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Décisions

CA Paris, 1re ch., 20 mai 2003, n° ECOC0300216R

PARIS

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Morin Sustème architectonique (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Penichon (faisant fonctions)

Avoué :

Me Baufume

Avocat :

Me Baudel.

CA Paris n° ECOC0300216R

20 mai 2003

Saisi par le ministre de l'Economie de pratiques mises en œuvre dans le secteur des escaliers préfabriqués en béton, le Conseil de la concurrence a, par décision n° 03-D-12 du 3 mars 2002, infligé à la société Morin Système Architectonique (MSA) une sanction pécuniaire de 675 000 euros ;

Ayant formé le 4 avril 2003 un recours en annulation et subsidiairement en réformation contre cette décision, la société MSA nous demande, en application des dispositions de l'article L. 464-8 du Code de commerce, de surseoir à l'exécution de la sanction pécuniaire ci-dessus rappelée jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les mérites du recours ;

A l'appui de sa demande, le conseil de cette société expose notamment que la transmission du dossier au Procureur de la République et la publication de la décision porteraient une atteinte irréversible au crédit de la société. Par ailleurs, il fait valoir que le paiement de la sanction pécuniaire serait de nature à compromettre tant la pérennité de l'entreprise, dont le résultat d'exploitation est déficitaire pour les années 2001 et 2002, que l'emploi dans la région, un plan social portant sur quarante et un licenciements ayant été présenté au comité d'entreprise,

Le ministre de l'Economie et le Ministère public concluent oralement au rejet de la demande de sursis à exécution.

Sur ce :

Attendu qu'aux termes de l'article L. 464-8 du Code de commerce le recours contre une décision du Conseil de la concurrence n'est pas suspensif, mais que, toutefois, le premier président de la Cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision lorsque celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité ;

Attendu, selon les articles L. 464-7 et L. 464-8, alinéa 1, du Code de commerce, que seules les décisions prononçant des sanctions, édictant des injonctions ou ordonnant des mesures conservatoires peuvent faire l'objet d'une mesure de sursis ;que la transmission du dossier au Procureur de la République n'entrant pas dans les prévisions des textes précités, la demande ne peut être accueillie ;

Attendu que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la publication forcée, qui procède du principe fondamental de la publicité des décisions à forme et à contenu juridictionnel, porte une atteinte irréversible à son crédit alors surtout qu'elle a la faculté de mentionner l'existence du recours dans le texte publié ;que cette demande est rejetée ;

Attendu, toutefois, qu'il résulte des pièces versées aux débats et mises à la disposition du Ministère public et du ministre chargé de l'Economie que le chiffre d'affaires de la société pour 2002, d'un montant de 16 236 444 euros, est en diminution par rapport à celui de 2001, qui s'est élevé à 22 684 928 euros, et que le résultat d'exploitation pour 2002 accuse une perte de 3 127 003 euros contre 1 444 065 euros en 2001, pour un montant de capitaux propres de 500 298 euros en 2002 et 476 535 euros en 2001, que, selon une attestation du 15 mai 2003 du commissaire aux comptes de l'entreprise, M. Olivier Coumert, " la société MSA n'est pas en mesure d'honorer une sanction pécuniaire de 675 000 euros sans mettre en péril son exploitation " ; qu'il apparaît ainsi que l'exécution de cette sanction pécuniaire est de nature à entraîner pour MSA des conséquences manifestement excessives,

Par ces motifs : Ordonnons le sursis à l'exécution de la sanction pécuniaire d'un montant de 675 000 euros contenue dans l'article 2 de la décision du Conseil de la concurrence n° 03-D-12 du 3 mars 2002 jusqu'à ce que la cour d'appel ait statué sur le recours formé contre cette décision ; Rejetons pour le surplus les autres demandes ; Laissons les dépens à la charge du Trésor public.