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Décisions

Cass. crim., 18 avril 1969, n° 68-91.780

COUR DE CASSATION

Arrêt

T. corr. Lille, du 12 févr. 1968

12 février 1968

LA COUR : - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 3 de la loi du 21 mai 1836 modifiée par la loi du 18 avril 1924, des articles 410 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale et 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale,

" en ce que l'arrêt attaqué a considéré comme une loterie prohibée la distribution à titre publicitaire et par la voie du hasard aux acheteurs de divers articles valant, dans le commerce, au moins le prix demandé, d'un supplément de valeur prélevé par le vendeur sur son bénéfice commercial, alors que seules ont interdites les " opérations " consistant en un marché à titre onéreux et qu'il n'y a donc pas délit lorsque les clients ne mettent aucune somme en jeu et ne courent par conséquent aucun risque de perte, même si certains d'entre eux obtiennent, par la voie du sort un supplément de valeur qui provient d'une libéralité du vendeur " ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement dont la cour d'appel adopte l'exposé de fait et les motifs non contraires que Pothelet a, en 1965, acquis d'un sieur Morali 700 appareils, dont il a placé 495 sur les comptoirs, à la vue du public, dans les débits de boissons ; que chaque appareil, dit " perce-trous " est constitué par une boîte métallique sur laquelle figure l'inscription : " Vente publicitaire, 1 F " ; que le dessus de cette boîte est recouvert d'un papier opaque marqué de 280 alvéoles qui indiquent l'emplacement de 280 billes de très petites dimensions et de couleurs différentes ; que le percement d'un alvéole par un stylet libère une bille qui tombe dans un godet où elle est récupérée grâce au maniement d'une poignée, qui ne peut s'effectuer qu'après versement d'une pièce de un F ; que chaque bille donne droit à un objet, dont le prix d'achat varie de 0,30 F à 16 F suivant la couleur de la bille ; qu'il fallait en moyenne cinq mois pour épuiser la totalité des billes, la recette de chaque appareil étant relevée par des représentants de Pothelet ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations c'est à bon droit que les juges du fond ont fait application à Pothelet de la loi du 21 mai 1836 modifiée par celle du 18 avril 1924 ; qu'en effet, de d'ensemble des dispositions de l'article 7 de ce texte, il résulte que sont réputées loteries et interdites comme telles, toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait dû, même partiellement, au hasard ; que ces dispositions n'exigent pas qu'il y ait risque de perte pour celui qui participe à un tel jeu, l'emploi de la voie du sort dans l'opération envisagée étant prohibé, abstraction faite de ses résultats ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 de la loi d'amnistie du 18 juin 1966, 2 et 3 de la loi du 21 mai 1836-18 avril 1924 portant prohibition des loteries, 410 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale et 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale,

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné le prévenu pour des faits de loterie prohibée commis en 1965, 1966 et 1967 alors que tous les faits antérieurs au 8 janvier 1966 étaient amnistiés de plein droit " ;

Attendu que les faits, objet de la prévention, ont été commis en 1965, 1966 et 1967 ; que s'agissant en l'espèce d'infractions successives de même nature commises, les unes avant, les autres après le 8 janvier 1966 et comprises dans une poursuite unique, ayant abouti à une peine, également unique, d'amende et de confiscation, celles des infractions commises postérieurement à cette date se situent lors du domaine d'application de l'article 2, 3°, de la loi du 18 juin 1966 portant amnistie ; que l'article 20 de ladite loi, s'il vise le cas de " condamnation pour infractions multiples " suppose des infractions de nature différente et est, dès lors, inapplicable en l'espèce ; qu'ainsi la peine de 500 F d'amende et la confiscation étant justifiées par la déclaration de culpabilité relative aux faits de loterie prohibée postérieurs au 8 janvier 1966, le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt attaqué est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.