CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 10 février 1999, n° 99-118
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lapeyrère
Conseillers :
MM. Rajbaut, Malatrasi
Avocat :
Me Rose.
Mme Odile V épouse F a été citée le 22 octobre 1996 à la requête du Ministère Public devant le Tribunal correctionnel de Draguignan pour :
- avoir à Vidauban, courant juillet, août et septembre 1994, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, en présentant sur des dépliants publicitaires, les vins commercialisés par la SCA X, des vins de pays comme des vins d'appellation d'origine de qualité supérieure.
- d'avoir à Vidauban, courant juillet, août et septembre 1994, pratiqué l'usurpation de l'appellation d'origine contrôlée (côtes de Provence) sur l'habillage des bouteilles de vins,
- d'avoir à Vidauban courant juillet, août et septembre 1994, pratiqué la vente avec primes en remettant gratuitement à l'acheteur des vins de nature différente à ceux commandés.
Faits prévus et réprimés par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1, L. 121-4, L. 115- 16, L. 115-1, L. 121-35 du Code de la consommation et les articles 33 al. 13 et 24 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986.
Par jugement contradictoire à signifier à l'égard de la prévenue, le tribunal a déclaré celle-ci coupable des faits qui lui sont reprochés et l'a condamnée à la peine de 100 000 F d'amende et à la publication du jugement par extrait dans les journaux Var-Matin et Nice-Matin, sans que le coût de chaque insertion puisse être supérieur à 5 000 F.
Ce jugement a été signifié à la personne de Mme F le 5 avril 1997.
Mme F a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 10 avril 1997.
Le Ministère Public a régulièrement interjeté appel incident le même jour.
Mme Odile V épouse F, régulièrement citée à sa personne le 8 octobre 1998 est présente, assistée et a déposé des conclusions au terme desquelles elle demande à la cour de constater l'amnistie de la contravention de vente avec primes, de constater que les délits d'usurpation d'appellation d'origine et de publicité mensongère ne sont pas établis, et en conséquence, de réformer le jugement entrepris et de la relaxer des fins de la poursuite.
Le ministère a requis l'extinction de l'action publique pour la contravention du fait de l'amnistie, s'en rapporte pour l'infraction d'usurpation d'appellation d'origine contrôlée et, estimant le délit de publicité mensongère constitué, requiert la confirmation, sur ce point, du jugement attaqué.
Sur ce
Attendu qu'il sera statué contradictoirement à l'égard de la prévenue.
Attendu que les appels sont réguliers pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux.
Attendu que l'infraction de vente à primes est une contravention de la cinquième classe, que les faits sont antérieurs au 18 mai 1995 puisqu'ils datent de juillet à septembre 1994, qu'en conséquence cette infraction est amnistiée en vertu de l'article 1er de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, que de ce fait la cour ne peut que constater l'extinction de l'action publique.
Attendu que l'infraction d'usurpation d'appellation contrôlée concerne l'étiquette d'une des bouteilles des vins commercialisés par la SCA X à Vidauban (Var) dont Mme Odile F est la gérante.
Attendu en effet que le vin de pays des Maures, cuvée Antiopolis, porte la mention " Grand Vin de Provence ", mais que cette seule mention, au demeurant exacte (le Vin de Pays des Maures étant bien produit en Provence) ne saurait constituer l'usurpation de l'appellation d'origine contrôlée " Côtes de Provence ", l'expression n'étant pas identique et alors surtout que l'étiquette porte bien la mention, en caractères apparent, de " Vin de Pays des Maures ", que dès lors le délit n'est pas constitué.
Attendu que l'infraction de publicité mensongère concerne les dépliants publicitaires adressés par la SCA X pour la vente par correspondance de ses vins.
Attendu en effet que la SCA X commercialise à la fois des vins d'appellation contrôlés " Côtes de Provence " et des vins de Pays des Maures, que les deux types de vins étant produits en Provence, il n'est pas anormal que le texte publicitaire privilégie la région Sud et la Provence pour vanter ces vins, qu'il n'est pas non plus anormal que ce texte fasse état de l'appellation d'origine contrôlée " Côtes de Provence " puisque des vins de cette appellation sont bien commercialisés par la SCA X et proposés à la vente dans le dépliant publicitaire incriminé.
Attendu que le bon de commande distingue nettement les vins d'appellation contrôlés des vins de pays, qu'aucune confusion ne peut résulter de la présentation effectuée, que le prix de vente de certains vins de pays (comme la cuvée Antiopolis) est librement fixé par le vendeur, l'acheteur potentiel étant libre de refuser d'acheter ce vin à ce prix s'il l'estime trop élevé pour un vin de pays.
Attendu dès lors que le délit de publicité mensongère n'est pas établi et que le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions et Mme Odile F relaxée des fins de la poursuite.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière correctionnelle, En la forme, Reçoit les appels. Au fond, Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau, Constate l'extinction de l'action publique du fait de la loi d'amnistie du 3 août 1995 pour la contravention de vente à primes. Relaxe Mme Odile V épouse F des autres chefs de poursuite. Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt, et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.