Cass. com., 6 mai 2003, n° 01-03.897
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Starvital - Laboratoire Lescuyer (SARL)
Défendeur :
Léa Institut Vital (SA), S'Nature (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Thomas-Raquin, Benabent.
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, le 30 janvier 2001), que la société S'Nature, titulaire depuis 1997 de la marque Vital, déposée le 26 novembre 1980 par la société Vitagermine et régulièrement renouvelée, pour désigner les produits en classes 5, 29 et 30, notamment les produits diététiques et alimentaires, a, par acte du 4 novembre 1998, enregistré le 9 novembre au registre national des marques, partiellement cédé cette marque pour les produits des classes 29 et 30 à l'exception du miel à la société Léa Institut Vital (société Léa), titulaire depuis le 27 janvier 1997 de la marque Institut Vital ; que la société Shanka, dénommée depuis le 3 juillet 1995 Starvital, et actuellement dénommée Laboratoires Lescuyer (société Starvital), qui commercialise des compléments nutritionnels et offre des prestations de services dans les domaines médical, paramédical ou diététique, visant au bien-être des personnes, a déposé entre les mois de février 1994 et d'octobre 1996, sept marques comportant le vocable Vital assorties de différents préfixes ; que par acte du 22 février 1999, les sociétés S'Nature et Léa ont assigné en contrefaçon de marques, nullité des marques contrefaisantes, changement de dénomination sociale et concurrence déloyale, la société Starvital, qui a reconventionnellement conclu à la déchéance des droits des sociétés S'Nature et Léa sur la marque Vital;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches: - Attendu que la société Starvital fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en déchéance des droits des sociétés S'Nature et Léa sur la marque Vital, alors, selon le moyen: 1°) que l'exploitation d'une marque enregistrée analogue à une autre marque enregistrée, ne vaut pas exploitation de cette dernière ; qu'il s'ensuit que le titulaire de deux marques voisines, faisant l'objet de deux enregistrements distincts, ne saurait prétendre échapper à la déchéance de l'une en invoquant l'exploitation de l'autre; qu'en constatant expressément que la société Léa exploitait ses produits sous la marque Institut Vital faisant l'objet d'un enregistrement distinct, tout en jugeant que l'exploitation de la marque Institut Vital pouvait être invoquée pour échapper à la déchéance sur la marque Vital, la cour d'appel a violé l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle; 2°) que lorsque le dépôt de la marque est effectué pour plusieurs produits et que l'exploitation n'est réalisée que pour certains, la déchéance des droits sur la marque est encourue concernant les produits pour lesquels elle n'est pas utilisée; que dans ses conclusions, la société Starvital faisait valoir que la société Léa exploitait la marque Vital pour des produits (gélules, comprimés capsules) autres que ceux pour lesquels la marque était enregistrée (produits alimentaires des classes 29 et 30 à l'exception du miel) et que la société S'Nature restée propriétaire de la marque Vital concernant le miel (en classe 30), n'exploitait pas la marque pour ce produit mais pour commercialiser du pollen, produit distinct du miel; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 3°) qu'en se bornant à relever l'existence de très nombreux engagements contractuels pris par la société Léa, la commercialisation par cette société de toute une gamme de produits appelés concentrés nature, ainsi que la commercialisation par la société S'Nature d'un produit sous la dénomination Vital forme, et par la société RCS distribution, licenciée de S'Nature, de produits sous les dénominations Vital, Vital Forme, Vital Beauté et Vital B9, sans rechercher quels étaient exactement les produits commercialisés par les deux titulaires de la marque, et si les produits commercialisés correspondaient à ceux désignés lors du dépôt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la marque Vital avait fait l'objet d'un usage sérieux au cours des années 1991 à 1994, puis à compter de l'année 1997, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande en déchéance de cette marque, le motif tiré de l'usage d'une marque similaire par la société Léa Institut Vital étant inopérant;
Attendu, en second lieu, que c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à des allégations non assorties d'offre de preuve, a pu, en constatant l'usage sérieux de la marque Vital conformément aux dispositions de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, statuer comme elle a fait; d'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, n'est pas fondé en ses autres branches;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches: - Attendu que la société Starvital fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré que la dénomination Starvital et les marques déposées par cette société étaient contrefaisantes de la marque Vital, d'avoir enjoint à cette société de modifier sa dénomination sociale et déclaré nulles les marques qu'elle avait déposées;
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi;
Mais sur le troisième moyen, - Vu l'article 1382 du Code civil : - Attendu que pour condamner la société Starvital pour concurrence déloyale, l'arrêt retient que la contrefaçon de la marque Vital constitue nécessairement un acte de concurrence déloyale et parasitaire, en ce sens qu'elle est de nature à entraîner un risque de confusion dans l'esprit du public;
Attendu, qu'en statuant ainsi, sans constater des faits de concurrence déloyale distincts des actes de contrefaçon, la cour d'appel a violé le texte susvisé;
Par ces motifs: Casse et annule, mais en ses seules dispositions ayant prononcé la condamnation du chef de concurrence déloyale, l'arrêt rendu le 30janvier 2001, entre les parties, par la Cour d'appel de Poitiers; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers.