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Décisions

CA Paris, 9e ch. A, 13 septembre 1999, n° 98-07474

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rognon

Avocat général :

Mme Taffaleau

Conseillers :

M. Morel, Mme Filippini

Avocat :

Me Hietter.

TGI Douai, du 14 nov. 1995

14 novembre 1995

Rappel de la procédure :

La prévention :

P Nicole, épouse L,

L Yves, L Pierre, sont prévenus :

- d'avoir, dans l'arrondissement de Douai, courant 1988, 1989, 1990, entre le 10 août 1990 et le 25 août 1993, en tout cas depuis temps non prescrit, illicitement effectué à titre de profession habituelle des opérations de banque, notamment des opérations de crédit en agissant à titre onéreux par mise ou promesse de fonds à la disposition de tiers ou en prenant dans l'intérêt de ceux-ci des engagements tels qu'avals, cautionnement ou garantie ou par mise à leur disposition de clientèle ou par gestion de moyens de paiement, spécialement des chèques bancaires ou postaux ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 1, 3, 10, 15 de la loi du 24 janvier 1984.

- d'avoir, dans l'arrondissement de Douai, courant 1988, 1989, 1990, entre le 10 août 1990 et le 25 août 1993, en tout cas depuis temps non prescrit, contrevenu aux dispositions législatives en ayant pratiqué ou fait pratiquer le démarchage au domicile de particuliers en proposant l'achat de biens, en omettant d'établir des contrats comportant les noms du fournisseur ou du démarcheur, l'adresse du fournisseur, l'adresse des lieux de conclusion des contrats, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des marchandises ou objets, le prix global à payer et les modalités de paiement au comptant ou à crédit et d'observer le délai de réflexion de sept jours accordés au client, ceci au préjudice de Marielle Didier, Van Respaille, Veyer, Taieb, Doye, François, Bommelaire, Delcerck, Wisirowski, Cattai, Gyrod, Colpaert, Jeanson, Breux, Joan, Martin, Milhau, Demarchelier, Viot, Lauria, Clariste, Robillard, Mazaud, Merliot, Karl, Ourvy, Lamboley, Givry, Thieullel, Denhez, Lequet, Dermy, Delhaye, Couderc, Fievet, Dubois, Piette, Mazaud, Fouque, Barat, Taine, Pedotti, Dubrulle ;

Infraction prévue et réprimée par les articles 2, 3, 4, 5 de la loi n° 722-1197 du 22 décembre 1992.

Le jugement :

Le tribunal, par jugement contradictoire, a rejeté l'exception de nullité ; a relaxé les prévenus de l'infraction à la réglementation sur le démarchage à domicile ;

Les a reconnus coupables des faits d'exercice illégal de la profession de banquier ;

A déclaré P Nicole épouse L coupable des faits qui lui sont reprochés et l'a condamnée à la peine de un an d'emprisonnement avec sursis et à 200 000 F d'amende ;

A déclaré Yves L coupables des faits qui lui sont reprochés et l'a condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et à 100 000 F d'amende ;

A déclaré Pierre L coupable des faits qui lui sont reprochés et l'a condamné à la peine de un an d'emprisonnement avec sursis et à 200 000 F d'amende ;

Le président a alors donné aux condamnés l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code pénal ;

Sur l'action civile :

A déclaré irrecevables les constitutions de parties civiles de Patrick Franchois, Madame Ritaine Bommelaire, Madame Ginette Viot, Madame Jeanine Mazaud, veuve Bordier, Madame Françoise Barrat, Madame Jacqueline Taine ;

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 600 F dont est redevable chaque condamné.

Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du Code de procédure pénale et des textes susvisés.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

- Monsieur le Procureur de la République, le 16 novembre 1995 contre Monsieur L Pierre, Monsieur L Yves et Madame P Nicole, épouse L.

- Par arrêt de la Cour d'appel de Douai en date du 26 novembre 1996, la 6e chambre des appels correctionnels, statuant contradictoirement, a confirmé le jugement en ce qu'il a reconnu les prévenus coupables du délit d'exercice illégal de la profession de banquier du 10 août 1990 au 25 août 1993 pour Nicole P épouse L et Pierre L et du 3 août 1990 au 8 mai 1993 pour Yves L. Pour le surplus a infirmé la décision et déclaré Nicole P et Pierre L chacun à la peine de un an d'emprisonnement dont quatre mois fermes et deux cents mille francs (200 000 F) d'amende ; a condamné Yves L à six mois d'emprisonnement avec sursis et cent mille francs (100 000 F) d'amende ;

A ordonné la publication de la décision par extraits aux frais des condamnés dans la Voix du Nord et Nord Matin Edition de Lille sans que le coût de chaque insertion puisse dépasser trois mille francs (3 000) F ;

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable chaque condamné.

L Pierre, P Nicole épouse L et Yves L, ont formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la Cour d'appel de Douai du 26 novembre 1996.

La Cour de cassation, chambre criminelle, le 26 février 1998, a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel de Douai, en date du 26 novembre 1998, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi ; a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en Chambre du conseil ; A ordonné l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres de la Cour d'appel de Douai, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Décision :

LA COUR après en avoir délibéré conformément à la loi,

I - Rappel des faits et des procédures antérieures :

1.1 - Les faits :

La société anonyme Y, au capital de 3 MF, immatriculée au TCS de Lille (83 B 376) depuis le 16 août 1983, ayant son siège social à Lille, <adresse>, avait pour activités essentielles le négoce de gros de meubles (chaises, tables, petits buffets) de faible valeur, importés de Roumanie, Belgique, Italie, Yougoslavie et revendus exclusivement à des marchands forains s'approvisionnant dans les nombreux dépôts qu'elle avait créées, exploitant ainsi des établissements secondaires déclarés aux RCS de Valenciennes, Nantes, Douai, Evreux, Montauban, Corbeil-Essonne, Nîmes".

Son conseil d'administration était présidé par Nicole P épouse L et encore composé de Pierre L, son époux, tous deux domiciliés à Orchies et Jean-Pierre Palisse, demeurant à Libourne.

Yves L, fils des précédents, avait précédé ce dernier en 1990 et 1992, alors même qu'il effectuait son service militaire, en remplacement d'un administrateur démissionnaire.

Yves L était ensuite salarié, en qualité d'attaché commercial, à compter du 1er juin 1992 jusqu'au 13 mars 1996, date à laquelle la société Y et ses succursales étaient déclarées en liquidation judiciaire.

Par ailleurs, Pierre L était gérant de la SARL X, ayant le même siège social que la société Y mais son principal établissement à Orchies, <adresse>.

Cette société commerçait en gros les sièges fabriqués à l'étranger (chaises et tabourets en bois, plastique, tubes).

Pour une meilleure compréhension des griefs faits aux consorts L, il n'est pas inutile de rappeler les dispositions de la loi 69-3 du 3 janvier 1969 et du décret d'application 70-708 du 31 juillet 1970 réglementant tant la circulation des personnes n'ayant en France ni domicile ni résidence fixe que l'exercice des activités commerciales ambulantes : toute personne n'ayant ni domicile ni résidence fixe en France (ou dans un pays de la CEE) doit, pour exercer une activité de commerçants ambulants, obtenir de l'autorité administrative la délivrance d'un livret spécial de circulation, être rattaché à une commune dite " de rattachement ", se faire immatriculer au Registre du Commerce et des Sociétés et mentionner le numéro de cette immatriculation sur le titre de circulation.

Le commerçant ambulant doit, évidemment, lorsqu'il procède en démarchant au domicile des personnes physiques, respecter les obligations imposées par les articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation prescrivant la remise d'un contrat écrit permettant l'exercice de la faculté de renoncer pendant un délai de 7 jours et interdisant d'exiger ou recevoir des paiements avant l'expiration de ce délai.

Il ne saurait être contesté que la majorité des marchands forains, à supposer même qu'ils exerçassent dans le respect des règles ainsi définies, étaient inconnus des administrations fiscales et sociales, s'entendaient refuser l'ouverture de comptes bancaires, prétendaient ne savoir lire et écrire pour justifier l'absence de documents sans pouvoir expliquer les conditions dans lesquelles ils obtenaient la délivrance du permis de conduire leurs automobile et fourgon tractant leur abri mobile.

Ainsi réclamaient-ils que le prix de vente de leurs marchandises soient payées en numéraire sinon par chèque sans mention de bénéficiaire.

Les procédés de vente des sociétés Y et X ressortaient, d'une part, des plaintes des victimes des forains et des documents y annexés, de seconde part, de pièces produites par les époux Pierre Nicole L, tant dans le cadre de l'information judiciaire que dans leur dossier de plaidoirie ; de troisième part, enfin et surtout des explications particulièrement circonstanciées qu'ont fournies les trois prévenus devant cette cour.

D'abord, jusqu'en août 1990, fin de la période visée par une précédente poursuite, leurs clients forains leur remettaient les chèques tirés au porteur par les particuliers démarchés en contrepartie desquels la société Y leur délivrait la somme en numéraire diminuée d'une substantielle commission (5 %). Ces opérations, indépendantes des liens contractuels liant le grossiste au détaillant ambulant, étaient comptabilisées " à part ", et enregistrées par débit-crédit d'un compte " spécial " banque.

Les liquidités ainsi obtenues permettaient aux forains de solder leurs factures d'achats tant auprès des sociétés Y et X que chez des vendeurs de choses pareilles voire de trousseaux et lingerie.

Compte tenu de l'irrégularité flagrante de telles méthodes, ils concevaient une combinaison fallacieusement destinées à faire de la remise et de l'encaissement des effets émis par des tiers l'accessoire de la vente en gros, qualification au demeurant douteuse au regard des faibles quantités vendues.

A l'occasion de chacune de ces ventes, le responsable des dépôts de Aniche (59), Luneville (54), Beaucaire (30), La Rochelle (17), Chilly Mazarin (91), Revenin-Vaugris (38), Salon de Provence (13), Evreux (27), Pors-Pirien (22), Montauban (82), Ploumagoan (Guigamp), émettait un bon de livraison tiré d'un carnet à souche, dont un exemplaire était envoyé au siège social avec les moyens de paiements :

- d'une part, des chèques sans ordre au verso desquels étaient mentionnés, au crayon, le nom du forain remettant et la date de la remise, également le tampon encreur du lieu de dépôt (voir à titre d'exemples cotes D2, D6, D16, D25),

- d'autre part, des " bons blancs ", en réalité des avoirs, remis aux ambulants lorsque le montant des chèques qu'ils échangeaient excédait celui de leurs achats.

Ce dernier comportait non seulement le prix de vente HT et TTC (TVA à 18,6 %) des marchandises vendues mais encore une commission dite " frais d'encaissement ", d'un montant variable, établi, selon les calculs auxquels nous avons procédés par sondages à partir des factures remises à l'audience entre 2,56 et 3,90 % du prix de vente HT (commissions hors taxes en 1991).

Cette commission était également soumise à la TVA au taux normal de 18,6 % applicable à l'époque.

Ainsi, et quasi-quotidiennement, après réception de la copie du bon de livraison et des moyens de paiement étaient établis, au siège social :

* une facture numérotée, avec le code du client, le code du dépôt (code VRP), le libellé de l'article, la quantité, le prix unitaire HT, le montant HT et qui comportait, en fin de page, la récapitulation :

- du montant total HT,

- de la TVA sur marchandises,

- des frais d'encaissement HT,

- de la TVA sur frais d'encaissement,

- de la somme totale à payer TTC (addition des 4 chiffres précédents);

* un bordereau récapitulatif qui était annexé à la facture avec référence à son numéro, intitulé " modes de règlements " et détaillant :

- d'une part, les caractéristiques des chèques au porteur remis par le forain :

* colonne 1 : nom du tireur,

* colonne 2 : banque (ou CCP) tirée,

* colonne 3 : montant du chèque.

- d'autre part, les bons (avoirs) à créditer (ou à débiter) ;

* colonne 4 : numéro du bon,

* colonne 5 : bon remis (avoir à encaisser),

* colonne 6 : bon à établir (avoir à décaisser) ;

- enfin récapitulant le total des règlements, des avoirs (bons établis) et le montant de la commission pour frais d'encaissement.

Alors même que la réglementation impose la délivrance de la facture à l'acheteur, ces documents n'étaient jamais remis aux forains ;

Exceptionnellement, à la demande de l'un d'eux, ils pouvaient lui être adressés en poste restante voire tenus à sa disposition au lieu de dépôt où il s'approvisionnait habituellement.

Le code client permettait la tenu comptable du compte de ce client -en crédit et débit- mais encore l'édition annuelle, par forain, du listing des opérations (achat-paiements-avoirs) effectuées avec celui-ci.

A réception, les chèques étaient complétés de la mention du bénéficiaire par apposition du timbre humide Y ou Z et endossés pour encaissement à l'ordre de la CRCAM du Nord à Lille.

S'agissant systématiquement de chèques postdatés (voir pour l'exemple cote D 32), ils n'étaient endossés qu'au fur et à mesure de la date d'émission qui y était portée.

La signature de l'endosseur était celle d'un préposé de la société Y, vraisemblablement le comptable salarié, également signataire des lettres de relance au nom d'un " service réclamations ", rappels et plaintes au parquet pour le " service contentieux " (voir cotes D 28 à D 32 - D 17 et s. à titre d'exemples).

Ces endos successifs, postérieurement à la date à laquelle les effets étaient remis, obligeaient ainsi la société Y à gérer ces moyens de paiement en les conservant " en portefeuille " jusqu'à la fausse date d'émission qu'ils comportaient et alors même que, dès leur remise, leur montant avait crédité le compte client du forain, opération en compte valant paiement du prix de vente y débité et des frais de gestion.

Les prévenus ont, par ailleurs, expliqué que la mention au verso des chèques de la date de leur remise et des nom et prénom du remettant, effectuée au crayon (ce qui facilitait sa disparition par gommage au besoin) permettait d'enjoindre aux marchands ambulants, dès qu'ils se présentaient à l'un des dépôts, de faire leur affaire de tous litiges opposé par leurs clients au paiement des chèques.

Ces litiges avaient pour origine :

- premièrement, l'impayé des chèques dès lors qu'à leur présentation échelonnée par le banquier endossataire (CRCAM du Nord) le compte du tireur pouvait être dépourvu de provision voire clôturé ;

- deuxièmement, la défense de payer notifiée au tiré par le tireur, compte tenu de procédés de démarchage particulièrement frauduleux.

A cet égard, le dossier de la procédure fourmille d'exemples significatifs :

- " l'escroquerie aux asticots " consistant à s'introduire au domicile de personnes âgées ou dépressives, d'examiner, sous un fallacieux prétexte, leur literie, d'y déposer des larves pour vicier le consentement des victimes acceptant l'acquisition immédiate de sommier et matelas neufs à des prix exorbitants (de 7 000 à 8 000 F), tout en faisant croire à des promotions, en acceptant la reprise, à vil prix, de la literie contaminée (qui sera aussitôt revendue aussi malhonnêtement) et en proposant des conditions de paiement avantageuses : la remise de plusieurs chèques sans ordre postdatés pour en échelonner les règlements (D44, D47) ;

- les contraintes morales exercées, en réunion, sur des personnes vulnérables (femmes seules, personnes âgées), appuyées d'un argumentaire soutenu par des documents publicitaires trompeurs jusqu'à ce que la personne physique démarchée à son domicile cède et accepte de payer, près de dix fois le prix du commerce local, chaises et meubles de pacotille (voir D6 : 6 chaises pour 5 200 F) ;

- l'absence systématique de contrat écrit, bons de commande, facture ;

- les paiements immédiats sans possibilité d'exercer la faculté de renonciation ;

- la prise de fausses qualités de vendeur ou représentant de la société Y (ou X) faisant ainsi croire à une vente directe par celle-ci assortie de sa garantie en exhibant, voire en remettant, les documents fournis aux forains par le grossiste :

- cartes de visite,

- publicité sur les sièges en paille de seigle,

- bon de garantie (D124),

- l'usage de faux noms (exemple Jean Y, cote D 56).

Soutenant n'avoir aucun autre lien contractuel avec les forains que ceux de fournisseur à client, les époux L mettaient néanmoins tout en œuvre pour les " inciter " à régler les litiges portés à leur connaissance par les particuliers (ou des associations de consommateurs), ainsi pour faire délivrer une facture d'apparence régulière mais faussement ou non signée (D276, D141), rembourser partie du prix (D203).

1.2. Les procédures antérieures

Compte tenu de l'utilisation persistante de méthodes douteuses, les dirigeants des sociétés Y et X ont fait l'objet de nombreuses poursuites.

Ainsi Pierre L a été cité devant le Tribunal correctionnel de Carpentras pour avoir fait procéder, le 5 mai 1989, par un de ses représentants à une vente de marchandises à domicile sans respecter les dispositions de la loi 72-1137 du 22 décembre 1972 (devenues celles précitées du Code de la consommation).

Il a été condamné à 10 000 F d'amende par jugement du 30 janvier 1992 confirmé par arrêt de la Cour d'appel de Nîmes du 5 mars 1993.

La chambre criminelle de la Cour de cassation a, par arrêt du 9 mars 1994, relevé que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire ou mieux s'en expliquer, retenir à la fois l'existence d'un contrat de vente entre la société X et le démarcheur et énoncer que ce dernier travaillait pour le compte de celle-ci ". La Cour d'appel de Montpellier, cour de renvoi, a, par arrêt du 26 octobre 1994, relaxé Pierre L, dès lors que le forain démarchait, en sa qualité de revendeur, pour son compte propre.

Par jugement du 24 juin 1994, le Tribunal correctionnel de Douai a relaxé Pierre L du chef de remise au client d'un contrat non conforme dans le cadre d'un démarchage à domicile pratiqué le 26 septembre 1992 mais, après meilleure qualification en recel, l'a condamné à 5 000 F d'amende pour avoir reçu un chèque remis au démarcheur avant l'expiration du délai de repentir.

Par arrêt du 11 avril 1995, après réformation partielle, la Cour d'appel de Douai a renvoyé L des fins de la poursuite en retenant que " l'enquête ne permet d'affirmer ni que la clientèle des Etablissements Y est constituée exclusivement de commerçants non sédentaires ni que ces commerçants agissent pour le compte de la société Y ni même qu'il existe un pratique de vente instaurée au sein de cette société tirant partie du caractère non sédentaire du vendeur " et ajoutant que " sauf à poser comme postulat que tout commerçant non sédentaire commet une ou plusieurs infractions lors des ventes à domicile, il ne peut être reproché au prévenu d'avoir reçu des chèques des commerçants forains en connaissance de cause ce d'autant que les chèques sont remis sur un compte que ces commerçants ont auprès de la société et peuvent provenir d'une vente sur marché ".

Un jugement non motivé du Tribunal correctionnel de Lille du 3 mars 1995 le relaxait également des mêmes chefs pour faits commis le 20 janvier 1992.

Outres ces procédures, toutes conduites sur des faits isolés, les pratiques habituelles des sociétés Y et X faisaient l'objet d'une information judiciaire qui conduisait au renvoi devant le tribunal correctionnel de Pierre L et Nicole P, par ordonnance du 31 juillet 1991, pour exercice illégal de la profession de banquier et pour avoir pratiqué le démarchage au domicile de particuliers pour la vente de biens sans établir un contrat conforme et sans observance du délai de réflexion, faits commis entre le 1er janvier 1986 et le 9 août 1990.

Pour prononcer condamnation, les juges du Tribunal correctionnel de Douai, par jugement du 28 février 1992, et l'arrêt confirmatif de la Cour d'appel de Douai du 15 mars 1993 ont retenu que la remise habituelle d'espèces en contrepartie de chèques pour les faire encaisser par la société moyennant une commission caractérisait la gestion à titre onéreux de moyens de paiement et, dès lors, l'exercice illégal d'opérations de banque.

Pour caractériser à la charge des époux L les éléments constitutifs du second délit, ils ont considéré qu'il existait entre les prévenus et les marchands forains un lien de subordination et de dépendance.

En rejetant le pourvoi des condamnés par arrêt du 21 septembre 1994, la chambre criminelle de la Cour de cassation a édicté que la " pratique du versement en espèces contre la remise de chèques au porteur caractérise la gestion de moyens de paiement, opération de banque visée à l'article 1er de la loi du 21 janvier 1984 ". Elle a ensuite approuvé la décision de la cour d'appel qui, " pour rejeter les conclusions des prévenus qui soutenaient n'avoir aucun lien contractuel avec les acquéreurs démarchés par des commerçants de détail indépendant, et les déclarer coupables d'infractions à la loi sur le démarchage à domicile, a énoncé que les marchands forains commercialisaient la marchandise pour le compte de la société Y à l'égard de laquelle ils se trouvaient en situation de subordination et de dépendance, motifs procédant d'une appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause ".

II - Procédure dont appel :

2.1. Préventions :

Par ordonnance de l'un des juges d'instruction au Tribunal de grande instance de Douai du 28 novembre 1994, Nicole P en sa qualité de président directeur général de la SA Y, Pierre L, directeur général de cette société et Yves L, administrateur, ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour :

" avoir dans l'arrondissement de Douai, courant 1988, 1989, 1990 entre le 10 août 1990 et le 25 août 1993 en tout cas depuis temps couvert par la prescription,

1°) Illicitement effectué à titre de profession habituelle, des opérations de banque, notamment des opérations de crédit en agissant à titre onéreux par mise ou promesse de fonds à la disposition de tiers ou en prenant dans l'intérêt de ceux-ci des engagements tels qu'avals, cautionnement ou garantie ou par mise à leur disposition de clientèle ou par gestion de moyens de paiement, spécialement des chèques bancaires ou postaux.

Faits prévus et réprimés par les articles 1, 3, 10, 15 de la loi du 24 janvier 1984.

2°) Contrevenu aux dispositions législatives en ayant pratiqué ou fait pratiquer le démarchage au domicile de particuliers en proposant l'achat de biens, en omettant d'établir des contrats comportant les noms du fournisseur et du démarcheur, l'adresse du fournisseur, l'adresse des lieux de conclusion des contrats, la désignation précise de la nature et les caractéristiques des marchandises ou objets, le prix global à payer et les modalités de paiement au comptant ou à crédit et d'observer le délai de réflexion de sept jours accordé au client ;

Faits prévus et réprimés par les articles 2, 3, 4, 5 de la loi n° 72-1197 de décembre 1992 ".

2.2. Le jugement

Par jugement du 14 novembre 1995 le Tribunal correctionnel de Douai :

- a rejeté l'exception de nullité de la citation ;

- a relaxé les prévenus du chef d'infraction à la loi sur le démarchage à domicile en relevant que :

- les forains sont des commerçants indépendants ;

- il n'est pas établi qu'ils agissent sur instructions de la société Y ou comme mandataires de cette dernière ;

- il n'est pas démontré un quelconque lieu de subordination entre eux et la société ;

- les a déclarés coupables d'exercice illégal de la profession de banquier ;

- a condamné :

- Nicole P et Pierre L aux peines d'un an d'emprisonnement avec sursis et 200 000 F d'amende ;

- Yves L à celles de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 100 000 F d'amende ;

2.3 L'appel

Ce jugement a été frappé d'appel par le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Douai par déclaration du 16 novembre 1995.

La recevabilité de cet appel n'est pas discutée.

La Cour d'appel de Douai par arrêt du 26 novembre 1996 a " confirmé le jugement en ce qu'il a reconnu les prévenus coupables du délit d'exercice illégal de la profession de banquier du 10 août 1990 au 25 août 1993 pour Nicole P épouse L et Pierre L et du 3 août 1990 au 8 mai 1993 pour Yves L.

Pour le surplus,

- déclaré Nicole P, Pierre L et Yves L coupables d'infraction à la législation sur le démarchage à domicile ;

- en répression, condamné Nicole P et Pierre L chacun à la peine d'un an d'emprisonnement dont quatre mois fermes et deux cent mille francs (200 000 F) d'amende ;

- Yves L à six mois d'emprisonnement avec sursis et cent mille francs (100 000 F) d'amende ;

- ordonné la publication de la décision par extraits aux frais des condamnés dans la Voix du Nord Matin édition de Lille sans que le coût de chaque insertion puisse dépasser trois mille (3 000) francs ;

2.4. L'arrêt de cassation :

Par arrêt du 26 février 1998, la chambre criminelle de la Cour de cassation " casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel de Douai, en date du 26 novembre 1996, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi,

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Paris, à se désignée par délibération spéciale prise en Chambre du conseil ".

Aux motifs suivants :

- Sur la première infraction :

Attendu que, pour déclarer coupables les prévenus du délit d'exercice illégal d'opérations de banque, la cour d'appel énonce, par motifs propres ou adoptés, que la société Y, dont la clientèle est constituée, pour l'essentiel, de marchands forains non titulaires de comptes bancaires, se fait remettre par ceux-ci, en paiement de leurs achats, des chèques, sans indication du bénéficiaire, établis par les particuliers qu'ils démarchent, en prenant une commission de 2 à 3 % ; qu'elle ajoute que ce prélèvement systématique, alors même que la société n'a pas à craindre ou à déplorer d'impayés, exclut la notion d'opération de trésorerie au sens de l'article 12 de la loi précitée et qu'il s'agit donc bien d'une mise à disposition de moyens de paiement, constitutive d'une opération de banque au sens de cette même loi ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'opérations passées au débit ou au crédit de comptes ouverts à des tiers permettant le transfert de fonds au sens des articles 1er et 4 de la loi du 24 janvier 1984, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

Sur la seconde :

" Attendu qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que des marchands forains qui se fournissent auprès de la société Y, ont vendu des meubles à des particuliers démarchés à leur domicile, sans remettre de contrat et sans respecter le délai de réflexion ; que les dirigeants de la société précitée, sont seuls poursuivis pour infractions à la réglementation sur le démarchage à domicile ;

Attendu que, pour les déclarer coupables de ce délit, les juges de second degré retiennent que, si les forains sont des commerçants indépendants, une certaines ambiguïté est entretenue par la remise à ces derniers de cartes de garanties ou de prospectus à l'enseigne de la société Y, sur ordre de dirigeants de celle-ci qui en connaissent l'utilisation frauduleuse, les personnes démarchées étant moins réticences en pensant avoir à faire à une société ; que le mode de règlement de leurs achats accepté par les forains, qui les oblige à obtenir au plus tôt des chèques auprès de leurs clients, apparaît être le seul en vigueur ; que le système financier mis en place conduit à enfreindre la loi sur le démarchage à domicile en ce qui concerne la remise d'effets avant la fin du délai de réflexion ;

Qu'ils ajoutent que les dirigeants de la société Y ont ainsi fait pratiquer un démarchage à domicile irrégulier, les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation " n'étant pas subordonnées à l'existence d'un contrat de travail " ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'elle ne pouvait, sans se contredire ou mieux s'en expliquer, d'une part, relever que les marchands forains étaient des commerçants indépendants qui revendaient la marchandise acquise auprès de la société Y, et d'autre part, admettre implicitement un lien du subordination et de dépendance des démarcheurs à l'égard des prévenus, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et privé sa décision de base légale.

III - Prétentions et moyens des parties :

31 - Les prévenus poursuivent, par conclusions écrites, la réformation partielle du jugement querellé et entendent obtenir leur relaxe aux moyens suivants :

1°) la société Y n'a jamais ouvert dans ses livres de comptes de tiers au nom des commerçants forains et le montant des chèques au porteur remis par les forains étaient directement crédités au compte de cette société ;

2°) la société Y n'a avec les forains d'autre lien contractuel que ceux de fournisseur à client : ils ne sont pas ses mandataires ni ses préposés ;

3°) Les prévenus n'ont fourni à ceux-ci ni les instructions ni les moyens de commettre les infractions -non contestées- à la législation sur les ventes au domicile des particuliers;

4°) le paiement régulier par chèques au porteur et la remise de certificats de garantie ne suffisent pas à caractériser une autre relation contractuelle que celle de vendeur à acheteur.

32 - Le Ministère public a requis la condamnation des époux Nicole et Pierre L à des peines du même ordre que celles prononcées par la Cour d'appel de Douai sauf à requalifier en complicité les agissements punis par le Code de la consommation et à considérer que les faits antérieurs à la date des précédentes poursuites relèvent de l'autorité de la chose jugée.

Il s'en rapporte par ailleurs à l'appréciation de la cour sur la culpabilité d'Yves L.

Ceci expose :

La cour :

I - Sur la gestion de moyens de paiement :

Considérant, selon les dispositions conjuguées des articles 1 et 10 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, que la gestion de moyens de paiement, à titre habituel, constitue des opérations de banque qui ne peuvent être effectuées que par des établissements de crédit ;

Qu'il ne peut être discuté que le chèque -bancaire ou postal- est un moyen de paiement ;

Que sa provision, qui doit être préalable à l'émission, suffisante et rester disponible, constitue la garantie légale de son paiement et est transmise, de plein droit à celui qui en est devenu porteur soit ensuite d'un endos soit par simple tradition lorsqu'il s'agit d'un chèque émis sans indication du bénéficiaire (chèque dit au porteur ou sans ordre) ;

Que le barrement d'un chèque est sans influence sur sa transmission ; que, cependant, il ne peut être endossé, pour paiement par la banque tirée, qu'au profit d'un établissement de crédit par un client de celui-ci ;

Qu'il suit de ces rappels qu'un commerçant grossiste peut valablement recevoir en paiement de ses clients -sédentaires ou non- des chèques barrés émis sans indication de bénéficiaire par des tiers et les endosser au profit de son banquier pour recouvrement ;

Mais considérant que cette faculté ne saurait lui ouvrir le droit, réservé aux établissements de crédit, de gérer, à titre habituel et contre rémunération, de tels moyens de paiements ;

Que la gestion de moyens de paiement doit s'entendre de tous actes matériels et juridiques d'administration destinés à la conservation des effets, à la sauvegarde et à l'exercice des droits y attachés, de l'émission au paiement ;

Qu'il ressort des données factuelles ci-dessus rappelées et confirmées à l'audience de la cour par les prévenus, que la société Y a fait fonctionner dans l'intérêt de ses clients forains, les comptes de tiers (comptes clients classe 41 du plan comptable) ouverts pour ceux-ci dans ses livres comme des comptes en banque, dont l'ouverture leur était refusée, et ce en facturant ses prestations ;

Qu'en effet, et pour chacun de ses clients (identifiés sous des numéros de code repris dans l'intitulé des comptes-clients ainsi que l'a confirmé Yves L devant la cour) elle a débité :

- le prix des marchandises HT,

- le montant de la TVA sur ce prix,

- le montant de la commission,

- la TVA y afférente,

- les bons (avoirs) à délivrer ;

et y a crédité :

- le montant des chèques en blanc tirés par un voire -et souvent- plusieurs tiers, personnes physiques démarchées par le titulaire du compte client ;

- les avoirs précédemment délivrés ;

Que ces écritures, reprenant celles des facturations et bordereaux y annexés, constituent ainsi les articles d'un même compte valant paiement des marchandises par compensation, sans réserve d'encaissement, peu important qu'après endos par la société Y, porteur bénéficiaire par ajout de mention, le banquier endossaire restât impayé par le tiré ;

Que ce paiement par compensation et la délivrance de billets, constatant un trop perçu, équivalent à la remise d'espèces ;

Qu'après passation de ces écritures, la société Y conservait les chèques " en portefeuille " pour ne les endosser, afin d'encaissement, qu'au fur et à mesure des " postdates " d'émission ;

Qu'ainsi, la commission dite " frais d'encaissement ", globalisée quel que fût le risque, doit être définie comme une rémunération forfaitaire de gestion des chèques aux lieu et place d'une banque, d'ailleurs volontairement assujettie à la TVA comme produit et non pas considérée comme provision sur le risque encouru.

II - Sur le démarchage frauduleux :

Considérant qu'il est constant que les marchands forains exerçaient leurs activités ambulantes en toute indépendance, voire en toute illégalité au regard des règles sus-énoncées, sans aucun autre lien contractuel avec la société Y que ceux résultant des contrats de vente convenus entre eux ;

Qu'il est indiscutable que ces itinérants n'ont jamais respecté la réglementation protégeant le consommateur démarché à son domicile et n'ont jamais voulu la respecter ;

Que les dirigeants de la société Y, qui, à l'audience, ont rappelé qu'ils n'avaient jamais pu obtenir d'engagements écrits de leurs clients, qui excipaient de leur impossibilité de lire et écrire, ne pouvaient ignorer -surtout après leurs précédentes mises en cause- que ces ambulants ne remettaient jamais de contrats, de factures ; ne permettaient pas l'exercice du repentir ; plus, se faisaient aussitôt remettre des chèques en blanc, aux dates d'émission échelonnées, que la société Y gérait en toute connaissance ;

Qu'ils ont néanmoins continué à les approvisionner en facilitant leurs paiements ; en leur remettant des documents commerciaux, notamment des bons de garantie, dont ils savaient l'utilisation abusive et aux seuls fins de maintenir un chiffre d'affaires très important avec des clients dont ils ne vérifiaient que rarement la capacité à effectuer des actes habituels d'achats et reventes d'objets mobiliers en ambulance ;

Que ces faits,qu'il appartient au juge de mieux qualifier après que les parties aient été en mesure de s'en expliquer, caractérisent à l'encontre des dirigeants de la société Y des actes de complicité par fourniture de moyens, aide et assistance dans les faits qui ont préparé puis facilité enfin consommé les infractions visées à la prévention commises à titre principal par les marchands forains,peu important que ceux-ci aient été ou non identifiés et/ou poursuivis.

III - Sur la culpabilité :

Considérant que Pierre L et Nicole P n'ont jamais nié qu'ils étaient les investigateurs des procédés de ventes et de gestion des moyens de leur paiement dont ils conviennent qu'ils assuraient le fonctionnement ;

Que, par contre, administrateur sans pouvoirs propres, Yves L n'a personnellement commis aucun de ces faits ;

Considérant, par ailleurs, que les préventions reposant sur des procédés et méthodes envisagés globalement, seuls seront retenus les faits postérieurs au 9 août 1990, ceux commis antérieurement ayant été définitivement jugés.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Vu l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 26 février 1998. Déclare recevable l'appel du Ministère public ; Réformant partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau par l'effet dévolutif de l'appel, après meilleure qualification des faits, Déclare Nicole P et Pierre L, coupables d'avoir, ensemble et de concert, dans l'arrondissement judiciaire de Douai et autres lieux du territoire national, entre le 9 août 1990 et le 9 août 1993 en tout cas depuis temps non prescrit, en leur qualité de dirigeants de la SA Y, 1°) de manière habituelle, à titre onéreux et sans que la société fût inscrite sur la liste des établissements de crédit, géré des moyens de paiement, en l'occurrence des chèques, délits prévus par les articles 1, 3, 10, 15 et 75 de la loi 84-46 du 24 janvier 1984 ; 2°) été complice de marchands ambulants, auteurs d'infractions à la législation sur le démarchage au domicile des personnes physiques pour avoir omis de leur remettre un contrat écrit, omis de leur faciliter l'exercice de la faculté de renonciation, exigé et accepté des paiements immédiats par chèques, en leur fournissant sciemment les moyens de commettre ces délits et en leur prêtant aide et assistance pour en faciliter la commission et la consommation ; délits prévus et punis par les articles 59, 60 anciens, 121-6 et 121-7 nouveaux du Code pénal, L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation ; En répression les condamne chacun à la peine de un an d'emprisonnement et 200 000 F d'amende ; Dit qu'il sera sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement dans les conditions prévues et avec l'avertissement prescrit par les articles 132-29 et suivants du Code pénal ; Déclare Yves L non coupable des faits visés à la prévention et le renvoie des fins des poursuites sans peine ni droit.