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Décisions

CA Paris, 5e ch. C, 26 novembre 1999, n° 1998-05127

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Road Star (SARL)

Défendeur :

Daewoo Automobiles France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Desgrange

Conseillers :

MM. Bouche, Savatier

Avoués :

Mes Hanine, SCP Monin

Avocats :

Mes Rumeau, Bricogne, SCP Vogel & Vogel.

T. com. Bobigny, du 11 déc. 1997

11 décembre 1997

Par contrat conclu le 21 février 1995 avec la société Daewoo Automobiles France, importateur de véhicules de marque Daewoo, la société à responsabilité limitée Road Star s'est vue concéder pour une durée indéterminée et pour un certain nombre de cantons du département de la Gironde, la vente des véhicules neufs de marque Daewoo ainsi que des pièces de rechange, l'objectif de vente sur lequel le concessionnaire s'était engagé étant fixé à 130 véhicules pour l'année 1995.

Plusieurs chèques émis par la société Road Star étant revenus impayés et les négociations engagées entre les parties sur les projets de réorganisation en vue de l'apurement des dettes n'ayant pas abouti, la société Daewoo Automobiles France a procédé le 1er mars 1996 à la résiliation de plein droit avec effet immédiat et sans préavis du contrat de concession.

Par acte des 4 et 5 novembre 1996, la société Road Star a assigné la société Daewoo Automobiles France devant le Tribunal de commerce de Bobigny pour rupture abusive du contrat de concession et a demandé la condamnation du concédant à lui payer la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts outre celle de 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur le litige ainsi né entre les parties, le tribunal par jugement du 11 décembre 1997 assorti de l'exécution provisoire, a débouté la société Road Star de ses demandes en la condamnant à payer à la société Daewoo Automobiles France la somme principale de 459 838,77 F avec intérêts au taux légal à compter du 1er mars 1996 outre celle de 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Road Star a interjeté appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation.

Dans ses dernières conclusions auxquelles il est renvoyé, elle chiffre à la somme de deux millions de francs le préjudice subi du fait de la résiliation qu'elle estime abusive et réclame la condamnation de la société Daewoo Automobiles France à lui payer, après compensation avec les sommes qu'elle reconnaît lui devoir, la somme de 1 540 161,23 F outre celle de 15 000 F au titre de ses frais irrépétibles.

Elle critique le tribunal d'avoir fait application de l'article XIII du contrat et d'avoir déclaré justifiée la résiliation sur le fondement d'un incident de paiement dont la société Daewoo Automobiles France aurait, selon elle, renoncé à se prévaloir. Elle relève à titre subsidiaire le caractère abusif de la clause résolutoire litigieuse. Elle calcule son dommage à partir du préjudice économique subi, des frais de lancement et de publicité exposés, ainsi que de la perte de son fonds de commerce causé par la résiliation du contrat de concession en le chiffrant à la somme globale de deux millions de francs. Elle ne conteste pas devoir au concédant la somme principale de 459 838,77 F.

Dans ses dernières conclusions auxquelles il est renvoyé, la société Daewoo Automobiles France intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et réclame la condamnation de la société Road Star à lui payer la somme de 30 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle affirme que du fait du caractère incontestable des impayés elle était fondée à résilier le contrat de concession sur le fondement de la clause valablement insérée au contrat.

Sur ce, LA COUR,

Considérant que se prévalant des dispositions de l'article XIII-3 alinéa 11 du contrat de concession conclu avec la société Road Star le 21 février 1995, la société Daewoo Automobiles France a, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 1er mars 1996, confirmé à la société Road Star sa décision de mettre fin au contrat, à compter de ce jour.

Considérant que l'article XIII-3 du contrat stipule que " le contrat sera résilié de plein droit avec effet immédiat et sans préavis ni notification préalable, lorsque cette sanction est déjà expressément prévue par une des dispositions contractuelles qui précédent, dans le cas de protêt des effets ou chèques impayés, non-règlement de leur autre moyen de paiement accepté par le concessionnaire ou non-respect d'une échéance quelconque ".

Considérant que l'existence des impayés n'est pas contestée; que la société Daewoo Automobiles France a visé dans son courrier de résiliation trois chèques d'un montant global de 506 280,53 F rejetés par la Banque d'Aquitaine le 12 février 1996.

Considérant qu'il est démontré par les attestations de rejet des chèques mises aux débats que contrairement aux allégations de la société appelante, la société Daewoo Automobiles France n'a pas procédé à la résiliation du contrat de concession au lendemain du premier impayé survenu le 21 décembre 1995 pour un chèque de 330 000 F; qu'elle a laissé à la société Road Star, qui avait reconnu la nécessité de se restructurer pour remédier à ses problèmes de trésorerie, la possibilité de régulariser la situation; que la société Daewoo Automobiles France a étudié les propositions que lui avait faites la société Road Star durant la période qui s'est déroulée entre la constatation des impayés et la résiliation, maisqu'elle ne les a pas acceptées.

Considérant qu'en effet il faut constater que la société appelante, la société Daewoo Automobiles France n'a jamais renoncé à sa créance ni conclu un accord avec la société Road Star en vue d'un étalement du paiement de ses dettes dans un délai de 18 à 24 mois que proposait la société Road Star dans son courrier du 16 février 1996; que le concédant a au contraire, le 20 février 1996, rejeté cette proposition en termes clairs et explicites, puisqu'il a exigé le règlement immédiat de la somme de 300 000 F et le remboursement des autres dettes à court terme.

Considérant qu'il est manifeste que la société Daewoo Automobiles France a laissé à son concessionnaire le temps de réagir après le premier impayé mais qu'au vu du renouvellement des impayés et de l'importance de leur montant, elle en a tiré les conséquences quant à l'incapacité de la société Road Star à rétablir la situation; que celle-ci ne peut prétendre avoir été en mesure de s'être acquittée de sa dette de 506 000 F le 1er mars 1996, et l'avoir fait, alors que selon le relevé mis aux débats, son compte bancaire était ce jour-là débiteur de 67 882,15 F.

Considérant que la réalité des impayés étant incontestablement établie, la société Daewoo Automobiles France était fondée à résilier le contrat de concession de plein droit avec effet immédiat et sans préavis sur le fondement de l'article XIII-3-l I du contrat, cet article ne prévoyant pas une mise en demeure de remédier au manquement à l'une des obligations énoncées au contrat lorsqu'il s'agit de chèques impayés;

Que cette clause ne lui imposait pas davantage de faire dresser protêt en cas d'incident; que d'ailleurs la société Road Star ne fournit aucune pièce permettant d'établir qu'elle avait obtenu un concours bancaire ou disposait de fonds lui permettant d'honorer ces chèques; qu'en revanche, tous les relevés de comptes de la société Road Star versés aux débats révèlent des soldes débiteurs.

Qu'il ne peut donc être reproché à la société Daewoo Automobiles France d'avoir procédé à la résiliation du contrat sur le fondement de cette clause qui n'est pas abusive;

Qu'il en résulte que la société Daewoo Automobiles France qui n'a fait que tirer les conséquences de la défaillance de son concessionnaire n'a commis aucune faute en résiliant le contrat conformément aux stipulations contractuelles contenues à l'article XIII-3-1 I.

Considérant que la résiliation du contrat n'étant pas abusive, la demande d'indemnisation que présente la société Road Star en invoquant un préjudice résultant de cette résiliation ne peut être accueillie.

Considérant que la société Road Star ne conteste pas devoir à la société Daewoo Automobiles France la somme de 459 838,77 F, qu'elle sera condamnée à lui payer, ainsi que l'ont décidé les premiers juges dont la décision sera confirmée en toutes ses dispositions.

Considérant que la société Road Star qui succombe et sera condamnée au paiement des dépens ne peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Considérant qu'il serait en revanche inéquitable de laisser à l'intimée la charge de ses frais irrépétibles exposés en appel; que la société Road Star sera condamnée à lui payer à ce titre la somme de 15 000 F.

Par ces motifs, LA COUR, Déclare recevable l'appel formé par la société Road Star, Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré. Y ajoutant, Condamne la société Road Star à payer à la société Daewoo Automobiles France la somme complémentaire de 15 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toutes demandes autres ou contraires aux motifs. Condamne la société Road Star au paiement des dépens de première instance et d'appel, avec admission pour ces derniers de l'avoué concerné, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.