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Décisions

CA Basse-Terre, 1re ch. civ., 29 janvier 2001, n° 99-01309

BASSE-TERRE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Erpeg (SA)

Défendeur :

Nina des Iles (EURL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bacou

Conseillers :

Mmes Jeanneau, Sauvage

Avocats :

Mes Plumasseau, SELARL Grollemund, Associés.

T. com. Pointe-à-Pitre, prés., du 30 jui…

30 juillet 1999

FAITS PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES.

Par déclaration au greffe de la cour du 3 septembre 1997, la société Erpeg a relevé appel d'une ordonnance de référé du 30 juillet 1999 du président du Tribunal de commerce de Pointe-à-Pitre, ayant dit n'y avoir lieu à référé et ayant condamné l'appelante à payer à l'EURL Nina des Iles la somme de 2 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

Erpeg, appelante, demande l'infirmation de l'ordonnance de référé.

Elle expose que selon contrat du 1er janvier 1998 la société Equip International lui a confié la distribution exclusive pour la Guadeloupe et la Martinique des produits cosmétiques Black Radiance et Black Opal;

Erpeg ajoute qu'elle est enregistrée à la Préfecture comme fournisseur exclusif et responsable de la mise sur le marché de ces produits qui sont commercialisés par un réseau de revendeurs agrées;

Que Nina des Iles a entrepris de commercialiser ces produits, sans autorisation et sans respecter les dispositions des articles L. 658-1 et suivants du Code de la santé publique;

Qu'il existe un trouble manifestement illicite par la violation du contrat d'exclusivité et un dommages imminent, la responsabilité de l'appelante étant engagée tant à l'égard du réseau de distribution que des tiers et des autorités administratives;

Qu'il y a également parasitisme, l'intimé profitant de la notoriété des marques, notoriété créée par l'appelante.

Enfin qu'il y a concurrence déloyale du fait de l'exploitation non autorisée.

Erpeg demande qu'interdiction soit faite a Nina des Iles d'importer, de commercialiser, de distribuer et de vendre les produits litigieux, sous peine d'une astreinte de 1 000 F par infraction constatée, ainsi que d'utiliser tous supports publicitaires, sous astreinte de 10 000 F par infraction constatée.

Enfin Erpeg demande la publication de l'arrêt dans le journal France Antilles et la condamnation de Nina des Iles au paiement de la somme de 30 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

L'EURL Nina Des Iles, intimée, demande la confirmation de l'ordonnance de référé.

Elle expose qu'elle a pour activité la distribution de produits cosmétiques;

Que dès réception de la lettre du 9 juin 1999, l'informant de l'exclusivité d'Erpeg pour les marques Black Radiance et Black Opal, elle a cessé de commercialiser et de vendre ces produits;

Que cependant Erpeg a saisi le juge des référés qui a retenu à juste titre qu'il n'y avait pas lieu à référé;

Que ni le trouble manifestement illicite, ni le péril imminent, ni le parasitisme ni la concurrence déloyale ne sont pas établis;

Que l'article L. 658-1 du Code de la santé publique dispose que la déclaration à l'Agence française de sécurité sanitaire ne se fait que par le premier importateur de produits cosmétiques provenant d'un pays non membre de l'Union Européenne;

Qu'Erpeg a déjà accompli cette formalité pour les produits litigieux;

Que ces produits sont achetés à une société à Marigot, dans la partie française de l'île de Saint Martin;

Que l'achat de produits et la revente hors réseaux ne constitue pas un acte de concurrence déloyale si les produits ont été acquis régulièrement en dépit des droits d'exclusivité du distributeur.

Nina des Iles demande la condamnation d'Erpeg au paiement de la somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et de la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

MOTIFS DE L'ARRET

Le juge des référés a dit qu'il n'y avait pas lieu à référé au motif qu'Erpeg ne produisait pas le contrat d'exclusivité dont elle demandait la protection, ni la déclaration prévue à l'article L. 258-2 du Code de la santé publique.

Cette déclaration est produite en cause d'appel.

Le contrat de distribution du 1er janvier 1998, versé aux débats dès la première instance, comporte une clause d'exclusivité au profit d'Erpeg.

Nina des Iles a fait constater par huissier le 17 juin 1999 qu'elle avait enlevé de ses magasins les produits cosmétiques litigieux, mais les produits ont été remis en vente après l'ordonnance de référé du 30 juillet 1999, ainsi qu'il résulte d'un constat d'huissier du 20 janvier 2000.

Dès lors que le contrat d'exclusivité n'est pas contesté, la commercialisation par un tiers non autorisé entraîne pour le distributeur exclusif un trouble manifestement illicite, que la juridiction des référés doit faire cesser, en application de l'article 873 du NCPC, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres fondements de la demande.

Il convient de faire interdiction à Nina des Iles d'importer, de commercialiser et de vendre les produits litigieux, ainsi que de faire toute publicité relative à ces produits.

Une astreinte apparaît nécessaire ainsi que la publication dans la presse du dispositif du présent arrêt.

L'appel étant déclaré fondé, la demande en dommages-intérêts pour appel abusif doit être rejetée.

Nina des Iles, qui échoue en cause d'appel, doit être condamnée aux dépens, déboutée de sa demande en paiement de frais non répétibles et condamnée à payer à ce titre une indemnité.

Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé commercial et en dernier ressort, Infirme l'ordonnance de référé rendue entre les parties le 30 juillet 1999 par le Président du Tribunal de commerce de Pointe-à-Pitre, Statuant à nouveau, renvoie les parties à se pourvoir au fond mais dès à présent, par provision, Fait interdiction à l'EURL Nina des Iles d'importer, de commercialiser, de distribuer et de vendre les produits cosmétiques Black Radiance et Black Opal, et ce sous peine d'une astreinte provisoire de 1 000 F par infraction constatée, Fait interdiction à l'EURL Nina des Iles d'utiliser tous supports publicitaires faisant référence à ces marques, sous peine d'une astreinte de 1 000 F par infraction constatée, Autorise la société Erpeg à publier le dispositif du présent arrêt dans un journal local d'annonces légales, aux frais de l'EURL Nina des Iles, Rejette les demandes de cette société, La condamne à payer à la société Erpeg une indemnité de 10 000 F (1 524,49 euros) au titre de l'article 700 du NCPC, La condamne aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SELARL Grollemund et Associés, avocats.