Conseil Conc., 4 juin 2003, n° 03-D-26
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Décision
Saisine de la Confédération nationale de la distribution pétrolière à l'encontre des pratiques d'EDF et GDF sur le marché du chauffage domestique
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur le rapport oral de Mme bergaentzlé, par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Behar-Touchais, MM. Flichy, Gauron, Piot, Ripotot, membres.
Le Conseil de la concurrence (section IV),
Vu la lettre enregistrée le 24 janvier 1996, sous le numéro F 844, par laquelle la Confédération nationale de la distribution pétrolière (CNDP) a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par EDF et GDF sur le marché du chauffage domestique ; Vu le livre IV du Code de commerce, relatif à la liberté des prix et de la concurrence, le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié et le décret n° 2002-689 du 30 avril 2002, fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce ; Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement, EDF et GDF, les organismes professionnels FNAS (Fédération française des négociants en appareils sanitaires, chauffage, climatisation et canalisation), CAPEB-UNA CPC (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment-Union nationale artisanale), UCF (Union climatique de France), UNCP (Union nationale des chambres syndicales de couverture et de plomberie en France) et SYNASAV (Syndicat national des services après-vente) et la CNDP, devenue la Fédération française des combustibles et carburants (FF2C) ; Vu les autres pièces du dossier ; La rapporteure, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la CNDP, devenue FF2C, de l'UNCP, de l'UCF, de la FNAS, de la CAPEB-UNA CPC et d'EDF et GDF, entendus lors de la séance du 18 mars 2003, le SYNASAV ayant été régulièrement convoqué ; Adopte la décision suivante :
I. - Constatations
A. - LE SECTEUR CONCERNÉ
1. Le choix des énergies
1. Le choix des énergies est le premier maillon de la chaîne d'opérations visant à répondre à la demande de chaleur destinée au chauffage et à la fourniture d'eau chaude sanitaire. La demande d'énergie nécessaire aux applications thermiques émane de tous les secteurs d'activité et peut être le fait tant des collectivités publiques ou privées (administrations, entreprises) que de simples particuliers (secteur dit résidentiel). Elle se manifeste à l'occasion de la réalisation d'opérations immobilières collectives ou individuelles d'aménagement, de construction ou de rénovation. Pour satisfaire à cette demande, interviennent différentes opérations, outre la production d'énergie, la fabrication de matériel, l'installation des équipements, l'exploitation, la gestion et la maintenance des chaufferies.
2. Une installation de chauffage peut être alimentée à l'électricité, par la combustion, ou à l'aide d'une énergie récupérée. Ces combustibles ou énergies récupérées sont les suivants : charbon, fioul, électricité, gaz, ordures ménagères.
3. La nature des équipements nécessaires à la production ou à l'alimentation en chaleur varie en fonction de la nature de l'énergie utilisée. Ainsi, le Conseil avait-il constaté dans son avis n° 90-A-13 que : "Lorsqu'une installation est conçue pour fonctionner à l'aide d'une énergie combustible, les différentes énergies combustibles sont relativement substituables entre elles mais ne peuvent en règle générale être substituées à l'électricité".
4. La demande de chaleur peut également être satisfaite par le raccordement à un réseau de chauffage urbain, lorsqu'il en existe un, lequel consiste à distribuer, au moyen d'un réseau de canalisations, de la vapeur ou de l'eau surchauffée (on parle alors d'énergie calorifique ou de "chaud") à tout ou partie d'une agglomération. Les centrales des réseaux de chaleur sont alimentées en fioul, en charbon, à partir de résidus urbains ou, enfin, au gaz.
2. La répartition de la consommation par énergie
5. Pour la totalité des fonctions consommatrices d'énergie, les statistiques disponibles font apparaître, au plan national, une progression continue du gaz et de l'électricité dans la consommation totale d'énergie. Dans le bilan énergétique provisoire de l'année 1994, l'Observatoire de l'Énergie indique : "Au total, sur une vingtaine d'années depuis le premier choc pétrolier, les évolutions sont très nettes : la part du charbon a été divisée par 2,5 ; la part du pétrole est passée de 70 % à un peu plus de 40 % ; la part du gaz a presque doublé et la part de l'électricité primaire a progressé de 30 points, passant de 7 à 37 %. Au total, le pétrole représente 41,2 % de la consommation totale d'énergie, l'électricité 37,8 %, le gaz 13 %, le charbon 6,2 %, les énergies renouvelables 1,8 %".
6. Concernant les consommations correspondant aux usages "chauffage, eau chaude, cuisson", l'électricité représentait, en 1993, 42 % de la consommation dans le secteur résidentiel et 61 % dans le secteur tertiaire ; le gaz, 19,5 % dans le secteur résidentiel et 18,5 % dans le secteur tertiaire ; le fioul, 15,2 % dans le secteur résidentiel et 15,7 % dans le secteur tertiaire ; le chauffage urbain, 3,6 % dans le secteur résidentiel, sa part n'étant pas identifiée dans le secteur tertiaire. Il existait, en 1993, 373 réseaux de chaleur, d'une longueur totale de 2 812 km, desservant 14 506 abonnés (source CEREN : Centre d'études et de recherche économique sur l'énergie).
7. En diminution régulière depuis les chocs pétroliers, la consommation nationale de fioul domestique atteignait 17 293 kilotonnes en 1993. Cette consommation est répartie entre le chauffage des particuliers (51 %), l'agriculture (14 %), l'industrie (17 %) et, enfin, les marchés des collectivités publiques.
3. Les principaux opérateurs en matière de fourniture d'électricité, de gaz naturel et de fioul
EDF
8. A l'époque de la saisine, le monopole de la production (sous réserve de dérogations prévues en faveur de petits producteurs autonomes ou d'installations destinées à une auto-consommation dans les conditions prévues par le décret n° 55-662 du 20 mai 1955 modifié), du transport, de la distribution, de l'importation et de l'exportation d'électricité était confié à Électricité de France (EDF), établissement public national à caractère industriel et commercial, en application de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946.
GDF
9. En application de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, le monopole de la production, du transport, de la distribution, de l'importation et de l'exportation de gaz combustible a été confié à Gaz de France (GDF), établissement public national à caractère industriel et commercial. Des exceptions à la nationalisation ont été introduites pour les entreprises gazières dont la production annuelle moyenne de 1942 et 1943 était inférieure à 6 Mm3/an, seuil porté ultérieurement à 12 Mm3/an par une loi du 30 juillet 1960.
10. En 1949, la production et le transport du gaz naturel ont été exclus de la nationalisation ce qui a permis à quatre entreprises de produire du gaz naturel en France, alors qu'un régime particulier a été prévu pour la production de gaz des houillères nationales, des cokeries sidérurgiques, des hauts fourneaux et des raffineries.
Les producteurs et les distributeurs de fioul
11. La fourniture de fioul destinée à la production de chaleur est le fait d'opérateurs nombreux qui sont, pour certains adossés à des groupes nationaux mais, qui, pour la plupart, sont des opérateurs de petite taille.
12. Trois catégories d'entreprises distribuent du fioul domestique. Pour l'année 1996, les groupes pétroliers et leurs filiales ont assuré ensemble la très grande majorité des ventes nationales (77 %). Prises séparément, les filiales détenaient, pour la même année, 38 % du marché national, les principales étant les filiales d'Elf (41,5 %), de Total (9,3 %) et de BP (4,3 %).
13. Les négociants revendeurs indépendants, qui disposent soit d'une unique implantation locale soit d'un réseau de plusieurs points de vente, assurent 22 % des ventes totales. L'importance des négociants revendeurs indépendants décroît du fait, notamment, des rachats de fonds de commerce par les filiales de groupes pétroliers.
14. La distribution du fioul domestique est également assurée par la grande distribution. La part des ventes effectuée par la grande distribution, très minoritaire en 1996 (1 % des ventes nationales), est croissante, les points de vente ayant doublé entre 1995 et 1996, pour atteindre 180. A la différence de la clientèle des filiales de groupes pétroliers et des revendeurs indépendants, celle des grandes surfaces est presque exclusivement composée de particuliers.
15. Les distributeurs de fioul domestique s'approvisionnent auprès d'entrepositaires agréés et de grossistes, appartenant principalement aux groupes pétroliers. Les filiales de groupes pétroliers spécialisées dans la distribution de fioul domestique ne sont pas forcément liées à leur maison mère pour leurs approvisionnements. De leur côté, les distributeurs indépendants s'adressent en général à plusieurs fournisseurs, en fonction des conditions offertes.
B. - L'ORGANISATION DES SOCIÉTÉS EDF ET GDF SUR LE TERRITOIRE NATIONAL
16. Chaque établissement public est administré par un conseil d'administration tripartite composé de représentants de l'État, des consommateurs et du personnel. Un certain nombre de fonctions est exercé par une direction commune aux deux établissements : la direction EDF GDF Services, située à Paris, à La Défense dans les Hauts-de-Seine.
17. Les centres EDF GDF Services, au nombre de 102, sont répartis sur l'ensemble du territoire national. Ces centres relèvent de l'autorité de la direction EDF GDF Services. La direction EDF GDF Services comprend deux services appelés "Mission d'appui", l'un concernant le domaine du développement de l'électricité, l'autre concernant le domaine du développement du gaz ainsi qu'un centre d'Expertise commercial électricité et un centre développement gaz.
1. Les instances de concertation mises en place par EDF et les organisations professionnelles
18. Un protocole, daté du 14 novembre 1985, conclu dans le cadre du décret n° 49-935 du 13 juillet 1949, a été signé par EDF et les professionnels concernés par les appareils d'utilisation de l'électricité. Les organisations professionnelles signataires sont représentatives des professions liées à l'électricité, au commerce de la radio et à l'équipement ménager, au froid et au conditionnement de l'air, au commerce de quincaillerie, au commerce des appareils de chauffage, à la distribution des matériels électrique et électronique, à l'éclairage et à la régulation du trafic. Ce protocole a créé trois catégories de structures : au niveau national, une Commission nationale de liaison électricité (CNLE), au niveau local, des Commissions locales de liaisons électricité (CLLE) et des Commissions régionales de coordination électricité.
2. Les instances de concertation mises en place par GDF et les organisations professionnelles
19. La convention nationale "Professionnel Gaz Naturel" (PGN) du 6 juin 1988, conclue entre GDF et les organisations professionnelles UNCP, CAPEB-UNA CPC, UCF, a pour objet de renforcer les relations entre les installateurs de matériels et de systèmes utilisant le gaz naturel de GDF, d'améliorer l'image de la profession d'installateurs de matériel, de développer les relations constructeurs-distributeurs-installateurs-services après-vente et d'assurer la promotion des matériels et des systèmes utilisant le gaz naturel. Deux comités ont été créés, le Comité de coordination national gaz et le Comité de concertation local gaz.
3. L'organisation et les activités des centres EDF GDF Services
20. Les centres EDF GDF Services relèvent de l'autorité de la direction EDF GDF Services, commune aux sociétés EDF et GDF. Le contrôle de l'activité de chaque centre est exercé par le biais de contrats d'objectifs conclus avec la direction EDF GDF services. Les centres déclinent au plan local les objectifs et les moyens définis au plan national, notamment les aides commerciales et les partenariats avec les organisations professionnelles et les constructeurs de logements.
21. Les méthodes commerciales couramment employées sont la prospection par voie de mailing pour le marché domestique, la prospection à l'occasion des manifestations telles que foires, salons, portes ouvertes chez les installateurs. Les centres interviennent dans les procédures de contrôle de la qualification des installateurs. L'ensemble des décisions relatives aux actions commerciales sont prises dans le cadre des Comités locaux de liaison électricité (CLLE) et des Comités de concertation locale gaz (CCLG).
22. Les centres EDF GDF Services ne distinguent pas systématiquement les activités fonctionnelles liées à l'énergie "électricité" et à l'énergie "gaz naturel". Une démarche visant à séparer nettement les activités a été entreprise par quelques centres en 1996 et 1997. Les représentants des centres EDF GDF Services participent indifféremment aux deux CLLE et aux CCLG.
4. Promotelec
23. L'objet de Promotelec, association de la loi de 1901, créée en 1990, est défini de la manière suivante : "L'association a pour objet la promotion de la qualité des applications électriques dans le bâtiment notamment sur les plans de la sécurité, du confort, des économies d'énergie". Les activités développées par l'association concernent les locaux neufs et anciens. Elle vend ou distribue gracieusement des documents destinés à l'information des prescripteurs, des concepteurs, des installateurs et des utilisateurs. L'association organise ou participe à des réunions et des manifestations et met en œuvre des campagnes d'information. L'aspect important de l'activité de Promotelec concerne la promotion des labels (Confort Sécurité pour les logements existants, Confort Plus remplacé par Confort électrique en 1997 pour les logements neufs), leur évolution, leur contrôle et leur attribution.
5. Qualigaz
24. L'association Qualigaz, association de la loi de 1901, est agréée comme organisme de contrôle par arrêté ministériel du 1er décembre 1992. Des associations locales sont réparties sur l'ensemble du territoire national depuis le 1er janvier 1994. L'association se donne pour objectif de contribuer à accroître la sécurité des utilisateurs d'appareils domestiques à gaz. L'association a donc pour mission "d'effectuer des contrôles sur les installations intérieures neuves (immeuble neuf ou ancien), sur les installations intérieures complétées ou modifiées". Pour les installations existantes, Qualigaz propose un diagnostic à la demande des utilisateurs.
C - LES ACTIONS COMMERCIALES ENGAGÉES PAR EDF ET GDF
1. Les actions commerciales engagées par EDF
25. La note GP du 7 février 1994, "Fidéliser pour développer", est la note de référence versée au dossier concernant la stratégie commerciale d'EDF. Elle débute ainsi : "Fidéliser nos clients autour des usages concurrentiels de l'électricité est aujourd'hui une condition essentielle de la préservation de nos parts de marchés et donc du développement d'Électricité de France". Ce plan d'action de fidélisation est engagé sur la période 1994/1998. Au niveau national, le pilotage global de l'opération est assuré par le directeur du Développement Électricité, pour le compte de la direction générale d'EDF et de la direction d'EDF GDF Services. Au terme d'un constat préoccupant, EDF se propose d'agir sur le stock de clients insatisfaits en traitant prioritairement les contre-références notoires. Une note du 29 avril 1994 du service commercial électricité de la direction d'EDF GDF Services définit les aides pour traiter des contre-références notoires et fidéliser la clientèle.
26. Pour les logements neufs, si le chauffage électrique a obtenu le label "Promotelec Confort Plus", une prime de 3 000 F est versée au constructeur. Si le chauffage électrique a obtenu le label "Promotelec Confort Plus" et comporte, en plus, un système économe en énergie ou un système innovant normalisé (planchers/plafonds chauffants), une prime de 1 000 F est versée au constructeur signataire d'une convention ou à l'installateur. Si le chauffage électrique a obtenu le label "Promotelec Confort Plus Tempo", une prime de 1 500 F est versée au client. Ainsi, le montant des primes varie de 3 000 F à 4 500 F par logement neuf. En substitution de ces primes, un prêt Projelec d'un montant de 5 000 F à 140 000 F, d'une durée de 1 an, peut être accordé.
27. Pour les logements existants, en cas de premier équipement en chauffage électrique, si l'installation a obtenu le label "Promotelec Confort Sécurité" et si cette installation comporte, en plus, soit un système économe en énergie soit un système innovant normalisé, soit une programmation et une régulation, une prime de 3 000 F est versée au client et une prime de 1 000 F est versée à l'installateur. En cas de rénovation du chauffage électrique, le montant de l'aide est plafonné à 25 % de l'investissement. Elle n'est pas cumulable avec la prime du label "Confort Sécurité". A ces primes, dont le montant par logement existant peut totaliser de 3 000 F à 5 500 F, peut être substitué le prêt Projelec. La bonification de prêt représente une prime de 1 000 F à 3 000 F. Concernant les chaudières bi-énergie (électricité + fioul ou propane ou bois), les chaudières compactes, les chaudières Perche, les chaudières électriques en relève d'une chaudière bois, une prime de 1 000 F peut être versée à l'installateur. EDF accorde également des aides commerciales dans le cadre de conventions conclues avec des promoteurs, des organismes institutionnels du secteur HLM et des organismes professionnels d'installateurs.
2. Les actions commerciales engagées par la société GDF
Le contrat d'objectifs
28. Le contexte des actions de GDF s'inscrit dans le cadre du contrat d'objectifs conclu pour la période 1994/1996 entre l'État et l'établissement public. Parmi les enjeux et les orientations stratégiques du contrat d'objectifs figure la qualité qui doit se traduire par la mesure de la satisfaction des clients, par la mise en œuvre d'une démarche de garantie de services, par des actions incitatives pour améliorer les installations des consommateurs situées en aval des compteurs, notamment par la mise en place de partenariat avec les professionnels de la filière. Le contrat prévoit aussi que : "Gaz de France suscitera, en concertation étroite avec les collectivités territoriales concernées, la mise au point de schémas directeurs d'extension de la desserte en gaz conciliant, conformément aux termes de la circulaire interministérielle du 17 février 1993, la recherche d'un aménagement harmonieux du territoire et le respect d'une rentabilité économique minimale des investissements". Il est envisagé le raccordement, pendant les trois années du contrat, d'environ 650 communes nouvelles représentant une population d'un peu plus d'un million d'habitants. En matière de croissance, GDF doit poursuivre son développement dans le secteur de l'énergie et des services : "Les Pouvoirs publics sont favorables à l'augmentation de la contribution du gaz au bilan énergétique, notamment dans le domaine du chauffage". En outre, le contrat précise que "Gaz de France renforcera donc la place du gaz naturel dans les différents secteurs de consommation (résidentiel, tertiaire, industriel). Il s'attachera, en particulier, à promouvoir les usages performants du gaz". Ainsi, au moins 50 % des logements neufs construits dans une zone desservie en gaz seront équipés d'un chauffage au gaz d'ici la fin de l'année 1996. Au chapitre, "Modalités de mise en œuvre", le contrat d'objectifs précise que, s'agissant du développement des ventes de gaz, "Gaz de France assurera en priorité une croissance de ses marchés dans la zone desservie en gaz. Gaz de France respectera des conditions de concurrence loyale, tant sur le plan tarifaire qu'en ce qui concerne les aides commerciales. Le volume des aides commerciales restera en deçà du niveau objectif de 1993. Gaz de France recherchera, au fur et à mesure de l'évolution de la concurrence, à le réduire davantage et à le concentrer sur des techniques performantes".
29. Les actions nationales ont consisté à mettre en place des mécanismes d'aides financières, des partenariats avec les professionnels et les constructeurs de logements privés et institutionnels du secteur HLM.
Les aides commerciales et leur gestion
30. La direction d'EDF GDF Services a élaboré une note GEM 166 du 4 juillet 1994 à destination des directeurs des centres concernant la gestion des aides financières à compter du 1er juillet 1994. Sont exclus du champ d'application de la note, les abattements sur branchements, les participations versées suite à remise d'ouvrage ainsi que les primes et les bonifications de prêts versées au titre de la sécurité.
31. En préalable, la note précise que : "Les aides financières sont destinées à soutenir l'action commerciale tant pour le développement que pour la fidélisation, mais elles ne doivent en aucun cas constituer son principal levier. La baisse tendancielle du montant des aides engagées a été assurée avec succès par les Unités. Pour les années 1994 et 1995, le même plafond annuel est fixé à marché et à pression concurrentielle constante". La note précise que : "Les résultats obtenus en 1992, puis en 1993, ont confirmé le bien-fondé de ces nouvelles orientations. En effet, sur le marché du logement neuf, les placements sont passés de 29,8 % en 1991 à 36,4 % en 1993, tandis que le montant des aides financières était réduit de moitié". Les aides gérées par chaque centre concernent l'action commerciale sur les marchés résidentiel et tertiaire, industriel exclu. Ces aides sont plafonnées. Pour optimiser les aides, la note distingue, d'une part, les primes et les bonifications de prêts qui s'apparentent à "un sacrifice financier" et, d'autre part, les primes consacrées notamment au remboursement des études technico-économiques, à la formation des vendeurs, des promoteurs ou constructeurs de maisons individuelles, qui relève de "la coopération commerciale avec le bénéficiaire de la prime". La note indique qu'il convient de privilégier systématiquement la coopération commerciale car elle représente un investissement. Un tableau "d'encadrement des aides commerciales" précise le cadre d'utilisation des aides et les montants retenus par affaire.
32. Dans le secteur des maisons individuelles neuves, les particuliers peuvent obtenir des bonifications de prêts et 15 000 kWh gratuits. Dans le cadre d'un accord passé avec un constructeur de maisons individuelles, la coopération commerciale prend la forme de primes et de bonifications de prêts. Dans les deux cas, l'enveloppe maximum est de 4 500 F par logement et le maximum recommandé par affaire est de 9 000 F par logement.
33. Pour un pavillon existant, en cas de conversion d'un chauffage "fioul" au gaz ou d'un premier équipement au chauffage au gaz, la coopération commerciale prend la forme de primes au diagnostic thermique et à l'étude d'installation, les aides commerciales prennent la forme de bonifications de prêts. L'enveloppe maximum est de 4 000 F par logement, avec un montant maximum recommandé par affaire de 15 000 F par logement. Pour un appartement existant, en cas de premier équipement au chauffage au gaz, les mêmes aides sont accordées pour un montant maximum recommandé par logement de 7 000 F.
34. Pour les appartements neufs ou non chauffés, la coopération commerciale prend la forme de primes finançant les études préalables, l'optimisation thermique, d'aides à la commercialisation des programmes PAP. Les aides financières comportent la prime versée au maître d'ouvrage et la prime au vendeur de chaleur. En fonction de la technique retenue, les aides financières varient de 2 000 F à 4 500 F par logement pour un montant maximum recommandé par affaire variant de 4 000 F à 9 000 F par logement.
35. En ce qui concerne le patrimoine existant de l'Union nationale des fédérations d'organismes d'HLM, la convention conclue entre cet organisme et GDF, prévoit, en cas de conversion de la chaufferie "fioul" au gaz naturel, une prime pour le diagnostic de la chaufferie. Une prime de 1 000 F par logement est versée au maître d'ouvrage avec un maximum recommandé de 3 000 F par logement. En cas de conversion de la chaufferie "fioul" au gaz avec une répartition des charges et l'interface domotique collective (IDC), la prime est de 4 500 F par logement avec un maximum recommandé de 6 000 F par logement. S'agissant des constructions neuves ou du passage au gaz naturel de chaufferies existantes, les aides financières consistent à accorder des bonifications de prêts ou à procéder à des montages financiers particuliers. La valeur retenue pour le calcul de l'enveloppe maximum par centre est de 1 ou 1,5 centimes par kWh, pour un montant maximum recommandé de 4 centimes par kWh.
36. La note ICG n° 94-59 du 4 septembre 1994 précise les modalités d'application des aides financières aux opérations concernant le passage de chaufferies existantes au gaz naturel. Pour ces affaires, qui, selon la note, nécessitent "un effort financier", plusieurs types d'aides sont possibles : "une coopération commerciale sous forme par exemple de remboursement d'étude technico-économique, de partenariat avec les acteurs de la filière, etc, une participation aux frais de branchement et un prêt spécifique DAS 4, le prêt Immoconfort bonifiable localement uniquement". Le prêt Immoconfort concerne les immeubles résidentiels existants privés chauffés collectivement (copropriétés et immeubles de propriétaires particuliers ou institutionnels) et les bâtiments tertiaires privés. Son montant couvre jusqu'à 100 % des travaux liés à l'énergie gaz naturel en neuf et en existant, en conversion ou en fidélisation, quel que soit l'usage du gaz naturel. Les bonifications sont calculées dans la limite de 2 centimes par KWh de consommation la première année ou de 4 centimes en cas de mise en œuvre de techniques performantes. En ce qui concerne les branchements au gaz naturel, l'occupant d'un logement existant peut obtenir une réduction : 3 372 F TTC au lieu de 5 337 F TTC. Pour les logements neufs, le branchement peut être gratuit à condition que le client traite avec un constructeur de maison individuelle signataire d'une convention avec GDF. Le promoteur peut bénéficier d'une prime de 1 000 F ou de 2 000 F par logement.
Le plan de relance en résidentiel collectif existant privé
37. La note ICG n° 94/85 du 23 décembre 1994 du service commercial Gaz d'EDF GDF Services concerne le "Plan de relance de Gaz de France en résidentiel collectif existant privé". La note fait le constat de la très forte baisse des placements en gaz naturel en résidentiel entre 1992 et 1993 (- 30 %), période au cours de laquelle les conversions de chaufferie au gaz naturel sont passées de 65 000 logements à 45 000 logements. Ce fait s'explique, selon les termes de la note, "par un renforcement des pressions de la concurrence (prix bas du fioul, actions du chauffage urbain)". GDF veut augmenter les placements commerciaux de 30 000 logements sur les deux années à venir en résidentiel collectif existant. Le contexte, selon GDF, est favorable pour deux raisons : la bonne image du gaz naturel et la vétusté du parc des chaufferies collectives existantes (2/3 ont plus de 20 ans). La nouvelle cible porte sur le parc de petites copropriétés de 20 logements.
38. Le plan de relance envisage des actions vers les propriétaires institutionnels tels que les compagnies d'assurances, les caisses de retraite et de prévoyance et les banques. Les axes de la stratégie sur ce marché sont de "convertir le parc fioul et chauffage urbain au gaz naturel" et de "fidéliser le parc au gaz naturel". GDF invite chaque centre à identifier le parc de copropriétés de leur zone d'intervention et à créer un fichier à partir d'un logiciel Coprocible lequel est compatible notamment avec les fichiers Optimia, Clio, Léopard, Lynx.
39. La gamme d'offres se présente sous forme de financement d'études dans le cas où une copropriété souhaite faire une étude complète de son installation, à condition que le bureau d'études ait des compétences reconnues soit choisi par le client et accepté par l'exploitant en place. Le niveau national prend à sa charge la moitié du coût de cette étude à concurrence de 5 000 F par immeuble. Une autre forme d'offres porte sur le pré-diagnostic de chaufferie qui sera effectué par les installateurs. Ensuite, il y aura abondement des aides financières pour que les centres puissent augmenter le montant des aides commerciales attribuées aux conversions de chaufferies existantes. Ainsi, le montant recommandé maximum passera dans ce cas à 1 000 F par logement lequel pourra être utilisé soit en réduction de l'investissement de la copropriété soit en bonification du prêt Immoconfort.
Le plan de relance de GDF en logements neufs "promotion privée"
40. La note ICG n° 95-04 du 17 janvier 1995 émise par le centre d'Expertise développement gaz concerne le "Plan de relance de Gaz de France en logements neufs promotion privée" pour les années 1995 et 1996. La note se réfère au contrat d'objectifs signé entre l'État et GDF pour la période 1994-1996 dans lequel il est prévu qu'au moins 50 % des logements construits en zone desservie gaz devront être équipés d'un chauffage au gaz d'ici l'année 1996. Pour atteindre cet objectif, GDF veut renforcer sa stratégie de partenariat avec les promoteurs. Le centre EDF GDF Services versera une participation aux promoteurs pour l'étude d'optimisation thermique et technique. La participation maximale du niveau national sera de 1 000 F hors taxes par logement, avec un plafond de 40 000 F hors taxes par opération. Pour faciliter la commercialisation des programmes, il est mis à disposition gratuite l'ensemble des moyens de communication et de publicité sur le lieu de vente créés dans le cadre de la campagne "logements neufs". Par ailleurs, un budget de 20 000 F hors taxes peut être mis à la disposition de chaque promoteur pour monter une opération en partenariat, avec un affichage Gaz de France.
D. - LA SAISINE
41. La Confédération nationale de la distribution pétrolière (CNDP) est une association de la loi de 1901 qui rassemble la Fédération des combustibles, la branche nationale des négociants en produits pétroliers (BNNPP) du Conseil national des professions de l'automobile et le Groupement intersyndical des combustibles (GIC). Ces différentes organisations professionnelles représentent la quasi-totalité des entreprises de distribution de charbon et de fioul domestique.
42. Selon ses statuts, la Confédération a, notamment, pour objet "de réunir en vue d'une action commune tous les professionnels dont l'activité est liée à la distribution de produits pétroliers", "d'étudier toutes les questions d'ordre général touchant à favoriser le développement ou la défense des professionnels de la distribution pétrolière" et "d'introduire auprès des juridictions compétentes toutes actions qu'elle jugerait nécessaires à la défense des intérêts moraux ou économiques de ses adhérents".
43. La Confédération nationale de distribution pétrolière s'est transformée, en mai 1997, en une Union de syndicats professionnels régie par les dispositions du Code du travail et a pris la dénomination de Fédération française des combustibles et des carburants (FF2C).
44. Dans sa saisine, la CNDP expose que le fioul est confronté à la concurrence des énergies substituables que sont l'électricité et le gaz pour lesquels les établissements publics à caractère industriel et commercial, EDF et GDF, se sont vus conférer le monopole de la production, du transport, de la distribution, de l'importation et de l'exportation. Elle estime que "les structures communes dont se sont dotées EDF et GDF et les méthodes que ces établissements publics mettent en œuvre pour promouvoir l'électricité et le gaz naturel comme mode de chauffage domestique entrent à différents égards dans le champ des prohibitions édictées aux articles 7 et 8 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986".
45. Tout d'abord, la FF2C expose que les centres EDF GDF Services, structures commerciales communes aux deux établissements, favorisent et organisent la limitation de la concurrence entre les deux entreprises publiques dans la mesure où les offres commerciales faites par les différents centres EDF GDF Services pour la promotion du gaz naturel sont systématiquement réservées à la transformation d'installations utilisant le fioul, et, accessoirement, le propane ou le charbon, à l'exclusion de celles utilisant l'électricité. La FF2C considère que : "de telles actions ciblées sur le fioul domestique et épargnant au contraire l'énergie substituable qu'est l'électricité, procèdent d'une stratégie de répartition de marché du chauffage domestique, manifestement contraire à l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986".
46. Ensuite, la Confédération soutient que : "les structures commerciales communes dont se sont dotés EDF et GDF renforcent les moyens, déjà hors du commun par rapport à ceux d'entreprises du secteur concurrentiel, dont dispose chacun des établissements publics du fait de son monopole légal" et que : "l'éviction de leur marché des entreprises de fioul domestique se trouve ainsi facilitée dans des conditions contraires à l'article 8-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, illustrées par les méthodes promotionnelles d'EDF et GDF".
47. Les méthodes dénoncées par la saisine concernent la charte de "L'électricien partenaire", habilitée à délivrer les labels "Confort Plus" et "Confort Sécurité", qui comporte d'importantes obligations promotionnelles, la préconisation des réseaux d'installateurs, titulaires des labels et certificats et engagés dans des actions commerciales, les actions fondées sur l'offre d'avantages exorbitants et l'utilisation des collectivités locales comme vecteur de promotion de l'électricité et du gaz et spécialement de l'extension du réseau GDF. Ces méthodes sont, selon la CNDP, des abus manifestes de la position que confèrent aux établissements EDF et GDF leurs monopoles légaux et leur image de service public.
E. - LES PRATIQUES RELEVÉES
1. Les offres commerciales communes à l'énergie "électrique" et à l'énergie "gaz naturel"
L'édition de documents communs à l'énergie "électrique" et à l'énergie "gaz naturel"
48. Le chef du service commercial du centre EDF GDF Services Touraine a déclaré, concernant les actions menées en matière de politique commerciale conduite conjointement dans les secteurs de la fourniture de l'électricité et du gaz, que : "... Dans le neuf, un courrier est systématiquement adressé aux demandeurs d'un permis de construire proposant les deux énergies. A réception de la réponse du client, selon le choix qu'il a fait connaître, il est dirigé vers un conseiller chauffage électricité ou gaz. Pour le salon de l'Habitat 96, une opération "branchement gratuit" a été organisée pendant ces quatre jours. Il n'existe pas, par ailleurs, de politique systématique de démarchage des clients dans l'existant diffus en particulier..." (déclarations du 28 mars 1997).
49. Le centre EDF GDF Services Touraine adresse à un client qui se fait construire une maison plusieurs lettres-types. Une lettre comporte la formule suivante : "Prochainement, vous ferez appel à EDF GDF Services Touraine pour la raccorder au réseau de distribution électrique et (ou) de gaz". Si le client a choisi le chauffage électrique, une lettre lui est adressée pour l'informer des avantages qu'il peut obtenir. Si le client a choisi le gaz naturel, un guide "Vivre mieux avec le Gaz Naturel" lui est transmis.
50. Le chef de service des relations commerciales du centre EDF GDF Services Annecy-Leman a déclaré : "Les clients dans le neuf sont identifiés à partir des permis de construire. Ils se voient proposer une offre gaz et électricité. Dans l'existant, s'il y a extension ou renouvellement de réseau, ainsi que pour les CNG (concessions nouvelles de gaz), le contact est établi par mailing ou par démarchage. Il n'est pas proposé d'offres promotionnelle ponctuelle pour le chauffage au gaz..." (déclarations du 14 février 1997).
51. Le centre EDF GDF Services Reims-Champagne a préparé une lettre-type à l'adresse d'entreprises qui souhaitent promouvoir leur activité afin de les inviter à intégrer, dans leurs opérations commerciales, le chauffage électrique ou le chauffage au gaz naturel.
L'exclusion du remplacement d'un chauffage fonctionnant au gaz naturel ou à l'électricité du bénéfice des aides commerciales
52. Une opération promotionnelle du centre EDF GDF Services Reims Champagne, limitée à la ville de Fismes, sous forme de publipostage, a ainsi été effectuée par l'agence clientèle Roosevelt-Nord du centre, le 22 mai 1995. L'objet de cette opération est de placer le gaz naturel pour le chauffage, l'eau chaude et la cuisine : "... Nous avons deux offres avantageuses pour toute installation de chauffage au gaz naturel en remplacement d'un chauffage fonctionnant à une autre énergie que le gaz naturel ou l'électricité...".
53. Le centre EDF GDF Services de la Vienne a adressé une lettre nominative, datée du 27 avril 1994, à une entreprise, pour l'informer des aides financières "gaz" et "biénergie" dans l'habitat individuel neuf et existant. Dans l'habitat existant, il est question du prêt Credigaz lequel "ne s'applique pas aux logements chauffés initialement à l'électricité".
54. Le centre EDF GDF Services de Saint-Mandé a élaboré une lettre-type adressée à des prospects, le 17 octobre 1994. La lettre a pour objet de proposer une solution de chauffage au gaz naturel. Outre une offre de 15 000 kWh gratuits, elle comporte, en bas de page, en petites lettres, la mention suivante : "Offre valable jusqu'au 31 décembre 1994 dans le cas d'une installation de chauffage gaz naturel (remplacement d'énergie, hors chauffage électrique)".
55. Le centre EDF GDF Services Rhône Alpes a émis, pour l'année 1995, un document concernant "L'aide commerciale 1995 accordée par Gaz de France" pour l'habitat individuel existant. Il s'agit du prêt Credigaz prévu "pour toute création d'installation de chauffage fonctionnant au gaz naturel ou en substitution d'énergie (autre que gaz naturel et électricité)".
Les conventions conclues avec des promoteurs et des organismes institutionnels
56. Plusieurs conventions conclues avec des promoteurs et des organismes institutionnels HLM comportent simultanément la promotion de l'énergie "gaz naturel" et de l'énergie "électricité".
57. La convention conclue entre le centre EDF GDF Services Annecy-Leman et le promoteur Promogim, en 1995, prévoit à l'article 2 intitulé : "Engagement qualitatif de Promogim" que "La société Promogim s'engage à tout mettre en œuvre pour équiper ses logements avec le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire à l'une ou l'autre des deux énergies".
58. Les conventions "Qualité thermique" conclues par le centre EDF GDF Services Charente Maritime, en 1995 et 1996, comportent un article 1 ainsi rédigé : "Soucieux de promouvoir des installations de chauffage et de production d'eau chaude de qualité dans les constructions de maisons individuelles, le constructeur ci-dessus désigné et EDF GDF Services... se sont rapprochés pour définir les critères qualitatifs à développer...". Les critères qualitatifs sont développés à l'article 2 au titre des engagements du promoteur : "Pour les maisons chauffées à l'électricité... Pour les maisons chauffées en gaz naturel..."
Les conventions définissent des zones desservies respectivement par les sociétés EDF et GDF
59. Une convention a été conclue, pour les années 1995 et 1996, entre l'OPAC de la Moselle et le centre EDF GDF Services Metz Lorraine. Cette convention concerne l'équipement au gaz naturel de l'ensemble des logements en trois usages (chauffage, eau chaude et cuisine) dans les constructions neuves ou existantes. La convention précise que "les affaires en chauffage électrique de qualité (Confort Plus ou Confort Sécurité) sur les zones desservies par EDF ne seront pas comptabilisées pour le calcul de la prime de fidélisation".
60. Une convention a été conclue entre l'OPAC de Loire-Atlantique et le centre EDF GDF Services Nantes Atlantique pour l'équipement des logements des programmes 1993/1994 en gaz naturel trois usages, chauffage, eau chaude, cuisine et en chauffage électrique conforme aux prescriptions du label Confort Plus. Aux termes de l'article 1 du chapitre B de la convention, intitulé : "Engagements de l'OPAC de Loire-Atlantique", l'OPAC s'engage à : "équiper en chauffage électrique avec label "Confort Plus" l'ensemble des logements qu'il construira de préférence sur les zones non desservies en gaz naturel...". L'article 2 du chapitre B, intitulé : "Engagements d'EDF-GDF Services Nantes Atlantique", prévoit que "Pour aider l'OPAC de Loire-Atlantique à appliquer cette nouvelle réglementation et pour satisfaire aux préoccupations actuelles d'Économie, de Qualité, Confort et Sécurité, EDF - GDF Services Nantes Atlantique s'engage à verser une prime pour tout logement (hors zone desservie en gaz naturel, sauf accord particulier d'EDF) ayant obtenu le label Confort Plus".
61. Le chef du service commercial du centre EDF GDF Services Touraine a précisé : "... Sur les quatre offices du département, une convention a été signée avec l'OPAC 37, aux termes de laquelle, pour une durée de 3 ans, l'Office s'engage à équiper ses nouveaux programmes de chauffage électrique hors zone gaz, ou du chauffage au gaz. L'Office s'engage à obtenir le label Promotelec Confort Plus ou à respecter les caractéristiques de la gamme Climalliance" (déclarations du 28 mars 1997). Cette convention, conclue le 19 septembre 1995, concerne les logements neufs construits par l'OPAC 37 et les logements existants faisant l'objet d'une réhabilitation lourde. Les engagements de l'OPAC sont définis à l'article III :
"Sur les zones desservies (ou dont GDF envisage la desserte à moyen terme) en gaz naturel du département d'Indre-et-Loire, l'OPAC 37 s'engage à : équiper la totalité des logements à construire en solution "gaz naturel" permettant les besoins en chauffage, production d'eau chaude sanitaire et cuisine..." ;
- "Sur les zones non desservies en gaz naturel du département d'Indre-et-Loire, l'OPAC 37 s'engage à : équiper la totalité des logements à construire en solution "tout électrique" permettant de satisfaire les besoins en chauffage, production d'eau chaude sanitaire et cuisine".
2. Les aides commerciales de GDF
62. Les aides commerciales de GDF sont ciblées sur le remplacement des chauffages alimentés au fioul, au propane ou au charbon.
63. Le centre EDF GDF Services Nantes Atlantique a adressé à des clients potentiels un dépliant qui propose un prêt à taux 0 % : "Gaz de France et les installateurs, sous convention avec GDF, prennent en charge les intérêts de votre crédit pour l'installation d'une chaudière au gaz naturel avec eau chaude sanitaire accumulée en remplacement de votre chaudière fioul, propane ou charbon".
64. Un publipostage, daté de 1994, invite les clients à se rendre dans un centre commercial de Nantes dans les termes suivants : "Pour convertir votre chauffage fuel, propane ou charbon, des conditions exceptionnelles vous seront accordées".
65. Le 1er mars 1996, l'agence de Rochefort du centre EDF GDF Services Charente Maritime a diffusé une publicité à l'occasion du 2ème salon de la rénovation de l'Habitat à Royan concernant une offre commerciale de 10 000 kWh gratuits "proposée pour le remplacement de votre ancienne chaudière fioul par une chaudière fonctionnant au gaz naturel".
66. Le compte rendu du Comité de concertation local gaz du 18 avril 1996 de ce centre annonce la mise en place d'une publicité concernant une offre de 10 000 kWh gratuits. Le libellé de cette publicité est le suivant : "Offre de 10 000 kWh de gaz naturel gratuits (environ 1 800 F), si signature d'un engagement pendant les 6 jours de la foire, sur le stand, dans les 6 mois après signature. Cette offre est valable uniquement pour le remplacement d'une ancienne chaudière fioul par une chaudière fonctionnant au gaz naturel".
67. Le centre EDF GDF Services du Loiret a émis une lettre nominative du 26 avril 1993 pour une offre de rénovation de chauffage. L'offre comporte en petits caractères la mention suivante : "Offre valable pour le remplacement d'une chaudière fioul, bois, propane par une chaudière Gaz Naturel avant le 30/11/93 sur le territoire de l'agence EDF GDF de Montargis ; réservée aux 100 premiers clients : 15 000 kWh, soit 2 600 F TTC correspondant environ à 50 % du chauffage d'un pavillon de 80 m² moyennement isolé".
68. Le centre EDF GDF Services Nantes Atlantique a lancé une invitation au centre commercial Beaulieu à Nantes du 13 au 18 mars 1995 par GDF et les installateurs Confort Gaz. L'offre consiste en une prime de 1 000 F pour la reprise de l'ancienne chaudière, formulée dans les termes suivants : "Gaz de France et ses partenaires distributeurs vous offrent 1 000 F pour l'installation d'une chaudière gaz naturel avec eau chaude accumulée en remplacement de votre ancienne chaudière fioul, propane ou charbon".
69. Le centre EDF GDF Services Savoie a adressé un publipostage, daté du 1er septembre 1995, à des clients potentiels, annonçant une prime de 5 000 F aux propriétaires d'un pavillon individuel "dans lequel s'installe un chauffage de gaz naturel". Cette opération s'intitule "Opération 5 000 F". La promotion de l'opération, prévue du 1er septembre au 31 octobre 1995, a été effectuée dans un journal local du 4 octobre 1995 pour "stimuler les PGN". La prime de 5 000 F, versée aux cent premiers clients, se compose d'une prime de 2 000 F à la charge de GDF, d'une prime de 2 000 F à la charge des grossistes et de 1 000 F à la charge des installateurs.
3. Les conditions de participation financière des centres EDF GDF Services aux frais d'assemblée générale des copropriétés
70. Le centre EDF GDF Services Marseille a réalisé un message publicitaire sous forme de lettre nominative concernant une offre exceptionnelle pour l'installation d'une chaufferie. L'offre comporte un encadré intitulé : "Une offre exceptionnelle pour 1996" ainsi rédigé : "Gaz de France prend en charge les frais de votre prochaine Assemblée Générale de copropriétaires, à condition que la modernisation de la chaufferie au gaz naturel soit à l'ordre du jour, si vous nous retournez le coupon réponse ci-joint avant le 29 février 1996. Cette offre est valable jusqu'au 24/02/96 pour un montant maximum de 3 000 F TTC concernant les frais d'assemblée générale (courriers recommandés, honoraires, frais de réalisation et d'expédition des PV)".
71. Une lettre datée du 13 novembre 1996 du syndic du groupe UFFI adressée au centre EDF GDF Services Marseille accuse réception du versement de 3 000 F au titre de la participation aux frais de convocation de l'assemblée générale du 21 mai 1996 de la résidence Cluny "au cours de laquelle a été adoptée le passage au gaz de l'installation de chauffage de cet immeuble".
72. Pour une résidence située 149-153 boulevard Rabatau, par lettre du 21 juillet 1996, le centre EDF GDF Services Marseille a précisé : "Nous souhaitons être présents lorsque vous présenterez cette proposition aux copropriétaires lors de cette assemblée générale". de même, par lettre du 2 mai 1996, le centre, dans le cadre de la rénovation d'une chaudière dans une résidence située 161-163 boulevard Rabatau, a précisé que "Nous souhaitons être présents lorsque vous présenterez cette proposition aux copropriétaires et au syndic lors de cette assemblée générale".
73. A l'occasion du 1er salon de la copropriété à Paris, la direction d'EDF GDF Services a rédigé un document publicitaire daté du 29 août 1995 qui prévoit la prise en charge de l'ensemble des frais de la prochaine assemblée générale de copropriétaires "à condition que la modernisation du chauffage au gaz naturel soit à l'ordre du jour".
4. Les bilans comparatifs entre énergie "gaz naturel" et énergie "fioul"
74. Par lettre du 16 juillet 1996, le centre EDF GDF Services Marseille a écrit au syndic d'un immeuble situé 108, Chemin Saint Jean du Désert à Marseille, le cabinet Des 5 Avenues, pour l'informer des propositions commerciales suivantes : raccordement gratuit au réseau de gaz naturel, prime commerciale exceptionnelle de 10 000 F, obtention d'un prêt à 0 % sur une durée de 5 ans. Ce même taux est proposé le 16 septembre 1996 à une copropriété située au 255, avenue de Montolivet. Un autre courrier, daté du 1er avril 1996 et concernant la modernisation d'une chaufferie située rue du Bosquet, propose un taux de 8 % sur 10 ans. Dans les trois cas, la proposition est accompagnée d'une comparaison avec le financement d'une chaufferie au fuel, sur la base d'un "taux d'emprunt moyen fuel-oil domestique" de 10 %, sans que ce taux soit justifié.
5. Le recensement des sites à convertir au gaz naturel
75. La convention conclue entre le centre EDF GDF Services Reims Champagne et la Chambre FNAIM de l'Immobilier Marne Ardennes, le 8 février 1996, pour une échéance de fin janvier 1997, prévoit un recensement des sites à convertir au gaz naturel. L'article 3 de la convention, intitulé : "Axes de partenariat individuel", comporte un paragraphe 3 titré : "Recensement du parc des copropriétés à convertir au gaz naturel pour une meilleure planification des travaux". Ce paragraphe débute ainsi : "Dans le but de maîtriser les coûts, il est de l'intérêt des deux parties de prévoir et/ou d'étudier suffisamment à l'avance les sites sur lesquels il pourrait y avoir des travaux de rénovation de chaufferie et d'amenée du gaz naturel. Le syndic de copropriétés pourra organiser, avec le soutien du Centre EDF GDF Services, un recensement du parc des copropriétés potentielles à convertir". L'article 3 prévoit aussi que le gestionnaire s'engage à mettre à disposition les coordonnées : "- des copropriétés, qui sont déjà équipées des énergies diffusées par EDF/GDF, pour un suivi de gestion en commun - des copropriétés actuellement à une énergie concurrente afin d'entamer une démarche de promotion du gaz naturel en commun". La convention énonce ensuite les informations minimum qui devront être communiquées au centre EDF GDF Services Reims Champagne : "- adresse postale précise de la résidence - nom de la résidence - nom et adresse de l'exploitant s'il y a lieu - type de contrat de l'exploitant ayant en charge la chaufferie - nombre de bâtiments - nombre de logements - énergie de chauffage et de production d'eau chaude - nature du chauffage (individuel et collectif) - nom du président du conseil syndical - consommations annuelles de fioul domestique - âge de la chaufferie". Dans ce même article, figure un paragraphe 4 intitulé "Proposition de modernisation des chaufferies existantes". Ce paragraphe commence par l'obligation suivante : "Les gestionnaires devront également informer leur correspondant privilégié des dates et ordres du jour des assemblées générales". Le correspondant est un agent du centre EDF GDF Services Reims Champagne.
76. Le centre EDF GDF Services Touraine a conclu, le 16 janvier 1996, avec la Chambre FNAIM d'Indre-et-Loire, une convention d'une durée de deux ans à compter du 16 janvier 1996, qui oblige, comme la précédente, l'administrateur de biens à fournir au centre, (EGST dans la convention), des informations précises sur l'identification des sites. L'article 3.4, intitulé : "Recensement du parc des copropriétés à convertir au gaz naturel pour une meilleure planification des travaux", précise que : "Dans le but de maîtriser les coûts, il est de l'intérêt des deux parties de prévoir et/ou d'étudier suffisamment à l'avance les sites sur lesquels il pourrait y avoir des travaux de rénovation de chaufferie et d'amenée du gaz naturel. L'administrateur de biens pourra organiser, avec le soutien d'EGST, un recensement du parc des copropriétés potentiellement à convertir".
6. Le contrat de mandat "Cleogaz"
77. Le centre EDF GDF Services Charente Maritime a conclu, le 30 avril 1996, avec le syndicat des copropriétaires de la résidence Salengro à Aytre, un contrat de mandat "Cleogaz". La convention, après avoir exposé, d'une part, que : "l'immeuble est équipé d'une installation collective de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire fonctionnant au fioul" et, d'autre part, que "par assemblée générale des copropriétaires du 28 novembre 1995, il a décidé de procéder à des travaux... pour la rénovation de l'installation ainsi que de l'alimenter au gaz naturel", prévoit que : "Dans le cadre de la fourniture de gaz naturel par GDF, et outre la conclusion d'un contrat y afférent, GDF a proposé au client de le représenter pour conclure, au nom et pour le compte du client, les contrats avec les professionnels compétents en vue de l'exécution et du financement des travaux, ainsi que de l'entretien de l'installation, objet des travaux...".
7. La garantie de prix (FOD-Fioul-Oil-Domestique)
78. La note GCG 60 du 22 mai 1996 du centre d'Expertise développement gaz, relative aux aides commerciales destinées au secteur HLM, adressée aux directeurs des centres, annonce : "En complément de la GEM 166A sur le nouveau système de gestion des aides commerciales, cette note présente le cadre de cohérence qui a été défini pour les logements existants privés en chauffage collectif (copropriétés et immeubles appartenant à des investisseurs soit institutionnels soit particuliers). Deux nouvelles dispositions ont été prises afin de redynamiser ce marché et mieux répondre aux préoccupations de décideurs. Il s'agit d'un prêt à taux 0 % et d'une garantie de compétitivité. Cette note précise : "Il s'agit de mettre en avant un argument commercial pour des clients qui s'interrogent sur l'évolution du prix des énergies. Cet argument peut se transformer, en cas de nécessité, en contrat passé entre le client et le Centre pour une durée de trois ans. Il n'est donc pas à proposer systématiquement. Par ce contrat, Gaz de France s'engage à ce que le prix du gaz naturel pour un client "type" reste inférieur, pendant une durée limitée à 3 ans à celui du fioul domestique de référence. La garantie de compétitivité ne fera pas l'objet d'une communication large ; elle ne sera portée que par les Unités. Elle sera à intégrer dans le plafond d'aide de 3 000 F par logement. Les modalités sur la mise en place et le suivi de cette garantie de compétitivité sont détaillées dans la note DC 96/10".
79. Le directeur commercial du centre EDF GDF Services Marseille, a remis le seul contrat de fourniture de gaz naturel comportant une garantie de compétitivité qui a été conclu par le centre. L'annexe au contrat définit : "les conditions d'application d'une garantie de compétitivité sur fioul domestique aux consommations de gaz naturel livrées dans le cadre du contrat de fourniture auquel est rattachée cette annexe".
8. Les clauses d'approvisionnement exclusif
La convention conclue entre le centre EDF GDF Services Savoie et l'OPAC de Savoie
80. Une convention de "Partenariat Qualité - Confort - Performance en logements neufs" a été conclue entre l'OPAC de Savoie et le centre, le 2 février 1994, à échéance du 31 décembre 1994, par laquelle l'OPAC s'engage à équiper l'ensemble de ses logements "en chauffage et en production d'eau chaude sanitaire au gaz naturel ou à l'électricité en zones desservies en gaz". La convention prévoit que : "Si une des réalisations venait à être équipée par une autre source d'énergie pour la production de chauffage et d'eau chaude sanitaire, le paiement des primes relatives à la totalité des programmes immobiliers serait remis en cause. Le point sera fait annuellement et l'accord sera donné pour le paiement des sommes dues à la mise en service de chaque opération".
Les conditions d'attribution d'une aide financière à un particulier
81. Le centre EDF GDF Services Sarthe a subordonné un abattement sur le coût d'un raccordement au réseau de gaz naturel à l'engagement par le client, d'une part, d'utiliser le gaz naturel pour les trois usages, cuisine, eau chaude sanitaire et chauffage et, d'autre part, d'installer les appareils correspondants. Le non-respect de ces engagements entraîne le remboursement de la différence entre le prix réel du branchement au moment de sa réalisation et le prix forfaitaire dont il a bénéficié.
Le protocole conclu entre le centre EDF GDF Services Loire et la commune de Charlieu
82. Par lettre du 29 mai 1998, la brigade interrégionale d'enquête de Lyon a transmis, à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, une "Note de transmission de fiche de renseignements concernant des indices d'actions anticoncurrentielles". La fiche émane de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de la Loire (DDCCRF). Elle fait état d'une demande d'avis présentée par la sous-préfecture de Roanne à la DDCCRF concernant une délibération du conseil municipal approuvant, le 23 février 1998, le protocole d'accord signé le 13 février entre le maire et le centre EDF GDF Services Loire au sujet du raccordement au gaz naturel de dix terrains nus du lotissement Montplaisir situé à Charlieu.
83. Par ce protocole, "Gaz de France s'engage à amener le réseau gaz naturel à l'entrée du lotissement et à desservir chacun des lots en exécutant tous les raccordements et (en) effectuant la pose des coffrets et socles recevant les branchements, et ce à un prix préférentiel de 2 412 F TTC par lot... au lieu des 5 247 F TTC ordinairement facturés pour ce type d'opération". Selon la fiche, la mairie "s'engage à proposer à tous les acquéreurs des terrains en cause l'utilisation du gaz naturel pour leurs besoins domestiques de chauffage et production d'eau chaude sanitaire - ainsi qu'à informer et remettre à chacun d'eux le formulaire de crédit Batigaz leur permettant d'accéder à un prêt de 20 000 F à taux 0 % sur 5 ans afin de financer l'installation du chauffage central" et le protocole précise que "la mairie s'engage à ce que tous les clients prennent le chauffage au gaz naturel. En cas de désistement de ces derniers en faveur d'une autre énergie, le complément financier du prix de raccordement sera facturé à la mairie, soit une différence de 5 247 F - 2 142 F=2 835 F TVA comprise par lot non utilisateur du gaz naturel". Il est encore précisé que : "La même pénalité est prévue pour les parcelles non vendues à l'échéance de 3 ans" et que : "les clients doivent être orientés par GDF sur la gamme des chaudières Climalliance et sur les Points Confort Gaz Naturel".
Les conditions particulières de vente d'une alimentation au gaz naturel à Marseille
84. Des conditions particulières "gaz" ont été émises par le centre EDF GDF Services Marseille pour une résidence située 4, rue Martiny à Marseille. L'opération concerne une alimentation en gaz naturel d'une chaufferie avec réalisation de travaux à partir du réseau jusqu'au compteur placé à l'intérieur de la chaufferie. Le montant des travaux réalisés par GDF est de 14 600 F HT. GDF prend en charge le coût du branchement et propose un prêt à 0 % sur 3 ou 5 ans ou une prime d'un montant de 9 000 F TTC. En cas de non-souscription du contrat de gaz naturel dans un délai de 12 mois après la réalisation des travaux, la copropriété doit rembourser à GDF la somme de 14 600 F HT correspondant au montant des travaux. En outre, il est prévu que la copropriété doit s'engager à se servir du gaz naturel pour le chauffage au minimum pendant cinq ans : "De plus, vous vous engagez à vous servir du Gaz Naturel pour votre chauffage au minimum 5 ans".
F. - LES GRIEFS NOTIFIÉS
85. Les griefs suivants ont été notifiés et maintenus dans le rapport :
- à l'encontre d'EDF et GDF, pour avoir mis en œuvre une pratique d'entente de répartition du marché de la fourniture d'énergie destinée au chauffage, sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce ;
- à l'encontre de GDF, pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la fourniture d'énergie destinée au chauffage en introduisant dans les contrats de fourniture une garantie de prix du gaz naturel indexé sur le prix du fioul, sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce ;
- à l'encontre de GDF, pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la fourniture d'énergie destinée au chauffage par des actions commerciales consistant à subordonner des aides commerciales en cas de conversion de chauffages alimentés par les énergies fioul, voire propane ou bois, à faire recenser par la FNAIM et le SYNASAV les sites de chaufferies à convertir au gaz naturel, à subordonner des aides commerciales à l'inscription de l'ordre du jour des assemblées générales des copropriétés la conversion au gaz naturel de la chaufferie, à présenter d'une manière trompeuse des bilans comparatifs financiers entre l'énergie "fioul" et l'énergie "gaz naturel", sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce ;
- à l'encontre de GDF, pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la fourniture d'énergie destinée au chauffage en subordonnant des clauses d'approvisionnement exclusif à des obligations et des pénalités disproportionnées et injustifiées, sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
II. - Discussion
A. SUR LA PROCÉDURE
Sur l'irrecevabilité de la saisine
86. Le Conseil a été saisi par une lettre, datée du 22 janvier 1996, présentée au nom de la CNDP et signée de son président. EDF et GDF font remarquer que les articles 24 et 34 des statuts de la CNDP disposent, d'une part, que : "Le conseil d'administration décide notamment... toute action judiciaire en qualité de demandeur ou de défendeur" et que, d'autre part, : "les délibérations du conseil d'administration sont constatées par procès-verbaux et rédigées par le secrétaire et le président et signées par le président et le secrétaire". Ils en déduisent qu'une délibération du conseil d'administration de la CNDP habilitant le président à agir en justice aurait dû être jointe à la saisine et, qu'à défaut, celle-ci doit être déclarée irrecevable.
87. La saisine du Conseil de la concurrence ne peut cependant être assimilée à une action en justice mais constitue un acte de la vie civile pour lequel le président de la CNDP est habilité à représenter l'organisme professionnel par l'article 26 des statuts. Au surplus, la FF2C a produit, en annexe de son mémoire en réponse au rapport, deux comptes-rendus du conseil d'administration de la CNDP, datés respectivement des 11 octobre 1995 et 18 janvier 1996, qui démontrent que le projet de saisine du Conseil de la concurrence a été approuvé par le conseil d'administration et que sa mise en œuvre a été confiée à son président.
Sur l'irrégularité de la procédure d'enquête
88. GDF conteste l'utilisation des enquêtes des BIE de Marseille et de Lyon à l'appui de la notification de griefs, dans la mesure où les diligences correspondantes ont été établies antérieurement à la saisine du conseil par la CNDP et non à la suite de la demande d'enquête adressée, le 20 juin 1996, à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de Répression des Fraudes par le président du Conseil. GDF en conclut que les rapports des BIE de Marseille et de Lyon sont dépourvus de tout lien avec la saisine de la CNDP et que pour "ces motifs, le rapport de la BIE de Marseille et l'ensemble des éléments qui y figurent doivent être écartés du dossier".
89. La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de Répression des Fraudes a, en effet, pris l'initiative de mener une enquête à Marseille et à Charlieu dans l'Indre, ainsi qu'en atteste la note du 5 mars 1998 de la Direction Régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de Provence-Alpes-Côte d'azur, qui fait référence à une note du 20 juin 1996 de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de Répression des Fraudes. L'existence d'une procédure pendante devant le Conseil a conduit la direction générale de la concurrence, de la consommation et de répression des fraudes à proposer au Conseil, dans la lettre de transmission du rapport d'enquête datée du 6 mai 1999, de joindre au rapport principal les deux rapports administratifs d'enquête datés du 4 décembre 1997 et du 6 mai 1999 : "Je vous transmets donc les différents documents établis à ce sujet. Ils pourront être utiles à votre conseil pour poursuivre l'instruction de l'affaire dont il a été saisi par la Confédération nationale de la distribution pétrolière le 22 janvier 1996". L'utilité des rapports d'enquête des BIE de Marseille et de Lyon se justifiait par le fait qu'ils avaient porté sur les mêmes pratiques que celles dénoncées par la CNDP. De plus, la demande d'enquête et son complément adressés par le Président du Conseil à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de Répression des Fraudes ne limitait pas le périmètre géographique des investigations à mener. Par conséquent, il ne peut être soutenu que l'on se trouve en présence de deux saisines, l'une directe, l'autre ministérielle, qui auraient dû être jointes. Le Conseil a déjà estimé, dans sa décision n° 98-D-52 relative à des pratiques relevées dans le secteur du mobilier urbain, qu'un rapport d'enquête concernant la même entreprise et les mêmes pratiques que celles visées dans une saisine directe, et ayant le même objet, établi à l'initiative de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de Répression des Fraudes, pouvait constituer un élément utile à l'instruction du dossier et que son versement au dossier ne portait pas atteinte aux droits de la défense.
Sur l'irrégularité des procès-verbaux
90. EDF et GDF font valoir que les procès-verbaux d'enquête doivent être écartés du dossier au motif que l'enquêteur n'a pas informé les personnes entendues de l'objet de l'enquête, les procès-verbaux ne comportant que la seule mention "enquête relative à la vérification du respect des dispositions des titres III et IV de l'ordonnance du 1er décembre 1986". Les parties estiment que cette carence n'est comblée par aucun élément intrinsèque ou extrinsèque aux procès-verbaux. Les deux établissements publics soutiennent que les personnes entendues ont été interrogées, de façon systématique, sur l'activité globale des centres EDF GDF Services et non sur les aides spécifiques au chauffage domestique, et estiment, en se référant à l'arrêt de la Cour de cassation du 20 novembre 2001, Bec Frères, qu'il ne peut être considéré, au cas d'espèce, que la mention préimprimée "...Nous lui avons indiqué l'objet de notre enquête relative à la vérification du respect des dispositions du titre III et IV de l'ordonnance du 1er décembre 1986" suffit à rapporter la preuve que l'objet de l'enquête a été indiqué aux personnes interrogées.
91. Les notes, conventions, protocoles et courriers, décrits aux paragraphes 0 à 0 ci-dessus, sur lesquels s'appuie la notification de griefs, ont été remis par les cadres des centres EDF GDF Services, interrogés dans le cadre de l'enquête et signataires des procès-verbaux concernés. Ils concernent, de façon spécifique, les aides commerciales prévues au niveau national et les actions commerciales entreprises au niveau local pour la promotion du gaz et de l'électricité dans le domaine du chauffage. Il ne peut donc être soutenu que les personnes interrogées ignoraient l'intégralité de l'objet de l'enquête et que le principe de loyauté dans la recherche des preuves n'a pas été respecté.
Sur la durée excessive de la procédure
92. EDF rappelle que le Conseil de la concurrence a été saisi par la CNDP le 24 janvier 1996 et qu'il s'est donc écoulé près de 6 ans entre cette saisine et la réception, par les entreprises mises en cause, de la notification de griefs. La société observe que "les faits analysés, quant à eux, portent pour l'essentiel sur la période 1994-1995" et que "dans le meilleur des cas, c'est sans doute environ 8 ans après leur commission que les faits dénoncés en l'espèce par la notification de griefs seront analysés par le Conseil de la concurrence". Elle souligne que "toutes les personnes interrogées en 1997 ont depuis quitté leurs fonctions, et seule une de Nantes travaille encore sur le centre, bien que dans d'autres fonctions" et ajoute que les centres EDF GDF Services ont entrepris, depuis 1996, une "démarche visant à séparer nettement les activités "gaz et électricité" et que, dans ces conditions, "les pratiques analysées par la notification de griefs correspondent donc à un mode de fonctionnement des centres EDF GDF Services totalement modifié depuis plus de 5 ans".
93. De même, GDF met en cause la longueur excessive de la procédure et fait valoir que "la plupart des personnes auditionnées lors de l'enquête de la DNEC de 1997, qui seraient aujourd'hui les mieux à même d'expliquer et de justifier les pratiques imputées à Gaz de France, ont depuis changé de poste ou quitté l'établissement" et "par suite, la capacité de Gaz de France à se défendre se trouvant considérablement affectée, le Conseil ne pourra que prononcer l'annulation de l'ensemble de la procédure".
94. La complexité du système d'aides commerciales de GDF et d'EDF, le nombre d'intervenants concerné et l'ampleur de l'enquête effectuée par la Direction Générale de la Consommation, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes, justifient la longueur du délai d'instruction et GDF reconnaît lui-même qu'un volume important de pièces figurent au dossier. Par ailleurs, les pratiques mises en cause sont constituées par des documents largement diffusés tels que les instructions émanant de la direction EDF GDF Services, les conventions de partenariat, les contrats de fourniture d'énergie et les documents publicitaires, et il ne peut être allégué que le départ de certains agents empêcherait les établissements publics mis en cause d'apporter des explications sur la politique commerciale mise en œuvre à travers ces documents. La cour d'appel a, d'ailleurs, jugé, dans un arrêt du 13 décembre 2001, Apprin et autres, que, dès lors qu'il n'est pas démontré que le délai employé par le Conseil pour procéder à l'instruction de l'affaire aurait empêché les requérantes de réunir les éléments utiles à leur défense relativement à l'existence des pratiques anticoncurrentielles qui leur étaient reprochées, la sanction attachée à la violation éventuelle de l'obligation de se prononcer dans un délai raisonnable ne peut être l'annulation de la procédure, mais la réparation du préjudice susceptible d'avoir été causé par une telle durée.
B. - SUR LA DÉFINITION DES MARCHÉS PERTINENTS ET LA POSITION D'EDF ET GDF SUR CES MARCHÉS
95. Dans sa décision n° 99-D-51, relative à des pratiques constatées dans le secteur des applications thermiques de l'énergie, le Conseil a considéré que la fourniture de l'énergie destinée à assurer le chauffage constituait un marché pertinent, que ce marché se caractérisait par une rencontre de l'offre et de la demande opérée au stade du choix de l'équipement de chauffage et qu'il était de dimension nationale. Par ailleurs, le Conseil a rappelé l'existence d'un marché de l'électricité et d'un marché du gaz, sur lesquels EDF, pour le premier, et GDF, pour le second, étaient en position dominante. Il a, également, considéré qu'à la date des faits, soit en 1993, EDF disposait d'une position dominante sur le marché national de la fourniture d'énergie destinée au chauffage des bâtiments. Enfin, il a estimé qu'il existait un lien de connexité suffisant entre le marché du gaz et celui de la fourniture d'énergie destinée au chauffage et que GDF était donc en mesure d'abuser, sur le second marché, de la position dominante qu'il occupe sur le premier. Les pratiques mises en cause dans la présente affaire ayant été constatées entre 1993 et 1996, aucune évolution notable du contexte concurrentiel ne justifie qu'il soit procédé à une analyse différente des marchés concernés et de la position occupée par EDF et GDF sur ces marchés.
C. - SUR LE GRIEF D'ENTENTE ENTRE LES SOCIÉTÉS EDF ET GDF
96. EDF fait valoir que l'édition de documents publicitaires communs résulte de l'organisation des centres EDF GDF Services et que la simple existence de documents de présentation conjointe aux deux énergies est une pratique parfaitement légitime et banale, eu égard à l'objet même des centres EDF GDF Services. EDF et GDF soutiennent, de plus, que les documents incriminés n'ont qu'un simple rôle d'information sur les avantages des deux énergies et ne restreignent pas le libre choix des clients potentiels.
97. De même, EDF et GDF font valoir que les conventions conclues par les centres EDF GDF Services, avec des promoteurs ou des offices d'HLM, interviennent en aval du choix énergétique déjà effectué par les constructeurs et n'ont donc pas pour effet de limiter la concurrence entre le gaz et l'électricité. GDF explique, par ailleurs, que ses aides à l'installation d'un chauffage à gaz sont ciblées sur le remplacement d'un chauffage au fuel car l'investissement nécessaire à la transformation d'un chauffage électrique en chauffage au gaz est beaucoup plus important et que ses aides ne sont pas dimensionnées à cet effet. Elle fait, de plus, valoir que la Cour de cassation a admis, dans un arrêt du 24 octobre 2000, qu'une opération commerciale ou promotionnelle pouvait être ciblée sur une catégorie de clients, en fonction de critères objectifs tels que le mode de chauffage, à condition que le ciblage ne se fasse pas à l'encontre d'un concurrent en particulier. EDF observe encore que, sur les zones non desservies en gaz naturel, la concurrence entre les deux formes d'énergie ne peut évidemment pas jouer.
98. S'agissant plus spécifiquement de la convention conclue entre le centre EDF GDF Services Metz Lorraine et l'OPAC de Moselle (paragraphe 0 ci-dessus), EDF et GDF font valoir qu'en précisant expressément que le centre EDF GDF Services ne tiendrait pas compte des équipements de chauffage électrique dans le calcul d'une prime de fidélité pour les installations au gaz, cette convention établit l'existence d'une réelle concurrence entre les deux énergies.
99. Les griefs ne visent pas l'existence de la structure commune EDF GDF Services en tant que telle. Cependant, les actions commerciales mises en œuvre par les centres dont il s'agit pourraient être prohibées par les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce si elles avaient, notamment, pour objet ou pouvaient avoir pour effet de restreindre l'accès du fuel au marché de la fourniture d'énergie pour le chauffage, en ne laissant subsister que la concurrence entre le gaz et l'électricité, ou si elles avaient pour objet ou pouvaient avoir pour effet de limiter de façon substantielle la concurrence entre le gaz et l'électricité.
100. Toutefois, au cas d'espèce, la diffusion par les centres EDF GDF Services de documents publicitaires, assurant simultanément la promotion du gaz et de l'électricité comme source d'énergie pour le chauffage, ne peut être considérée comme ayant eu pour effet de limiter les possibilités de choix des consommateurs aux seuls gaz et électricité, à l'exclusion du fuel. Il en est de même de la convention conclue entre le centre EDF GDF Services d'Annecy et le promoteur Promogim, ou des conventions "Qualité thermique" destinées par le centre EDF GDF Services de Charente Maritime aux promoteurs, qui sont des accords de partenariat conclus avec les professionnels de la construction en vue de l'amélioration de la qualité thermique des logements neufs, qui interviennent en aval du choix de l'énergie par ces derniers et qui ne comportent pas d'exclusivité au bénéfice de l'électricité ou du gaz. De surcroît, ces actions de promotion conjointe des deux types d'énergie sont restées limitées.
101. S'agissant du ciblage, par les centres EDF GDF Services de Reims, de la Vienne, de Saint-Mandé et de Rhône Alpes, des aides à l'installation d'un chauffage au gaz naturel sur le remplacement d'un chauffage fonctionnant à une autre énergie que le gaz ou l'électricité, il ne peut être considéré comme de nature à restreindre la concurrence entre le gaz et l'électricité dans la mesure où il ne fait que traduire le caractère très limité de la substituabilité entre un système de chauffage fonctionnant à l'électricité et un système de chauffage fonctionnant avec une énergie combustible, comme le gaz ou le fuel. La clause de la convention conclue entre le centre EDF GDF Services de Metz et l'OPAC de Moselle, qui exclut les installations électriques du bénéfice de la prime de fidélisation gaz traduit bien, quant à elle, la volonté de ne pas globaliser les aides à l'installation de systèmes de chauffage au gaz et celles à l'installation de systèmes de chauffage à l'électricité.
102. En revanche, les clauses de la convention conclue entre le centre EDF GDF Services de Nantes et l'OPAC de Loire-Atlantique et de celle conclue entre le centre EDF GDF Services de Touraine et l'OPAC 37, aux termes desquelles les OPAC concernés s'engagent à privilégier l'utilisation du gaz sur les zones desservies en gaz naturel, les primes liées au label "Confort plus" pour l'utilisation de l'électricité étant notamment réservées aux zones non desservies en gaz, sont effectivement de nature à limiter, dans les départements concernés, la pression concurrentielle exercée par l'électricité sur le gaz. Toutefois, le développement privilégié du gaz naturel dans les zones desservies est inscrit dans le contrat d'objectifs conclu pour la période 1994/1996 entre l'État et GDF (cf. paragraphe 0 ci-dessus) : "Les Pouvoirs publics sont favorables à l'augmentation de la contribution du gaz au bilan énergétique, notamment dans le domaine du chauffage... Gaz de France assurera en priorité une croissance de ses marchés dans la zone desservie en gaz. Gaz de France respectera des conditions de concurrence loyale, tant sur le plan tarifaire qu'en ce qui concerne les aides commerciales". Dans la mesure où l'État est également l'actionnaire unique d'EDF, le fait que la politique commerciale d'EDF ne soit pas contradictoire avec les objectifs assignés par l'État à GDF et s'inscrive dans le cadre d'une politique nationale de l'énergie ne peut être considéré comme une entente entre les deux établissements publics. Au surplus, la politique commerciale d'EDF et GDF, et notamment les prix, étant déterminée au niveau national, l'effet des restrictions apportées au libre jeu de la concurrence entre les deux types d'énergie par deux conventions départementales apparaît très limité.
103. Ainsi, la plus grande partie des conventions examinées n'a pas eu d'effet sur le choix entre le fuel, d'une part, et le gaz et l'électricité, d'autre part, dans la mesure où elles sont passées par les centres EDF GDF Services postérieurement à ce choix et ne comportent pas d'exclusivité. Par ailleurs, il ne peut être soutenu que la limitation de la concurrence entre le gaz et l'électricité constatée ci-dessus en Loire-Atlantique et dans l'Indre-et-Loire a eu pour objet ou aurait pu avoir pour effet de restreindre l'accès des producteurs de fuel au marché de la fourniture d'énergie pour le chauffage.
104. Il résulte de ce qui précède que les pratiques reprochées à EDF et GDF comme étant susceptibles de constituer une entente ayant un objet ou pouvant avoir un effet anticoncurrentiel ne peuvent être qualifiées au regard des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
D. - SUR LES GRIEFS D'ABUS DE POSITION DOMINANTE DE LA SOCIÉTÉ GDF
La garantie de prix FOD
105. GDF fait valoir que la garantie de prix FOD, aux termes de laquelle le prix du gaz naturel devait rester inférieur au prix du fioul pendant une période de trois ans, a été mise en place par une note du 7 mai 1996, soit à une date postérieure à l'acte de saisine. A titre accessoire, la société GDF estime que "cette pratique a revêtu un caractère extrêmement localisé" et que "l'enquête menée auprès des 102 centres EDF GDF Services a révélé que la mise en œuvre de cette clause s'était limitée à la zone de Marseille et n'a été insérée que dans un seul contrat". Elle précise de plus que cette clause de garantie de prix n'a jamais été appliquée dans la mesure où le gaz a toujours bénéficié, lors de la période de référence, d'un tarif plus favorable que le fioul.
106. Comme l'a déjà relevé le Conseil dans sa décision n° 99-D-51 du 20 juillet 1999, ce type de clause a pour effet de faire obstacle à l'abaissement des prix de vente de la part des concurrents, aucun d'entre eux ne pouvant, à terme, espérer augmenter significativement sa part de marché s'il diminue ses prix, et contribue donc à figer les positions acquises sur le marché. Toutefois, au cas d'espèces, la mise en place de cette garantie a été annoncée aux directeurs de centre par une note GCG 60 du 22 mai 1996 du centre d'Expertise développement gaz, relative aux aides commerciales destinées au secteur HLM, qui la présente comme une "nouvelle disposition" par rapport au dispositif d'aide mis en place en 1994. Mise en place postérieurement à la date de la saisine, cette pratique ne pouvait donc être visée par celle-ci et ne peut être sanctionnée dans le cadre de la présente décision.
Les aides commerciales de GDF
107. S'agissant des aides commerciales ciblées sur la conversion au gaz des chauffages au fuel, voire au propane ou au charbon, GDF fait valoir que la Cour de cassation a admis, dans un arrêt du 24 octobre 2000, qu'une opération commerciale ou promotionnelle pouvait être ciblée sur une catégorie de clients, en fonction de critères objectifs tels que le mode de chauffage, à condition que le ciblage ne se fasse pas à l'encontre d'un concurrent en particulier. Elle ajoute que, dans la décision n° 99-D-51 précitée, le Conseil a souligné le faible degré de substituabilité entre l'électricité et les énergies combustibles et précise qu'en termes de stratégie commerciale, il serait trop coûteux de cibler les utilisateurs de chauffage électrique compte tenu du coût élevé de la conversion d'un chauffage alimenté à l'électricité.
108. GDF soutient également que, tant les accords conclus avec le SYNASAV et la FNAIM, concernant le recensement des chaufferies au fioul potentiellement convertibles, que la participation financière aux frais d'assemblée des copropriétés inscrivant à leur ordre du jour la conversion au gaz de la chaudière, relèvent d'une technique légitime de prospection de la clientèle potentielle à laquelle tout opérateur peut recourir, en particulier les fournisseurs de fioul, dont elle rappelle qu'ils sont, pour certains d'entre eux, adossés à des groupes puissants. Elle ajoute que cette aide laisse les copropriétés libres de leur décision.
109. Enfin, GDF expose que les bilans financiers, comparant le coût d'une installation de chauffage utilisant le fuel et celui d'une installation au gaz naturel, manquant prétendument d'objectivité, n'ont été diffusés que par un seul des centres EDF GDF Services, auprès d'un nombre très limité de clients potentiels.
110. Les aides commerciales ne sont pas illicites en soi. Comme l'a rappelé le Conseil dans la décision n° 99-D-51 précitée, ainsi que dans sa décision n° 02-D-34 du 11 juin 2002, relative à des pratiques d'Électricité de France, les aides commerciales accordées par une entreprise en position dominante à ses clients, même si elles peuvent défavoriser ses concurrents, ne sont pas, en elles-mêmes, anticoncurrentielles. De même que le Conseil l'a noté pour EDF, il peut, d'ailleurs, être relevé que ces aides constituent, s'agissant de GDF, la seule marge de négociation commerciale d'une entreprise dont les prix sont régulés par la puissance publique. Pour établir que ces aides sont anticoncurrentielles, il faut démontrer que les prix, une fois les aides accordées déduites, sont prédateurs ou que les conditions dans lesquelles ces aides sont octroyées sont discriminatoires ou, plus généralement, que leurs conditions d'octroi ou leur montant sont d'une nature telle qu'elles en établissent l'objet ou l'effet anticoncurrentiel.
111. Au cas d'espèce, aucun grief de prédation n'a été notifié. Il ne peut pas non plus être considéré que le ciblage des aides à l'installation d'un chauffage au gaz sur la conversion des chauffages au fuel, au propane ou au charbon constitue une pratique discriminatoire ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de limiter la concurrence sur le marché des énergies destinées au chauffage, dans la mesure où l'exclusion de la conversion des installations de chauffage à l'électricité qui en résulte est fondée sur des critères objectifs, tenant au coût de la conversion d'une installation utilisant l'électricité vers une installation utilisant une énergie combustible, telle que le gaz, le fuel, le propane ou le charbon. Au total, aucun élément du dossier ne permet d'établir que les actions commerciales mises en cause excèdent les marges de liberté dont dispose tout fournisseur, même détenteur d'une position dominante, dans la négociation commerciale avec un client potentiel, et que les concurrents de GDF sur le marché concerné ne seraient pas en mesure de mettre en place des actions équivalentes pour promouvoir leurs propres ventes.
Les clauses d'approvisionnement exclusif
112. GDF fait valoir que, conformément à la jurisprudence du Conseil, une clause d'exclusivité est licite si elle est justifiée par les investissements réalisés par le fournisseur et si les pénalités encourues par le client du fait de sa violation sont proportionnées à l'ampleur de ces investissements. Elle ajoute que l'appréciation des ces clauses doit prendre en compte l'obligation pesant sur Gaz de France de satisfaire, à l'instar de toute entreprise commerciale, à des impératifs de rentabilité.
113. S'agissant plus spécifiquement de l'engagement signé par un particulier avec le centre EDF GDF Services de la Sarthe, GDF soutient la licéité de la clause prévoyant une pénalité en cas d'utilisation d'une énergie concurrente pour l'un des trois usages "eau chaude, chauffage, cuisson" dans la mesure où "la réduction consentie par Gaz de France par rapport au prix réel du branchement ne peut se justifier, d'un point de vue économique, que si l'établissement est assuré d'amortir l'aide qu'il a versée". Elle explique que "cet amortissement ne peut être réalisé que si Gaz de France obtient la garantie qu'un volume minimum de gaz sera livré au client, garantie obtenue en l'espèce par l'obligation d'utiliser le gaz pour trois usages" et qu'"à défaut d'une telle clause, Gaz de France subirait une perte du fait de la réduction consentie au client, ce qui serait incompatible avec l'obligation qui lui incombe d'assurer la rentabilité de ses investissements". Concernant la pénalité infligée au client dans l'hypothèse où il choisirait de recourir à une énergie concurrente pour l'un des usages, GDF précise qu'"elle correspond strictement à la réduction qui lui a été consentie sur le prix du branchement".
114. S'agissant de l'engagement de la mairie de Charlieu de prendre en charge la différence entre le coût réel du branchement et le prix facturé en cas de non-raccordement d'un client, la société GDF précise, à titre liminaire, qu'il concernait un lotissement communal, c'est-à-dire un lotissement pour lequel la municipalité était le maître d'ouvrage, et expose que "la municipalité de Charlieu a financé une partie du raccordement, Gaz de France prenant quant à lui à sa charge la différence entre le prix réel de raccordement à chaque habitation et le prix effectivement facturé". Selon GDF, pour que cette réduction soit justifiée, d'un point de vue économique, l'ensemble de la zone raccordée devait utiliser le gaz comme énergie de chauffage.
115. GDF ajoute qu'en tout état de cause, ces contrats n'ont été conclus que par un nombre très limité de centres (quatre au total) et concernent un nombre de clients négligeable par rapport à la taille globale du marché concerné.
116. Le Conseil a relevé, dans sa décision n° 99-D-51 précitée, que la combinaison d'aides commerciales, aboutissant à une baisse de prix, et d'une clause d'exclusivité, pouvait avoir pour effet d'exclure, de façon durable, les autres concurrents de l'approvisionnement en énergie de la zone concernée. En l'espèce, dans la mesure où la pénalité encourue est comparable au montant de l'aide et n'a d'effet sur le choix de l'énergie qu'au moment de l'installation des appareils de chauffage, de cuisson et de production d'eau chaude, la clause d'exclusivité contenue dans le contrat conclu par le centre EDF GDF Services de la Sarthe avec un particulier n'est pas de nature à exclure durablement les énergies concurrentes.De même, le protocole passé par la mairie de Charlieu avec le centre EDF GDF Services de la Loire prévoit que dans l'hypothèse où l'un ou plusieurs des acquéreurs de terrains du lotissement concerné ne choisirait pas un chauffage au gaz, seule devra être remboursée la différence entre le coût du raccordement du ou des terrains concernés et le prix préférentiel facturé initialement pas GDF. Enfin, en ce qui concerne le contrat conclu entre le centre EDF GDF Services de Marseille et une copropriété, prévoyant l'usage exclusif du gaz pendant une durée de cinq ans, le non respect de cette clause entraînant le remboursement du montant des travaux, soit 14 600 F TTC, la durée de l'exclusivité n'est pas excessive au regard de la durée de vie d'un appareil de chauffage et le montant de la pénalité correspond à celui de l'aide consentie.
117. En revanche, le centre EDF GDF Services de Savoie, a conclu, le 2 février 1994, avec l'OPAC de Savoie, une convention de "Partenariat Qualité-Confort-Performance en logements", qui comporte une clause prévoyant le remboursement de la totalité des primes versées au titre des programmes immobiliers réalisés par l'office d'HLM au cas où un seul programme immobilier ne serait pas équipé au gaz naturel. Dans ce cas, la pénalité paraît en effet, excessive au regard du manque à gagner encouru par GDF et est de nature à restreindre l'accès des producteurs d'énergie concurrentes au marché de l'énergie destinée au chauffage et à la production d'eau chaude sanitaire, dans la zone considérée. Néanmoins, il convient de constater que la pratique en cause ne se retrouve que dans une seule convention et que l'application des pénalités qu'elle prévoit n'a jamais été mise en œuvre. Cette pratique n'a donc pu affecter de façon sensible la concurrence sur le marché national de la fourniture d'énergie pour le chauffage et la production d'eau chaude.
118. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les pratiques mises en cause et imputées à GDF ne sont pas qualifiables au regard de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
DÉCISION
Article 1 : Il n'est pas établi que EDF et GDF aient enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Article 2 : Il n'est pas établi que GDF ait enfreint les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.