CA Versailles, 9e ch., 27 mars 2002, n° 01-02265
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Ract-Madoux
Avocat général :
M. Renaut
Conseillers :
Mlle Delafollie, M. Boilevin
Avocats :
Mes Coblence, Vaisse, Caballero.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE:
LE JUGEMENT:
Par jugement contradictoire en date du 22 septembre 1998, le Tribunal correctionnel de Paris a:
- rejeté l'exception de nullité,
- rejeté la demande tendant à voir déclarer l'action publique éteinte par amnistie,
- dit n'y avoir lieu à question préjudicielle en interprétation devant la Cour de justice des Communautés européennes,
- a requalifié les faits de publicité indirecte ou clandestine en faveur du tabac, en l'espèce des vêtements DS en complicité de publicité indirecte ou clandestine en faveur du tabac ou de ses produits, courant 1993 , à Paris, infraction prévue par les articles L. 3512-2 al.1, L. 3511- 3, L. 3511-4 al.1, L. 3511-1 du Code de la santé publique et réprimée par l'article L. 3512-2 al.1, al.3 du Code de la santé publique
- a déclaré les prévenus coupables de ces faits,
- a condamné L Jacques et V Klaus chacun à une amende délictuelle de 500 000 F, M Patrick à une amende de 400 000 F, C Gérard et N Vincent à une amende de 100 000 F,
- a débouté MM. V, L, M de leurs demandes au titre de l'article 472 du Code de procédure pénale,
- a reçu le Comité National contre le Tabagisme en sa constitution de partie civile,
- a condamné solidairement MM. V, L, M à lui payer la somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts et chacun celle de 5 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
- a débouté le Comité National contre le Tabagisme du surplus de ses demandes;
- a mis hors de cause la SA AF France citée comme civilement responsable;
LES APPELS:
Appel a été interjeté par:
Monsieur V Klaus et le Ministère public, le 1er octobre 1998
Monsieur M Patrick et le Ministère public, le 1er octobre 1998
Monsieur L Jacques et le Ministère public, le 1er octobre 1998
Monsieur C Gérard et le Ministère public, le 2 octobre 1998
Monsieur N Vincent et le Ministère public, le 2 octobre 1998
Comite National Contre le Tabagisme, le 6 octobre 1998
ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS
Par arrêt en date du 11juin 1999, la Cour d'appel de Paris (13e chambre) a:
- reçu les appels,
- constaté que l'ensemble de la procédure est entachée de nullité,
- a infirmé le jugement entrepris et a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite,
POURVOI
Pourvoi a été interjeté par le Comité National contre le Tabagisme.
ARRET DE LA COUR DE cassation
par arrêt en date du 12 décembre 2000, la Cour de cassation a:
- cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Paris en date du 11 juin 1999, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
- a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de Versailles à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil,
- a ordonné l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la Cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé,
DÉCISION
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant:
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE:
Le 16 août 1993, le Comité National contre le Tabagisme (CNCT) a déposé plainte avec constitution de partie civile contre X, pour publicité indirecte en faveur du tabac. II exposait que depuis mars 1993, de nombreuses publicités avaient été diffusées dans la presse écrite en faveur de la marque de vêtements DS, par la société de droit belge SI NV qui commercialisait en France les vêtements, par l'intermédiaire de sa filiale en cours de constitution, la SA MS France. La publicité DS représentait la marque D avec la même calligraphie et les mêmes couleurs que la marque de cigarettes, le mot "D" étant écrit en lettres pleines et le mot "S" en lettres creuses et moins apparentes.
L'information alors ouverte a révélé que le droit d'utiliser la marque D appartenait à la HB INC (HBI) et que la commercialisation des cigarettes en France était assurée par la société de droit allemand RJ AG GMBH, dont la société française AF France était le conseil pour la conception et l'exécution des publicités. La société MS France avait, quant à elle, été créée le 23 avril 1993 et inscrite au registre du commerce de Cambrai le 25 mai 1993. M. Martin B, Président directeur général de cette société, a indiqué le 6 avril 1994 que la marque DS n'avait pas été déposée à l'Institut national de la propriété industrielle mais que sa société, sous-filiale de la société SI, avait obtenu l'autorisation d'utiliser la marque D de la société HBI, pour la commercialisation de vêtements masculins. L'enquête a établi en outre que les vêtements DS avaient été créés en septembre 1992 et commercialisés à partir de janvier 1993 et que la campagne publicitaire avait été organisée par UM et par l'agence X.
Le 2 février 1995, au cours d'une perquisition effectuée aux sièges des sociétés AF France et HBI, divers documents de stratégie commerciale et publicitaire ont été découverts et ont permis de mettre en cause M. Klaus V, Président directeur général de la SA AF France, mis en examen le 25 mars 1996, M. Jacques L, Directeur général de la même société, mis en examen le 8 novembre 1995, M. Patrick M, Directeur marketing de la société HBI, mis en examen le 25 mars 1996, M. Gérard C, Président de la société UM, mis en examen le 25 mars 1996 et M. Vincent N, Président de l'agence X, mis en examen le 26 avril 1996.
Par ordonnance du 11 mars 1997, le juge d'instruction a renvoyé ces cinq personnes devant le tribunal correctionnel pour avoir, à Paris et sur le territoire national, effectué une publicité indirecte en faveur du tabac, en l'espèce une publicité pour les vêtements DS. Par jugement du 16 décembre 1997, le Tribunal correctionnel de Paris a renvoyé la procédure au Ministère public afin qu'il saisisse le juge d'instruction pour régulariser l'ordonnance, au motif que cette dernière, ne précisant pas la date de commission des faits, n'était pas conforme aux dispositions de l'article 184 du Code de procédure pénale.
Par une nouvelle ordonnance du 15 janvier 1998, le juge d'instruction a renvoyé les mêmes prévenus devant le Tribunal correctionnel de Paris, pour avoir, à Paris et sur le territoire national, courant 1993 et depuis temps non prescrit, effectué une publicité indirecte en faveur du tabac, en l'espèce une publicité pour des vêtements DS, faits prévus aux articles L. 355-24, L. 355-25, L. 355-26 et L. 355-31 du Code de la santé publique.
La société AF France a été assignée comme civilement responsable de MM. V, L, et M.
Par jugement du 22 septembre 1998, le Tribunal correctionnel de Paris:
- a rejeté l'exception de nullité de l'ordonnance de renvoi du 15 janvier 1998 soulevée par MM. C et N;
- a requalifié la prévention à l'égard des cinq prévenus en complicité de publicité en faveur du tabac;
- a déclaré MM. L Alain, V Klaus, M Patrick, C Gérard et N Vincent coupables des faits ainsi requalifiés et a condamné M. L à une amende de 500 000 F, M. V à une amende de 500 000 F, M. M à une amende de 400 000 F, M. C à une amende de 100 000 F et M. N à une amende de 100 000 F;
- a mis hors de cause la SA AF France;
- sur l'action civile, a déclaré recevable la constitution de partie civile du Comité National contre le Tabagisme et a condamné solidairement M. L, M. V et M. M à lui verser la somme de 500 000 F de dommages et intérêts;
- a condamné MM. V, L et M à verser chacun au CNCT la somme de 5 000 F au titre de l'article 475-1 du CPP.
Le premier octobre 1998, MM. V, L, M et le Ministère public ont interjeté appel des dispositions pénales et civiles de ce jugement. MM. N et C, et le CNCT, partie civile, ont également interjeté appel les 2 et 6 octobre 1998.
Par arrêt du 11 juin 1999, la Cour d'appel de Paris, infirmant la décision du tribunal, a constaté que l'ensemble de la procédure était entachée de nullité et a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite, aux motifs que l'ordonnance rectificative du juge d'instruction était nulle dès lors que le juge d'instruction n'avait pas été saisi au préalable par le Ministère public et que l'ordonnance n'avait pas été signifiée aux parties.
Le Comité National contre le Tabagisme a formé un pourvoi contre l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris.
Par arrêt du 12 décembre 2000, la chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, au motif que l'article 385 du Code de procédure pénale et le principe selon lequel une cour d'appel ne peut relever d'office une cause de nullité de l'ordonnance de renvoi avaient été méconnus et a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de Versailles.
Cette cassation intervenue sur le seul pourvoi de la partie civile ne peut remettre en cause la décision de relaxe prononcée par la Cour d'appel de Paris, qui est devenue définitive. Il appartiendra dès lors à la cour de renvoi de rechercher si les éléments constitutifs de l'infraction reprochée aux prévenus sont réunis, au regard des intérêts civils.
Les conseils des prévenus ont soulevés, in limine litis, plusieurs exceptions.
Sur la demande présentée par M. C de suppression, dans les conclusions de la partie civile, d'un passage faisant référence à une condamnation amnistiée:
Le conseil de M. C a demandé la suppression, dans les conclusions de la partie civile, du passage relatif au rappel d'une condamnation à 50 000 F d'amende, pour publicité en faveur du tabac, prononcée par la Cour d'appel de Paris le 15 septembre 1998 à l'encontre de ce dernier pour des faits commis courant mars 1993, qui serait amnistiée par la loi du 3 août 1995.
Le conseil de la partie civile s'est opposée à cette suppression.
MOTIFS DE LA COUR:
S'il est vrai que l'article 7 de la loi d'amnistie du 3 août 1995 dispose que sont amnistiées les infractions commises avant le 18 mai 1995 qui sont punies d'une peine d'amende, il résulte néanmoins de l'article 17 alinéa 3 de la même loi, qu'en cas de condamnation à une amende supérieure à 750 euros, l'amnistie ne sera acquise qu'après le paiement de cette amende.
Or, le prévenu ne rapporte pas la preuve du paiement de l'amende prononcée à son encontre, le 15 septembre 1998 et cette condamnation figure toujours sur le bulletin n°1 de son casier judiciaire, délivré le 21 janvier 2002. La cour n'ayant pas la preuve de l'amnistie de cette condamnation, il convient de rejeter la demande de suppression du passage litigieux des conclusions de la partie civile.
SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITE:
Sur la nullité du pourvoi formé par la CNCT et de la procédure de cassation à l'égard de MM. C et N:
Le conseil de MM. C et N demande à la cour de constater, à l'égard de ses clients, la nullité de la procédure qui s'est déroulée devant la Cour de cassation. En effet, le CNCT n'a pas notifié son pourvoi à MM. C et N, alors que l'article 578 du Code de procédure pénale oblige le demandeur au pourvoi à notifier son recours au Ministère public et aux parties, par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de 3 jours. En outre, aucun des mémoires en cassation n'ayant été signifié à MM. N et C qui n'ont pas eu connaissance de l'existence même du pourvoi en cassation, la procédure de cassation se serait déroulée en violation des droits de la défense, notamment du principe du contradictoire et du droit à un procès équitable, garanti par l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme.
La partie civile demande à la cour de rejeter cette exception de nullité présentée par MM. C et N, estimant qu'elle n'avait pas à leur notifier le pourvoi, dès lors qu'elle ne s'est jamais constituée partie civile à leur encontre, comme le démontrent ses conclusions déposées en première instance.
MOTIFS DE LA COUR:
S'il est constant que la notification du pourvoi prévue par l'article 578 du CPP n'a pas été effectuée par la partie civile, l'article 579 du CPP dispose que "la partie qui n'a pas reçu la notification prévue à l'article 578 a le droit de former opposition à l'arrêt rendu par la Cour de cassation, par décision au greffe de la juridiction qui a rendu la décision, dans les cinq jours de la signification prévue à l'article 614". Or, il résulte des pièces du dossier que l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation a été signifié à M. C le 28 mars 2001, et à M. N le 20 juin 2001. Il leur appartenait, dès lors, de former opposition à cette décision et ils ne sont plus recevables aujourd'hui à invoquer une méconnaissance des droits de la défense.
Il convient toutefois de donner acte à la partie civile de ce qu'elle ne présente aucune demande à leur encontre et il ne sera dès lors pas nécessaire d'examiner les autres moyens de défense de ces deux prévenus.
Sur la nullité de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel :
Le conseil de MM. L, V et M a soulevé la nullité de l'ordonnance de renvoi du 15 janvier 1998 (rectifiant celle du 11 mars 1997, qui ne comportait pas la date de la commission des faits) au motif qu'elle ne respecterait pas les prescriptions de l'article 184 du CPP, ni celles de l'article 6§3 de la Convention européenne des Droits de l'Homme. L'article 184 du CPP dispose en effet que, outre les noms, prénoms, date et lieu de naissance de la personne mise en examen, l'ordonnance de règlement rendue par le juge d'instruction doit indiquer " la qualification légale du fait imputé à la personne mise en examen et, de façon précise, les motifs pour lesquels il existe ou non contre elle des charges suffisantes". L'article 6§3 de la CEDH dispose, quant à lui, que "tout accusé a droit à être informé, dans le plus court délai dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ". Selon la défense, l'ordonnance du 15 janvier 1998 n'indiquerait pas de manière suffisamment précise la date de la commission des faits, et ne contiendrait aucune motivation de la décision de renvoi devant le tribunal correctionnel, faute pour le juge d'instruction et le Ministère public d'établir en quoi les faits reprochés constitueraient une publicité indirecte et pourquoi ils seraient imputables aux personnes mises en examen, ce qui ne leur permettait pas de connaître de manière détaillée l'accusation portée contre eux. Enfin, les prévenus ont soulevé pour la première fois devant la Cour d'appel de Versailles la violation de l'article 385 alinéa 2 in fine du CPP, relevée d'office par la Cour d'appel de Paris aux motifs qu'aucune pièce de la procédure ne justifierait de la saisine du juge d'instruction par le Ministère public et que cette ordonnance qui n'a pas été notifiée aux parties, contrairement aux exigences de l'article 183 alinéa 1 du CPP, ne serait pas devenue définitive.
Une telle nullité relevant de l'ordre public procédural déterminant les conditions d'existence de l'action publique, il conviendrait, selon la défense, de renvoyer la procédure au Ministère public pour lui permettre de saisir le juge d'instruction.
Le conseil du CNCT et le Ministère public ont conclu au rejet de ces exceptions de nullité.
MOTIFS DE LA COUR:
Sur la nullité tirée de la violation de l'article 184 du CPP et de l'absence de précision de la date de commission des faits, il convient de relever que l'ordonnance indique que les faits reprochés aux prévenus ont été commis "courant 1993 et depuis temps non prescrit"; les campagnes publicitaires reprochées aux prévenus s'étant déroulées sur une durée de plusieurs mois à compter de mars 1993, la mention "courant 1993" apparaît parfaitement appropriée.
Sur la nullité tirée de l'imprécision des charges de l'accusation dans l'ordonnance de renvoi et de la prétendue violation de l'article 6§3 de la CEDH, il n'était pas nécessaire que cet acte contienne une motivation détaillée dès lors que le juge d'instruction a rendu une ordonnance de renvoi conforme au réquisitoire définitif motivé et s'y référant expressément et que dans ce dernier étaient analysées, de manière suffisante, les charges retenues à l'encontre des prévenus;
Sur le moyen de nullité tiré de la violation de l'article 385 alinéa 2 du CPP, il convient de relever que les prévenus soulèvent pour la première fois ce moyen devant la Cour d'appel de Versailles. Or, il résulte des termes de l'article 385 dernier alinéa du CPP qu'une telle nullité doit être soulevée avant toute défense au fond. Les prévenus seront donc déclarés irrecevables à soulever cette nullité pour la première fois en cause d'appel.
Sur la nullité tirée de la violation de l'article 183 alinéa I du CPP, il ressort de la mention figurant sur l'ordonnance de renvoi elle-même que cette dernière a bien été notifiée aux personnes mises en examen et à leurs avocats, ainsi qu'à la partie civile, par lettre recommandée du 15 janvier 1998.
Il y a lieu dès lors, de rejeter toutes les exceptions de nullité de la procédure.
AU FOND:
Sur la compatibilité de la législation française de lutte contre le tabagisme avec le droit communautaire :
Le conseil de MM. V, L, et M soutient que les dispositions de la loi française réglementant la publicité indirecte en faveur du tabac ou des produits du tabac, telle qu'interprétée par la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation sont incompatibles avec les articles 30 (devenu 28) et 59 (devenu 49) du traité de Rome garantissant la libre circulation des marchandises et la libre prestation des services. En effet, selon la jurisprudence de la CJCE, une interdiction de toute forme de publicité pour les produits DS constituerait une grave restriction à la libre circulation des marchandises et à la libre prestation des services et priverait les opérateurs économiques d'un moyen essentiel d'accès au marché.
MOTIFS DE LA COUR:
Comme le relèvent la partie civile et le Ministère public, il convient de constater que les dispositions de la loi Evin du 10 janvier 1991 relative à la publicité indirecte en faveur du tabac s'appliquent aussi bien aux produits nationaux qu'à ceux qui proviennent d'autres Etats membres et ne constituent donc pas une mesure d'effet équivalent au sens de l'article 28 du traité instituant la Communauté européenne. En outre, ces restrictions sont justifiées par le souci légitime de l'Etat français de protéger la santé publique,au sens de l'article 36, devenu 30 du dit traité et peuvent être considérées comme justifiées et proportionnées à cet objectif, dès lors que d'une part, il est démontré par les statistiques produites que depuis 1991 (date d'entrée en vigueur de la loi Evin) la consommation de tabac en France n'a cessé de décroître alors qu'elle augmentait régulièrement jusqu'à cette date et d'autre part que plusieurs études ont attesté de l'impact du budget publicitaire d'une marque de tabac sur la consommation des jeunes. Il convient dès lors de considérer que la législation française est compatible avec le droit communautaire et de rejeter la demande des prévenus de voir poser une question préjudicielle à la CJCE, sur le fondement de l'article 177 devenu 234 du traité de Rome.
Sur la compatibilité de la loi française avec la Convention européenne des Droits de l'Homme :
Le Conseil de MM. V, L et M soutient que la loi Evin serait contraire à l'article 7§1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, relatif au principe de la légalité des délits et des peines, à l'article 10 relatif à la liberté d'expression et enfin à l'article 1 du protocole I de la CEDH, relatif au droit de propriété. L'interprétation restrictive donnée par la Cour de cassation de l'article L. 355-26 du Code de la santé publique, rendrait la loi imprécise et surtout imprévisible dans son application, ce qui est contraire à l'article 7 de la CEDH; le droit de propriété et la liberté d'expression commerciale seraient vidés de toute substance si le titulaire d'une marque était empêché de l'exploiter en commercialisant des produits n'ayant aucun lien avec le tabac, alors au contraire que cette diversification devrait lui permettre de compenser les pertes causées par la diminution de la consommation de tabac résultant de l'interdiction édictée par la loi Evin.
MOTIFS DE LA COUR:
Il résulte de l'article 10 de la CEDH et de l'article 1er du protocole I additionnel à la CEDH que l'exercice de ces droits et libertés peut faire l'objet de restrictions prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique, si ces restrictions sont proportionnées avec l'intérêt public les justifiant.En l'espèce, ainsi que cela a été ci-dessus rappelé, le souci de l'Etat français de protéger la santé publique, qui constitue un intérêt général légitime, justifie les restrictions apportées à la liberté d'association et au droit de propriété des marques, ces restrictions étant par ailleurs proportionnées avec l'objectif poursuivi.
En outre, la rédaction de l'article L. 355-26 ( devenu article L. 3511-4) du Code de la santé publique, qui définit en son alinéa 1 la notion de publicité indirecte en faveur du tabac et dispose en son alinéa 2 que l'interdiction de la publicité indirecte n'est pas applicables "à la propagande ou à la publicité en faveur d'un produit autre que le tabac ou un produit du tabac qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement et financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique, importe ou commercialise du tabac ou un produit du tabac" est suffisamment claire et précise pour permettre aux prévenus de connaître les exigences requises par la loi pour déroger à l'interdiction de toute publicité indirecte en faveur du tabac et de prévoir les conséquences des comportements qu'ils ont adoptés. Il convient dès lors de considérer que les articles L. 355-24 et suivants du Code de la santé publique ne constituent pas une violation des droits garantis par la Convention européenne des Droits de l'Homme.
Sur la réunion des éléments constitutifs du délit de publicité indirecte en faveur du tabac :
La Cour de cassation ayant cassé l'arrêt de la Cour d'appel de Paris sur le seul pourvoi de la partie civile, la relaxe des cinq prévenus est définitive. Il appartient seulement à la cour de renvoi, statuant sur les intérêts civils, de rechercher si les différents éléments constitutifs de l'infraction reprochée aux prévenus sont caractérisés et s'il convient de faire droit à la demande de la partie civile.
Le conseil de MM. V, L et M soutient qu'il faut admettre la licéité des politiques et campagnes de diversification des produits du tabac et relève une certaine discrimination de la part du CNCT et du Ministère public qui tolèrent par exemple des campagnes publicitaires en faveur de la marque de vêtements Marlboro Classic.
Il a précisé que les vêtements D étaient commercialisés en France depuis 1983, que la société HBI était propriétaire de la marque notoire D aux fins de diversification pour des produits autres que le tabac et que cette société, comme la société AG GMBH, (c'est-à-dire la société allemande de la branche de tabac qui fabriquait les cigarettes et les vendaient à la Y, aidée pour leur commercialisation en France par la société AF France) était une filiale de la société holding RJR N.
Il considère que les éléments matériel et moral de l'infraction ne sont pas constitués.
Au regard de l'élément matériel, les faits reprochés rentreraient en effet exactement dans le cadre de la dérogation prévue à l'article L. 355-26 du Code de la santé publique, qui prévoit que la publicité en faveur d'un produit autre que le tabac qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement et financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique commercialise du tabac ou un produit du tabac est autorisée. En l'espèce, la société HBI, propriétaire de la marque D aux fins de diversification et la société AF qui fabriquait les cigarettes de marque D et les vendait à la Y n'auraient entre elles aucun lien juridique ou financier.
Sur l'élément moral, l'intention des dirigeants de AF France de promouvoir leur produit (les cigarettes) ne pourrait être prise en considération, puisque seule l'intention de l'auteur principal, c'est-à-dire de l'annonceur, serait à retenir; en l'espèce l'intention chez les licenciés, c'est-à-dire les représentants de la société SI et de la société MS de promouvoir le tabac n'existerait pas, leur intérêt étant que la marque DS évoque non pas des cigarettes mais des vêtements. Il sollicite donc l'infirmation du jugement entrepris en ce que les publicités incriminées en faveur des vêtements DS ne contreviennent pas aux dispositions de la loi Evin,
La partie civile, le CNCT, a estimé quant à elle que l'infraction est constituée, le but de cette infraction étant de censurer toute forme de publicité qui rappellerait le tabac.
Le Ministère public a également estimé que les éléments constitutifs de l'infraction étaient réunis.
MOTIFS DE LA COUR:
Sur I'illicéité de la campagne publicitaire:
L'article L. 355-25 (devenu L. 3511-3) du Code de la santé publique dispose que "Toute propagande ou publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac ou des produits du tabac, ainsi que toute distribution gratuite sont interdites". L'article L. 355-26 alinéa 1 énonce que " est considéré comme propagande ou publicité indirecte toute propagande ou publicité en faveur d'un organisme, d'un service, d'une activité, d'un produit ou d'un article autre que le tabac lorsque, par son graphisme, sa présentation, l'utilisation d'une marque, d'un emblème publicitaire ou de tout autre signe distinctif, elle rappelle le tabac ou un produit du tabac".
En l'espèce, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, au cours de la campagne publicitaire diffusée en France en mars 1993 pour les vêtements DS, le terme D était calligraphié de façon identique à la marque de cigarettes mondialement connue, avec les mêmes couleurs, alors que le terme S, écrit en lettres creuses, n'était que peu apparent. Cette publicité rappelle donc un produit du tabac et constitue dès lors une publicité indirecte en faveur du tabac, définie à l'article L. 355-26 alinéa 1 du Code de la santé publique.
Sur la dérogation de l'article L. 355-26 alinéa 2 du Code de la santé publique:
L'article L. 355-26 alinéa 2 qui prévoit une dérogation à l'interdiction ainsi instaurée, dispose que "Toutefois ces dispositions ne sont pas applicables à la propagande ou à la publicité en faveur d'un produit autre que le tabac qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement ou financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique, importe ou commercialise du tabac ou un produit du tabac. La création de tout lien juridique ou financier entre ces entreprises rend caduque cette dérogation".
Il résulte de ce texte que la dérogation prévue est exclue pour les produits commercialisés, même avant le premier janvier 1990, par des entreprises qui, sans constituer juridiquement et financièrement une entité avec celle qui fabrique, importe ou commercialise du tabac ou un produit dérivé du tabac, se rattachent à cette dernière par un lien juridique ou financier, fût-il indirect ou occasionnel.
En l'espèce, il est établi que la marque D appartient à la société HBI, qui est, au même titre que la société RJ AF France, une filiale du groupe RJR N, société holding du groupe AF qui fabrique et commercialise des cigarettes et que l'exploitation de cette marque par la société MS France, filiale de la société SI résulte de la conclusion d'un contrat de licence de marque entre cette dernière et la société HBI,à partir d'octobre 1992, autorisant la commercialisation de ces produits en France. Le lien né d'un contrat de licence de marque, quelle que soit la date de création de ce lien, est de nature à faire obstacle à l'application de la dérogation prévue par l'article L. 355-26 alinéa 2 du Code de la santé publique.
La campagne de publicité pour les vêtements DS constitue donc une publicité indirecte en faveur du tabac illicite, compte tenu des liens unissant l'entreprise exploitante des vêtements et l'entreprise commercialisant les cigarettes de même marque.
Sur l'imputabilité des faits aux prévenus :
Il convient de donner acte à la partie civile de ce qu'elle ne formule aucune demande à l'encontre de MM. N et C, respectivement responsables de l'agence X chargée de concevoir et d'organiser la campagne publicitaire, et de la société UM, chargée d'acheter les espaces publicitaires; ils seront donc déclarés hors de cause.
Sur les faits imputés à MM. V, L ET M
Arguments des parties:
Les prévenus soutiennent qu'à supposer que l'infraction soit constituée, elle ne leur est pas imputable, dès lors que ces derniers ne peuvent se voir reprocher aucun agissement permettant de les rendre responsables pénalement de l'infraction prétendument constituée.
M V, à l'époque des faits Président directeur général de la société AF France, conseil pour la conception et l'exécution des publicités en faveur des cigarettes commercialisées en France, ne serait jamais intervenu dans la préparation ou la diffusion des publicités qui ont été commandées par les licenciés de la société HBI. Sa responsabilité pénale ne devrait donc pas être engagée.
M. L, au moment des faits Directeur général de cette même société, ne saurait se voir reprocher les publicités litigieuses, n'ayant aucun rôle au niveau décisionnaire, au regard des activités de diversification de HBI.
Quant à M. M, Directeur du bureau de la représentation française de HBI entre 1992 et 1994, il n'aurait pas le pouvoir de représenter la société HBI, et ne saurait donc répondre pénalement des agissements de cette société.
En outre, le conseil de MM. V, L et M a souligné que la qualification de complicité retenue par le tribunal ne pourrait pas non plus être reprochée aux prévenus, dès lors que ceux-ci n'auraient participé ni à l'élaboration, ni à la diffusion de la publicité incriminée et que le tribunal n'aurait caractérisé à leur encontre, ni instigation, ni aide, ni assistance à la réalisation des publicités litigieuses.
Le CNCT soutient, quant à lui, que les documents découverts lors d'une perquisition opérée par le juge d'instruction le 2 février 1995, et notamment le plan stratégique réalisé par la société HBI visant à prévoir des investissements publicitaires massifs en faveur de la marque " DS " caractérisent l'assistance, l'aide apportée par les prévenus à la diffusion des publicités litigieuses.
MOTIFS DE LA COUR:
II résulte des divers documents saisis lors de la perquisition opérée le 2 février 1995 dans les bureaux de M. L, de la responsable de la comptabilité de la SA AF France et de l'assistante de M. M, que le HBI Strategic Plan 1993-1997 a été expédié par HBI Belgique à M. M, avec copie à M. L, sur laquelle il était indiqué que ce plan avait été revu "avec M. K.D. V qui est d'accord avec la ligne générale et les stratégies-clés. Je vous serais reconnaissante d'examiner le plan et de me faire savoir s'il vous pose quelques problèmes, ou si vous avez des commentaires... Je vous prie de faire des copies sur place pour le distribuer comme il le convient". II est dès lors établi que MM. V qui a donné son accord, et M. L destinataire du document, dirigeants de la SA AF France à l'époque des faits, étaient en relations étroites avec M. M au sujet de l'élaboration des plans stratégiques pour les activités de diversification de marques de HBI.
Ce document donnait pour mission à HBI " d'identifier, développer et prendre en charge les programmes de diversifications de marque qui augmenteront la perception et l'effet d'image des principales marques internationales RJRN " et prévoyait pour la ligne de vêtements D, d'augmenter les dépenses de marketing de 13,4 millions de dollars, dont 54% en France, entre 1993 et 1997. II soulignait en outre que " les logos devront être revus pour être légèrement différenciés de ceux des cigarettes ".
Le second document découvert, intitulé " Plan Stratégique 1992/1996 RJ AF France " exprimait, quant à lui, la nécessité de " mettre en place un changement progressif pour passer des outils de communication utilisés actuellement, à des activités de licence logo, afin de maintenir la continuité en matière de communication ", mentionnait qu' " en comparaison avec la plupart de ses concurrents, RJR France semble mieux préparé à faire face aux nouvelles restrictions légales, grâce à un plus grand nombre d'activités de licences logo à sa disposition (montres O Trophy, O Boots, collection/boutiques O, vêtements D) permettant de maintenir une continuité dans la communication derrière O et D " et précisait qu' " une approche créative des questions légales " ainsi qu' " un équilibre entre les risques légaux et les bénéfices espérés " devaient être recherchés.
Enfin, le troisième document découvert, intitulé " France 1992/1996 Stratégie de communication " indiquait: " à la date du 23 janvier 1993:
- arrêter les campagnes de cigarettes
- se concentrer sur les activités de licences logo, montres O Trophy, chaussures O, collection O, vêtements D et portait la mention manuscrite " la communication est toujours possible mais sera de plus en plus complexe ".
Il résulte ainsi de l'étude de ces documents que la stratégie de diversification du groupe AF en Europe dans différents produits et notamment les vêtements DS a été conçue et élaborée par la société HBI, dont le représentant en France était M. M, en étroite collaboration avec les dirigeants de la société AF France, MM. V et L. Ces derniers ont été informés, ont approuvé et intégré, dans leur propre stratégie de communication les politiques commerciales destinées à exploiter au mieux les activités de logo rappelant les cigarettes. Il ressort des termes mêmes des documents saisis que les prévenus ont été amenés à donner leurs opinions sur les plans litigieux et ont par la même participé à leur élaboration et à leur rédaction, ceux-ci ayant été exécutés par les annonceurs commercialisant les vêtements qui sont comme l'ont justement relevé les premiers juges, les auteurs principaux du délit poursuivi;
Le montant considérable des financements prévus par HBI pour les dépenses de publicité en faveur des vêtements D est enfin révélateur de l'aide financière apportée par le groupe AF aux annonceurs directs SI et à sa filiale en voie de constitution MS, incapables de mener seuls une campagne publicitaire d'une telle envergure.
La participation à l'élaboration et à l'organisation de ces plans par de prétendues campagnes de diversification est constitutive du détournement de l'interdiction posée par la loi Evin.
Un tel comportement caractérise l'élément matériel de la complicité du délit prévu par l'article L. 355-25, devenu L. 3511-3 du Code de la santé publique, prévention sur laquelle les prévenus ont pu s'expliquer contradictoirement aussi bien devant le tribunal que devant la cour.
L'existence de l'élément moral de la complicité résulte de ce que l'objectif des prévenus consistait à maintenir, malgré son interdiction, la publicité en faveur de la marque de tabac D, par le biais de l'utilisation de nouveaux outils de communication (la publicité en faveur des vêtements D).
Les éléments de la complicité de publicité indirecte en faveur du tabac sont donc réunis à l'encontre de MM. V, L et M.
Sur le préjudice subi par le CNCT :
Le conseil de MM. V, L et M fait valoir que le CNCT n'apportait pas la preuve d'un préjudice certain, direct et personnel, et qu'en tout état de cause, si un tel préjudice pouvait être retenu, il ne pourrait justifier qu'une indemnité symbolique, les campagnes de publicité indirecte ne constituant pas une infraction grave aux dispositions de lutte contre le tabagisme.
Le CNCT relève que la publicité indirecte est au contraire une forme vicieuse de communication des cigarettiers, les études réalisées démontrant le pouvoir de séduction particulièrement fort de ces publicités sur les jeunes, banalisant ainsi les marques de tabac. La partie civile demande donc à la cour de lui allouer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 1 981 837, 22 euros, correspondant aux sommes engagées par les sociétés HBI et RJ AF France pour réaliser les publicités illégales, en vue de lui permettre d'effectuer, en faveur de la lutte contre le tabagisme des campagnes d'une ampleur et d'une qualité équivalentes à celles effectuées en faveur des cigarettes D par le biais des vêtements D, ainsi que la somme de 7 622, 45 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
En raison de la spécificité de son but et de l'objet de sa mission, le Comité National Contre le Tabagisme, reconnu d'utilité publique, a subi un préjudice direct et personnel du fait de la publicité indirecte en faveur du tabac, qu'il convient d'évaluer à 76 225 euros.
MM. V, L et M, à l'égard de qui les éléments constitutifs de la complicité du délit de publicité indirecte ont été caractérisés, seront condamnés solidairement à verser au CNCT cette somme.
Les frais irrépétibles occasionnés par cette très longue procédure seront fixés à la somme de 7 620 euros, et chacun des trois prévenus sera condamner à verser au CNCT la somme de 2 540 euros.
Sur la responsabilité de la SA RJ AF France, devenue société JT Iinternational France :
Le CNCT a mis en cause la société RJ AF France, afin que la cour constate la responsabilité civile de celle-ci pour faute sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et la condamne à garantir MM. V, L et M de toutes les condamnations civiles prononcées à leur encontre.
La défense fait valoir que MM. V et L ne sont pas des préposés de la société RJ TOBACCO France au sens de l'article 1384 al.5 du Code civil et que la responsabilité civile de cette dernière ne peut être retenue, comme l'a justement énoncé le tribunal;
MOTIFS DE LA COUR
Il résulte de l'article 113 de la loi du 24 juillet 1966 devenu l'article L. 225-51 du Code du commerce que le Président du conseil d'administration ou le PDG assume la direction générale de la société anonyme et engage cette dernière dans ses rapports avec les tiers et de l'article 117 de la même loi, devenu l'article L. 225-56 du même code que les directeurs généraux disposent à l'égard des tiers des mêmes pouvoirs que le Président;
Il s'ensuit que MM. V et L, respectivement PDG et Directeur général de la société RJ AF France ont engagé cette dernière à l'égard du CNCT, par leurs agissements contraires aux dispositions du Code de la santé publique;
La société JTI T France, venant aux droits de la société RJ AF France doit donc répondre des fautes civiles commises par ses mandataires sociaux, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil;
En revanche, elle ne saurait être tenue à garantir les condamnations prononcées contre M. M qui ne possède pas la qualité de mandataire social de la société AF France;
Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement; vu l'arrêt de la Cour de cassation du 12 décembre 2000 ayant cassé, sur le pourvoi de la partie civile, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 11 juin 1999, en la forme, - déclare recevables les appels de l'ensemble des parties; au fond, - constate que la cour n'est plus saisie que de l'action civile; - rejette la demande de suppression de certains passages des conclusions de la partie civile, présentée par M. C ; - constate que le CNCT ne s'est pas constitué partie civile et ne présente aucune demande à l'encontre de MM. C et N; - les déclare hors de cause; - rejette les exceptions de nullités de la procédure soulevées par MM. V, L et M; - constate que les dispositions de la loi du 10 janvier 1991 ne sont pas contraires au droit communautaire et à la Convention européenne des Droits de l'Homme, - confirme le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié les faits reprochés aux prévenus en complicité de publicité indirecte en faveur du tabac et a reconnu que les éléments constitutifs de ce délit étaient réunis à l'encontre de MM. V, L et M; - confirme le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande du CNCT à hauteur de 76 225 euros et a condamné solidairement M. V, M. L et M. M à verser cette somme au CNCT; - infirme le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause la société RJ AF France; - déclare la société JTI T France, venant au droit de la société AF France, civilement responsable des condamnations prononcées contre MM. V et L; - condamne chacun des trois prévenus à verser au CNCT la somme de 2 540 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;