquant des réductions allant jusqu'à 87,47 % du prix de certaines marchandises ;que la cour, qui ne peut suivre les prévenues dans leurs écritures soutenant que la publicité sous-entendait qu'il s'agissait de finir ... la saison d'été, estime que l'infraction de vente en soldes en dehors des périodes autorisées est caractérisée en tous ses éléments et qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité et sur les peines prononcées, qui constituent une juste application de la loi pénale.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement à l'encontre des prévenues, Reçoit les appels des prévenues et du Ministère public ; Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.