Livv
Décisions

CA Rennes, ch. corr., 21 janvier 1993, n° 104 ter-93

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Ministère public

Défendeur :

Union Fédérale des consommateurs d'Ille et Vilaine

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Casorla

Conseillers :

Mme Algier, M. Le Quinquis

Avocats :

Me Gautier, Dupas.

TGI Rennes, ch. corr., du 25 juin 1992

25 juin 1992

Statuant sur les appels interjetés le 26 juin 1992 et le 1er juillet 1992 par les prévenus sur les dispositions pénales et civiles, par le Ministère public le 29 juin et le 1er juillet 1992 et par la partie civile le 30 juin 1992 par le Tribunal correctionnel de Rennes qui, pour obtention de paiement avant le délai de réflexion, a condamné Jean-Claude B à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 F d'amende, et Jacques C à 4 000 F d'amende et, sur l'action civile, a ordonné la publication de l'arrêt et les a condamnés solidairement à payer respectivement à Monsieur B et à l'Union fédérale des consommateurs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Considérant que les appels sont réguliers et recevables en la forme :

Considérant qu'il est fait grief aux prévenus

- d'avoir dans le département de la Manche, en tout cas sur le territoire national, courant 1990 et 1991, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, ensemble et de concert, faisant pratiquer le démarchage au domicile de personnes physiques (Joseph Broquet, Marcel Pocreau, Jean-Luc Pillet, Marcel Marie, M. Jourdain, Lucien Heulie, M. Houssin, M. Girard, Yvonne Chartier, M. Bailleul, Raymond Bretagne, Christian Berthaud, Denis Bellanger, M. Audouard, Jean-Claude David, René Baruzier) pour leur proposer la vente de vérandas, exigé et obtenu de ces personnes le paiement d'un acompte avant expiration du délai de réflexion.

Faits prévus et réprimés par les articles 5, 4 de la loi 72-1137 du 22 décembre 1972.

Considérant qu'il ressort du dossier et des débats des éléments suivants :

Il ressort des déclarations de Jacques Cauvin qu'il s'est rendu le 27 décembre 1989 au domicile de Joseph Broquet, âgé de 76 ans, suite à une demande téléphonique de ce dernier.

Il a fait signer un contrat le jour même au domicile du client et a perçu immédiatement un premier versement par chèque de 8 400 F.

Selon Jacques C, cette méthode est exigée par sa société sous peine de non-enregistrement du dossier.

Quelques semaines plus tard, il a reçu un appel téléphonique de Monsieur Broquet l'informant de sa volonté d'annuler le projet.

Jacques C reconnaît être retourné chez son client et avoir repris l'ensemble du contrat y compris le bordereau de rétractation. Il déclare avoir retourné tous ces documents à son employeur, la société X dont le PDG est Jean-Claude B, accompagnés d'une lettre explicative plaidant en la faveur de ses clients, compte tenu de leur âge et de leur faibles revenus.

Sa société s'en tenant à la date légale de rétractation a refusé l'annulation et a conservé pour ce motif l'acompte versé par Monsieur Paul Broquet, pour enfin le rembourser en juillet 1991.

Les enquêteurs se faisaient remettre copie de 20 commandes obtenues par Jacques C pour le compte de la société X. Jacques C reconnaît que celles-ci ont été signées au domicile du client.

Sur ces contrats, il est constaté que des sommes allant de 5 000 F à 18 150 F ont été versées à la commande.

Sur la copie de la commande signée à son domicile par Monsieur Paul Broquet il est constaté que la mention suivante est portée : " versement à la commande 30 % CB 8 400 F ainsi que la mention manuscrite " annulé ".

Huit autres clients parmi les vingt noms relevés sur les dossiers suspects confirment tous, sans exception, les constatations effectuées sur contrat, les déclarations de Jacques C et les faits dénoncés par Monsieur Paul Broquet : tous les contrats ont été signés au domicile des clients et tous ont versé au représentant un premier versement le jour de la signature.

Considérant que les prévenus ne contestent nullement les faits reprochés, que Jacques C déclare avoir agi dans l'ignorance de la loi et sur les prescriptions très strictes de son employeur, que Jean-Claude B déclare expressément renoncer aux arguments soulevés devant le tribunal et se borne à solliciter l'indulgence ;

Considérant qu'il ressort, tant des déclarations du plaignant Paul Broquet que des déclarations de Jacques C que des huit témoignages recueillis auprès de la clientèle, que la société X fait procéder par l'intermédiaire de son représentant, Jacques C, à la vente à domicile de ses produits ;

Qu'il ressort des constatations matérielles faites sur les contrats qu'un premier versement à la commande est prévu par la société X puisque cette clause du contrat est imprimée sur le document type établi par cette société ;

Que le fait que cette exigence émane de la société X elle-même est confirmée par les déclarations de Jacques C qui affirme que sa société exige un versement de 30 % à la signature sous peine de non-enregistrement du dossier", qu'elle exige que le contrat et le chèque de paiement soient envoyés le soir même de la vente à son siège ;

Que les produits considérés et les méthodes de vente incluant la fourniture de services ne sont pas exclus du champ d'application de la loi 72-1137 du 27 décembre 1972;

Considérant que les faits visés à la prévention sont établis par les éléments du dossier, les débats et les aveux mêmes des prévenus et ont été exactement analysés par les premiers juges, qui ont infligé une sanction adéquate, sauf à assortir du sursis la sanction infligée à Jacques C dont le casier judiciaire ne révèle aucune condamnation antérieure, et correctement estimé les demandes des parties civiles qui seront également confirmées, l'indemnité due au titre des frais irrépétibles étant fixée ainsi qu'il suit au dispositif ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, à signifier à la partie civile Joseph Broquet par application de l'article 420-1 du Code de procédure pénale, En la forme : Reçoit les appels ; Au fond : Confirme le jugement sur la qualification des faits, la déclaration de culpabilité des prévenus et les sanctions prononcées à l'encontre de Jean-Claude B ; Réformant sur l'application de la peine, en ce qui concerne Jacques C, Le condamne à 4 mois d'emprisonnement avec sursis ; Constate que l'avertissement prévu par l'article 737 du Code de procédure pénale n'a pas été donné au prévenu absent lors du prononcé de l'arrêt ; Confirme les dispositions civiles du jugement ; Condamne solidairement Jacques C et Jean-Claude B à payer à la partie civile, l'Union fédérale des consommateurs d'Ille et Vilaine la somme de 2 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en cause d'appel ; Condamne Jean-Claude B et Jacques C aux dépens de première instance et d'appel liquidés à la somme globale de mille cent vingt six francs quarante huit (1 126,48 F) chacun étant tenu pour la moitié ; Et ce, compris le droit fixe du présent arrêt, le droit de poste et non compris les frais postérieurs éventuels. Prononce la contrainte par corps. Le tout en application des articles susvisés et 473, 749 et 750 du Code de procédure pénale.