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Décisions

CA Grenoble, 1re ch. civ., 3 juin 1997, n° 95-473

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère

Défendeur :

Emme (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Berger

Conseillers :

Mmes Manier, Brenot

Avoués :

SCP Perret, Pougnand, Me Ramillon

Avocats :

Mes Brasseur, Bois

TGI Grenoble, du 1er déc. 1994

1 décembre 1994

Les faits de la procédure :

La SARL Emme commercialise du mobilier contemporain et des produits électroménagers sous la marque " Bulthaup " en proposant à sa clientèle un contrat de vente-type dont certaines clauses sont estimées abusives ou illicites par l'association "Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère".

Celle-ci a donc assigné le 16 février 1994 la société Emme devant le Tribunal de grande instance de Grenoble principalement en suppression des clauses 1-2, 1-5, 4-1, 4-3, 5-1, 6-1 et 10.

Par jugement rendu le 1er décembre 1994, le tribunal a déclaré abusives les clauses figurant aux articles 1-2, 1-5, 4-3c , 5-2 et 6-1 des conditions générales de vente proposées par la société Emme et illicite la clause figurant dans l'article 4-1, ordonné la suppression de ces clauses sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de trois mois après la signification de la décision et condamné la société Emme à payer à l'UFC 38 la somme de 9 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile:

Les prétentions des parties en appel et la motivation de la cour :

L'UFC 38 soutient que le tribunal devait lui octroyer les dommages et intérêts ainsi que la publication de la décision qu'elle sollicitait au motif qu'il existe un préjudice collectif (direct ou indirect) à l'intérêt collectif des consommateurs qui ne se confond pas avec le préjudice propre et individuel d'un ou plusieurs consommateurs. Elle précise qu'elle est investie d'un rôle préventif en matière de clauses abusives dont les consommateurs ne peuvent se prévaloir pour déclarer un préjudice personnel et que, s'agissant de contrats dont les consommateurs pensent qu'ils " font la loi des parties ", ceux-ci s'inclinent sans pouvoir savoir si la clause est abusive et déséquilibre le contrat.

Mais la cour relève une contradiction dans l'argumentation présentée par l'UFC 38, à savoir l'intervention préventive de celle-ci et l'existence d'un préjudice fût-il collectif dès lors que, par principe, toute prévention est exclusive de tout préjudice.

D'autre part, il ne suffit pas, juridiquement, de constater que l'application de clauses abusives ou illicites d'un contrat de vente est de nature à entraîner un préjudice pour être assuré de l'existence d'un tel préjudice, le fait qu'il soit collectif ne permettant pas d'écarter les règles habituelles en matière de réparation de tout préjudice, lequel pour être réparé doit être établi concrètement.

De plus, ainsi que le constate à juste titre la société Emme, l'article L. 421-6 du Code de la consommation, sur lequel est basée l'action de l'UFC 38, ne prévoit pas de faveur des associations habilitées à exercer une action en suppression des clauses abusives, un droit à réparation et donc l'octroi de dommages-intérêts.

L'article L. 421-7 auquel se réfère l'UFC 38 pour estimer recevable sa demande en dommages-intérêts (cet article stipulant que les associations ... peuvent intervenir ... et demander notamment l'application des mesures ... et donc des dommages-intérêts, selon l'UFC 38) consistant à lui seul la section III du Chapitre 1er du Titre II du Livre IV du Code de la consommation sous le titre " Interventions en justice " impliquant une demande initiale d'un consommateur, alors que l'article L. 421-6 constituant la section II " Action en suppression des clauses abusives " est seul applicable en l'espèce.

La cour en conséquence confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Grenoble.

Sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

La société Emme sollicite 5 000 F. La cour lui accorde 3 000 F.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi, Déboute l'Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère (UFC 38) de son appel. Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Grenoble. Condamne l'Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère (UFC 38) à payer à la société Emme la somme de trois mille francs (3 000 F) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne l'Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère (UFC 38) aux seuls dépens d'appel. Dit que maître Ramillon, avoué, pourra recouvrer directement contre la partie condamnée aux dépens, ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.