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Décisions

CA Poitiers, ch. corr., 27 février 1997, n° 96-00257

POITIERS

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Comptoir Automobile Rochelais (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Besset

Conseillers :

Mme Baudon, M. Barthélémy

Avocats :

Mes Beauchard, Doury

TGI Rochefort-sur-Mer, ch. corr., du 27 …

27 février 1996

Décision dont appel :

Le tribunal a :

Sur l'action publique :

- relaxé la société X de l'infraction de publicité mensongère,

- déclaré les prévenus coupables du surplus de la prévention,

- condamné Stéphane P à la peine de 10 000 F d'amende dont 5 000 F avec sursis,

- condamné la SARL X à la peine de 50 000 F d'amende,

- condamné Francis P à la peine de 15 000 F d'amende,

- ordonné aux frais de Francis P la publication par extraits de la présente décision dans le journal Sud Ouest sans que le coût de cette insertion ne dépasse la somme de 4 000 F.

Sur l'action civile :

- reçu la société Comptoir de l'automobile Rochelais (SA CAR) en sa constitution de partie civile,

- déclaré Stéphane P, la société X et Francis P solidairement responsables du préjudice subi par la société Comptoir automobile Rochelais (SA CAR),

- les a condamnés solidairement à payer à la société Comptoir automobile Rochelais (SA CAR) la somme de 1 franc à titre de dommages-intérêts et celle de 4 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,

- mis les dépens de cette constitution à la charge des prévenus.

Appel a été interjeté par :

- le prévenu, M. P Francis, le 4 mars 1996, des dispositions pénales et civiles,

- le prévenu, M. P Stéphane, le 4 mars 1996, des dispositions pénales et civiles,

- la SARL X prévenue, le 4 mars 1996, des dispositions pénales et civiles,

- M. le Procureur de la République, le 4 mars 1996,

Décision :

LA COUR, après en avoir délibéré,

Vu le jugement entrepris, dont le dispositif est rappelé ci-dessus,

Vu les appels susvisés, réguliers en la forme,

Attendu que Stéphane P, la SARL X et Francis P sont prévenus d'avoir :

- à Echillas, entre le 28 juin 1994 et le 16 février 1995, utilisé une marque en l'espèce les marque " VAG, Audi, et Volkswagen " en violation des droits conférés par son enregistrement et des interdictions qui découlent de celui-ci,

Fait prévu et réprimé par les article L. 716-9 et L. 716-11-2 du Code de la propriété intellectuelle,

- sur le département de la Charente-Maritime, entre le 27 janvier 1995 et le 3 février 1995, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur la nature exacte de son activité en matière de vente de véhicules neufs, en affirmant notamment dans le cadre de publicités offrant à la vente des véhicules neufs de diverses marques " Service après-vente assuré ", alors qu'un tel service ne pouvait être assuré qu'au risque pour le consommateur de perdre le cas échéant ses droits à la garantie contractuelle du constructeur d'un bien ou d'un service,

Fait prévu et réprimé par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1, L. 213-1 et L. 121- 4 du Code de la consommation ;

Faits et procédure :

La société Y, dont M. Francis P était le PDG était concessionnaire exclusif Volkswagen Audi sur les secteurs géographiques de Rochefort, Marennes et l'Ile-d'Oléron jusqu'au 14 juin 1993, date de retrait de la concession. Le 14 avril 1994, la société CAR, dont le PDG était M. Mathieux, déjà concessionnaire exclusif Volkswagen Audi à La Rochelle, s'est vue confier la concession de Rochefort, Marennes et l'Ile-d'Oléron, anciennement attribuée à la société Y. Le 1er juin 1994, la SARL X a été créée, M. Stéphane P en étant le gérant et son père, M. Francis P, directeur commercial. Le 21 octobre 1994, la société Y a été mise en liquidation judiciaire.

Le 13 février 1995, M. Mathieux a saisi la Direction de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes, estimant être victime des agissements de la SARL X. Après enquête, M. Stéphane P, M. Francis P et la SARL X ont été cités devant le Tribunal correctionnel de Rochefort-sur-Mer qui a rendu le 27 février 1996 la décision dont le dispositif est rappelé précédemment et qui est soumise à l'appréciation de la cour.

M. Stéphane P, M. Francis P, et la SARL X demandent à la cour de réformer la décision déférée, de les relaxer du chef des deux infractions, subsidiairement de réduire les peines prononcées et de déclarer la constitution de partie civile de la société CAR irrecevable, la juridiction commerciale étant déjà saisie.

Le Ministère public a conclu à la confirmation de la décision en toutes ses dispositions.

La société CAR a demandé à la cour de confirmer la décision des premiers juges et de lui allouer en outre une indemnité de 5 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Motifs de la décision :

Sur l'action publique :

Il résulte des éléments du dossier et en particulier du procès-verbal en date du 14 juin 1994 dressé par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes :

- que des bons de commandes propres au réseau des concessionnaires Volkswagen Audi ont été utilisés pour la vente de véhicules neufs de la marque (Golf TDI, vendue à M. Bon suivant bon de commande du 19 septembre 1994, Golf Diesel vendue à M. Gricourt suivant bon de commande du 10 octobre 1994),

- que du matériel, tel qu'un cachet commercial où figurent à la fois les logos des marques VAG Audi, Volkswagen et le numéro d'identification de l'atelier attribué par VAG France, a été utilisé sur des carnets d'entretien comportant les mêmes logos (véhicule Volkswagen immatriculé 586 TA 17, visites des 3 septembre 1994, 31 octobre 1994 et 19 décembre 1994 ; véhicule immatriculé 8802 TX 17, visites des 26 octobre 1993, 25 février 1994 et 17 août 1994 ; véhicule immatriculé 5852 XC 17, visites des 17 septembre 1993, 15 décembre 1993, 15 avril 1994 et 12 juillet 1994 ; véhicule immatriculé 5527 TZ 17, visites des 21 octobre 1993, 18 février 1994 et 13 juillet 1994 ; véhicule immatriculé 75 VC 17, visites des 16 avril 1994 et 27 août 1994) ;

- que des signes d'identification propres au réseau des concessionnaires tels que des autocollants rectangulaires ont été apposés et maintenus sur la porte d'accès au hall d'entrée de la SARL X.

Or, il est établi qu'après le 14 juin 1993, la société Y n'avait plus la qualité de concessionnaire exclusif Volkswagen Audi et que la SARL X n'a jamais été concessionnaire. Dès lors l'utilisation de documents, de matériel, de signes d'identification propres au réseau des concessionnaires et agents des marques Volkswagen Audi, comportant à ce titre les logos des marque VAG Audi Volkswagen, qui ont fait l'objet d'un dépôt et d'un enregistrement auprès de l'Institut National de la Propriété Industrielle, constitue bien l'infraction reprochée aux prévenus. Cette infraction doit être retenue à l'encontre de la SARL X, conformément aux dispositions de l'article L. 716-11-2 du Code de la propriété intellectuelle, M. Stéphane P, gérant de la SARL, et de M. Francis P, directeur commercial de la SARL et ancien PDG de la société Y, concessionnaire des marques Volkswagen Audi, jusqu'au 13 juin 1993.

La SARL X a également fait paraître quatre publicités dans les journaux locaux :

- le 31 janvier 1995 : Gazette de Rochefort,

- le 3 février 1995 : Charentais Annonces,

- le 10 janvier 1995 : Gazette de Rochefort,

- le 27 janvier 1995 : Charentais Annonces,

La cour relève :

- que ces annonces ont paru avec la mention " Garage Y ", M. Francis P reconnaissait que c'est sous cette dénomination qu'était le plus connu le garage par la clientèle et ce alors qu'il était concessionnaire Volkswagen Audi, ce qui n'était plus le cas lors de la parution de la publicité,

- que deux de ces publicités proposent l'Audi A4 comme étant disponible alors qu'un délai de 2 mois et demi est nécessaire pour la version Audi A4 Diesel,

- que deux autres publicités offrent à la vente des véhicules neufs de diverses marques tout en assurant la garantie usine et le service après-vente. Or, la mise en œuvre éventuelle de cette garantie suppose que les visites d'entretien préconisées par le constructeur aient été exécutées par un atelier du réseau de ses concessionnaires ou agents, ce qui ne pouvait être le cas, la SARL X n'étant pas concessionnaire Volkswagen Audi, ni d'autres marques d'ailleurs,

- que le garage P (en réalité la SARL X) apparaît comme vendeur de véhicules neufs, alors qu'il ne pouvait intervenir qu'en qualité de mandataire, celui-ci accomplissant une prestation de service et non une activité de négoce. La mention " provenance CEE " figurant sur les publicités étant à cet égard insuffisante pour renseigner clairement l'acheteur éventuel.

Il en résulte que le consommateur a été induit en erreur par ces publicités et que cette infraction doit être retenue à l'encontre de Stéphane P, gérant de droit de la SARL X et de M. Francis P, véritable responsable de la politique commerciale.Par contre, comme l'ont relevé les premiers juges, cette infraction ne peut être retenue à l'égard de la SARL X, en l'absence d'incrimination concernant les personnes morales.

Les peines prononcées par les premiers juges apparaissent adaptées et il y a lieu de confirmer leur décision.

Sur l'action civile :

La société CAR, victime des agissements des consorts P et de la SARL X, a engagé une action commerciale devant le Tribunal de commerce de Marennes qui a donné lieu à un jugement du 7 juillet 1995, frappé d'appel à ce jour. Dès lors la juridiction pénale doit se déclarer incompétente pour statuer sur la demande de dommages et intérêts formée par la société CAR, partie civile, à l'encontre des prévenus, en raison de l'instance commerciale en cours ayant le même objet. Il y a lieu de débouter la société CAR de sa demande au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. La décision des premiers juges doit être réformée.

Par contre, elle doit être confirmée en ce qu'elle a débouté M. Suzarte, la motivation des premiers juges étant reprises par la cour.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, sur appel en matière correctionnelle et en dernier ressort. Reçoit les appels, réguliers en la forme. Sur l'action publique : Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions et dit que la publication du présent arrêt sera ordonnée dans les conditions fixées par les premiers juges, Le président a donné lecture à M. Stéphane P de l'avis prévu à l'article 132-29 du Code pénal, Le tout en application des articles susvisés. Sur l'action civile : Confirme la décision déférée en ce qu'elle a déboutée M. Suzarte, Réforme pour le surplus et se déclare incompétent sur la demande de dommages et intérêts formée par la société Comptoir automobile Rochelais, la juridiction commerciale étant déjà saisie, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.