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Décisions

Cass. crim., 6 mars 1984, n° 83-90.469

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bruneau (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Leydet

Avocat général :

M. Méfort

Avocats :

SCP Riche, Blondel.

Paris, 9e ch., du 21 déc. 1982

21 décembre 1982

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par T Philippe, la société à responsabilité limitée L, contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 21 décembre 1982 qui, pour infraction à la loi relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, a condamné T à 10 000 F d'amende, S à 1 500 F d'amende et a déclaré ladite société civilement responsable de ce dernier ; Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ; - Sur le pourvoi de T Philippe : - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 4, 5 et 6 de la loi du 22 décembre 1972, ensemble les principes directeurs d'interprétation de la loi pénale, l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a sur l'action publique condamné le gérant d'une SARL à une amende de 10 000 F et au paiement des frais du procès envers l'Etat, pour avoir avant l'expiration du délai de 7 jours à compter de la commande exigé et obtenu un " engagement " au sens de l'article 4 de la loi précitée ;

" au motif qu'il est évident qu'en faisant signer le même jour, par la cliente, l'ordre de publication et la demande de prélèvement sur son compte bancaire, le démarcheur a exigé et obtenu un engagement au sens de l'article 4 et ce sans qu'il y ait lieu de prendre en considération la possibilité d'une éventuelle révocation de la part de la signataire ;

" alors que, d'une part la signature d'une demande de prélèvement sur un compte bancaire ne peut constituer un engagement au sens de l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 ;

" alors que, d'autre part et en tout état de cause dans la mesure où une demande de prélèvement peut à tout moment être révoquée sans motif et ce à la seule initiative de son signataire, cette demande de prélèvement ne peut constituer un engagement ;

" et alors enfin que si une autorisation de prélèvement sur un compte bancaire est signée pendant le délai de réflexion de l'article 3 de la loi du 22 décembre 1972, la validité et l'efficacité de cette demande sont subordonnées à l'absence de repentir de la part du consommateur dans le délai de réflexion ; que l'engagement au sens de l'article 4 de la loi susvisée ne peut dans ces conditions exister qu'après l'expiration du délai de sept jours ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 4, 5 et 6 de la loi n° 72-1337 du 22 décembre 1972, ensemble de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a sur l'action publique condamné le gérant d'une SARL à une amende de 10 000 F et aux frais du procès pour avoir, avant l'expiration du délai de 7 jours à compter de la commande, exigé et obtenu un " engagement " au sens de l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 ;

" alors qu'il résulte de conclusions laissées sans réponse que les prévenus et spécialement le sieur T avaient fait valoir que l'élément moral faisait totalement défaut en l'espèce ; qu'en ne se prononçant pas sur cette articulation essentielle des écritures du prévenu, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 593 du Code de procédure pénale ;

" et alors d'autre part et en tout état de cause qu'en ne caractérisant pas l'existence en l'espèce d'un élément moral, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à son arrêt au regard des exigences des articles 4 et 5 de la loi du 22 décembre 1972 " ;

Lesdits moyens étant réunis ; - Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme sur le principe de la culpabilité, qu'à l'occasion d'un démarchage à domicile, T Philippe a obtenu de la part de la personne visitée, en même temps que la signature d'un contrat relatif à une annonce à paraître dans un guide indicateur, une autorisation de prélèvement sur son compte bancaire de la somme de 2000 F correspondant aux frais de publication de ladite annonce ;

Attendu que pour déclarer le prévenu coupable d'infraction à l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 modifié par la loi du 7 juin 1977, aux termes duquel : " avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article 3, nul ne peut exiger ou obtenir directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement ", la cour d'appel énonce " qu'en faisant signer le même jour par la cliente la publication et la demande de prélèvement, le prévenu a obtenu un engagement au sens de ce texte, sans qu'il y ait lieu de prendre en considération la possibilité d'une éventuelle révocation de la part de la signataire " ;

Attendu qu'en se prononçant ainsi les juges d'appel ont caractérisé tous les éléments tant matériel qu'intentionnel du délit qu'ils ont retenu à la charge du prévenu ; qu'en effet, une autorisation de prélèvement bancaire même si elle peut être révoquée par le signataire doit être considérée quelle que soit la suite donnée par les parties au contrat qui lui a servi de fondement, comme une contrepartie au sens de l'article 4 de la loi susvisée ; d'ou il suit que les moyens doivent être écartes ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette les pourvois.