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Décisions

CA Grenoble, ch. corr., 7 mai 1998, n° 528-98

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

LPG Systems (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigny

Conseillers :

Mme Robin, M. Balmain

Avocats :

Mes Ughetto, Barthélémy.

TGI Valence, ch. corr., du 11 avr. 1997

11 avril 1997

Attendu que par jugement en date du 11 avril 1997, le Tribunal correctionnel de Valence statuant :

- sur l'action publique :

a déclaré Jean-Jacques C coupable d'avoir à Bourg-les-Valence (26) et sur le territoire national, de janvier 1995 à janvier 1996, effectué une publicité mensongère sur les mentions suivantes figurant sur une plaquette de documentation générale relative aux produits et méthodes diffusés par l'entreprise X dont il est gérant :

* fausse qualité de " cadre moniteur " pour M. G et Mme B (p. 1) ;

* fausses spécialités de vertébrothérapeute, rhumatologue, acupuncteur, médecine du sport, attribuées au Docteur K (p. 2) ;

* fausses mentions relatives à l'Institut Y : centre de recherche, véritable laboratoire, centre d'études, centre de formation (p. 3) ;

* mention d'indications thérapeutiques du système Z injustifiées (p. 4 et 5) ;

* référence au staff scientifique de la société X alors qu'aucune équipe scientifique n'y est employée (p. 6) ;

* fausse indication " une minute de massage avec l'appareil correspond à environ 7 mn de massage manuel " alors que rien ne permet de l'affirmer (p. 8) ;

* mentions injustifiées de vente du " produit Z dans les plus grands centres esthétiques du monde " (p. 17) ;

* mention de propriétés injustifiées de l'appareil A " (p. 18 et 19) ;

* fausses indications relatives à la parution dans la grande presse féminine de copies de rédactionnels parus sur " le produit Z " alors qu'il s'agissait, en fait, de publicités diffusées par la société X (p. 23) ;

* fausse mention d'un attaché de presse qui n'a jamais travaillé pour la société et d'un chiffre d'affaire minimum qu'assurerait le contrat B aux masseurs kinésithérapeutes contractants alors qu'il n'y a aucun engagement de la société à ce sujet (p. 23),

d'avoir à Bourg-les-Valence et sur le territoire national en octobre 1995 et en janvier 1996, étant gérant de la société X, effectué une publicité mensongère sur le témoignage de divers masseurs-kinésithérapeutes relatif à l'efficacité du produit Z, présenté dans la rubrique Publi Reportages de la revue Kiné Actualités comme de simples clients alors qu'en fait au moins deux d'entre eux étaient liés à la société par leur activité de formateur pour le compte de celle-ci,

en répression l'a condamné à 20 000 F d'amende dont 10 000 F avec sursis et a ordonné la publicité du jugement dans le Dauphiné Libéré et les revues professionnelles Kiné Actualités et MK France.

- Sur l'action civile :

a condamné Jean-Jacques C à payer à la société LPG Systems, reçue en sa constitution de partie civile, la somme de 1 F à titre de dommages et intérêts et celle de 2 000 F au titre de l'article 475- 1 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'il a été régulièrement interjeté appel de cette décision par Jean-Jacques C et par le procureur de la République ;

Attendu que par conclusions auxquelles il est renvoyé, Jean-Jacques C sollicite sa relaxe ;

Que Monsieur l'Avocat général s'en rapporte ;

Motifs de l'arrêt :

1/ Sur l'action publique :

Attendu qu'en janvier 1996, les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la Drôme, procédaient à la suite d'une dénonciation faite par Louis-Paul Guitay au nom de la société LPG Systems, à une enquête sur les publicités réalisées par le principal concurrent de la société LPG Systems, la société X dont le gérant est Jean-Jacques C ;

Que ce contrôle a porté d'une part sur une plaquette de documentation générale et d'autre part, sur des publi-reportages ;

Que les contrôleurs ont relevé diverses irrégularités ce qui a conduit le procureur de la République à citer Jean-Jacques C devant le tribunal correctionnel ;

Que le premier juge a considéré établies les infractions relevées à la charge de Jean-Jacques C ;

Que celui-ci conteste les faits, s'affirmant victime d'un règlement de compte de la part de la société LPG Systems ;

A) la plaquette de documents générale :

Attendu que les contrôleurs de la DCCRF ont relevé sept inexactitudes :

- page 1 : deux kinésithérapeutes sont qualifiés de " cadres moniteurs " alors qu'il n'est pas justifié de leur qualité ;

Attendu que le décret 76-862 du 6 septembre 1976 crée un diplôme de moniteur cadre réservé aux personnes titulaires du diplôme d'Etat de masseur-kinésithérapeute qui ont subi un enseignement complémentaire sanctionné par un examen ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas démontré par Jean-Jacques C que Denis G et Nicole B soient titulaires de ce diplôme ;

Que Jean-Jacques C explique qu'en fait ces deux masseurs-kinésithérapeutes encadrent les moniteurs dispensant enseignement et formation au sein de l'Institut Y ; que cette terminologie de " cadres moniteurs " crée une ambiguïté propre à induire en erreur le lecteur de la plaquette ;

- page 2 : les spécialités attribuées au Docteur K :

Attendu que la page de la notice présente le Docteur K, concepteur de l'appareil Z ; qu'il y est indiqué " diplômé en rééducation et réadaptation fonctionnelle, vertébrothérapeute, maître de stage à l'Université de Saint-Etienne, diplômé de médecine du sport, acupuncteur, président de la SOMED (société médicale d'étude et du traitement de la douleur) et de l'ARP (association de recherche et d'étude du palper-rouler) ;

Attendu que s'il est établi, sans conteste possible que le Docteur K est diplômé en rééducation et réadaptation fonctionnelle et reconnu par l'ordre des médecins comme " compétent en biologie et médecine du sport ", force est de constater, sans méconnaître les qualités de ce praticien, qu'aucun autre justificatif n'est produit pour les autres spécialités énumérées, étant par ailleurs rappelé que les universités françaises n'enseignent et a fortiori ne sanctionnent par un diplôme la vertébrothérapie, l'acupuncture ou l'ostéopathie ;

- page 3 : l'Institut Y :

Attendu que la plaquette présente l'Institut Y <adresse> comme un centre de recherche pour de nouvelles applications du produit Z - véritable laboratoire de techniques de dépressomassage et dépressodrainage - centre d'études de la posture - centre d'études des cicatrices - centre de formation aux techniques de dépressomassage et dépressodrainage - centre de formation permanente - centre d'optimisation des techniques esthétiques ;

Attendu que cet institut est donc présenté comme un centre de recherche, centre d'études et de formation ; qu'en fait il s'agit d'une société civile de moyens qui regroupe en son sein diverses spécialités médicales et para-médicales ; qu'il n'est pas justifié qu'au moment du contrôle, des formations y étaient organisées, les justificatifs produits par Jean-Jacques C se rapportent à la période à la période novembre 1997 - janvier 1998 ;

- page 4 et 5 : les qualités du produit Z :

Attendu que la plaquette fait référence à toute une série d'indications thérapeutiques pour l'appareil Z ; que les documents produits par Jean-Jacques C ne permettent pas d'apprécier la véracité scientifique de ces publications ;

- page 6 : le staff scientifique :

Attendu qu'il est écrit "le champ d'application du produit Z est la peau-organe à part entière, qui est pour tout le staff scientifique de X de loin l'organe le plus important du patient" ;

Attendu qu'en fait, le staff scientifique auquel il est fait allusion, se composait de personnes exerçant de façon libérale et indépendante au sein de l'Institut Y, assurant la formation des nouveaux acquéreurs du produit Z ;

Qu'il ne peut donc s'agir d'un staff au sens littéral du terme ; que l'emploi de ce terme dans cette plaquette ne peut que créer une ambiguïté dans l'esprit du lecteur ;

- page 8 : l'efficacité de l'appareil :

Attendu qu'il est écrit " les effets physiologiques du produit Z sont tels qu'une minute de massage avec l'appareil correspond à environ 7 mn de massage manuel ";

Attendu que cette affirmation n'est étayée par aucun élément technique objectif et empirique,qu'il s'agit simplement d'appréciations données par des masseurs-kinésithérapeutes ;

- page 17 : les références :

Attendu que dans sa plaquette, la société X affirme que le produit Z a aussi été choisi par les plus grands centres esthétiques du monde ; qu'il y est fait état : Clinique La Prairie en Suisse ; Centre Biovimer à Villeneuve-Loubet et le Centre Kythira à Paris ;

Attendu que s'il est versé aux débats un listing, dit " fichier client " il n'est pas justifié de la vente effective de cet appareil aux " plus grands centres esthétiques " du monde ;

Que la cour ne saurait se contenter ni d'un listing ni d'une attestation unique d'un médecin brésilien ;

- page 18 et 19 : l'appareil body analyseur :

Attendu que cet appareil est présenté comme analysant par bio impédance le poids idéal et le métabolisme de base et permettant aux utilisateurs d'orienter le traitement ;

Attendu que force est de constater que Jean-Jacques C n'apporte aucune autre justification que celle présentée au contrôleur de la DCCRG (mode d'emploi en langue anglaise) ;

- page 22 : le faire-valoir :

Attendu qu'au titre des outils de marketing, la société X fait état de copie des rédactionnels parus sur le produit Z parus dans la grande presse féminine ;

Attendu que pour la période considérée, un seul article peut être qualifié de rédactionnel, le reste étant, en fait des publicités X ;

Que les documents présentés à la cour sont très postérieurs au contrôle ;

- page 23 : l'attachée de presse :

Attendu qu'il est fait état dans la plaquette d'une attachée de presse, Magali H, chargée de l'action presse ;

Que Jean-Jacques C reconnaît que Magali H n'a jamais travaillé pour X en qualité d'attachée de presse ;

- page 23 : le contrat B :

Attendu qu'il est fait référence à la garantie d'un minimum de chiffre d'affaires annuel pour le masseur-kinésithérapeute par le contrat B ;

Que le contrat B ne fait pas état d'un quelconque engagement de la société X quant au chiffre d'affaires du masseur-kinésithérapeute ;

B) les publi-reportages :

Attendu que dans les publi-reportages parus dans la revue Kiné Actualités des 26 octobre 1995 et 25 janvier 1995, Nicole B et Thierry D sont présentés comme de simples utilisateurs, parmi d'autres, alors que ceux-ci étaient formateurs pour l'un, cadre formateur pour la seconde, donc employés de la société X ;

Attendu que la plaquette de documentation générale a, même si elle n'était destinée qu'à des professionnels, le caractère de publicité puisqu'elle est destinée à vanter les mérites des appareils proposés par X de façon à permettre à ces masseurs-kinésithérapeutes de se faire une opinion sur les appareils commercialisés par la société X ;

Que les mentions relevées dans cette plaquette et analysées précédemment présentent bien un caractère trompeur dans la mesure où elles étaient propre à induire en erreur les clients potentiels tant sur la qualité des intervenants que sur les qualités du matériel proposé ;

Que dès lors que Jean-Jacques C ne justifie pas la réalité de l'ensemble des énonciations de la plaquette de documentation générale, les faits de publicité mensongère sont établis ;

Que c'est donc à bon droit que le premier juge l'a retenu dans les liens de la prévention,en lui faisant, par ailleurs une exacte application de la loi pénale ;

Que les dispositions pénales du jugement seront intégralement confirmées ;

2/ Sur l'action civile :

Attendu que le premier juge a très exactement apprécié le préjudice subi par la société LPG Systems ;

Que les dispositions civiles du jugement seront intégralement confirmées ;

Par ces motifs : Recevant les appels comme réguliers en la forme, Confirme en toutes ses dispositions tant pénales que civiles le jugement déféré, Constate que le présent arrêt est assujetti au droit fixe de 800 F résultant de l'article 1018 A du Code général des impôts, et dit que la contrainte par corps s'exercera, conformément aux dispositions des articles 749 à 751 du Code de procédure pénale, Le tout par application des dispositions des articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation, 132-29 à 132-39 du Code pénal.