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Décisions

CA Rennes, 3e ch., 7 mai 2002, n° 02-783

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ministère Public, Le Du

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Moignard

Conseillers :

Mme Jeannesson, M. Lourdelle

Avocat :

Me Simon.

TGI Nantes, ch. corr., du 6 juill. 2000

6 juillet 2000

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le Tribunal correctionnel de Nantes par jugement contradictoire à signifier en date du 6 juillet 2000, pour :

Publicité mensongère ou de nature à induire en erreur

Cinquante-trois infractions aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes

a condamné H Pascal à 10 000 F d'amende, l'a relaxé pour l'infraction aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes ;

pour :

Publicité mensongère ou de nature à induire en erreur

Cinquante-trois infractions aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes

a condamné L Nathalie épouse H à 10 000 F d'amende dont 5 000 F avec sursis pour l'infraction de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur et à 53 amendes de 200 F chacune pour l'infraction aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes ;

et sur l'action civile:

a déclaré la constitution de partie civile de Le Du Paul recevable et régulière en la forme, déclaré solidairement L Nathalie, H Pascal entièrement responsables du préjudice subi par la partie civile et a condamné solidairement L Nathalie, H Pascal à payer à Le Du Paul la somme de 4 500 F à titre de dommages et intérêts et celle de 2 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, les a condamnés solidairement aux dépens de l'action civile.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

Monsieur H Pascal, le 14 mai 2001 à titre principal sur les dispositions pénales et civiles,

Madame L Nathalie, le 14 mai 2001 à titre principal sur les dispositions pénales et civiles,

M. le Procureur de la République, le 15 mai 2001 à titre incident.

LA PRÉVENTION:

Considérant qu'il est fait grief à Pascal H :

- d'avoir à Nantes et sur le territoire national, le 6 avril 1999, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les conditions d'utilisation en l'espèce proposant à la vente un véhicule pouvait être conduit sans permis alors que sa conduite nécessitait la possession du Code,

faits prévus et réprimés par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimés par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir à Carquefou, le 29 juin 1999, exposé à la vente 53 véhicules dont les affichages ne comportaient pas l'intégralité des mentions exigées par la réglementation (53 contraventions),

faits prévus et réprimés par les articles 5 et 6 du décret 78-993 du 4 octobre 1978,

faits prévus par les articles L. 214-2 alinéa 1, L. 214-1 du Code de la consommation et réprimés par l'article L. 214-2 alinéa 1 du Code de la consommation;

Considérant qu'il est fait grief à Nathalie L épouse H :

- d'avoir à Nantes et sur le territoire national, le 6 avril 1999, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les conditions d'utilisation en l'espèce proposant à la vente un véhicule pouvait être conduit sans permis alors que sa conduite nécessitait la possession du Code,

faits prévus et réprimés par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimés par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir à Carquefou, le 29 juin 1999, exposé à la vente 53 véhicules dont les affichages ne comportaient pas l'intégralité des mentions exigées par la réglementation (53 contraventions),

faits prévus et réprimés par les articles 5 et 6 du décret 78-993 du 4 octobre 1978,

faits prévus par les articles L. 214-2 alinéa 1, L. 214-1 du Code de la consommation et réprimés par l'article L. 214-2 alinéa 1 du Code de la consommation;

En la forme :

Les appels des prévenus et du Ministère Public sont réguliers et recevables en la forme.

Au fond :

Il résulte du dossier et des débats les éléments suivants :

A la suite de la réception en mai 1999 d'une lettre de doléances d'un particulier, Paul Le Du , la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DCCRF) intervenait auprès de l'établissement A situé dans la région nantaise, dont Pascal H était le responsable des ventes et Nathalie L la gérante.

Dans son courrier, Paul Le Du relatait qu'il avait acheté, le 17 avril 1999, un véhicule sans permis auprès dudit établissement après avoir lu une petite annonce parue dans un journal gratuit. Il indiquait qu'il s'était ensuite rendu compte que le véhicule en question devait être utilisé par un conducteur en possession du Code de la route, ce qu'il ne détenait pas, puisque le 16 mars 1999 il en avait été dépourvu par le Préfet de Loire-Atlantique, ce qui expliquait qu'il avait désiré acquérir une telle voiture.

Paul Le Du écrivait dans sa lettre qu'il s'était en outre aperçu que la facture en date du 17 avril 1999, laquelle avait été rédigée après la conclusion du contrat c'est-à-dire après la signature du bon de commande, comportait la mention " voiture avec Code ".

Il estimait donc avoir été abusé par le responsable des ventes et avoir été victime d'une publicité mensongère.

Le 29 juin 1999, Nadine Harel-Godefroy, contrôleur de la DCCRF accompagnée de deux gendarmes, se rendait dans les locaux de la société A et relevait l'existence de deux infractions.

- Concernant l'étiquetage des véhicules mis en vente:

L'inspecteur de la DCCRF constatait que cinquante-trois véhicules exposés en vue de la vente, comportaient tantôt une affiche, tantôt des inscriptions inscrites au blanc d'Espagne sur le pare-brise, ne reprenant que partiellement leurs caractéristiques.

Il observait qu'aucun des affichages de ces cinquante-trois véhicules ne reprenait la totalité des indications obligatoires prévues par la réglementation : il y manquait la marque ou le millésime ou la date de première mise en circulation ou encore le kilométrage, seul le prix de vente y figurant de façon systématique.

Interrogé sur ce point, Pascal H déclarait ignorer la réglementation concernant l'affichage des véhicules automobiles.

Entendu par la suite par la brigade de gendarmerie de Carquefou, il reconnaissait encore ces oublis et affirmait qu'il avait, avec Nathalie L, commencé à y remédier.

Egalement entendue par les gendarmes, Nathalie L avouait elle aussi avoir involontairement omis de porter toutes les indications obligatoires sur les voitures mises en vente et se justifiait en déclarant qu'ils étaient nouveaux dans la profession.

- Concernant la publicité mensongère de nature à induire en erreur:

Pascal H déclarait au contrôleur de la DCCRF que le véhicule vendu à Paul Le Du n'était pas celui qui avait fait l'objet de l'annonce parue dans " le 44 ". Selon lui, celui présenté dans l'annonce ne nécessitait aucun permis pour sa conduite alors que celui qui avait été vendu à Paul Le Du imposait d'être possesseur du Code de la route, comme cela avait été porté sur la facture délivrée à Paul Le Du.

Pascal H précisait ensuite à l'agent de la DCCRF qu'il ignorait que Paul Le Du n'était plus titulaire du permis de conduire, et ce d'autant plus que ce dernier le lui avait présenté comme pièce d'identité au moment de la réalisation des copies de pièces devant servir à la mutation de la carte grise. Cette pièce d'identité avait d'ailleurs été photocopiée et déposée au service de cartes grises, démarche effectuée par sa compagne, gérante du magasin, Nathalie L.

Pascal H signalait qu'à l'époque de cette transaction avec Paul Le Du , il vendait un autre véhicule dit sans permis, à l'origine de la rédaction de l'annonce. Il n'était cependant pas en mesure de remettre à l'agent de la DCCRF des documents tels que bons de dépôt signés par les déposants ou fonds de dossiers de chacun d'eux, permettant de justifier une telle affirmation car la responsable, Nathalie L, qui tenait les dossiers à jour était absente lors du contrôle de la DCCRF.

De surcroît, sur le registre de police où les deux véhicules devaient être inscrits, seul celui correspondant à l'achat fait par Paul Le Du était retrouvé par l'inspecteur de la DCCRF, la voiture à l'origine de la petite annonce n'y figurant pas.

Le 1er juillet 1999, Nathalie L était entendue par l'inspecteur de la DCCRF. Elle affirmait elle aussi que le véhicule de l'annonce ne correspondait pas à celui vendu à Paul Le Du. En effet, le prix de vente décrit dans le journal s'élevait à 9 900 F tandis que Paul Le Du avait payé son véhicule 5 900 F, carte grise comprise. De plus, la référence de la voiture sur le journal était " JDM " et correspondait à un véhicule sans permis alors que celle du véhicule de Paul Le Du était " TQM SIMPA " impliquant que le conducteur soit possesseur du Code de la route, ce qui avait été inscrit sur la facture datée du 17 avril 1999.

Nathalie L déclarait à l'agent de la DCCRF ne pas être en mesure de lui communiquer les documents inhérents au véhicule de l'annonce, signalant qu'elle ne les possédait pas car, d'une part, si ce véhicule n'avait pas été porté sur le registre de police, c'est qu'il n'avait jamais séjourné physiquement dans son dépôt et d'autre part, qu'aucune personne n'avait donc pu signer un bon de dépôt. Elle ajoutait qu'elle-même et Pascal H, avaient été informés de l'existence d'un véhicule " JDM " à vendre par un client dont elle ne souvenait pas des coordonnées.

Elle précisait enfin que lors de la transaction réalisée avec Paul Le Du, ce dernier lui avait confié son permis de conduire pour servir de pièce d'identité, dans le cadre de la mutation de carte grise et qu'elle avait déposé la copie de cette pièce d'identité dans le dossier destiné à la préfecture. Ceci lui avait donc laissé croire que Paul Le Du en avait l'usage.

La DCCRF se faisait communiquer le contenu des annonces libellées de façon manuscrite dans le journal " le 44 ", dont celle relative à la voiture sans permis rédigée comme suit : " vend voiture sans permis JDM Revisser - 9 900 F - ". Aucune modification n'avait été apportée par les rédacteurs du journal.

Afin de recueillir des éléments concrets sur la réalité des références du véhicule TQM SIMPA vendu à Paul Le Du, l'inspecteur de la DCCRF s'était rendu chez un concessionnaire JDM-SIMPA lequel lui avait expliqué que la marque SIMPA correspondait à la nouvelle enseigne JDM-SIMPA et, que la référence " TQM " inscrite dans la rubrique " genre " sur la carte grise signifiait que le conducteur du véhicule devait posséder le Code de la route, la référence équivalente pour un véhicule sans permis étant " QM ".

Lors de son audition par les gendarmes, Pascal H indiquait qu'il n'y avait pas dans le journal " le 44 " de rubrique " voiture sans permis mais avec Code ", toutes les voiturettes de ce type étant classées dans la catégorie des " voitures sans permis ".

Nathalie L soutenait que la transaction faite avec Paul Le Du l'avait été de bonne foi.

Devant les premiers juges, Pascal H et Nathalie L ne comparaissaient pas.

Le tribunal retenait Nathalie L dans les liens de la prévention, relaxait Pascal H du chef des infractions aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes mais entrait en voie de condamnation à son encontre pour le surplus.

A l'audience, Paul Le Du, représenté par son conseil, sollicite la confirmation de la décision déférée.

M. l'Avocat général requiert au minimum la confirmation du jugement.

Les époux H, qui ont eu connaissance de la citation, ne comparaissent pas et ne sont pas représentés.

Sur quoi :

Sur la publicité mensongère:

Il est constant que l'encart mensonger a été passé dans la rubrique " voitures sans permis " du journal " le 44 ", que le manuscrit même, établi par Pascal H, reprenait cet intitulé et que contrairement aux déclarations contraires des prévenus, il n'y a jamais eu dans le stock du garage un véhicule réellement sans permis, différent de celui cédé à Paul Le Du;ce qui est établi par l'absence de mention au livre de police et l'incapacité des appelants de justifier de leurs allégations contraires.

Il ressort de ce qui précède, qu'en agissant ainsi, Pascal H, auteur de l'annonce et Nathalie H, dirigeant de la société se sont rendus coupables des faits qui leur sont reprochés.

Compte tenu de la gravité de ces faits, de la mauvaise foi des prévenus et de leur personnalité qui fait apparaître que l'époux s'est déjà rendu coupable d'infractions, notamment économiques, il convient de les condamner chacun à une peine d'amende de 1 800 euros, assortie pour Madame [X, délinquante] primaire au moment des faits, d'un sursis à hauteur de 900 euros.

Sur les contraventions:

Il n'est pas contesté que 53 infractions se rapportant aux règles d'étiquetage des véhicules exposés dans la surface de vente ont été constatées.

La conformité de l'étiquetage incombe à Nathalie H, ce qu'elle a reconnu.

Il y a lieu de la condamner au paiement de 53 amendes de 30 euros chacune et de confirmer la relaxe de son époux pour ces faits.

Sur l'action civile:

Les dispositions civiles du jugement, non contestées devant la cour, seront confirmées sauf à les convertir au taux de la monnaie ayant cours légal à la date du présent arrêt.

Par ces motifs : LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à signifier à l'égard de H Pascal, de L Nathalie épouse H et par arrêt contradictoire à l'égard de Le Du Paul ; En la forme : Reçoit les appels, Au fond : - Sur l'action publique, Confirme le jugement entrepris sur la qualification des faits et les déclarations de culpabilité, Le réformant sur la peine, Condamne Pascal H à une peine d'amende de 1 800 euros, Prononce la contrainte par corps, Condamne Nathalie H à une peine d'amende de 1 800 euros, assortie du sursis à hauteur de 900 euros, Constate que l'avertissement prévu à l'article 132-29 du Code pénal n'a pu être donné à la prévenue absente lors du prononcé de l'arrêt, Condamne en outre Nathalie H au paiement de 53 amendes de 30 euros chacune, Prononce la contrainte par corps, La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euros dont est redevable chacun des condamnés, Le tout par application des articles susvisés, 800-1,749 et 750 du Code de procédure pénale. Sur l'action civile, Confirme le jugement et, convertissant les dommages et intérêts en euros, Condamne solidairement les prévenus à verser à Paul Le Du les sommes de 686,02 euros en réparation du préjudice subi, 304,90 euros pour les frais irrépétibles de première instance.