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Décisions

Conseil Conc., 28 mai 2003, n° 03-D-25

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Saisine de la société Holopanoragramme

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de M. Deparis par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Pasturel, vice-présidente, M. Nasse, vice-président.

Conseil Conc. n° 03-D-25

28 mai 2003

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 2 avril 2002 sous le numéro 02-0043 F par laquelle la société Holopanoragramme a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par l'établissement public Aéroports de Paris ; Vu le livre IV du Code de commerce, relatif à la liberté des prix et de la concurrence, le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour l'application de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, ainsi que le décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce ; Vu les pièces du dossier ; Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et le représentant de la société Holopanoragramme entendus lors de la séance du 30 avril 2003 ; Adopte la décision suivante :

1. La société Holopanoragramme a pour objet l'exploitation commerciale d'un instrument d'optique breveté consistant en un projecteur urbain d'holopanoragramme à image réelle quadridimensionnelle. Elle expose qu'elle a proposé ce support publicitaire nouveau pour la communication visuelle d'annonceurs à l'établissement public Aéroports de Paris et que celui-ci lui a répondu en l'invitant soit à proposer son invention à l'entreprise bénéficiaire de la convention d'exploitation des activités publicitaires pour que celle-ci intègre ce nouveau mode de publicité à ceux déjà exploités par elle, soit à participer au prochain appel d'offres ayant pour objet le choix d'un concessionnaire chargé d'exploiter ces activités sur les aéroports d'Orly et Charles de Gaulle.

2. La société saisissante fait valoir que le refus opposé par Aéroports de Paris de prendre en compte une innovation en invoquant l'existence d'une convention passée avec le bénéficiaire de l'exploitation du domaine public en matière de publicité constitue un frein à l'accès au marché ou au progrès technique au sens de l'article L. 420-1 du livre IV du Code de commerce.

3. Lors de la séance, elle a exposé qu'" une autorisation du domaine public qui ne permet pas au cas par cas l'exercice d'une manière concurrente du droit conféré par un brevet d'invention et qui réserve l'équivalent d'une priorité d'exploitation de toute invention présente et à venir à son concessionnaire, représente (...) l'élément probant d'une entente entre l'organisme public et son concessionnaire, qui vient limiter le progrès technique et l'accès au marché (...) ".

4. Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 462-8 du Code de commerce, " le Conseil de la concurrence peut déclarer, par décision motivée, la saisine irrecevable (...) s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ".

5. Par un arrêt du 18 octobre 1999, Aéroports de Paris, le tribunal des conflits a jugé que "si dans la mesure où elles effectuent des activités de production, de distribution ou de services, les personnes publiques peuvent être sanctionnées par le Conseil de la concurrence, agissant sous le contrôle de l'autorité judiciaire, les décisions par lesquelles ces personnes assurent la mission de service public qui leur incombe au moyen de prérogatives de puissance publique relèvent de la compétence de la juridiction administrative pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la responsabilité encourue par ces personnes publiques ", que les décisions d'Aéroports de Paris " qui se rattachent à la gestion du domaine public constituent l'usage de prérogatives de puissance publique " et qu'en conséquence, les pratiques d'Aéroports de Paris, qui en sont indissociables, relèvent de la seule compétence de la juridiction administrative ;

6. Dans son arrêt du 19 novembre 2002, Au Lys de France, la Cour de cassation a jugé que : " ... l'arrêt, qui retient que la résiliation par un établissement public d'une convention d'occupation du domaine public (...) ainsi que le refus opposé à une demande de concession constituent des décisions par lesquelles une personne publique assure la mission de gestion du domaine public, qui lui est confiée, au moyen de prérogatives de puissance publique, et qui relève que les conditions critiquées de fixation du niveau des redevances d'occupation temporaire du domaine public sont indissociables de la gestion de ce domaine, a statué à bon droit ; ".

7. Les conventions, par lesquelles l'établissement public Aéroports de Paris attribue les autorisations temporaires d'exploitation de différents modes de publicité sur le domaine public, constituent des décisions relatives à la gestion du domaine public ; dès lors, les pratiques invoquées, qui se rattachent à l'accomplissement d'une mission de service public au moyen de la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique, relèvent de la seule compétence de la juridiction administrative.

8. Il y a donc lieu de constater que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de compétence du Conseil de la concurrence et de faire application des dispositions de l'article L. 462-8 du Code de commerce ;

Décision :

Article unique - La saisine enregistrée sous le numéro 02-0043 F est déclarée irrecevable.