Cass. com., 19 octobre 1993, n° 91-18.732
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Mathieu, Chambre syndicale des agents généraux d'assurance des Hautes-Alpes
Défendeur :
Espitallier, Le Sillon Alpin (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
Mme Clavery
Avocat général :
M. Curti
Avocats :
SCP Waquet, Farge, Hazan, Me Vincent.
LA COUR : - Sur la recevabilité du pourvoi, formé par M. Serge Mathieu, contestée par la défense (sans intérêt) ; - Sur le moyen unique, du pourvoi de la Chambre syndicale des agents généraux d'assurance des Hautes-Alpes, pris en ses deux branches ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Grenoble, 17 avril 1991), que M. Mathieu, agent général d'assurance a sollicité du directeur de publication de la revue Le Sillon alpin, M. Espitallier, l'insertion d'annonces publicitaires afférentes à des propositions d'assurances de chasse ; que deux refus successifs lui ont été opposés ; que les estimant abusifs, M. Mathieu et la Chambre syndicale des agents généraux d'assurance des Hautes-Alpes ont assigné M. Espitallier ;
Attendu que la Chambre syndicale des agents généraux d'assurance des Hautes-Alpes fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en se fondant sur la délibération de l'assemblée générale de la société Le Sillon alpin en date du 27 mai 1978 document qui n'était pas invoqué par M. Espitallier et la société Le Sillon alpin dans leurs écritures, lesquelles ne faisaient nullement état d'une quelconque restriction statutaire sur l'insertion des annonces publicitaires, et dont ni les mentions de l'arrêt ni le dossier de la procédure n'établissent qu'il a été régulièrement communiqué et qu'il a fait l'objet d'un débat contradictoire, la cour d'appel a violé les articles 15, 16 et 132 du nouveau Code de procédure civile ; et alors d'autre part, que l'exercice du droit de refuser, en matière de presse, l'insertion d'une annonce publicitaire peut constituer une faute lorsque le titulaire de ce droit en fait, à dessein de nuire, un usage préjudiciable à autrui ; qu'en se bornant à relever qu'une délibération avait effectivement restreint en matière d'assurance la publication des annonces publicitaires aux seuls organismes d'assurance mutuelle agricole, au lieu de rechercher, comme elle y était invitée, si cette restriction n'était pas discriminatoire et abusive dès lors qu'elle avait pour seul objet d'écarter les sociétés d'assurance concurrentes des associés de la société éditrice du journal, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que le moyen tendant à critiquer la prise en considération par la cour d'appel d'un document de nature à justifier le refus d'insertion est inopérant dès lors que le refus d'insertion n'a pas à être motivé ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, après avoir retenu exactement que le directeur de publication peut opposer un refus d'insertion non motivé sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que la demande porte ou non sur une annonce à caractère publicitaire, a relevé que ce refus était justifié par la politique et l'esprit de la publication, la ligne rédactionnelle du Sillon alpin créé par des sociétés coopératives agricoles étant demeurée la même depuis l'origine ;qu'en l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, elle a pu estimer que la faute n'était pas démontrée ;d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Par ces motifs, déclare irrecevable le pourvoi en ce qu'il est formé par M. Mathieu, rejette le pourvoi en ce qu'il est formé par la Chambre syndicale des agents généraux d'assurance des Hautes-Alpes.