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Décisions

CA Paris, 25e ch. A, 31 janvier 2003, n° 2001-15995

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Melian

Défendeur :

Janiak

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Canivet

Conseillers :

Mme Bernard, M. Picque

Avoués :

SCP Narrat-Peytavi, Me Teytaud

Avocats :

Mes Lienhardt, Zameczkowski-Jardin.

TGI Paris, 4e ch., du 25 juin 2001

25 juin 2001

Invoquant la rupture abusive par Sébastien Janiak, photographe, le 25 mars 1998, de leurs relations professionnelles qu'elle qualifie de mandat d'intérêt commun et le préjudice en découlant, Eugénia Melian, exerçant le métier d'agent artistique, a assigné Sébastien Janiak le 30 juillet 1998 devant le Tribunal de grande instance de Paris. Au terme de son assignation et de ses conclusions récapitulatives, la demanderesse a réclamé la condamnation de Sébastien Janiak à lui verser à titre de dommages-intérêts 152 449 euros (1 000 000 F) pour son préjudice matériel, 45 734,70 euros (300 000 F) pour son préjudice moral et professionnel et à nouveau 45 734,70 euros en raison d'une campagne de dénigrement menée à son encontre par Sébastien Janiak auprès d'un certain nombre de professionnels.

Par ailleurs, estimant que la coproduction de la série de photographies, Nadja Avermann, s'analyse en une société de participation, Eugénia Melian a sollicité la liquidation de cette société et à ce titre la condamnation de Sébastien Janiak à lui verser la somme forfaitaire de 6 097,96 euros (40 000 F) en contrepartie de ses apports en numéraire et en industrie ainsi que la compensation entre les dommages-intérêts, auxquels elle peut prétendre, et sa dette de 21 997,24 euros (144 292,50 F) représentant les droits de Sébastien Janiak sur une campagne publicitaire BMW.

Le défendeur s'est opposé à l'ensemble des demandes, en alléguant les manquements professionnels d'Eugénia Melian pour justifier de leur rupture. Reconventionnellement, il a réclamé la restitution, sous astreinte de 152,45 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, de 107 ektachromes ou négatifs originaux dont il est l'auteur et la condamnation d'Eugénia Melian à lui verser 130 496,35 euros (856 000 F) à défaut de restitution de ces ektachromes, 21 997,24 euros (144 292,50 F) au titre de droits d'auteur, 3 057,36 euros (20 055 F) encaissés indûment le 22 janvier 1999, majorés des intérêts au taux légal à compter de cette date et 45 734,70 euros (300 000 F) à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et matériel, outre des frais irrépétibles à hauteur de 4 573,47 euros (30 000 F). Comme la demanderesse, le défendeur a encore requis une expertise pour vérifier les comptes entre les parties.

Par jugement rendu le 25 juin 2001, le Tribunal de grande instance de Paris a débouté Eugénia Melian de toutes ses prétentions, estimant qu'elle ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un mandat d'intérêt commun, ni d'une société en participation et que Sébastien Janiak démontrait par contre les manquements déontologiques de son agent et le fait qu'Eugénia Melian détenait bien les 107 ektachromes dont il est l'auteur. Le tribunal a en conséquence condamné Eugénia Melian à restituer à Sébastien Janiak ses 107 ektachromes originaux, sous astreinte de 76,22 euros par jour de retard, à compter de la signification du jugement et à défaut de restitution, à lui payer 16 318,51 euros (107 000 F) HT, augmentés des "taxes" au taux légal. Par ailleurs, le tribunal a condamné Eugénia Melian à verser à Sébastien Janiak 22 867,35 euros (150 000 F) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rétention abusive des ektachromes et 2 286,74 euros (15 000 F) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. En outre, le tribunal a ordonné l'exécution provisoire, a sursis à statuer sur le surplus des demandes et avant-dire-droit, a ordonné une expertise confiée à Evelyne Hénault pour faire les comptes entre les parties, aux frais avancés par Sébastien Janiak.

Eugénia Melian a relevé appel de cette décision et a obtenu la suspension de son exécution provisoire par ordonnance rendue le 16 octobre 2001 par le premier Président de la Cour d'appel de Paris. En cours d'appel, des incidents d'exécution ont aussi opposé les parties.

Dans ses dernières conclusions signifiées régulièrement le 9 septembre 2002 et auxquelles il convient de renvoyer, l'appelante déclare que les deux parties ont la qualité de commerçant. Elle précise qu'elle est inscrite au registre du commerce et que son activité consiste, en qualité de mandataire et de façon indépendante, à négocier et éventuellement à conclure des contrats de vente (de droits de reproduction) ou de représentation, ou de prestations de services (production de telle ou telle série de photos, d'après un cahier des charges prédéfini par l'agence de publicité ou le magazine ou défini en commun).

L'appelante indique que Sébastien Janiak exerce, à titre régulier et principal, l'activité de photographe de mode et a la qualité de producteur. Elle déduit de ces éléments que leur relation correspond en tous points à la définition de l'agent commercial, donnée par la loi de 1991 ; qu'elle bénéficie donc du statut légal des agents commerciaux et de l'article 4 de la loi qui énonce que " les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties ".

Aucune clause écrite ne venant écarter le statut d'agent commercial, Eugénia Melian demande ainsi, en premier lieu, l'infirmation du jugement entrepris de ce chef et de dire que le mandat conclu avec Sébastien Janiak était un mandat d'intérêt commun, conforme à l'article 4 de la lai du 25 juin 1991, même si les parties n'avaient eu aucune relation antérieurement à la conclusion de ce mandat. Elle soutient du reste justifier avoir amplement contribué au développement de la carrière de Sébastien Janiak dans le cadre dudit mandat.

Eugénia Melian se fonde, en second lieu, sur l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, pour affirmer avoir droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. Elle conteste avoir commis une faute grave qui écarterait ce droit à réparation. Subsidiairement, si la cour retenait que, conclu hors de cadre de la loi de 1991, un mandat d'intérêt commun peut être rompu légitimement par le mandant, dès lors qu'il apporte la preuve d'un motif légitime, l'appelante fait valoir qu'aucun motif légitime ne justifie la rupture du mandat, que la lettre de révocation n'évoque qu'une soi-disant divergence de goût et de méthode et que les motifs, repris par le tribunal, comme le refus d'une commercialisation trop affirmée, les désaccords résultant de la confrontation de personnalités différentes, les manquements déontologiques de l'agent, l'absence de promotion réelle, la diminution du chiffre d'affaires par rapport à 1995, le manquement à l'obligation de reddition des comptes et à son obligation d'information de l'auteur quant à l'exploitation de ses clichés, n'ont été invoqués qu'après la rupture.

Eugénia Melian demande en conséquence la condamnation de Sébastien Janiak à lui payer 152 449 euros à titre de dommages-intérêts et subsidiairement la désignation d'un expert pour fixer le montant de cette indemnisation.

Concernant les 105 ektachromes réclamés par Sébastien Janiak en troisième lieu, Eugénia Melian affirme que l'intimé n'apporte aucun élément de preuve propre à vérifier qu'elle serait en possession de ces ektachromes. Elle indique qu'elle n'a, de toute façon, pas vocation à conserver tous les ektachromes et que Sébastien Janiak ne démontre pas qu'il est propriétaire des ektachromes revendiqués qui ne sont d'ailleurs pas des épreuves originaires, même s'il est l'auteur des œuvres reproduites sur les ektachromes. L'appelante ajoute que le code des usages invoqué par Sébastien Janiak n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce. Elle soutient enfin que même Sébastien Janiak a reconnu qu'elle n'était pas en possession d'œuvres originales en refusant l'intégralité des ektachromes qu'elle se proposait de lui remettre et que l'intimé ne justifie, en tout état de cause, d'aucun préjudice du fait de cette prétendue rétention. Eugénia Melian sollicite donc l'infirmation de la décision entreprise de ce chef également et le débouté de toutes les prétentions de Sébastien Janiak liées à la possession des ektachromes ;

Eugénia Melian reconnaît, en quatrième lieu, devoir à Sébastien Janiak 21 997,25 euros (144 292,50 F) au titre de la réalisation de la campagne BMW et 1 837,19 euros sur la somme qu'elle a perçue de la société Blob le 3 février 1999. Elle réclame que ces sommes se compensent avec les dommages-intérêts dus par l'intimé, ces dettes étant connexes et subsidiairement par le jeu de la compensation judiciaire.

En dernier lieu, Eugénia Melian requiert la condamnation de Sébastien Janiak à lui verser 45 734,70 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice professionnel et moral et 8 5000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures signifiées le 15 octobre 2002 et auxquelles il convient de renvoyer, Sébastien Janiak conteste l'existence d'un mandat d'intérêt commun donné à Eugénia Melian qui n'est elle-même, pas agent commercial. Il déclare exercer lui-même une activité libérale et ne pas avoir, en conséquence, la qualité de commerçant et de producteur. Reprenant la motivation du tribunal, il confirme qu'Eugénia Melian n'a pas concouru à la création d'une clientèle commune ou au développement de sa carrière mais a simplement géré pendant 2 ans et 3 mois l'aspect photographique, publicitaire et rédactionnel de son activité et encore uniquement sur l'Europe. L'intimé qualifie donc ses relations professionnelles avec Eugénia Melian demandant simple, librement révocable par application de l'article 2004 du Code civil.

Subsidiairement, si ses relations professionnelles avec Eugénia Melian devaient s'analyser en un mandat d'intérêt commun, il rappelle que la rupture d'un tel mandat est justifiée par la preuve d'un motif légitime ou d'une évolution économique ou d'une réorganisation de l'entreprise. Or, il soutient, d'une part, qu'Eugénia Melian a commis des manquements contractuels avant la rupture, d'autre part, qu'il a souhaité se consacrer à une activité cinématographique et audiovisuelle au détriment de son activité photographique.

Sébastien Janiak conclut ainsi au débouté des demandes d'indemnisation présentées par Eugénia Melian à quelque titre que ce soit, s'élevant par ailleurs contre les accusations de dénigrement qui lui sont faites par l'appelante. En outre, il demande à la cour de constater qu'Eugénia Melian ne sollicite plus la dissolution de la prétendue société en participation constituée avec lui ni la condamnation à lui verser 6 097,87 euros au titre de prétendus apports en numéraire et en industrie.

L'intimé maintient sa demande de restitution de 102 ektachromes ou négatifs originaux, dont il est l'auteur, conservés par Eugénie Melian sous astreinte de 76,22 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir. Il affirme en être le seul et unique propriétaire, Eugénia Melian lui ayant refacturé les frais de réalisation des ektachromes originaux.

II est par contre appelant incident pour demander la condamnation d'Eugénia Melian à lui payer 124 398,18 euros à défaut de restitution des ektachromes litigieux dans le délai de 3 mois à compter de la signification de l'arrêt ainsi que 30 489,80 euros à titre de dommages-intérêts en application de l'article 1147 du Code civil pour réparer le préjudice moral et financier causé par l'appelante.

Sébastien Janiak requiert encore la confirmation du jugement entrepris pour le surplus de ses demandes ainsi que sur la mesure d'expertise et la condamnation d'Eugénia Melian à lui payer 7 622,45 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 22 octobre 2002.

Eugénia Melian a reconclu le 22 octobre 2002 et communiqué une pièce n° 131 ce même jour.

Par écritures signifiées le 23 octobre 2002, Sébastien Janiak a soulevé l'irrecevabilité de ces conclusions et de cette pièce.

Sur quoi,

Quant à la recevabilité des conclusions signées le 22 octobre 2002 et de la pièce n° 131 communiquée le 22 octobre 2002 par Eugénia Melian ;

Considérant que ces conclusions et pièces ne satisfont pas au respect du principe du contradictoire, Sébastien Janiak n'étant pas en mesure d'en prendre connaissance et d'y répliquer utilement avant l'ordonnance de clôture de la mise en état rendue le 22 octobre 2002, soit le même jour que la signification desdites écritures et la communication de la pièce n°131 ; que ces conclusions et pièce seront en conséquence écartées des débats ;

Quant au fond :

Considérant quant à la qualification des relations contractuelles ayant existé entre les parties que celles-ci ne sont liées par aucun écrit ; qu'il est avéré toutefois qu'Eugénia Melian a été chargée par Sébastien Janiak dit Seb Janiak, photographe, de représenter ses intérêts professionnels pour l'Europe de fin 1995 au 25 mars 1998 ;

Considérant que le contrat d'agent commercial dont se prévaut Eugénia Melian peut se prouver par tous moyens;

Qu'il est constaté qu'Eugénia Melian se présente comme étant agent artistique depuis 1984, exerçant son activité en qualité de commerçant indépendant depuis 1992 et représentant 5 ou 6 photographes ainsi qu'un chorégraphe ; que de son côté, Sébastien Janiak affirme être un photographe professionnel de mode exerçant à titre personnel ;

Que l'agent commercial a pour activité selon l'article L. 134-1 du Code du commerce "de négocier, et de façon permanente, des contrats de vente, achats, locations ou de prestations de services au nain et pour le compte de producteurs, industriels commerçants ou d'autres agents commerciaux";

Qu'il ressort des pièces versées aux débats que Sébastien Janiak est un photographe de mode pratiquant personnellement son art ; que les photographies qu'il prend sont tirées par lui-même ou sous son contrôle, signées et numérotées dans la limite de 30 exemplaires tous formats et supports confondus ; que Sébastien Janiak n'a aucune activité de producteur ; que son activité audiovisuelle est exploitée par la société Ninetynine dont le gérant et producteur est Yann Mangematin ; que Sébastien Janiak a un droit patrimonial sur son œuvre dont il ne cède que les droits de reproduction et de publication; que de telles ventes sont exonérées de la TVA et que les revenus artistiques de Sébastien Janiak sont imposables au titre des bénéfices non commerciaux, comme il en justifie notamment par une attestation de l'Agessa du 28 décembre 2001 ; que Sébastien Janiak n'a ainsi pas la qualité de commerçant ;

Qu'Eugénia Melian n'établit pas qu'elle ait la qualité d'agent artistique au sens de l'article L. 762 du Code du travail; qu'elle est qualifiée sur de nombreux documents comme "agent de photographes" ; qu'elle admet être inscrite au registre du commerce en qualité de commerçante et avoir la maîtrise et l'organisation de ses activités; qu'elle reconnaît aussi ne pas être inscrite au registre spécial des agents commerciaux ; qu'elle ne rapporte pas non plus la preuve que les commissions qu'elle acquiert dans l'exercice de son mandat sont considérées comme des bénéfices non commerciaux comme les revenus d'un agent commercial;

Considérant qu'au vu de ces éléments et des autres pièces produites par les parties, il apparaît qu'Eugénia Melian n'est pas un agent commercial et ne peut bénéficier des dispositions de l'article 134-l et suivant du Code de commerce; que son activité s'apparente à celle d'un agent d'affaires, professionnel libre qui se charge contre rémunération, à titre de profession habituelle et sans caractère public, de gérer les affaires d'autrui c'est-à-dire d'offrir ses services pour faciliter ou gérer les affaires d'autrui;

Considérant que le contrat liant l'agent d'affaires à son client est un mandat commercial qui peut être simple ou d'intérêt commun; que les critères du mandat d'intérêt commun s'apprécient à la date de la conclusion du contrat, soit en l'espèce, fin 1995 ;

Considérant que contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la cour retiendra que le mandat ayant lié Eugénia Melian à Sébastien Janiak était bien d'intérêt commun;

Que s'il est incontestable qu'en 1995, Sébastien Janiak avait, grâce en particulier à sa technique du " Marte Painting ", acquis une réputation tant en France qu'à l'étranger dans les milieux des agences de publicité et de mannequins ainsi que des magazines de mode, il n'est reste pas moins que s'il a chargé à cette époque Eugénia Melian de le représenter pour l'Europe, c'est parce qu'il escomptait voir sa carrière se développer et sa clientèle s'accroître encore sur ce continent grâce aux efforts et à l'expérience de son mandataire; que cette dernière a elle-même contracté, non pour se cantonner à un simple rôle de gestion mais en vue du profit qu'elle pourrait retirer dans l'avenir de l'accroissement du travail et de la notoriété de l'artiste, à la fois sur le plan pécuniaire, ses commissions étant en rapport avec les droits d'auteur et autres revenus encaissés par Sébastien Janiak et sur le plan de sa propre notoriété professionnelle ;

Qu'Eugénia Melian démontre, en effet, suffisamment, qu'en dépit du fait que le chiffre d'affaires réalisé avec elle par Sébastien Janiak a progressé de 1996 à 1998 mais est resté inférieur à celui réalisé par le photographe avec son précédent agent, elle a mis tout en œuvre, en collaboration avec Sébastien Janiak, pour valoriser le talent de ce dernier par la clientèle et les moyens techniques dont elle disposait ainsi qu'en lui avançant de nombreux frais et pour développer la carrière de l'artiste par la recherche d'engagements, l'étude de propositions et la négociation de cachets et droits de reproduction ou publication; que les deux parties ont ainsi contribué par leurs activités réciproques à la réalisation de l'objet du mandat, soit le développement de la carrière artistique en Europe de Sébastien Janiak, auquel Eugénia Melian avait un intérêt évident;

Considérant que Sébastien Janiak a mis fin au contrat de mandat par lettre recommandée avec avis de réception du 25 mars 1998 après 2 ans et 3 mois; qu'à la différence du régime de l'agent commercial dans lequel seule la faute grave de l'agent est, en cas de rupture par le mandant, privative de réparation, la rupture d'un mandat d'intérêt commun ne peut donner lieu à réparation si la révocation est faite par consentement mutuel ou a une cause légitime reconnue en justice;

Que l'existence de cette cause légitime, que fait plaider Sébastien Janiak est réelle, peu important que l'intimé n'ait invoqué que postérieurement à sa lettre de rupture des faits préexistants à cette dernière;

Que d'une part, Eugénia Melian reconnaît que Sébastien Janiak souhaitait réorganiser son activité et privilégier une activité cinématographique et audiovisuelle ; qu'elle indique elle-même dans ses dernières écritures qu'après la rupture, la société Ninety-nine a produit plusieurs vidéomusiques importantes dont Sébastien Janiak était l'auteur;

Que d'autre part, si Sébastien Janiak ne prouve pas le grief qu'il fait à Eugénia Melian d'une absence de travail réel de promotion, alors que dans sa lettre de rupture il lui disait qu'elle était son meilleur agent dans la photographie de mode depuis ses débuts, en revanche, il établit que l'appelante a commis des manquements contractuels justifiant aussi la rupture intervenue; que la preuve est ainsi rapportée qu'Eugénia Melian a commis un manquement déontologique grave en faisant publier par l'intermédiaire de l'agence Blob dans le magazine italien Max en juin 1998, un cliché de Naomi Campbell pris par Sébastien Janiak et communiqué par l'appelante en mars 1998 sans le consentement ni du photographe ni du modèle ; qu'est également démontré le manquement réitéré d'Eugénia Melian à l'obligation de reddition des comptes ; que cette dernière n'a pas nié avoir encaissé le produit de la campagne BMW début 1998 et s'être refusée à procéder au règlement des sommes revenant à Sébastien Janiak, soit 21 997,25 euros qu'elle offre de payer en cause d'appel par compensation; qu'elle a également encaissé en janvier 1999 de la société Blob le montant des factures établies en mars 1998 et correspondant à des publications en Italie et n'a jamais reversé à Sébastien Janiak la somme due, selon le décompte qu'elle produit, de 1 837,19 euros ;

Considérant qu'Eugénia Melian sera donc déboutée de sa demande d'indemnisation au titre de la rupture de son mandat, laquelle en raison des motifs légitimes la justifiant a pu intervenir sans préavis comme celle d'un mandat simple, le jugement entrepris étant confirmé sur ce point, mais pour d'autres motifs;

Considérant par ailleurs qu'il est constaté qu'Eugénia Melian ne sollicite plus la dissolution d'une prétendue société en participation constituée avec Sébastien Janiak, ni la condamnation de ce dernier à lui verser 6 097,87 euros au titre d'apports en numéraire et en industrie;

Considérant encore que la demande de l'appelante tendant à la réparation d'un préjudice professionnel et moral évalué à 6 972,21 euros sera rejetée pour les motifs pertinents retenus par le tribunal et que la cour adopte ; qu'il sera seulement ajouté que non seulement Sébastien Janiak mais aussi Eugénia Melian ont provoqué les attestations des professionnels du monde de la photographie et de la mode, chacun donnant son analyse des faits litigieux les opposant;

Considérant quant à la demande de restitution par Eugénia Melian des documents originaux dont Sébastien Janiak est l'auteur, force est de relever que presque 5 ans après la rupture de leurs relations, Sébastien Janiak ne rapporte pas la preuve de ce que l'appelante détiendrait encore 102 ektachromes constituant des œuvres originales lui appartenant; que la mise en demeure du 24 juin 1998 retenue par le tribunal comme probante ne l'est pas ; que Sébastien Janiak qui réclamait 104 ektachromes (chiffre fixé à 107 par le tribunal) reconnaît avoir reçu deux de ces ektachromes du magazine Vogue anglais en cours de procédure ; que le magazine Vogue Paris atteste le 12 novembre 2001 détenir 4 ektachromes de la série Diamants, sans qu'il soit précisé si ce sont des originaux ou des sorties d'ektachromes, copies techniques des originaux;

Qu'au surplus, Eugénia Melian a offert à Sébastien Janiak de reprendre les seuls documents selon elle, en sa possession soit des sorties d'ektachromes, ce que Sébastien Janiak a refusé suivant constat de Maître Lachkar, huissier de justice du 13 août 2001 ; qu'en outre il est établi que depuis la rupture, Sébastien Janiak a pu faire publier quelques unes des œuvres originales litigieuses et même céder des droits de publication sur l'une d'elles grâce au fichier numérique qu'il a conservé, de telle sorte que l'intimé ne prouve pas l'étendue du préjudice que lui causerait la détention abusive des ektachromes réclamés;

Que Sébastien Janiak sera donc débouté tant de sa demande de restitution des 104 ektachromes listés dans ses conclusions de première instance que d'indemnisation pour la perte de ces ektachromes ; que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef;

Considérant que la décision entreprise sera aussi infirmée en ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise ; qu'il n'y a pas lieu au calcul d'une indemnité de rupture au profit d'Eugénia Melian compte tenu du rejet de la demande de cette indemnité par le présent arrêt ; que dans ses dernières conclusions Eugénia Melian ne sollicitait une expertise que pour ce faire; que Sébastien Janiak ne produit aucune pièce faisant apparaître la nécessité de faire les comptes entre les parties ; que simplement, Eugénia Melian admettant devoir à Sébastien Janiak les sommes de 21 997,25 euros et de 1 837,19 euros montants, qui pour le premier, n'est pas contesté par l'intimé, et pour le second, non contredit utilement, il convient de condamner Eugénia Melian à payer à Sébastien Janiak 23 834,44 euros majorés des intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2000, date des conclusions "récapitulatives" signifiées par Sébastien Janiak devant le tribunal;

Considérant enfin qu'il y a lieu de condamner Eugénia Melian à payer à Sébastien Janiak 4 500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel ;

Par ces motifs : LA COUR, Contradictoirement, En la forme, Rejette des débats les conclusions signifiées le 22 octobre 2002 et la pièce n° 131 communiquée le même jour par Eugénia Melian ; Au fond, Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Eugénia Melian de toutes ses demandes et l'a condamnée à payer à Sébastien Janiak 2 286,74 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; L'infirmant pour le surplus et statuant à nouveau, Déboute Sébastien Janiak de ses demandes de restitution de 107 ou 102 ektachromes constituant des œuvres originales et à défaut de leur valeur ainsi que de sa demande de dommages-intérêts pour rétention abusive ; Dit n'y avoir lieu à expertise ; Condamne Eugénia Melian à payer à Sébastien Janiak 23 834,44 euros majorés des intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2000 ; Condamne Eugénia Melian à verser à Sébastien Janiak 4 500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel ; Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; Condamne Eugénia Melian aux entiers dépens. Admet Maître Teytaud, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.