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Décisions

CCE, 28 avril 1999, n° M.1309

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Matra/Aérospatiale

CCE n° M.1309

28 avril 1999

LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,

1. Le 11 mars 1999, la Commission a reçu une notification, au titre de l'article 4 du règlement du Conseil (CEE) n° 4064-89, d'un projet de concentration aux termes duquel l'Etat français et Lagardère SCA ("Lagardère ") acquerront, au sens de l'article 3 paragraphe 1 point b du règlement du Conseil, le contrôle conjoint de Matra Hautes Technologies (" MHT ") et d'Aérospatiale SNI (" Aérospatiale ").

2. Parmi les activités concernées par l'opération, certaines (et notamment les missiles) ont un caractère strictement militaire. Les autorités françaises estiment que ces activités touchent aux intérêts essentiels de sécurité de la République française, et, à ce titre, à ce titre, elles ont invoqué les dispositions de l'article 223 (1) b du traité CE pour enjoindre aux parties de ne pas notifier ces aspects de l'opération.

3. Après examen de la notification, la Commission est arrivée à la conclusion que l'opération notifiée relève du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun et avec l'accord EEE.

I. LES PARTIES

4. Lagardère contrôle un groupe de sociétés présentes dans les domaines de l'espace, des télécommunications, de l'automobile, de l'électronique, de la défense, des services de distribution et des média.

5. Aérospatiale est une société nationale industrielle, qui exerce ses activités dans les secteurs de l'aéronautique, de l'espace et des missiles. Elle a récemment reçu la participation détenue par l'Etat français dans la société Dassault Aviations, présente dans la production et la maintenance d'avions civils et militaires.

6. MHT est une filiale de Lagardère, qui rassemble les activités du groupe dans les domaines de l'espace, de la défense, des télécommunications et de l'informatique.

II. L'OPERATION

7. Aux termes d'un accord industriel conclu entre Lagardère, Aérospatiale et MHT, et d'un pacte d'actionnaires conclu entre l'Etat français et Lagardère, MHT apportera à Aérospatiale ses actifs dans la défense, l'espace, les télécommunications et l'informatique civile. En échange de cet apport et d'une soulte, Lagardère acquerra une participation de 33 % dans le nouvel ensemble, dénommé Aérospatiale-Matra, qui sera privatisé.

8. Aérospatiale-Matra sera une société anonyme de droit français. La majeure partie de son capital sera détenu par l'Etat français et Lagardère, le reste étant côté en bourse.

III. CONCENTRATION

Contrôle conjoint

9. Suite à l'opération, le "secteur public" détiendra environ 48 % du capital et des droits de vote d'Aérospatiale-Matra, dont il sera le premier actionnaire. Lagardère possédera 33 % du capital et des droits de vote du nouvel ensemble et en sera le premier actionnaire privé. Lagardère et l'Etat français auront donc la majorité à l'assemblée générale des actionnaires.

10. Selon les termes du pacte d'actionnaires conclu entre l'Etat français et Aérospatiale, l'administration et la direction d'Aérospatiale-Matra seront assurées par un conseil de surveillance et un directoire, dont les décisions seront prises à la majorité des voix. Lagardère et le "secteur public " disposeront ensemble de la majorité des droits de vote à chacun de ces organes sociaux. En revanche, aucun des deux actionnaires n'aura à lui seul la majorité des droits de vote.

11. De plus, le "secteur public " et Lagardère conviendront ensemble des décisions relatives à l'approbation du plan stratégique pluriannuel d'Aérospatiale-Matra et à la conclusion d'accords stratégiques d'alliance et de coopération, avant que ces décisions ne soient prises par les organes sociaux du nouvel ensemble (où Lagardère et le secteur public disposeront de la majorité des voix).

12. Au vu de ce qui précède, Lagardère et l'Etat français détiendront le contrôle conjoint d'Aérospatiale-Matra.

Entité autonome de plein exercice

13. MHT et Aérospatiale sont deux sociétés existantes, qui accomplissent les fonctions qui sont normalement exercées par les autres entreprises présentes sur leurs marchés. Aérospatiale-Matra, qui résultera de l'apport de MHT à Aérospatiale, exercera donc de manière durable toutes les fonctions d'une entité autonome de plein exercice.

IV. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

14. Lagardère et Aérospatiale réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial supérieur à 5 milliards d'Euros (Lagardère: 9,9 milliards d'Euros et Aérospatiale: 8,5 milliards d'Euros). Le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par au moins deux des entreprises concernées représente un montant supérieur à 250 millions d'Euros (Lagardère: 6,8 milliards d'Euros; Aérospatiale: 5,5 milliards d'Euros). Ces entreprises ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires communautaire dans un seul et même Etat membre. L'opération a donc une dimension communautaire, et elle ne constitue pas un cas de coopération au sens de l'Accord EEE.

V. APPLICATION DE L'ARTICLE 223 (1) B DU TRAITÉ CE

15. Ainsi qu'il a déjà été indiqué plus haut, les autorités françaises ont invoqué les dispositions de l'article 223 (1) b du traité CE pour enjoindre aux parties de ne pas notifier les aspects de l'opération relatifs aux missiles et systèmes de missiles.

16. La Commission a examiné si les conditions d'application de l'article 223 (1) b étaient remplies dans le cas présent. Dans ce cadre, et sur la base des informations fournies par les autorités françaises, elle note que:

- les parties de la concentration qui n'ont pas été notifiées concernent exclusivement des produits figurant dans la liste mentionnée à l'article 223 (2) du traité CE ;

- les mesures prises par l'Etat français peuvent être considérées comme nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité ;

- les mesures prises par l'Etat français n'auront pas d'effets induits sur des produits non militaires.

17. Par conséquent, les conditions d'application de l'article 223 (1) b sont remplies. Sous réserve que les mesures prises par les autorités françaises n'aient pas pour effet de fausser les conditions de la concurrence dans le Marché commun, la Commission n'estime pas nécessaire d'invoquer les dispositions de l'article 225 (1) du traité CE.

VI. COMPATIBILITE AVEC LE MARCHE COMMUN

A. Systèmes militaires de commandement, d'information et de communication

Marchés de produits

18. Selon les parties notifiantes, les Systèmes militaires de Commandement, d'Information et de Communication (SCIC) concernés par l'opération peuvent se subdiviser en Systèmes d'Information et de Commandement (SIC), systèmes de commande et contrôle (C2) et systèmes de télécommunications.

19. Les SIC sont des systèmes qui permettent aux opérationnels de tous niveaux de connaître à un moment donné la situation des différents acteurs, leurs moyens et les ordres en cours, et de pouvoir planifier, commander et superviser les actions appropriées.

20. Les C2 sont des systèmes qui assurent la gestion en temps réel de capteurs, d'armes et/ou de systèmes d'armes. Ils recouvrent notamment l'électronique et l'informatique de conduite de tir, d'autodéfense, d'identification, etc.

21. Selon les résultats de l'enquête menée par la Commission, la segmentation des SCIC est difficile à délimiter précisément. En particulier, les SIC semblent recouvrir des fonctionnalités différentes, comme la gestion d'informations et de bases de données et le contrôle de systèmes en temps réel. Or, ces différentes fonctions correspondent à des technologies et donc des compétences distinctes (informatique civile, électronique militaire etc.), et certains SIC ne réalisent que quelques fonctions particulières.

22. Toutefois, la question de la définition précise des marchés de produits en cause peut demeurer ouverte, dans la mesure où quels que soient les segments alternativement considérés, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Marchés géographiques

23. Les SCIC sont principalement des produits de défense. Dans des décisions (1) précédentes, la Commission a indiqué qu'il existait une approche de plus en plus internationale de la politique d'acquisition des Etats membres en matière de défense, grâce à l'augmentation du nombre des programmes menés en coopération entre Etats membres, à la réalisation de programmes militaires dans le cadre d'organismes internationaux (comme l'OTAN ou l'OCCAR) et à la consolidation de l'industrie de défense. Toutefois, dans le domaine particulier des SCIC, il semble encore exister une forte préférence nationale dans certains pays producteurs (et notamment en France), qui constituent dès lors des marchés géographiques distincts. En revanche, dans les pays non producteurs, et sous réserve de l'existence d'autres barrières (comme des restrictions aux exportations et d'autres barrières liées à la sécurité nationale), la concurrence a généralement lieu à une dimension au moins européenne, sinon à l'échelle d'une alliance militaire (comme l'OTAN) ou mondiale.

24. Dans le cas d'espèce, il convient donc de retenir une définition du marché géographique de référence limité à la France.

Appréciation concurrentielle

25. Aérospatiale et Matra sont toutes deux présentes sur les marchés associés aux SIC. En France, leur part de marché combinée atteint environ [25 %-35 %], mais les parties restent soumises à la concurrence de groupes importants comme Thomson-CSF (qui détient plus de 50 % des ventes de SIC), et leur principal client est le ministère de la Défense, qui dispose d'une puissance d'achat importante. Aux niveaux européen et mondial, les parts de marché combinées des parties ne dépassent pas [5 %-15 %].

26. À la lumière des considérations ci-dessus, la Commission peut conclure que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun dans le secteur des SCIC.

B. Systèmes de Traitement et d'Exploitation des Images

Marchés de produits

27. Les parties sont toutes deux présentes dans le secteur des Systèmes de Traitement et d'Exploitation des Images (STEI), qui permettent de traiter des images d'observation (à partir de capteurs tels que des caméras fixes, des satellites, des avions etc.), de les visualiser et d'en extraire certaines formes. Leurs applications, qui peuvent être civiles ou militaires, concernent généralement, soit la production d'informations à caractère géographique (cartographie, surveillance des cultures, exploration pétrolière et gazière, etc.), soit la reconnaissance de formes sur image (contrôle de production, comptage automatique, reconnaissance de caractères, etc.).

28. Les parties indiquent que l'ensemble des STEI repose sur la maîtrise d'une même technologie de traitement des images, déclinée dans des systèmes plus ou moins complexes. Toutefois, dans la mesure où certaines applications font appel à un niveau de sophistication spécifique et s'adressent à des utilisateurs différents, elles proposent de subdiviser le secteur des STEI en stations d'exploitation d'imagerie, en systèmes d'informations géographiques (SIG) et bases de données traitées, et en systèmes de reconnaissance de forme sur image. Elles indiquent également qu'à cause de la spécificité de la demande des utilisateurs militaires, les STEI utilisés dans le domaine de la défense peuvent être considérés comme appartenant à des marché distincts des STEI civils.

29. Les réponses à l'enquête menée par la Commission confirment généralement que les applications militaires des STEI doivent être distinguées des applications civiles, à cause de la spécificité des équipements militaires de prise de vue et des exigences particulières des clients militaires.

30. Les réponses à l'enquête menée par la Commission suggèrent également que le secteur des STEI pourrait être segmenté de façon plus fine. Ainsi, la réalisation de SIG et la production de bases de données pourraient faire l'objet de marchés séparés, dans la mesure où les SIG diffèrent des bases de données par la présence d'outils de manipulation particuliers des données et où certains acteurs ne sont présents que sur l'une de ces activités. Certains des clients et des concurrents interrogés par la Commission ont également indiqué qu'à leurs yeux, chaque application (comme la photo-interprétation militaire) des STEI devait constituer un marché de produit spécifique.

31. Toutefois, la question de la définition précise des marchés de produits en cause peut demeurer ouverte, dans la mesure où quels que soient les segments alternativement considérés, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Marchés géographiques

32. Selon les parties notifiantes, les marchés associés aux STEI sont de dimension nationale pour ce qui concerne les applications militaires (et notamment la photo-interprétation), et de dimension mondiale pour ce qui concerne les applications civiles (et notamment les SIG).

33. Pour ce qui concerne les applications militaires des STEI, il semble que le processus d'internationalisation de la politique d'acquisition des Etats membres soit plus avancé que dans le domaine des SCIC. En particulier, le ministère de la Défense français a indiqué qu'il effectuait ses acquisitions de STEI dans le cadre d'une consultation européenne.

34. Toutefois, la question de la définition précise des marchés géographiques de référence peut demeurer ouverte, dans la mesure où quels que soient les segments alternativement considérés, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Appréciation concurrentielle

35. Les activités des parties dans le secteur des STEI civils ne se recouvrent que dans le domaine des systèmes d'information géographiques et des bases de données, pour lequel leur part de marché combinée ne dépasse pas [10 %-20 %] en France, [0 %-10 %] en Europe et [0 %-10 %] au niveau mondial. Lagardère est également présent sur d'autres marchés civils de STEI (comme les stations d'exploitation), mais il n'existe pas de relation verticale directe entre ces activités et celles d'Aérospatiale.

36. Dans le secteur militaire, les parties notifiantes sont toutes deux présentes dans la photo-interprétation militaire, où leur part de marché combinée atteint [50 %-60 %] en France et [30 %-40 %] en Europe.

37. Toutefois, les marchés des STEI militaires sont caractérisés par des périodes de fourniture de durée très variable et par l'existence de programmes pluriannuels.Les contrats afférents à ces marchés portent donc généralement sur des montants importants, sont attribués de manière irrégulière, et sont souvent espacés de plusieurs années. Les parts de marché peuvent donc fluctuer fortement en fonction des dernières adjudications, et ne constituent donc pas nécessairement à elles seules des indicateurs fiables du pouvoir de marché réel.Dans le cas présent, la position de Lagardère dans le domaine des STEI militaires s'explique essentiellement par sa participation au seul programme de satellite militaire Hélios I, et elle ne présage pas de l'attribution des programmes futurs dans ce domaine.

38. En outre, il existe d'autres concurrents importants à l'échelle européenne, comme DASA, ACS, et Syseca (filiale de Thomson-CSF), et il semble que d'autres entreprises déjà présentes dans le secteur des STEI civils soient susceptibles d'entrer sur les marchés militaires.

39. Enfin, les marchés militaires sont caractérisés par le fort pouvoir de négociation des clients, les ministères de la Défense, qui, formulant généralement les spécifications et assurant le financement des programmes, réduisent fortement la possibilité pour les producteurs d'exercer leur pouvoir de marché. Il est donc nécessaire de tenir compte en particulier de la position du principal client des parties à la concentration, le ministère de la Défense français. Or, celui-ci a indiqué que, selon lui, l'opération n'affecterait pas significativement la situation concurrentielle sur les STEI militaires.

40. À la lumière des considérations ci-dessus, la Commission peut conclure que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun dans le secteur des STEI.

C. Drones

Marchés de produits

41. Les drones sont des véhicules aériens non habités et qui peuvent remplir différentes missions, comme la reconnaissance ou la surveillance, l'écoute, la guerre électronique, etc. Bine que certaines applications civiles soient aujourd'hui à l'étude, ils sont aujourd'hui exclusivement employés à des fins militaires. Les drones sont utilisés dans le cadre de systèmes de drones, qui, en plus des vecteurs, comprennent également une installation d'exploitation au sol.

42. Les parties notifiantes proposent de segmenter le secteur des drones en fonction du type d'application (observation, communication, écoute et attaque) d'une part, et des caractéristiques techniques du drone (drones tactiques et drones de longue endurance) d'autre part. Selon elles, il n'est pas nécessaire de distinguer les drones eux-mêmes des installations d'exploitation au sol, dans la mesure où, dans la très grande majorité des cas, l'ensemble du système est réalisé par le maître œuvre.

43. Toutefois, la question de la définition précise des marchés de produits en cause peut demeurer ouverte, dans la mesure où quels que soient les segments alternativement considérés, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Marchés géographiques

44. Il semble que le processus d'internationalisation de la politique d'acquisition des Etats membres (et notamment de la France, où les parties réalisent l'essentiel de leurs activités dans le domaine des drones) soit relativement avancé dans le domaine des drones. En particulier, le ministère de la Défense français a indiqué que, sur les deux seules acquisitions de systèmes opérationnels réalisées actuellement, l'une a résulté d'une adaptation d'un drone canadien et l'autre a donné lieu à une mise en concurrence européenne.

45. Toutefois, la question de la définition précise des marchés géographiques de référence peut demeurer ouverte, dans la mesure où, quelles que soient les définitions alternativement considérées, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Appréciation concurrentielle

46. Les activités de Lagardère et d'Aérospatiale dans le domaine des drones concernent exclusivement les drones d'observation, où elles détiennent moins de [10 %-20 %] des ventes européennes et [0 %-10 %] des ventes mondiales.

47. En France, en revanche, leur part de marché combiné atteint [75 %-85 %]. Toutefois, cette part de marché s'explique principalement par l'activité de Lagardère, Aérospatiale ne détenant que [0 %-10 %] du marché français. De plus, il apparaît que les activités d'Aérospatiale dans le domaine des drones ne concernent qu'un seul produit, le drone CL 289, qui a été introduit il y a plus de 10 ans et ne devrait pas faire l'objet de nouveaux développements. Enfin, compte tenu de la spécificité des marchés de défense et de la puissance d'achat des clients, les ministères de la Défense des Etats membres, la Commission considère généralement que les parts de marché ne constituent pas nécessairement à elles seules des indicateurs fiables du pouvoir de marché réel des entreprises concernées, et qu'il convient de prendre en compte l'opinion des principaux clients.A ce titre, le ministère français de la Défense a indiqué que, de son point de vue, l'opération ne changeait pas fondamentalement les conditions du marché.

48. Au vu de ce qui précède, la Commission peut conclure que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun dans le secteur des drones.

D. Sondes spatiales

Marchés de produits

49. Les sondes spatiales sont des engins spatiaux scientifiques destinés à l'exploration du système solaire ou d'autres objets célestes (comme des comètes). Elles diffèrent des satellites dans la mesure où elles ne suivent pas des orbites autour de la terre, et où elles peuvent être amenées à entrer dans l'atmosphère de planètes ou d'autres objets célestes, afin d'en réaliser l'analyse ou d'en rapporter des échantillons.

50. Les parties estiment que les sondes spatiales doivent être inclues dans un marché général des engins spatiaux scientifiques, au même titre que les satellites scientifiques, dans la mesure où ces produits sont tous développés dans le cadre des commandes d'acteurs institutionnels (comme l'Agence Spatiale Européenne ou le Centre National d'Etudes Spatiales (CNES)) et sont donc considérés par une identité des clients, des budgets et des fournisseurs.

51. D'un autre côté, les sondes spatiales présentent des caractéristiques techniques différentes de celles des satellites scientifiques, réalisent des missions spécifiques et donnent lieu à des programmes et des contrats distincts.

52. Toutefois, la question de la définition précise des marchés de produits en cause peut demeurer ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation alternativement considérée, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Marchés géographiques

53. Les clients des sondes spatiales sont principalement les organismes institutionnels spatiaux, nationaux (comme le CNES ou la NASA) ou internationaux (comme l'Agence Spatiale Européenne), qui tendent généralement à contracter de préférence avec des fournisseurs originaires de leurs propres pays. Il pourrait donc théoriquement être envisagé de distinguer plusieurs niveaux (national, européen et mondial) de marchés géographiques de référence.

54. Toutefois, la question de la définition précise des marchés géographiques de référence peut demeurer ouverte, dans la mesure où quelles que soient les définitions alternativement considérées, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Appréciation concurrentielle

55. Lagardère est présente, via Matra Marconi Space (" MMS ", filiale commune avec GEC Marconi), dans les activités de maîtrise d'œuvre d'engins spatiaux, et notamment de sondes spatiales. Aérospatiale ne produisant pas de sondes spatiales, il n'existe pas de recouvrement horizontal entre les activités des parties.

56. Selon certains opérateurs, Aérospatiale détient certaines compétences particulières dans le domaine de l'aérodynamique et de l'aérothermique, qui sont employées dans la conception de sondes spatiales. En particulier, ces connaissances permettent de modéliser le comportement de la sonde lors de sa rentrée atmosphérique, et donc de définir le niveau de protection thermique et les lois de pilotage adaptés.

57. Toutefois, d'une part, l'avantage concurrentiel qu'Aérospatiale-Matra pourrait tirer de l'expérience acquise par Aérospatiale dans le domaine de l'aérodynamique et de l'aérothermique est limité par le fait que chaque programme de modélisation aérothermique est spécifique à une mission de sonde et ne peut être directement utilisé pour une sonde différente ; et, d'autre part, il semble qu'il soit possible de développer ces compétences à des coûts et des délais raisonnables, comme l'indique le fait que le CNES a développé son propre modèle pour le programme de sonde martienne Mars Sample Return.

58. Au vu de ce qui précède, la Commission peut conclure que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun dans ce secteur.

E. Structures composites pour satellites

Marchés de produits

59. Lagardère est présente, via MMS, dans les activités de maîtrise d'œuvre de satellites et de stations de contrôle au sol. Aérospatiale, de son côté, est présente sur le secteur amont des équipements pour satellites, où elle produit des composants et structures composites, notamment des réflecteurs d'antenne et des tubes centraux pour satellites.

60. Les réflecteurs d'antenne sont des structures qui réfléchissent les ondes radiofréquences entre le satellite et la terre. Les parties proposent de segmenter ce secteur en quatre grandes catégories : les réflecteurs de petite taille (de diamètre inférieur à 4 m), les réflecteurs de grande taille (de diamètre compris entre 5 et 10 m), les réflecteurs déployables (de diamètre supérieur à 10 m) et les réflecteurs gonflables. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de définir les marchés de produits en cause avec plus de précision car, quelle que soit la définition retenue, l'analyse concurrentielle resterait inchangée.

61. Les tubes centraux constituent la structure porteuse du satellite, à laquelle viennent se fixer les équipements du satellite. Les parties estiment qu'il n'existe pas de marché pour les tubes centraux, dans la mesure où il s'agit d'éléments dédiés à une plate-forme, qui sont le plus souvent développés et fabriqués directement par le maître œuvre du satellite. Toutefois, il apparaît que certains maîtres œuvre de satellites sous-traitent la production de tubes centraux de satellites à des fournisseurs indépendants, et qu'il existe donc un marché ouvert pour ces produits (qui, selon des tiers, représente environ 30 % de la production totale).

Marchés géographiques

62. Selon les parties notifiantes, les marchés des structures composites sont de dimension mondiale, les conditions de concurrence étant homogènes à ce niveau et les commandes étant généralement effectuées par voie d'appels d'offres internationaux (et faisant intervenir des fournisseurs situés sur différents continents).

63. Toutefois, pour ce qui concerne les réflecteurs d'antenne, il apparaît que les ventes des producteurs extra-européens (et notamment américains) en Europe soient relativement limitées. Ainsi, le principal fournisseur américain de réflecteurs d'antenne, COI, ne semble commercialiser qu'une part relativement minime de sa production en Europe, et son concurrent le plus proche, AASC, ne semble vendre aucun de ses produits en Europe.

64. En outre, pour ce qui concerne les tubes centraux, des tiers ont indiqué que les coûts de transport, qui représentent 5 à 10 % du coût du tube pour un transport en Europe, atteignaient des valeurs importantes pour des transports entre continents.

65. Enfin, le 15 mars 1999 est entrée en vigueur une modification de la réglementation américaine International Traffic in Arms Regulation (ITAR). Cette modification a eu pour effet de soumettre le contrôle des exportations d'un grand nombre de satellites civils ou commerciaux, et leurs équipements, à une autorisation préalable du Department of State des Etats-Unis. Compte tenu du caractère récent de ces mesures, il semble difficile d'en évaluer la portée réelle sur les exportations de tubes centraux et de réflecteurs d'antenne en provenance des Etats-Unis, mais il apparaît que cette modification de la réglementation américaine pourrait conduire à une augmentation importante des délais d'approvisionnement en équipements et satellites américains. Si tel était le cas, et compte tenu des contraintes calendaires liées à la fourniture de satellites, les producteurs situés aux Etats-Unis pourraient ne plus être consultés par leurs clients européens.

66. Pour les besoins de la présente décision, le marché géographique de référence pourrait donc, être limité au monde à l'exception des Etats-Unis, voire à l'Europe, du fait de l'existence d'une barrière réglementaire.

67. Toutefois, la question de la définition précise des marchés géographiques de référence peut demeurer ouverte, dans la mesure où, compte tenu des éléments ci-dessous, quelles que soient les définitions alternativement considérées, l'opération ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

Appréciation concurrentielle

68. Au niveau mondial, l'opération ne soulèverait pas de difficultés concurrentielles, dans la mesure où MMS ne détient pas plus de [0 %-10 %] des ventes mondiales de satellites et où, bien qu'Aérospatiale détienne [30 %-40 %] du marché ouvert des réflecteurs d'antenne et environ [15 %-25 %] du marché ouvert des tubes centraux, les marchés ouverts ne représentent qu'une part relativement modeste de la production totale, et Aérospatiale reste soumise à la concurrence d'autres producteurs importants (et notamment des producteurs situés aux Etats-Unis, comme COI).

69. Si, en revanche les producteurs d'équipements et de satellites situés aux Etats-Unis ne pouvaient plus être pris en considération, l'intégration verticale des activités d'Aérospatiale dans le domaine des structures composites et des activités de MMS dans le secteur des satellites pourrait avoir un impact significatif sur la concurrence.

70. En effet, sur cette base, Aérospatiale détient une forte position concurrentielle sur les marchés des structures composites.D'une part, Aérospatiale réalise environ [60 %-70 %] des ventes de réflecteurs d'antenne et [60 %-70 %] des ventes de tubes centraux dans le monde à l'exception des Etats-Unis, ce qui est plus de quatre fois supérieur aux ventes de ses concurrents les plus proches (comme Alenia dans les réflecteurs d'antenne ou CASA dans les tubes centraux). D'autre part, selon les indications données par des tiers, il semble que la position d'Aérospatiale ne puisse pas être contestée à court terme, dans la mesure où il s'agirait du seul fournisseur européen à maîtriser l'ensemble des technologies de réflecteurs d'antenne et où, pour ce qui concerne les tubes centraux, l'accès à une source d'approvisionnement alternative prendrait environ 3 ans.

71. Compte tenu de ce qui précède, il ne peut pas être exclu que, dans l'hypothèse où la nouvelle réglementation de l'ITAR par le Gouvernement des Etats-Unis aurait pour effet de limiter dans une mesure significative l'approvisionnement en structures composites des fabricants de satellites non américains, Aérospatiale ne se retrouve alors de ce fait en position dominante sur les marchés des réflecteurs d'antenne et des tubes centraux pour satellites en Europe ou dans le monde à l'exception des Etats-Unis. A ce titre, il convient de noter que, parallèlement aux effets potentiellement induits par l'ITAR, qui risquent de faire disparaître pendant un certain temps la pression concurrentielle émanant des fabricants américains, l'opération aura quant à elle pour effet direct de réunir les capacités de production comparables d'Aérospatiale et de MMS en matière de structures composites.Toutefois, la production actuelle de MMS étant uniquement destinée à l'assemblage de ses propres satellites, ce dernier ne peut être pris en considération qu'en tant que concurrent potentiel.

72. Par ailleurs, MMS est un acteur majeur du secteur des satellites, et détient environ [30 %-40 %] des ventes en Europe. Dans certains cas d'appels d'offre, MMS pourrait donc se trouver en concurrence avec des clients d'Aérospatiale. Dans ces cas, après l'opération, Aérospatiale-Matra pourrait être incitée à renoncer à certaines ventes ponctuelles de structures composites, si cette perte était compensée par une amélioration sensible des chances offertes à MMS d'emporter un marché de fourniture de satellite. Un renforcement du pouvoir de marché d'Aérospatiale pourrait notamment résulter du fait que MMS produit ses propres structures primaires de satellite et fabrique environ [65 %-75 %] des réflecteurs d'antenne qu'elle consomme, la perte d'une vente par Aérospatiale pourrait donc être également compensée par un surcroît d'activité dans les activités correspondantes de MMS. En outre, l' occurrence d'appels d'offres pour lesquels MMS ne se trouverait en concurrence qu'avec des clients d'Aérospatiale est d'autant plus probable que MMS est un acteur important sur le secteur aval des satellites dans son ensemble, et des satellites d'observation en particulier (dont MMS détient [55 %-65 %] des ventes en Europe), et qu'Aérospatiale compte parmi ses clients certains des principaux concurrents de MMS.

73. Il convient donc d'examiner en premier lieu si le pouvoir de négociation d'Aérospatiale-Matra vis-à-vis de ces clients concurrents serait renforcé sur les marchés des structures composites en cause, dans une mesure telle qu'un renforcement de position dominante puisse être sérieusement craint. Tel pourrait en particulier être le cas si, d'une part, la demande ne pouvait accéder à aucune autre source d'approvisionnement, et d'autre part, si le pouvoir de négociation des parties ne pouvait pas être susceptible d'être contrebalancé par la puissance d'achat de cette demande. En second lieu, il est nécessaire d'examiner également si le lien vertical créé par l'opération pourrait conduire à une augmentation des parts détenues par MMS, telle qu'elle pourrait susciter des doutes sérieux quant au risque d'une création de position dominante de MMS sur les marchés de satellites.

74. Etant donné le caractère indispensable des composants concernés pour la réalisation d'un satellite, et le fait que ces produits sont dans une assez large mesure adaptés aux besoins spécifiques des clients, la recherche d'une seconde source peut s'avérer difficile et nécessiter des délais et des coûts importants, notamment pour l'adaptation préliminaire d'une nouvelle offre aux spécifications des maîtres d'œuvre. Cependant, les investigations menées auprès des parties et des principaux assembleurs de satellites européens montrent que d'une part Aérospatiale réalise la quasi totalité de son chiffre d'affaires en matière de structures composites avec son principal client(100 % pour ce qui concerne certains composants), et que d'autre part ce client est le seul à dépendre quasi exclusivement de ce fournisseur. En conséquence, à l'exception de ce principal client, la quasi-totalité des fournisseurs de satellites dispose d'ores et déjà, soit de ses propres capacités de fabrication, soit d'une source d'approvisionnement alternative. Dans la mesure où une partie de cette source d'approvisionnement alternative proviendrait des Etats-Unis, sa disparition potentielle ne pourrait en tout état de cause pas être directement imputée aux effets de l'opération. En outre, pour ce qui concerne le cas du client principal d'Aérospatiale qui est la fois concurrent de MMS, l'existence de capacités de production de structures composites, émanant de fabricants non intégrés, témoigne de la possibilité d'émergence d'une source alternative d'approvisionnement dans un court délai.

75. Par ailleurs, la simple position de client unique confère normalement à une entreprise une puissance de négociation notable vis-à-vis de son fournisseur.En outre, la demande de satellites en Europe émane notamment d'organismes puissants tels l'ESA où le CNES, qui invitent systématiquement plusieurs offreurs à concourir par le moyen d'appels d'offres. Dans la mesure où les parties tenteraient, de manière répétée, de mettre en œuvre à l'encontre de leur client des pratiques discriminatoires en vue d'entraver ses chances de remporter un marché sur lequel fournisseur et client se trouveraient en concurrence, il est donc probable que les maîtres d'ouvrages inviteraient d'autres fournisseurs, non dépendant d'Aérospatiale, à déposer une offre. En conséquence, quand bien même un accroissement du pouvoir de négociation pourrait être présumé résulter de la création d'un lien vertical entre MMS et Aérospatiale, celui-ci ne pourrait exercer des effets néfastes sensibles, selon les résultats de l'enquête de la Commission, qu'à l'égard d'une seule entreprise, représentant il est vrai un acteur important en aval.

76. Informées durant la première phase d'instruction, des risques décrits ci-dessus, les parties ont soumis à la Commission une proposition d'engagement (qui figure en annexe à la présente décision), par laquelle elles déclarent s'engager à négocier auprès de tout tiers des accords de fourniture de tubes centraux et des réflecteurs d'antenne à des conditions commerciales normales, transparentes et non discriminatoires. A cet effet, les parties se proposent de créer, sur la base de la clause compromissoire prévue par le nouveau Code de procédure civile français, une instance d'arbitrage indépendante et compétente ("l'Arbitre"). L'Arbitre, pour lequel les parties proposent de désigner l'European Space Agency (ESA), prise en la qualité de son directeur de l'administration, jugera en dernier ressort de tout litige en matière de tubes centraux et de réflecteurs d'antenne, et devra rendre sa sentence dans les deux mois suivant sa saisine. La Commission note que cette clause d'arbitrage constitue une élément susceptible de conférer à tout client d'Aérospatiale une possibilité supplémentaire de négociation, puisque le client pourrait à tout moment soumettre une plainte à l'arbitrage d'une instance offrant toutes les garanties de neutralité, de rapidité et de compétences pour juger de son bien-fondé.

77. Eu égard à tout ce qui précède, la Commission observe que le lien vertical créé par la concentration entre l'activité d'Aérospatiale dans le domaine des tubes centraux et réflecteurs d'antenne pour satellites et l'activité détenue par MMS dans le domaine des satellites, aboutit principalement au risque que ce lien vertical ne défavorise, de manière temporaire, un fournisseur de satellite concurrent.La Commission observe néanmoins que ce risque est limité par plusieurs éléments relatés ci-dessus. En effet, le fabricant de satellite en question, ainsi d'ailleurs que tout autre client potentiel d'Aérospatiale, apparaît en mesure d'obtenir une source d'approvisionnement en structures composites alternative dans un délai suffisamment court pour qu'aucun doute sérieux de création ou de renforcement de position dominante ne puisse être soulevé en raison de la position spécifique détenue par Aérospatiale au moment même de l'examen de l'opération.

78. Compte tenu des circonstances spécifiques de l'affaire, aucun risque concurrentiel sérieux ne peut donc résulter des effets verticaux identifiés par la Commission.

VII. RESTRICTIONS ACCESSOIRES

79. Lagardère a conclu dans le cadre l'opération un engagement de non-rétablissement dans le développement, la fabrication et la commercialisation de matériels ou équipements et systèmes y relatifs inhérents à la conduite des activités d'Aérospatiale-Matra, tant que Lagardère détiendra au moins 20 % des droits de vote d'Aérospatiale-Matra et pendant cinq ans après la date à laquelle Lagardère viendrait à perdre le statut de partenaire stratégique privilégié.

80. Cet engagement vise à garantir le retrait durable de Lagardère, et protège Aérospatiale-Matra contre le retour de Lagardère sur certains de ses marchés. Toutefois, sa durée excède celle qui serait nécessaire à Aérospatiale-Matra pour asseoir sa crédibilité et s'attacher la clientèle, et qui est estimée à cinq ans. La présente décision ne couvre donc cet engagement que pour une durée de cinq ans.

VIII. CONCLUSION

81. En conséquence, la Commission conclut que le projet de concentration ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante de nature à entraver de manière significative une concurrence effective dans le Marché commun ou une partie substantielle de celui-ci. 82. Pour les raisons exposées ci-avant la Commission a donc décidé de ne pas s'opposer à la concentration notifiée et de la déclarer compatible avec le Marché commun et le fonctionnement de l'Accord EEE. La présente décision est adoptée en application de l'article 6 paragraphe 1 point b du règlement du Conseil (CEE) n° 4064-89, tel qu'amendé par le règlement du Conseil n° 1310-97.

Affaire IV-M.1309 - Matra/Aérospatiale Proposition d'engagement soumise par les parties

Conformément à l'article 6.2 du règlement du Conseil n° 4064-89, Lagardère et Aerospatiale, agissant tant pour elles-mêmes que pour le compte d'Aerospatiale Lanceurs Stratégiques et Spatiaux, filiale à 100 % d'Aerospatiale, (qui seront collectivement désignées ci-après "les Parties") proposent à la Commission européenne les engagements suivants, qui entreront en vigueur à la réception de la décision de la Commission déclarant l'opération de concentration Matra-Aerospatiale compatible avec le Marché commun conformément à l'article 6 (1) b dudit règlement.

1. Les Parties s'engagent à offrir de fournir, à tout tiers qui en ferait la demande, des structures composites (tubes centraux et réflecteurs d'antenne) dont elle effectue la fabrication.

2. A cet effet, les Parties proposeront des accords de fourniture à des conditions contractuelles normales, transparentes et non-discriminatoires, sur une base commerciale normale et conforme à la pratique commune, adaptée éventuellement à l'évolution générale du marché. Les propositions d'accord comporteront tous les éléments permettant la conclusion de ces accords et notamment ceux relatifs aux prix, aux remises de prix, à la qualité, et aux délais et conditions de livraison.

3. En outre, les parties s'engagent à ne pas accorder à un quelconque acheteur de traitement préférentiel non justifié sur la base de critères objectifs et vérifiables, par exemple pour certains volumes d'achat.

4. Les parties s'engagent à proposer que tout litige relatif à la négociation, à la conclusion et au respect des accords de fournitures relatifs à la fourniture de tubes centraux et de réflecteurs d'antenne soit soumis à un Arbitre unique, disposant de l'expérience, de la compétence et de l'indépendance requises. Les parties proposent que l'European Space Agency (ESA), prise en la qualité de son directeur de l'administration (ou de toute autre personne compétente au sein de l'ESA et n'ayant pas ou n'ayant pas eu dans les 5 ans précédant sa nomination, d'intérêt direct ou indirect avec les parties) soit désigné comme arbitre (" l'Arbitre ").

Les parties s'engagent à nommer, en même temps que l'Arbitre titulaire, un arbitre suppléant au sein de l'ESA, lequel remplira les mêmes conditions d'impartialité que le titulaire et pourra agir en cas d'absence ou d'empêchement de l'Arbitre titulaire.

L'Arbitre pourra être saisi par tout acheteur de structures composites (tubes centraux et réflecteurs d'antenne). La saisine sera effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception, qui précisera l'objet du litige et la prétention du plaignant. L'Arbitre rendra sa sentence, de façon définitive et en dernier ressort, dans un délai maximal de deux (2) mois après la réception de la saisine.

L'Arbitre agira dans le cadre prévu aux articles 1442 et suivants du nouveau Code de procédure civile en application du droit français et pourra prendre toute mesure conservatoire. Les parties s'engagent à exécuter dans les plus brefs délais la sentence rendue par l'Arbitre ainsi que toute obligation (telle que le respect de délais de livraison ou toute autre mesure d'équité) qui pourrait leur être imposée par l'Arbitre.

L'Arbitre pourra accéder à toute information de nature confidentielle, procéder à toute investigation ou expertise auprès d'Aerospatiale Lanceurs Stratégiques et Spatiaux, et ordonner toutes autres mesures, dans la mesure où ces informations et mesures sont nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

La possibilité de recours décrite ci-dessus sera mentionnée dans les propositions d'accord de fournitures relatifs aux tubes centraux et réflecteurs d'antenne pour satellites rédigées par les Parties.

Les parties s'engagent à faire parvenir dès que possible à la Commission européenne copie de toute saisine de l'Arbitre au titre du présent engagement, ainsi que de la sentence rendue.

1. Cet engagement restera en vigueur pour une durée de trois (3) ans à compter de la date de sa prise d'effet, pour autant que l'activité de fabrication des structures composites visées par le présent engagement reste dans le périmètre de contrôle de la nouvelle entité Aerospatiale-Matra, issue de l'opération de concentration.

(1) Cf., entre autres, affaire IV-M.1198 - British Aerospace Plc/SAAB AB