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Décisions

CA Toulouse, 3e ch. corr., 20 mai 1998, n° 97-01046

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Confédération syndicale des familles, Union fédérale des consommateurs de Toulouse Que choisir ?

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schiex

Conseillers :

Mmes Girot, Fourniel

Avocats :

Mes Loriot, Quenioux.

TGI Toulouse, 3e ch., du 10 nov. 1997

10 novembre 1997

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le tribunal, par jugement en date du 10 novembre 1997, a déclaré Gabriel S coupable de :

- publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, courant 1995 et 1996, à Portet-sur-Garonne, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation

et, en application de ces articles, l'a condamné à 15 000 F d'amende, publication dans La Dépêche du Midi et l'Opinion Indépendante (coût maximum 3 000 F chacune), affichage à la porte principale de l'établissement " X " centre commercial Carrefour à Portet-sur-Garonne pendant huit jours.

Sur l'action civile :

- Confédération Syndicales des Familles, 1 000 F à titre de dommages-intérêts avec intérêts de droit au taux légal à compter du présent jugement, 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

- Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse " Que Choisir ? ", 1 000 F à titre de dommages-intérêts avec intérêts de droit au taux légal à compter du présent jugement, 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

M. S Gabriel, le 14 novembre 1997,

M. le Procureur de la République, le 17 novembre 1997 contre M. S Gabriel.

Décision :

Le 14 novembre 1997 le conseil de M. Gabriel S a relevé appel, suivi le 17 novembre par le Ministère public, d'un jugement rendu le 10 novembre 1997 par le Tribunal de grande instance de Toulouse qui l'a condamné, du chef de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, à la peine de 15 000 F d'amende, a ordonné l'insertion par extrait du jugement dans les journaux " La Dépêche du Midi " et " L'Opinion Indépendante " sans que le coût de chaque insertion puisse dépasser 3 000 F et a ordonné l'affichage de la décision à la porte principale de l'établissement " X ", centre commercial Carrefour à Portet-sur-Garonne pendant huit jours et qui, sur l'action civile, a reçu les constitutions de parties civiles de l'Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse et de la Confédération Syndicale des Familles et condamné Gabriel S à verser à chacun de ces organismes la somme de 1 000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 500 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Les appels, interjetés dans le délai légal et dans des formes régulières sont recevables.

Au cours d'une vérification effectuée le 25 avril 1996 par les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) à la Brasserie " X ", centre commercial Carrefour à Portet-sur-Garonne, brasserie exploitée par une SARL dont le gérant est M. Gabriel S, il a été constaté que les cartes mises à la disposition de la clientèle proposaient à la rubrique boissons le vin suivant :

" Les fillettes de X, Gaillac rouge ou rosé 46 centilitres, 36 F ",

que cependant ce vin provenait de fûts de 30 litres étiquetés " cuvée des bastides, vin de table rouge fruité de la cave de Labastide de Lévis-Tarn, 11 % vol. produit de France ", et ne pouvait pas prétendre à l'appellation d'origine contrôlée " Gaillac ", celle-ci n'étant inscrite ni sur les factures, ni sur les étiquettes apposées sur les fûts.

L'enquête a révélé qu'entre le mois d'octobre 1995 et le mois d'avril 1996 M. S avait ainsi vendu dans son établissement 2 400 litres de vin rouge et 100 litres de vin rosé proposé à la clientèle sous une appellation inexacte.

Lors de son audition M. S a expliqué que son fournisseur, la société Y, lui avait vendu ce vin comme étant du Gaillac, que les factures qu'il lui avait adressées jusqu'au mois d'octobre 1995 portaient la mention Gaillac et qu'à partir du moment où le fournisseur avait modifié les mentions figurant sur les factures il avait modifié sa carte, soit à compter de l'été 1996.

Au vu de ces faits M. S a été poursuivi du chef de publicité mensongère devant le Tribunal correctionnel de Toulouse qui a rendu la décision déférée.

M. S a comparu assisté de son conseil qui a plaidé la relaxe.

Il fait valoir que la carte proposée à ses clients n'était ni de nature à induire le consommateur en erreur ni mensongère dès lors qu'il est constant que le vin proposé en carafe provient de la cave de Labastide Lévis située dans le vignoble de Gaillac et répertoriée comme telle.

Il souligne qu'aucun consommateur n'ignore que le vin vendu en carafe est du vin de table et non du vin AOC et que la mention Gaillac figurant sur la carte n'est pas mensongère dès lors qu'elle indique la région d'origine du vin.

Il ajoute que sa mauvaise foi ne peut être retenue la commande de vin en carafe par un client n'étant jamais dictée par l'appellation mais par la comparaison avec les prix des bouteilles figurant sur la carte.

Le ministère Public a requis la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a ordonné l'affichage de la décision dans l'établissement exploité par la SARL X, l'affichage n'étant pas prévu par la loi.

L'Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse a sollicité la confirmation du jugement sauf à lui allouer la somme de 1 200 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

La Confédération Syndicale des Familles a également conclu à la confirmation du jugement et demandé à la cour d'y ajouter en condamnant M. S à lui payer la somme de 2 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Motifs de la décision :

- Sur l'action publique :

Il est constant que l'appellation Gaillac, appellation d'origine contrôlée, obéit à des dispositions réglementaires strictes prévues par le décret numéro 70-970 du 23 octobre 1970 et à une élaboration spécifique.

Il n'est pas discuté que le vin proposé en carafe par la Brasserie " X " ne pouvait prétendre à l'appellation d'origine contrôlée Gaillac.

En proposant sur sa carte du vin en carafe sous l'appellation Gaillac alors qu'il n'ignorait pas que ce vin ne pouvait prétendre à cette appellation M. S a bien commis le délit qui lui est reproché, la mention ainsi portée sur la carte étant manifestement de nature à tromper un consommateur normalement avisé et ce même si ladite carte proposait également des vins d'appellation d'origine contrôlée en bouteilles à des prix supérieurs,observation étant faite que les étiquettes portées sur les fûts ne portaient pas la mention Gaillac et qu'à compter du mois d'octobre 1995 la société Y, son fournisseur, avait modifié ses factures à la suite d'un contrôle.

C'est par conséquent à bon droit que les premiers juges ont retenu la culpabilité de Gabriel S.

Le bulletin numéro 1 du casier judiciaire de M. S mentionne deux condamnations antérieures prononcées pour achat ou vente sans facture de produit ou prestation de services et pour faux et exécution d'un travail clandestin.

Compte tenu de ces éléments, en proportion des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur, la peine justifiée sera fixée à 10 000 F d'amende.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné sa publication par extrait.

En revanche l'affichage de la décision, qui n'est pas prévu par la loi, ne sera pas ordonné.

- Sur l'action civile :

La recevabilité des constitutions de parties civiles de l'Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse et de la Confédération Syndicale des Familles n'est ni discutable ni discutée.

C'est par une exacte appréciation des données de droit et de fait de la cause ainsi que des justifications produites que le tribunal a fixé à 1 000 F la somme propre à réparer le préjudice subi par chacune des parties civiles du fait de l'infraction, et à 500 F le montant des frais irrépétibles engagés par celles-ci pour la défense de leurs droits.

Le jugement, non discuté sur ce point, sera en conséquence également confirmé.

Il sera inéquitable de laisser à leur charge les frais non répétibles que les parties civiles ont dû exposer pour défendre à un appel déclaré non fondé. A ce titre une indemnité supplémentaire de 500 F sera allouée à chacune d'elles.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort : Reçoit M. S et le Ministère public en leurs appels du jugement rendu le 10 novembre 1997 par le Tribunal de grande instance de Toulouse. Confirme ce jugement sur la déclaration de culpabilité et en ce qu'il a ordonné la publication du jugement par extraits dans les journaux " La Dépêche du Midi " et " L'Opinion Indépendante " pour un coût ne devant pas dépasser 3 000 F pour chaque insertion. Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau : Condamne M. S à la peine de 10 000 F d'amende. Confirme le jugement en ses dispositions civiles. Y ajoutant : Condamne M. Gabriel S à payer : - à l'Union Fédérale des Consommateurs de Toulouse une indemnité supplémentaire de 500 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - à la Confédération Syndicale des Familles une indemnité supplémentaire de 500 F sur le fondement du même texte. La présente décision est assujetti à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont chaque condamné est redevable. Fixe la contrainte par corps, s'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale. Le tout en vertu des textes sus-visés.