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Décisions

CA Angers, ch. corr., 11 mars 1999, n° 98-00541

ANGERS

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chesneau

Conseillers :

MM. Liberge, Midy

Avocat :

Me Strujon

CA Angers n° 98-00541

11 mars 1999

PREVENTION

Le prévenu a été renvoyé devant le tribunal :

pour avoir à Craon (53), le 2 octobre 1997, au moyen de visite au domicile abusé de la faiblesse de Madame Tonnelier Yvone veuve Gelure, qui n'était pas en mesure d'apprécier la portée de ses engagements, pour lui faire souscrire des engagements au comptant.

LE JUGEMENT DONT APPEL

Le Tribunal correctionnel de Laval, par jugement contradictoire en date du 5 février 1998, a renvoyé au bénéfice du doute, M. Jean X des fins de la poursuite sans peine ni dépens.

LA COUR :

Le Ministère public requiert l'infirmation du jugement en considérant que l'âge de la victime, son handicap de surdité et le certificat médical qui atteste que son état général la rend inapte à une compréhension des conversations.

Le prévenu comparaît à l'audience et dépose des conclusions tendant à la confirmation de sa relaxe en se fondant sur l'absence de mesure de sauvegarde de la victime, sur le respect des dispositions légales.

MOTIFS

Il résulte de la procédure que le prévenu représentant de la SARL Y dont le siège social est situé à Remiremont (Vosges), s'est présenté au domicile de Madame Gelure, âgée de 90 ans, à laquelle il a vendu pour une somme de 4 200 F de cartilage de requin supposé soulager ses douleurs rhumatismales.

Il s'avère ce que le prévenu a déclaré lui-même que la victime est atteinte d'une importante surdité et qu'elle se déplaçait à l'aide d'un déambulateur. C'est le prévenu qui a rempli le chèque.

Le bon de commande remis par la victime ne comporte pas les mentions exigées par l'article L. 121-23 du Code de la consommation, il ne comporte pas le bulletin de rétractation prévu par cet article.

Il apparaît que la victime a signé le jour même un chèque malgré l'interdiction de recevoir sous quelque forme que ce soit un paiement pendant le délai de rétractation. Il est faux de soutenir comme le fait le prévenu que ce chèque lui aurait été laissé, charge pour elle de l'envoyer au terme du délai de rétractation, puisque le plaignant, fils de la victime s'est rendu compte de cette affaire en découvrant le talon du chèque qui n'avait pas été renseigné de la main de la victime et ce d'autant que le prévenu a déclaré avoir laissé la marchandise à la cliente.

Enfin, il s'avère que le 15 octobre 1997, 13 jours après la vente, la victime ne se souvenait plus de cette affaire et son compte bancaire ne pouvait pas supporter une telle dépense. II s'avère également qu'elle n'a pu être entendue par la gendarmerie.

La cour, en considérant le handicap de la victime, le certificat médical qui établit qu'elle est incapable d'entretenir une conversation normale, les carences amnésiques qu'elle présente, les démarches faites par X lui-même (signature du chèque, renseignement du talon), les irrégularités commises, la réception d'un paiement immédiat avec remise de la marchandise, retient la culpabilité du prévenu. Professionnel de la vente, il n'ignore pas les obligations légales auxquelles il prétend maladroitement se soumettre. Sa responsabilité personnelle dans ces manœuvres est entière.

Par ces motifs, LA COUR Statuant publiquement et contradictoirement, Infirme le jugement déféré, Condamne Jean X du chef visé à la prévention à une peine d'amende de 5 000 F, Dit que la contrainte par corps s'exercera dans les conditions des articles 750 et suivants du Code de procédure pénale. Ainsi jugé en application des articles 122-8 et 122-9 du Code de la consommation.