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Décisions

Cass. crim., 14 avril 1993, n° 92-84.180

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gondre (faisant fonctions)

Rapporteur :

M. Carlioz

Avocat général :

M. Robert

Conseillers :

MM. Hébrard, Jean Simon, Hecquard, Blin, Jorda, Roman

Avocat :

Me Ryziger.

Cass. crim. n° 92-84.180

14 avril 1993

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par B Jean-Michel, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, du 3 juillet 1992 qui, pour diverses infractions à la loi du 10 janvier 1978 et à celle du 22 décembre 1972 ainsi qu'au décret du 14 mars 1986 portant application au commerce de l'ameublement de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes, l'a condamné, pour les délits, à une amende de 20 000 F, pour les contraventions, à quatre amendes de 800 F, à cinquante-huit amendes de 800 F et à quatre-vingt dix-neuf amendes de 100 F, chacune, et a prononcé sur les réparations civiles ;

Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 5 du décret n° 86-583 du 14 mars 1986, 3 et 5 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, 1 et 4 du Code pénal ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné B à diverses peines d'amendes contraventionnelles ;

" aux motifs adoptés des premiers juges que B, qui a participé activement à la vente, donnait des instructions précises à son équipe de vendeurs et a été l'interlocuteur privilégié de l'Administration à l'occasion de l'enquête, doit être regardé comme pénalement responsable des infractions qui ont été constatées ; qu'il en est de même en ce qui concerne A dont le niveau de rémunération et les fonctions d'autorité qui lui avaient été dévolues en ce qui concerne la direction et l'animation de l'équipe de vente, empêchent de le considérer comme étranger aux délits et contraventions relevés, dans la mesure où ces derniers sont étroitement liés à la politique commerciale de l'entreprise ; qu'il convient donc de retenir les deux prévenus dans les liens de la prévention ;

" alors qu'en matière contraventionnelle, un même fait ne peut donner lieu qu'à la condamnation d'une seule personne auteur de l'infraction, qu'il n'existe, en effet, en cette matière ni complicité ni coaction ; qu'en retenant dès lors tant B que A dans les liens de la prévention et en les condamnant l'un et l'autre, et à raison des mêmes faits, à des peines d'amendes contraventionnelles, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus visés " ;

Attendu que le moyen qui, d'une part, remet en discussion une disposition du jugement passée en force de chose jugée à l'égard de Philippe A et qui, d'autre part, est nouveau et mélangé de fait, est comme tel irrecevable ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 5 de la loi 78-22 du 10 janvier 1978 ;

" en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement ayant condamné B à une peine de 58 amendes de 800 F chacune pour l'omission des mentions obligatoires sur l'offre de crédit ;

" aux motifs adoptés des premiers juges que de nombreuses omissions ou imprécisions ont été relevées dans 58 contrats de vente examinés ;

" alors que l'article 5 de la loi du 10 janvier 1978 précise les mentions obligatoires devant figurer dans les offres de crédit ; qu'il s'agit du montant du crédit, de la nature, l'objet et les modalités du contrat, ainsi que d'un certain nombre d'autres mentions ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer que de nombreuses imprécisions ou omissions ont été relevées dans 58 contrats de vente examinés, sans préciser la nature de ces imprécisions ou omissions, et en particulier, sans relever qu'il s'agissait de mentions obligatoires prévues par l'article 5 de la loi précitée, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer le contrôle qui lui appartient, de sorte qu'elle a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;

Attendu que pour déclarer Jean-Michel B coupable d'avoir contrevenu aux dispositions de l'article 5 de la loi du 10 janvier 1978 relative à l'information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit, l'arrêt attaqué énonce que le prévenu a omis, contrairement aux prescriptions légales, de mentionner sur l'offre préalable à l'ouverture de crédit les modalités du contrat, le coût total du crédit, le coût de la location en pourcentage, le prix de vente final ou la durée de la location ;

Que le moyen, qui procède d'une affirmation inexacte, ne saurait être admis ;

" Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 1 et 5 de la loi n° 72- 1137 du 22 décembre 1972 ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris ayant condamné B à une somme de 20 000 F d'amende pour les délits ;

" aux motifs que B fait remarquer que, a contrario des dispositions actuellement en vigueur, la loi relative au démarchage à domicile ne saurait lui être applicable, dès lors que c'est à la demande des clients que les vendeurs se rendaient chez ces derniers ; qu'il ressort des auditions des clients ayant contracté avec Cuisine Plus que nombre d'entre eux étaient contactés directement par la société Cuisine Plus, en particulier par téléphone ; que ce mode de prospection permettait au vendeur d'obtenir un rendez-vous avec le client, chez lequel il se rendait avec son accord ; que l'initiative de la prise de contact revenait bien à la société Cuisine Plus, de sorte que B ne saurait soutenir que c'est à la demande des clients que les vendeurs se rendaient au domicile de ces derniers ;

" alors que le démarchage à domicile au sens de la loi du 22 décembre 1972, suppose la visite inopinée d'un démarcheur au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail ; que tel n'est pas le cas, d'une visite faisant suite à un accord de la personne visitée, quand bien même cet accord aurait été donné téléphoniquement et à l'initiative du vendeur ou du prestataire de services ; qu'en retenant, dès lors, B dans les liens de la prévention au motif que l'initiative de la prise de contact revenait bien à la société Cuisine Plus, qui avait contacté directement les clients par téléphone, tout en constatant que les vendeurs se rendaient à leur domicile avec leur accord, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus visés " ;

Attendu que pour déclarer Jean-Michel B coupable d'infraction à l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 relative la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, pour avoir exigé ou obtenu de clients le versement d'un acompte avant l'expiration du délai de réflexion de sept jours, la juridiction du second degré se prononce, notamment, par les motifs repris au moyen;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments l'infraction poursuivie; qu'en effet, la loi précitée du 22 décembre 1972 est applicable à quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail pour proposer la vente, la location ou la location-vente de ces marchandises ou objets quelconques ou pour offrir des prestations de service; que le caractère spontané de la visite du démarcheur n'est pas une condition de la répression; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation de l'article 6 de la loi du 22 décembre 1972 ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris ayant condamné in solidum B et A à payer diverses sommes aux parties civiles ;

" alors que lorsque les infractions sont commises par les préposés ou dirigeants d'une personne morale, dans le cadre de leurs fonctions et au profit de ladite personne morale, seule cette dernière peut être condamnée à réparer le préjudice subi par les victimes, en sa qualité de civilement responsable ; qu'en condamnant cependant B à verser diverses sommes aux parties civiles en réparation de leur préjudice, la cour d'appel a violé les articles susvisés " ;

Attendu qu'en condamnant Jean-Michel B à payer, solidairement avec Philippe A, définitivement condamné par les premiers juges, les sommes allouées par ces derniers aux parties civiles en réparation du préjudice résultant des infractions dont ils ont été déclarés coupables, la cour d'appel n'a fait qu'appliquer les dispositions de l'article 55 du Code pénal selon lesquelles les personnes condamnées pour un même crime ou, comme en l'espèce, pour un même délit, sont tenues solidairement des restitutions et des dommages-intérêts;

Que le moyen, dès lors, n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi ;