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Décisions

Conseil Conc., 15 avril 2003, n° 03-D-19

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques relevées sur le marché des granulats dans le département de l'Ardèche

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de M. Avignon, par M. Nasse, vice-président, présidant la séance, Mmes Aubert, Mader-Saussaye, Perrot, MM. Bideau, Charrière-Bournazel, Piot, membres.

Conseil Conc. n° 03-D-19

15 avril 2003

Le Conseil de la concurrence, (Section I),

Vu la lettre enregistrée le 8 juin 1998 sous le numéro F 1054 par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques d'entente relevées à l'occasion de marchés de fourniture de granulats pour la construction et l'entretien des routes départementales en Ardèche ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, fixant les conditions d'application de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et le décret n° 2002-689 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce ; Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement et par les sociétés Matériaux et Travaux du Velay (SMTV), Ozil et Cie, des Carrières St Julien substituant la société des Basaltes de l'Ardèche (SBA), Ardéchoise Laurans, Vancéenne de Carrières et Travaux Publics (SVCTP), Lafarge Granulats Rhône Auvergne, Carrières Delmonico Dorel, Granulats Rhône Alpes et Morillon Corvol ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Matériaux et Travaux du Velay (SMTV), Ozil et Cie, des Basaltes de l'Ardèche (SBA), Ardéchoise Laurans, Vancéenne de Carrières et Travaux Publics (SVCTP), Lafarge Granulats Rhône Auvergne, l'Art des Choix en Granulats, Carrières Delmonico Dorel, Granulats Rhône Alpes et Morillon Corvol entendus au cours de la séance du 28 janvier 2003 ; Adopte la décision suivante :

I. - CONSTATATIONS

A. - Le marché de fourniture et de transports des granulats

1. Le conseil général de l'Ardèche, agissant en qualité de maître d'ouvrage, a lancé, le 27 novembre 1995, une procédure d'appel d'offres restreint, avec une date limite de réception des candidatures fixée au 10 janvier 1996 et une date limite de réception des offres définitives fixée au 12 février 1996. Ce marché à bons de commande, reconductible sur 3 ans au total, concerne un volume de 41 100 tonnes de granulats routiers réparti en 9 lots géographiques, pour un montant estimé, en 1996, à 3,97 MF.

Les travaux à réaliser par les entreprises comprennent :

l'extraction, le concassage, le criblage, le lavage des granulats ;

le chargement et le pesage des matériaux sur les véhicules de transport ;

le transport de ces granulats du lieu de production jusqu'aux aires de stockage ;

le déchargement des matériaux en tas de dimensions géométriques sur ces aires.

2. Les granulats à fournir sont différents selon les couches à mettre en ouvre sur les chaussées. Pour les couches d'assise, sont utilisées des graves concassées non traitées 0/30 ou 0/60 provenant des roches calcaires, basaltiques ou granitiques, que l'on trouve dans les carrières du département ou en limite extérieure. Les couches de roulement sont répandues sur les couches d'assise et utilisent des matériaux silico-calcaires ou alluvionnaires 2/4, 4/6, 6/10 ou 10/14 d'une granulométrie variable selon le trafic routier attendu. Ils sont toujours d'une dureté supérieure aux granulats des couches d'assise et proviennent pour une grande part des gravières de la vallée du Rhône.

3. Pour le marché de 1996, les matériaux devaient provenir exclusivement des carrières exploitées par les entreprises titulaires des marchés. Les entreprises avaient la possibilité de présenter les offres en groupement et de soumissionner pour un ou plusieurs lots, douze candidats au maximum pouvant être admis à présenter une offre sur chacun d'eux.

4. Chaque entreprise, ou groupement, devait présenter son offre sur un bordereau de prix en précisant, pour chaque catégorie de granulats à fournir, leur prix unitaire à la tonne ainsi que les termes fixes et kilométriques de leur transport. Le terme fixe sert à rémunérer la mise à disposition d'un camion pour le transport des matériaux alors que le terme kilométrique rémunère le transport d'une tonne de granulats au kilomètre parcouru.

B. - Les entreprises titulaires des marchés

5. Sept des entreprises titulaires de ces marchés, seules ou le plus souvent en groupement, sont des entreprises liées à des groupes nationaux : groupe Lafarge pour la SA LGRA ; groupe Eiffage pour la société Ardéchoise Laurans et la SARL SBA ; groupe RMC pour la SA Morillon Corvol ; groupe Jean Lefebvre pour la SARL Ozil et la SARL SMTV ; groupe Vicat pour la SA Granulats Rhône-Alpes. Les 3 autres entreprises titulaires - la SARL l'Art des Choix, la SA Delmonico Dorel et la SARL SVCTP - sont, au moment des faits, des entreprises indépendantes.

6. Les tableaux figurant aux pages suivantes présentent, pour les neuf lots du marché, les entreprises titulaires des marchés en 1993 et en 1996 et les prix de la fourniture et du transport des granulats proposés par les entreprises ayant remporté le marché.

Tableau des entreprises titulaires des marchés en 1993 et 1996

EMPLACEMENT TABLEAU

Prix du marché 1996 - Granulats et transport

EMPLACEMENT TABLEAU

C. - Les pratiques dénoncées

1. Les documents saisis dans la société Delmonico Dorel

7. En premier lieu, un état récapitulatif des commandes et des prix composé de deux pages collées l'une à l'autre a été saisi dans les locaux de la société Delmonico Dorel. La première page à gauche est une copie du détail estimatif du lot n° 1 du marché 1996. Il s'agit d'un tableau récapitulatif des commandes envisagées par le maître d'ouvrage pour le secteur n° 1 complété par l'indication des prix proposés par les entreprises soumissionnaires. En correspondance des lignes relatives aux natures et quantités de granulats à fournir, figure, dans la colonne prix unitaire, une mention manuscrite "Base 93" avec au-dessous les prix unitaires correspondants aux diverses catégories de granulats et puis, en bas de la colonne, la mention :

"semi = 1,20

6 x 4

1,60

4 x 2 "

Dans la deuxième colonne, correspondant à la mention pré-imprimée "Montant HT", on trouve l'indication manuscrite "Actualisé.../95" avec au-dessous, comme précédemment, les prix unitaires des différentes catégories de granulats suivis des mentions en bas de la colonne :

"3

1,20

1,60"

Au-dessus du tableau ainsi présenté, on peut lire le mot "couverture" suivi des mentions "GRA" et "DD" avec légèrement en dessous le chiffre "6,1 %", alors qu'en bas de ce tableau les mentions manuscrites suivantes sont apposées :

Sur la page de droite, dans la continuité des lignes du tableau précédent, a été confectionné un tableau manuscrit comportant neuf colonnes correspondant à chacun des lots du marché, avec, en haut de chaque colonne, les noms ou sigles d'entreprises. Sur quatre de ces colonnes (lots 1, 3, 6 et 8) sont indiqués des prix manuscrits pour les granulats et les termes fixes et kilométrique du transport. Au-dessus de ce tableau, on lit la mention manuscrite suivante : "Redland pas retenu manque déclaration TVA. Laurens M. Deville".

8. Dans une déclaration faite le 17 octobre 1997, un responsable de la société Delmonico Dorel, Monsieur X, a expliqué son rôle dans l'élaboration de ce tableau : "Je ne sais pas à quelle date j'ai établi ce tableau. Je l'ai dressé seul. Les informations ont été glanées à droite et à gauche. Le taux de 6,1 % représente l'actualisation 1996 du prix 1993. Je ne sais pas ce que signifie le terme "couverture GRA DD". Les prix dans la colonne lot 1 sont les prix auxquels on a travaillé pour obtenir les prix du marché 1996. J'ai dû faire une étude de marché sur les entreprises qui pouvaient répondre par rapport à la situation géographique, d'une part, et par rapport aux informations dont je disposais sur le marché, d'autre part."

9. En second lieu, a été saisi un bordereau de commandes, identique dans sa structure au précédent, et qui concerne non plus le secteur 1 mais le secteur 2 du marché. Il fait apparaître, dans la colonne des prix unitaires, des mentions manuscrites de prix correspondant aux diverses catégories de granulats ainsi qu'un prix total du transport. Ces prix sont récapitulés dans la deuxième colonne "Montant HT" et permettent de calculer le montant total de l'offre fixée à 329 103,50 F.

Au-dessous du tableau, on peut lire la phrase suivante écrite à la main : "Distance Bourg Les Valence Secteur 1 (r) 45 km. Dans l'attente de ton bordereau secteur 1."

Au-dessus du tableau apparaît la mention manuscrite indiquant l'identité du destinataire : "De Dorel à Yves Guilloud".

Ce document a été envoyé, le 9 février 1996, à partir du télécopieur de l'entreprise Delmonico Dorel. Le numéro du destinataire, à savoir le 75 56 17 28, apparaît dans le rapport d'émission annexé. Il s'agit de celui de la société Granulats Rhône Alpes à Bourg les Valence.

2. Le document saisi dans les locaux de la société Morillon Corvol (cotes 1197-1198)

10. Ce document, découvert par les enquêteurs dans le dossier d'appel d'offres du marché de 1996, est constitué de deux pages manuscrites agrafées. Il comporte, sur la première page, les chiffres de 1 à 9 correspondant aux numéros des lots du marché. En face de ces numéros sont mentionnés les noms des entreprises qui ont généralement obtenu les lots correspondants :

en n° 1 l'indication "DD-Gerland". DD est le sigle de Delmonico Dorel et Gerland le nom de la société mère de Carrière des Chênes ;

en n° 2, trois noms "Gra Lafarge - RMC en graves" ainsi que la mention un peu plus bas et en petit caractère "DD" sur la partie droite de la ligne. "Gra" est le sigle de Granulats Rhône Alpes, Lafarge désigne la société Lafarge Granulats et RMC le nom du groupe propriétaire de la société Morillon Corvol ;

en n° 3, les noms de "Lafarge, RMC, GSM" avec un peu plus loin, en petits caractères, le nom "Y", ce nom étant le même que celui de Monsieur Y, directeur de la société Carrière des Chênes ;

en n° 4, à nouveau le sigle "RMC" suivi de deux noms : "Ozil T.P." et "Ozil Jacques", avec, en petits caractères, sur la droite de la page le nom de "Lafarge" ;

en n° 5, les sigles "GRA" et "LGRA" des sociétés Granulats Rhône Alpes et Lafarge Granulats Rhône Auvergne ;

en n° 6, les noms d'"Ozil" et "Ardéchois" suivi de la mention "réponse à faire" et du sigle "RMC" ;

en n° 7, la mention du nom "Gerland", société mère de la société SBA ;

en n° 8, les noms "Ozil" et "SMTV" ;

en n° 9, les mentions des sociétés "Laurans" et "SVCTP".

La deuxième page de ce document est un tableau manuscrit mentionnant en haut de page les lots n° 2, 3, 4 et 6, avec, sur la colonne 2, les prix des différentes catégories de granulats ainsi que les prix du transport (terme fixe et terme kilométrique). En face de la colonne correspondant au lot n° 6, on trouve le mot "seul".

11. Le 30 octobre 1997 dans le cadre de l'enquête administrative, le directeur de région de la société Morillon Corvol a déclaré, à propos de la pièce analysée ci-dessus : "Je ne me souviens plus ni quand ni pourquoi j'ai établi cette liste". S'agissant de la deuxième page du document, il a indiqué : "Il s'agit des lots et des prix de la soumission de SEMC, transmis à mon secrétariat pour dactylographie".

3. La politique de soumission des entreprises

La reconduction des anciens titulaires

12. L'analyse des résultats de l'appel d'offres permet de constater que, dans tous les cas, les entreprises titulaires des marchés en 1993 le restent en 1996. Les entreprises mandataires des groupements en 1996 étaient déjà mandataires des groupements titulaires en 1993 pour tous les lots sauf un. La société Delmonico Dorel, mandataire du groupement attributaire en 1993, est titulaire seule en 1996. La SARL SBA est reconduite sur le lot n° 7. Sur les lots n° 3 et 4, le groupement attributaire est seul candidat.

Les similitudes prix des granulats

13. Des similitudes de prix ont été constatées pour le gravillon concassé 4/6 entre l'offre du groupement titulaire du lot 4 et les offres de la société Delmonico Dorel sur les lots n° 1 et 2. De même, la société Lafarge Granulats Rhône Auvergne propose, sur le lot n° 5, pour toutes les catégories de granulats, des prix identiques à ceux du groupement auquel elle participe avec la société Morillon Corvol, sur les lots n° 2 et 3. Des similitudes peuvent également être observées entre les prix des offres des sociétés Ozil, l'Art des Choix et SMTV, fixés par les trois entreprises à 69,50 F la tonne, pour les gravillons concassés 2/6, 4/6 et 6/10.

14. Les prix facturés sur le gravillon concassé 2/4 par les sociétés Delmonico Dorel, Morillon Corvol, Lafarge Granulats Rhône Auvergne et Ozil sont identiques (70 F la tonne). Cette similitude des prix est observée, alors que la société Lafarge Granulats Rhône Auvergne soumissionne seule sur le lot n° 5 et que la société Delmonico Dorel fait de même sur le lot n° 1.

15. La même constatation peut, enfin, être faite, d'une part, pour les entreprises SBA, Ardéchoise Laurans et SVCTP qui proposent le même prix de 80 F la tonne pour les granulats concassés 2/4 alors qu'elles présentent des offres séparées sur le lot n° 8 et, d'autre part, pour les groupements Ozil/ADC et SMTV/Ozil, qui, sur les lots n° 6 et 8, proposent le même prix pour les granulats 2/6, 4/6, et 6/10.

La similitude des prix du transport

16. Sur le lot n° 2, les prix du transport proposés par la société Delmonico Dorel et par le groupement Lafarge Granulats Rhône Auvergne/Morillon Corvol sont les mêmes (3 F pour le terme fixe et 1,20 F pour le terme kilométrique), bien que ces entreprises aient déposé des offres séparées.

17. Tel est encore le cas sur les lots n° 3 et 4, où les deux groupements qui présentent une offre, d'un côté le groupement Morillon Corvol / Lafarge Granulats Rhône Auvergne, de l'autre le groupement Morillon Corvol / Ozil / l'Art des Choix, proposent exactement les mêmes prix, 3 F pour le terme fixe et 1,20 F (semi) pour le terme kilométrique.

18. Dans sa soumission sur le lot n° 5, lot déclaré infructueux, la société Lafarge Granulats Rhône Auvergne présente encore ces mêmes prix.

19. S'agissant des lots de montagne, les prix du transport sont plus élevés compte tenu des difficultés de communication, mais présentent les mêmes similitudes. Aussi, sur le lot n° 6, la société SMTV, d'un côté, et le groupement l'Art des Choix en Granulats / Ozil, de l'autre, proposent les mêmes prix : 7,20 F pour le terme fixe et 1,30 F pour le terme kilométrique. La société SMTV reprend ces mêmes prix dans ses propositions sur les lots n° 7 et 8, imitée par la société Ozil sur les lots n° 7 et 9.

La constitution systématique de groupements

20. L'instruction a fait apparaître que la plupart des entreprises titulaires ont déposé des offres en groupement. Sur les neuf lots du marché, sept ont été attribués à un groupement, avec une reconduction quasi systématique en 1996 des groupements titulaires du marché en 1993.

21. Dans la vallée du Rhône, quatre des cinq lots sont attribués à un groupement :

Les lots n° 2 et 3 au groupement Morillon Corvol / Lafarge Granulats Rhône Auvergne ;

Le lot n° 4 au groupement Morillon Corvol / Ozil / l'Art des Choix en Granulats ;

Le lot n° 5 au groupement Lafarge Granulats Auvergne / Granulats Rhône Alpes dans le cadre d'un marché négocié.

Concernant le lot n° 1, il est attribué à la société Delmonico Dorel seule, le groupement prévu avec Carrière des Chênes n'ayant pu se réaliser. Monsieur X, de la société Delmonico Dorel, a déclaré le 17 octobre 1997 : "J'ai contacté Monsieur Y (Carrière des Chênes) afin de former un groupement, mais il m'a fait part de ce que la candidature de son entreprise n'avait pas été retenue pour ce marché".

22. Dans la zone "Montagne", trois groupements de deux entreprises détiennent les lots n° 6 (Ozil /l'Art des Choix en Granulats), n° 8 (SMTV / Ozil) et n° 9 (Laurans / SVCTP). Seule la SBA obtient individuellement le lot n° 7.

D. - Les grieffs notifiés

23. Sur la base des éléments présentés ci-dessus, les griefs suivants ont été notifiés :

1) à la SA Carrières Delmonico Dorel, à la SA Morillon Corvol, à la SA Lafarge Granulats Rhône Auvergne, à la SA Granulats Rhône Alpes, à la SARL l'Art des Choix en Granulats, à la SARL Ozil et Cie, à la SARL Société des Basaltes de l'Ardèche (SBA), à la SARL Société Matériaux et Travaux du Velay (SMTV), à la SARL Société Vancéenne de Carrières et Travaux Publics (SVCTP), à la SNC Société Ardéchoise Laurans, pour avoir mis en ouvre ou participé à des échanges d'informations ayant pour objet, d'une part, de fixer à l'avance la répartition des lots et, d'autre part, de faire obstacle à la libre fixation des prix du marché départemental des granulats de l'Ardèche en 1996, et pour effet de tromper le maître d'ouvrage sur la réalité de la concurrence.

2) à la SA Granulats Rhône Auvergne pour avoir mis en œuvre une concertation avec la société Delmonico Dorel par laquelle elles ont envisagé et effectivement déposé, s'agissant de cette dernière, des offres de couvertures ayant pour objet d'éviter toute concurrence entre elles sur les prix des lots n° 1 et 2 et pour effet de se garantir l'attribution de ces lots en trompant le maître d'ouvrage sur la réalité de la concurrence qui pouvait exister entre elles ;

3) à la SA Morillon Corvol, à la SA Lafarge Granulats Rhône Auvergne, à la SA Granulats Rhône Alpes, à la SARL l'Art des Choix en Granulats, à la SARL Ozil et Cie, à la SARL Société Matériaux et Travaux du Velay (SMTV), à la SARL Société Vancéenne de Carrières et Travaux Publics (SVCTP), à la SNC Société Ardéchoise Laurans, pour avoir, sur les lots n° 2, 3, 4, 5, 6, 8 et 9 de ce marché, créé des groupements non justifiés au plan économique et technique ayant pour objet de faciliter entre elles les échanges d'informations et pour effet de se répartir les marchés en éliminant la concurrence entre les membres des groupements et en empêchant l'émergence d'offres réellement compétitives de la part des entreprises extérieures.

II. - DISCUSSION

A. - Sur la prescription

24. La société Ardéchoise Laurans soutient que la lettre adressée, le 6 juin 2001 par le rapporteur aux entreprises en cause, ne peut être considérée comme un acte interruptif de prescription dès lors que les informations demandées figuraient déjà dans le rapport administratif d'enquête. La société SVCTP fait valoir que l'interruption de la prescription ne lui est pas opposable dans la mesure où elle a reçu la demande de renseignement, datée du 6 juin, le 14 juin 2001, alors que la prescription des faits était acquise le 8 juin 2001.

25. Cependant, la Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 15 juin 1999, a estimé que la demande de renseignement sur la situation juridique et financière d'une entreprise, émanant du rapporteur, postérieurement à la saisine du Conseil, constitue un acte interruptif de prescription. Elle a également précisé, dans un arrêt du 2 mars 1999, que l'interruption de la prescription produit effet à l'égard de toutes les parties en cause. Or, six entreprises, sur les quatorze destinataires du courrier du 6 juin 2001, l'ont reçu avant le 8 juin 2001.

B. - Sur les prariques relevées

26. L'article L. 464-6 du Code de commerce énonce : "Lorsque aucune pratique de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché n'est établie, le Conseil de la concurrence peut décider, après que l'auteur de la saisine et le commissaire du Gouvernement ont été mis à même de consulter le dossier et de faire valoir leurs observations, qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure".

1. En ce qui concerne l'entente générale de répartition du marché des granulats du département de l'Ardèche pour 1996, 1997 et 1998

Sur les éléments recueillis dans l'entreprise Delmonico Dorel

27. La société Delmonico Dorel fait valoir les différences de graphisme du tableau élaboré par elle pour montrer qu'il a été écrit en plusieurs fois, à des périodes différentes. Ainsi, la page de gauche aurait été rédigée la première et correspond à l'actualisation des prix du marché de 1993, à un taux de 6,1 %, soit celui prévu dans le cahier des charges. De même, les deux colonnes écrites en caractères plus clairs, correspondant aux lots n° 1 et 3, ne comportent que l'indication des titulaires des marchés en 1993. En revanche, les autres colonnes écrites en caractères plus foncés et correspondant aux lots n° 4 à 9, auraient été renseignées après la publication des résultats du marché et désignent le nom des entreprises choisies en 1996. La société Morillon Corvol assure, quant à elle, que ce document peut être le fruit d'une réflexion personnelle à partir des résultats du marché de 1993 et d'informations que tout professionnel du secteur pouvait détenir.

28. De fait, bien que, dans sa déclaration du 17 octobre 1997, citée au paragraphe 8 ci-dessus, Monsieur X, de la société Delmonico Dorel, ne prétende pas avoir rempli ces colonnes postérieurement à la publication des résultats du marché, aucun élément tiré du dossier ne permet de dater avec certitude ce document. La différence constatée entre les écritures peut, en revanche, laisser supposer qu'il a été établi en plusieurs fois, soit avant la date limite de dépôt des offres, soit après la proclamation des résultats de l'appel d'offres. En particulier, il ne peut être exclu que les indications de prix, apparaissant en regard des lots n° 3, 6 et 8, lots sur lesquels la société Delmonico Dorel n'a présenté aucune offre en 1996, aient été portées après la proclamation des résultats de l'appel d'offres. Par suite, ce document ne peut être considéré comme l'indice d'une concertation préalable au dépôt des offres entre les entreprises qui y sont nommées.

Sur les éléments recueillis dans l'entreprise Morillon Corvol

29. La société Morillon Corvol ne conteste pas que le tableau saisi dans ses locaux ait été élaboré avant la remise des offres, mais soutient que les prévisions qu'il contient quant à l'identité probable des groupements attributaires des offres découlent très logiquement de la localisation de leurs carrières et de l'analyse que tout professionnel du secteur pouvait faire, et n'ont nécessité aucun échange d'informations entre les entreprises concernées. Elle allègue, de plus, que les noms d'entreprises figurant, après ceux des attributaires supposés, en regard des lots n° 2, 3 et 4, correspondent à des concurrents potentiels et non à des offres de couverture attendues.

30. Effectivement, la simple mention d'une ou plusieurs entreprises en regard de chacun des lots ne permet pas, à elle seule, d'établir la participation des ces entreprises à l'élaboration de ce document dès lors que, d'une part, ces mentions ne correspondent pas exactement au résultat de l'appel d'offres puisque que certains de ces noms sont ceux d'entreprises titulaires du marché en 1993 mais non retenues par le maître d'ouvrage en 1996, et que, d'autre part, le résultat de l'appel d'offres pouvait être prévu à l'avance, avec une probabilité raisonnable, sur la base de la localisation des entreprises soumissionnaires. En effet, le maître d'ouvrage a découpé le territoire départemental en 9 lots et a autorisé, sans limitation, le groupement des entreprises dont les carrières se situent sur le territoire de ces lots. Les coûts de transport de granulats étant très importants, les attributaires les plus probables de l'appel d'offre sont, dans ces conditions, soit les entreprises isolées, soit les deux ou trois entreprises constituées en groupement, qui se situent sur le territoire du lot ou à proximité immédiate. Cette analyse est corroborée par la mention pour le lot n° 5 des sociétés Lafarge Granulats, Rhône Auvergne et Granulats Rhône Alpes alors que cette dernière société, qui n'était pas candidate, a été choisie, avec la société Lafarge Granulats Rhône Auvergne, par le maître d'ouvrage, après que l'appel d'offres ait été déclaré infructueux, en raison de la situation géographique de leurs carrières.

31. Par ailleurs, le fait que la société Delmonico Dorel, à laquelle les initiales "DD" portées après les noms des attributaires supposés en face du lot n° 2 pourraient correspondre, ait déposé une offre parallèlement à celle du groupement attributaire ne peut suffire à lui seul à prouver qu'il s'agissait d'une offre de couverture. De plus, les mentions "Y" et "Lafarge" portées de façon similaire en regard des lots n° 3 et 4 correspondent, pour la première, au nom d'un responsable de la société Carrières des Chênes, qui s'était portée candidate pour le lot concerné mais n'avait finalement pas déposé d'offre et, pour la seconde, au nom d'une entreprise qui n'avait ni déposé d'offre, ni ne s'était porté candidate. Dans ces conditions, il ne peut être exclu qu'il s'agisse, comme le soutient la société Morillon Corvol, d'entreprises que le rédacteur du document considérait comme des concurrents potentiels du groupement qui avait le plus de chances de l'emporter.

Sur la constatation d'un alignement des prix des granulats et de leur transport

32. Les sociétés Delmonico Dorel, Morillon Corvol, Lafarge Granulats Rhône Auvergne, Ozil et Cie et L'Art des Choix présentent systématiquement, sur les lots n° 1 à 5, les mêmes prix pour les termes fixes et kilométriques à partir desquels est calculé le coût du transport facturé au Conseil général. Les sociétés SMTV, Ozil et Cie et l'Art des Choix font de même sur les lots n° 6 à 9. Ces prix, strictement identiques, sont également proposés sur les lots que ces entreprises n'obtiennent pas, alors qu'elles ont présenté une offre.

33. De plus, le tableau présenté au paragraphe Ib ci-dessus fait apparaître une grande similitude des prix des granulats, particulièrement marquée sur les lots proches de la Vallée du Rhône. Sur ces lots, les prix sont très proches de 70 F la tonne pour la catégorie 2/4, de 55,50 F pour les catégories 2/6, 4/6 et 6/10 et de 60 F pour le 10/14. Sur les lots de la partie montagneuse du département, ils se situent dans une moyenne de 80 F par tonne pour le 2/4 et de 60 F pour le 4/6 et le 6/10. En revanche, les prix figurant sur les catalogues destinés aux clients sont très différents d'une entreprise à l'autre. Ainsi, il peut être constaté que pour arriver à des prix semblables, les entreprises mises en cause ont été amenées à pratiquer des taux de remise extrêmement divers allant de - 57 % à + 29 % pour le granulat 4/6, de - 6 % à + 30 % pour le 6/10 et de - 31 % à + 2 % pour le 0/30.

34. Les sociétés Morillon Corvol, Lafarge Granulats Rhône Auvergne, Ozil et Cie, L'Art des Choix et SMTV expliquent l'identité des prix du transport par le fait qu'elles participent à des groupements sur les lots n° 1, 3, 4, 6 et 8. Elles justifient le terme kilométrique de 1,20 F par la topographie particulière des routes départementales de l'Ardèche ainsi que par les prix pratiqués habituellement par les sous-traitants. De plus, les sociétés Delmonico Dorel et Morillon Corvol font valoir que, les granulats étant des produits peu différenciés dont les spécificités techniques sont très précisément définies dans le CCTP, il n'est pas anormal de constater un certain rapprochement des prix. Pour la société Ardéchoise Laurans, cet alignement est le fruit des négociations successives avec les collectivités locales. La société Lafarge Granulats Rhône Auvergne fait, par ailleurs, remarquer qu'une stricte identité n'est constatée que très exceptionnellement, hormis le cas où les entreprises membres d'un même groupement ont naturellement proposé les mêmes prix. Les sociétés Ozil et Cie et SMTV font également valoir que cette similarité des prix s'explique par la présence des entreprises au sein des groupements qui présentent des offres sur la plupart des lots. La société SBA, quant à elle, soutient que ses prix de granulats sont différents de ceux des autres entreprises.

35. Par ailleurs, les sociétés en cause justifient la différence entre les prix de soumission et les prix catalogue d'un même matériau, d'une part, par des contraintes techniques imposées par le cahier des charges pour garantir un haut niveau de propreté et de qualité du produit, d'autre part, par le fait que les prix de soumission ne sont pas calculés par référence aux prix catalogue mais sur la base actualisée de ceux déjà proposés lors des précédentes consultations de 1990 et de 1993. La société Morillon Corvol souligne, de plus, que les prix catalogue ne tiennent pas compte des quantités commandées.

36. De fait, la seule identité des prix des granulats constatée sur les lots de la Vallée du Rhône concerne les entreprises Morillon Corvol et Lafarge Granulats Rhône Auvergne qui ont constitué des groupements sur les lots n° 2 et 3. En revanche, les prix proposés par la société Delmonico Dorel sur le lot n° 1 diffèrent pour toutes les catégories de granulats de ceux observés sur les autres lots. S'agissant de la zone montagneuse du département, les propositions des groupements Ozil/Art des Choix et SMTV/Ozil, sur les lots n° 6 et 8, sont différentes de celles présentées par la société SBA sur le lot n° 7 et par le groupement Laurans/SVCTP sur le lot n° 9. Il apparaît en conséquence que, pour une très large part, cet alignement des prix s'explique par la participation de la plupart des entreprises à des groupements.

37. En ce qui concerne la similitude des prix du transport observée sur les 5 lots de la Vallée du Rhône, elle ne peut constituer qu'un indice d'une coordination des offres ou d'un échange d'informations sur les prix préalable au dépôt des offres, qui devrait être conforté par d'autres pour que l'entente soit établie.

2. En ce qui concerne le dépôt d'une offre de couverture par les sociétés Delmonico Dorel et Granulats Rhône Alpes

38. La société Granulats Rhône Alpes déclare que la télécopie du 9 février 1996 qui lui a été adressée par la société Delmonico Dorel, est postérieure au 15 janvier 1996, date du procès-verbal d'ouverture des candidatures qui a rejeté la sienne, et qu'elle n'a, en conséquence, pas répondu à la demande faite dans cette télécopie, devenue sans objet. La société Delmonico Dorel soutient qu'elle ignorait que la candidature de la société Granulats Rhône Alpes n'avait pas été retenue, et qu'elle lui transmettait un projet de bordereau de prix sur le secteur 1 en vue de présenter des offres en groupement sur les lots n° 1 et 2. Elle explique la date tardive de ce rapprochement par le fait que le groupement préalablement envisagé avec la société Carrière des Chênes n'avait pu voir le jour.

39. Si l'envoi par la société Delmonico Dorel de la télécopie en cause laisse, en effet, supposer que celle-ci ignorait que la candidature de la société Granulats Rhône Alpes n'avait pas été retenue, il n'est pas vraisemblable que les discussions en vue de la constitution d'un groupement commencent par l'échange de bordereaux de prix sur deux secteurs différents. De même, la mention du nombre de kilomètres à faire figurer sur l'offre atteste de la volonté, de la part de la société Delmonico Dorel, d'échanger des informations sur les prix des offres. Cependant, à défaut de réponse de la société Granulats Rhône Alpes, et en l'absence de tout intérêt, pour celle-ci, d'une participation à cet échange d'informations, puisque sa candidature n'avait pas été retenue, ce document ne démontre pas un accord de volontés entre les deux entreprises mises en cause.

3. En ce qui concerne le recours à des groupements

40. Le commissaire du Gouvernement soutient que le dépôt d'offres groupant plusieurs entreprises pour les lots n° 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 n'était justifié par aucune nécessité technique mais avait pour objet et a eu pour effet de faire disparaître toute concurrence lors de l'appel d'offres, dans la mesure où les entreprises géographiquement les mieux placées pour emporter un lot se sont systématiquement groupées pour déposer une offre. Il souligne que ces groupements ont également permis une reconduction quasiment à l'identique des titulaires des marchés par rapport au résultat de l'appel d'offres de 1993.

41. Les sociétés SMTV et Ozil et Cie exposent que la décision de se grouper constitue une liberté fondamentale de gestion de l'entreprise, à valeur constitutionnelle, qu'il ne revient pas au Conseil de la concurrence d'en apprécier la licéité au regard des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce mais qu'il appartient au maître d'ouvrage d'annuler les marchés s'il constate un effet anticoncurrentiel de ces groupements.

42. Les entreprises mises en cause justifient la constitution de groupements par les exigences de l'article 9-1 du CCTP, selon lesquelles les entreprises soumissionnaires devaient pouvoir fournir à la fois des granulats pour couche de roulement et des granulats pour couche d'assise, ce que la plupart des entreprises n'étaient pas en mesure de faire à partir des seules carrières dont elles sont gestionnaires. Ainsi, la société Lafarge Granulats Rhône Auvergne explique la constitution d'un groupement sur les lots n° 2 et 3, avec la société Morillon Corvol, par son incapacité à fournir des graves à partir de ses carrières proches de Châteauneuf et de Saulce. Sur le lot n° 4, le groupement constitué entre les sociétés Ozil et Cie, l'Art des Choix et Morillon Corvol est justifié par le fait que les carrières proches des sociétés Ozil et Cie et l'Art des Choix ne pouvaient fournir que des graves concassées 0/30 et 0/60, les gravillons devant être fournis par la société Morillon Corvol à partir de sa carrière de Montélimar. Sur le lot n° 6, la société Ozil et Cie soutient s'être groupée avec l'Art des Choix parce qu'elle ne pouvait produire des graves en quantité suffisante. Le groupement associant l'Art des Choix et la société SMTV, sur le lot n° 8, est présenté comme nécessaire du fait que, dans ses carrières de Lavilatte et d'Usclades, la société Ozil et Cie ne fournissait que des graves alors que SMTV pouvait livrer le marché en gravillons concassés à partir de sa carrière de Solignac-sur-Loire. Enfin, les sociétés Ardéchoise Laurans et SVCTP expliquent leur groupement sur le lot n° 9 par le fait que la première, dans sa carrière de Chandolas, produit des granulats silico-calcaires ou alluvionnaires pour couche de roulement que la seconde ne peut pas produire à partir de sa carrière des Assions.

43. La constitution, par des entreprises indépendantes et concurrentes, d'un groupement en vue de répondre à un appel d'offres n'est pas, en soi, illicite. De tels groupements peuvent avoir un effet pro-concurrentiel s'ils permettent à des entreprises ainsi regroupées de concourir alors qu'elles n'auraient pas été en état de le faire isolément, ou de concourir sur la base d'une offre plus compétitive. Ils peuvent, à l'inverse, avoir un effet anticoncurrentiel s'ils provoquent une diminution artificielle du nombre des entreprises candidates, dissimulant une entente anticoncurrentielle de prix ou de répartition de marchés. L'absence de nécessités techniques et économiques de nature à justifier ces groupements peut faire présumer de leur caractère anticoncurrentiel. Dans le cas d'espèce, il ressort de l'examen du périmètre géographique des lots mis en concurrence et du résultat de l'appel d'offres que les groupements attributaires rassemblent les entreprises qui, compte tenu de la localisation de leurs carrières et de l'importance du coût du transport dans le coût total, étaient les mieux placées pour proposer des prix compétitifs. Il a, de plus, été constaté au paragraphe 0 ci-dessus que la soumission d'offres en groupements avait favorisé l'alignement des prix des granulats.

44. Cependant, les bons de commande sur lesquels les candidats devaient présenter leurs offres prévoyaient la fourniture de granulats aussi bien pour couche d'assise que pour couche de roulement et aucun élément du règlement de l'appel d'offres ne permet de considérer que les entreprises auraient pu soumissionner sur un seul type de matériau. De plus, le maître d'ouvrage a imposé aux entreprises titulaires de fournir les granulats à partir de leurs propres carrières. Or, les éléments recueillis au cours de l'instruction ne permettent pas d'établir que les entreprises membres des groupements auraient eu la possibilité de fournir seules les deux types de granulats. Il ne peut également être exclu que, même si, sur certains lots, seule une catégorie de granulats était à priori prévue, les entreprises auraient pu être appelées, le cas échéant, à livrer des matériaux de l'autre type. Ainsi, compte tenu des spécifications techniques imposées par le maître d'ouvrage, il n'est pas établi que les groupements constitués entre les sociétés Morillon Corvol, Lafarge Granulats Rhône Auvergne, Granulats Rhône Alpes, Ozil et Cie, l'Art des Choix en Granulats, SMTV, SVCTP et Ardéchoise Laurans aient été utilisés pour mettre en œuvre des pratiques concertées ayant pour objet de limiter le libre exercice de la concurrence lors de l'appel d'offres en cause.

45. Il résulte de ce qui précède que, si les documents manuscrits saisis chez les sociétés Delmonico Dorel et Morillon Corvol témoignent du suivi et de l'analyse du résultat probable de l'appel d'offres lancé par le conseil général de l'Ardèche pour la fourniture de granulats routiers, l'absence de date sur le premier et le caractère prospectif du second ne permettent pas de considérer ces documents comme des indices d'échanges d'information préalable au dépôt des appels d'offres ou d'entente relative à la répartition du marché. De même, il n'est pas établi que les similitudes de prix relevées dans les offres déposées et la constitution de plusieurs groupements entre les entreprises mises en cause résultent d'une concertation préalable d'entreprises ayant pour objet de faire obstacle au jeu de la concurrence lors de l'appel d'offres en cause.

46. En conséquence, il y a lieu de faire application de l'article L. 464-6 du Code de commerce.

Décision :

Article unique: - Il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure.