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Décisions

Cass. com., 17 juin 2003, n° 01-12.280

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Hadjm (SARL), Beauté Méditerranée (SARL)

Défendeur :

L'Oréal (SA), Kristal parfum (Sté), Prestige (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot. Rapporteur: Mme Garnier

Avocats :

SCP Gatineau, SCP Thomas-Raquin, Benabent.

TGI Marseille, du 23 janv. 1997

23 janvier 1997

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 17 janvier 2001), que la société l'Oréal, titulaire de la marque dénominative "Safari", n° 1 200 787, déposée le 6 mars 1992, en renouvellement d'un précédent dépôt, de la marque emblématique complexe, n° 94 536 282, déposée le 14 septembre 1994 avec revendication de couleurs représentant un emballage comportant un fond marron imitant une peau de reptile, une étiquette rectangulaire de couleur argent entourée d'un trait noir avec l'inscription "Safari", et de la marque figurative, n° 94 536 281, déposée le 14 septembre 1994, représentant un flacon de parfum avec vaporisateur comportant un écusson, le dessin de la croix de Saint André et un bouchon cylindrique avec moulure, pour désigner divers produits de parfumerie en classe 3, a, après saisie-contrefaçon, poursuivi judiciairement en contrefaçon de marques, concurrence déloyale et parasitaire la société Hadjm qui offrait à la vente des eaux de toilettes et des parfums présentés dans des conditionnements similaires aux siens, ainsi que les sociétés Beauté Méditerranée et Kristal parfum, fournisseurs des produits litigieux ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches : - Attendu que les sociétés Hadjm et Beauté Méditerranée font grief à l'arrêt de leur condamnation pour contrefaçon de marques, alors, selon le moyen : 1°) que les juges du fond ne peuvent retenir la contrefaçon d'une marque emblématique complexe composée d'un nom et d'autres éléments, dès lors qu'ils ont rejeté toute contrefaçon du nom de la marque emblématique ; qu'en l'espèce, ayant à juste titre rejeté toute contrefaçon de la marque dénominative Safari la cour d'appel ne pouvait retenir la contrefaçon de la marque emblématique Safari se composant pour partie, si ce n'est essentiellement, de la dénomination non contrefaite ; qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé les articles L. 713-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle ; 2°) que pour que les divers éléments composant une marque complexe puissent être protégés séparément les uns des autres, il est nécessaire que soit établi que chacun de ces éléments présente isolément un caractère distinctif, que de plus, une marque complexe ne peut contrefaire un élément d'une autre marque complexe que si elle en contrefait l'élément, caractéristique ; qu'en l'espèce, en retenant une contrefaçon des marques emblématiques complexes Safari, quand elle avait constaté l'absence de contrefaçon de la dénomination Safari constituant l'élément central de ces marques complexes, sans à aucun moment relever que les autres éléments, argués de contrefaçon, auraient présenté isolément un caractère distinctif permettant leur protection séparée, ni qu'ils auraient constitué l'élément caractéristique de la marque complexe, la cour d'appel a en tout état de cause privé sa décision de base légale au regard des articles L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les emballages en carton diffusés par les sociétés Hadjm et Beauté Méditerranée reproduisaient, à l'exception de la dénomination "safari", remplacée par le terme "alfaro", l'emballage de couleur marron, imitant la peau d'un reptile et l'étiquette argentée de la marque n° 94 536 282, la cour d'appel qui a ainsi, implicitement mais nécessairement, constaté que l'élément distinctif de la marque complexe arguée de contrefaçon était l'élément emblématique a, par une appréciation souveraine, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour condamner les sociétés Hadjm et Beauté Méditerranée pour concurrence déloyale, l'arrêt retient que ces sociétés ont commercialisé les produits litigieux à un prix nettement inférieur à ceux pratiqués par la société l'Oréal, cette différence de tarif n'empêchant pas qu'ils puissent être acquis par la même clientèle ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, insuffisants à caractériser une faute, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais en ses seules dispositions ayant prononcé une condamnation pour concurrence déloyale et fixé le montant du préjudice, l'arrêt rendu le 17 janvier 2001, entre les parties, par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Montpellier.