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Décisions

Cass. crim., 20 juillet 1993, n° 92-85.951

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Guhenec

Rapporteur :

M. Jorda

Avocat général :

M. Libouban

Avocats :

SCP Le Bret, Laugier.

T. corr. Bobigny, 16e ch., du 16 janv. 1…

16 janvier 1992

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par A Xavier, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, du 29 octobre 1992, qui, pour apposition sans autorisation de trois enseignes lumineuses, l'a condamné à 3 amendes de 2 000 francs chacune et a ordonné, sous astreinte, la suppression desdites enseignes ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 24 et suivants de la loi du 29 décembre 1979, 27, 29, 31 et suivants du décret n° 80-973 du 21 novembre 1980, 8 à 13 du décret n° 82-211 du 24 février 1982, de la loi du 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III, des articles 585 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Xavier A coupable du délit d'apposition de trois dispositifs publicitaires lumineux sans autorisation, l'a condamné en conséquence à trois amendes de 2 000 francs chacune, et a ordonné la suppression des trois dispositifs publicitaires sous astreinte ;

" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que le maire de Paris a dû demander à la société L des renseignements complémentaires et que les pièces réclamées ont été adressées à la mairie de Paris, par télécopies, les 28 février 1990 et 5 mars 1990 ; que le refus du maire de Paris du 26 avril 1990, notifié à la SA L par lettre recommandée du 2 mai 1990, est donc parfaitement régulier et qu'il serait surabondant d'examiner la validité des deux autres modes de notification utilisés par le maire de Paris ;

" alors, d'une part, que le maire de Paris avait, aux termes d'un courrier du 16 juillet 1990 visé au demeurant par son arrêté du 29 mars 1991 comportant mise en demeure, expressément indiqué que " le délai de 2 mois commençait et courait à partir du 28 février 1990, date à laquelle la mairie a reçu les pièces complémentaires demandées le 7 février précédent ; (que) le délai fixé pour la notification de la décision expirait le 28 avril à 24 heures " ; que l'autorité administrative ayant ainsi officiellement pris parti sur le point de départ du délai de 2 mois fixé pour sa réponse et tenant compte de la réception effective des pièces complémentaires demandées, la cour d'appel ne pouvait sans commettre un excès de pouvoir substituer une appréciation divergente sur la mise en état par le pétitionnaire de son dossier de demande d'autorisation et retenir que le délai n'avait commencé à courir qu'à la seule date du 5 mars 1990, compte tenu d'un ultime envoi effectué ce jour-là en télécopie ;

" alors, d'autre part, que le jugement entrepris avait prononcé la relaxe de Xavier A en constatant, à partir des explications écrites fournies par la mairie le 16 juillet 1990, que les documents complémentaires sollicités avaient été réceptionnés par celle-ci le 28 février 1990 ; que, dès lors, ledit envoi de pièces complémentaires satisfaisant aux conditions de l'article 27 du décret du 21 novembre 1980 pour faire courir le délai de réponse de 2 mois de l'autorité compétente, et faire naître, après l'expiration de ce délai, l'existence d'une autorisation tacite, la cour d'appel n'a pu, se fondant sur la seule circonstance de l'envoi d'un dernier document par le demandeur le 5 mars 1990 à la suite d'un simple appel téléphonique de la mairie et sans rechercher si cette dernière pièce modifiait effectivement la constitution du dossier de demande, retenir que le délai de réponse avait été nécessairement reporté au 5 mai 1990 ; que, dès lors, l'arrêt attaqué est entaché d'un manque de base légale et a insuffisamment motivé sa décision, infirmant, à partir de ce seul fondement, le jugement entrepris de relaxe " ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Xavier A, président de la société L, a sollicité le 18 janvier 1990 du maire de Paris l'autorisation d'installer une publicité lumineuse sur un immeuble ; que, le 7 février 1990, le maire a demandé diverses pièces complémentaires qui lui sont parvenues le 28 février, puis le 5 mars 1990 ; que, le 2 mai 1990, le représentant de la société a signé l'avis de réception de la lettre recommandée du maire lui notifiant son refus d'autoriser l'installation de l'enseigne que Xavier A a cependant fait apposer ; que celui-ci est poursuivi pour infractions à la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes ;

Attendu que, pour le déclarer coupable de ces infractions, après avoir écarté ses conclusions invoquant une autorisation tacite du maire découlant du défaut de notification de la décision administrative dans le délai de 2 mois, la juridiction du second degré retient que ce délai n'a pu, conformément aux dispositions des articles 27 et 29 du décret du 21 novembre 1980, expirer que le 5 mai 1990, 2 mois après la date de réception des dernières pièces adressées au maire par la société ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que la décision du maire était assortie d'une sanction pénale, la Cour d'appel, a, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, justifié sa décision ; - d'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 24, 29 et 31 de la loi du 29 décembre 1979, 27, 29, 31 et suivants du décret n° 80-973 du 21 novembre 1980, 5 du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Xavier A coupable du délit d'apposition de trois dispositifs publicitaires lumineux sans autorisation et l'a condamné à trois amendes de 2 000 francs chacune, outre la suppression des dispositifs publicitaires sous astreinte de 300 francs par jour de retard ;

" aux motifs que Xavier A, en sa qualité de président du conseil d'administration de L, adressait au maire de Paris une demande d'autorisation d'installer une enseigne lumineuse " Bercy 2 ", composée de trois dispositifs sur la terrasse de l'immeuble 1-11, rue Fulton à Paris 13e ; que, conformément aux dispositions de l'article 29 de la loi du 29 décembre 1979, il devra être prononcé autant de peines d'amende qu'il y a eu de dispositifs publicitaires lumineux en infraction, soit trois ;

" alors, d'une part, que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article 29 de la loi du 29 décembre 1979 prévoit que l'amende sera appliquée autant de fois qu'il y aura de publicités, d'enseignes ou de préenseignes en infraction, sans prendre en considération la notion de dispositif ; que, dès lors, l'arrêt attaqué n'a pu retenir à l'encontre de Xavier A l'existence de plusieurs infractions justifiant la condamnation au paiement de trois amendes distinctes en se fondant sur la seule constatation de la mise en place de trois dispositifs ;

" alors, d'autre part, que l'astreinte assortissant la mise en conformité ou la suppression prescrite par le maire est infligée en fonction de l'infraction constatée ; que, dès lors, le juge répressif, appelé à se prononcer sur la même infraction, ne peut fixer une nouvelle astreinte sans prendre en considération le montant de l'astreinte déjà instituée par l'autorité administrative ; que, par suite, l'arrêt attaqué, constatant sans autre précision que l'arrêté du 29 mars 1991 enjoignant la dépose comportait déjà une astreinte, n'a pas donné de base légale à sa décision " ;

Attendu que, pour condamner Xavier A à trois peines d'amende, les juges du second degré retiennent que les " dispositifs publicitaires lumineux " mis en place sont distincts ; qu'ils en ordonnent, en outre, la suppression sous astreinte ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, loin de méconnaître les textes invoqués, en a fait l'exacte application ; qu'en effet, d'une part, il résulte des dispositions combinées des articles 29 et 8 de la loi du 29 décembre 1979 que, lorsqu'il y a plusieurs dispositifs publicitaires lumineux distincts, il doit être prononcé autant d'amendes que de dispositifs en infraction; que, d'autre part, en matière d'infractions à la loi du 29 décembre 1979, l'astreinte judiciaire prévue par l'article 31 de cette loi et l'astreinte administrative visée par l'article 25 du même texte ne se confondent pas; d'où il suit que le moyen, infondé en sa première branche et inopérant en sa seconde, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.