Conseil Conc., 3 juillet 2003, n° 03-D-33
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Décision
Pratiques mises en œuvre par la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré, sur le rapport oral de M. Avignon, par M. Nasse, vice-président, Mme Perrot, MM. Bidaud, Piot, membres.
Le Conseil de la concurrence (section 1),
Vu la lettre enregistrée le 7 octobre 1998 sous le numéro F 1087 par laquelle la société Pompes funèbres générales sud-ouest, devenue la SA OGF, a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en ouvre par la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié fixant les conditions d'application de l'ordonnance n° 86- 1243 du 1er décembre 1986 et le décret du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce ; Vu le Code général des collectivités territoriales ; Vu la décision du Conseil de la concurrence n° 01-D-80 en date du 13 décembre 2001 ; Vu les observations présentées par la société OGF ainsi que par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la société OGF entendus lors de la séance du 29 avril 2003 ;
Adopte la décision suivante :
I. - CONSTATATIONS
La société Pompes funèbres générales du sud-ouest, devenue OGF, expose dans sa saisine que la ville de Toulouse a décidé d'installer la régie municipale des pompes funèbres dans un nouveau complexe funéraire érigé rue de l'abbé Jules Lemire, rassemblant en un seul lieu l'ensemble des services liés aux obsèques : état civil, service des cimetières, chambre funéraire et bureau de règlement des obsèques, et que cette décision, qui a, en elle-même, un effet anticoncurrentiel résultant de l'avantage procuré à la régie municipale par la réunion des services, a engendré la mise en œuvre d'autres pratiques également anticoncurrentielles et qui sont les suivantes :
- absence de séparation efficace des locaux de la régie et des services administratifs ;
- mise en place dans toute la ville de panneaux directionnels qui tendent, par la confusion des indications présentées, à associer, dans l'esprit des familles en deuil, les services administratifs (service des décès, de l'état civil, des cimetières, et chambre funéraire municipale) et la régie municipale des pompes funèbres ;
- publicité effectuée par la régie municipale, dans l'annuaire téléphonique de la Haute-Garonne, de nature à introduire la même confusion entre les services administratifs et la régie municipale ;
- orientation systématique des familles par les établissements hospitaliers de la ville, afin qu'elles aillent souscrire les déclarations de décès au nouveau complexe funéraire dans lequel se trouve la régie municipale et non au centre ville, rue des Lois, où toutes les déclarations de décès se faisaient antérieurement à la constitution du nouvel ensemble.
En outre, la société Pompes funèbres du sud-ouest a dénoncé la fixation par la direction des pompes funèbres municipales d'horaires peu commodes et discriminatoires vis-à-vis des entreprises privées pour les soins de conservation des corps, d'une part, et pour les crémations, d'autre part, qui, en obligeant les entrepreneurs à décaler les cérémonies, provoquent des surcoûts pour les familles.
A. - L'organisation du service des pompes funèbres
1. La réglementation en vigueur au moment des faits
Le service des pompes funèbres comprend, outre le service intérieur, le service extérieur et les prestations dites libres qui dépendent de la seule initiative des familles.
Le service intérieur s'exerce à l'intérieur des édifices cultuels et relève du service des cultes. Il comprend les objets destinés aux funérailles dans les édifices religieux et la décoration intérieure et extérieure de ces édifices.
Le service extérieur se déroule à l'extérieur des édifices du culte et constitue un service public qui, en application de la loi du 28 décembre 1904, relevait exclusivement des communes et comportait différentes prestations énumérées limitativement par l'article L. 362-6 du Code des communes : le transport des corps après mise en bière, la fourniture des corbillards, des cercueils, des tentures extérieures des maisons mortuaires, les voitures de deuil ainsi que les fournitures et le personnel nécessaire aux inhumations, exhumations et crémations.
Le contenu actuel de ce service est défini par l'article L. 2223-19 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction issue de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire.
Les prestations relevant du service extérieur comprennent désormais, outre celles prévues antérieurement, le transport des corps avant mise en bière, l'organisation des obsèques, les soins de conservation, la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que les urnes cinéraires, la gestion et l'utilisation des chambres funéraires.
Titulaires exclusifs du monopole légal du service extérieur, les communes n'étaient pas tenues d'organiser ce service. L'article L. 362-1 du Code des communes laissait à celles d'entre elles qui avaient décidé de l'organiser le choix entre la régie ou la délégation. L'exercice du monopole était ainsi protégé puisque les entreprises organisant les funérailles devaient, pour ce qui concerne les prestations du service extérieur, s'adresser au titulaire du monopole, régisseur ou concessionnaire.
Une première brèche dans le monopole communal du service extérieur des pompes funèbres a été ouverte avec la loi n° 86-29 du 9 janvier 1986, pour tenir compte du fait que la majorité des décès interviennent en milieu hospitalier et souvent dans des communes différentes du domicile du défunt. Le législateur a voulu à la fois renforcer les libertés et les garanties offertes aux familles, simplifier certaines procédures et sanctionner plus sévèrement les atteintes au monopole du service extérieur des pompes funèbres.
Ces dispositions ont été ainsi codifiées à l'article L. 362-4-1 du Code des communes (aujourd'hui art. L. 2223-19 du Code général des collectivités territoriales) : "Par dérogation aux règles du service extérieur des pompes funèbres, lorsque la commune du lieu de mise en bière n'est pas celle du domicile du défunt ou du lieu d'inhumation, ou de la crémation, la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles ou son mandataire, si elle ne fait pas appel à la régie ou au concessionnaire de la commune du lieu de mise en bière, dans les conditions fixées à l'article L. 362-1, peut s'adresser à la régie ou au concessionnaire ou, en l'absence d'organisation du service, à toute entreprise de pompes funèbres soit de la commune du lieu d'inhumation ou de crémation, soit de la commune du domicile du défunt, pour assurer les fournitures de matériel prévues à l'article L. 362-1, le transport des corps après mise en bière et l'ensemble des services liés à ces prestations."
La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire a mis fin au monopole communal. Désormais, le service extérieur des pompes funèbres, qui constitue une mission de service public, peut être assuré, non seulement par les communes ou leurs délégataires, mais aussi par toute autre entreprise ou association bénéficiaire d'une habilitation délivrée par le représentant de l'Etat dans le département.
Toutefois, l'article 28-1 de la loi du 8 janvier 1993 a prévu une période transitoire pendant laquelle : "Les régies communales et intercommunales des pompes funèbres existant à la date de publication de la présente loi peuvent, durant une période qui ne saurait excéder cinq années à compter de cette date, assurer seules le service extérieur des pompes funèbres tel que défini par les dispositions légales précédemment en vigueur. Durant une période de trois ans, les contrats de concession conclus avant la date de publication de la présente loi, y compris ceux comportant une clause d'exclusivité, continuent à produire effet jusqu'à leur terme, sauf résiliation d'un commun accord. Nonobstant toute disposition contraire, les contrats comportant une clause d'exclusivité ne peuvent être prorogés, ni renouvelés, (...)".
Le privilège d'exclusivité du service extérieur des pompes funèbres devait donc disparaître à la date du 10 janvier 1996, au plus tard, pour les entreprises délégataires et à la date du 10 janvier 1998, au plus tard, pour les régies.
2. L'organisation du service des pompes funèbres à Toulouse
La loi du 28 décembre 1904 ayant supprimé le monopole des pompes funèbres détenu jusqu'alors par les fabriques, le conseil municipal de la ville de Toulouse, a décidé, par une délibération du 30 décembre 1905, d'organiser ce service public en régie municipale. Durant la période transitoire de 5 ans prévue par la loi du 8 janvier 1993 précité, la ville de Toulouse a décidé de continuer à confier la gestion du service extérieur à la régie municipale des pompes funèbres.
Elle a, en outre, par délibération du 28 octobre 1994 de son conseil municipal, décidé de transférer la régie municipale et le service des cimetières, jusqu'alors situés rue Pargaminières dans un nouveau complexe, 2 rue de l'Abbé Jules Lemire, regroupant également le service de règlement des obsèques, une antenne de l'état civil ainsi que la chambre funéraire.
La régie municipale assure l'ensemble des prestations funéraires, à l'exception des soins de conservation. Elle emploie 55 personnes et dispose de 20 véhicules. Elle gère également la chambre funéraire, installée dans le nouveau complexe, ainsi que le crématorium situé à Cornebarrieu dans un des cimetières suburbains de Toulouse.
B. - Les caractéristiques du marché des pompes funèbres à Toulouse et ses environs
Toulouse et son agglomération comptent environ 750 000 habitants. Sur cette zone, le nombre de décès comptabilisés a été de 6 454 en 1997 et 6 450 en 1998. La moitié des décès enregistrés sur la commune de Toulouse concerne des personnes domiciliées dans cette ville, l'autre moitié, des personnes domiciliées dans l'agglomération ou à l'extérieur.
Ce fait s'explique par la présence à Toulouse d'importants établissements hospitaliers publics et privés. Les décès survenus dans les principaux hôpitaux de la ville (Purpan, Rangueil, Lagrave, Claude Regaud, Pasteur) s'élèvent à 2 925 en 1997 et 2 918 en 1998. Ces chiffres représentent plus de 60 % des décès enregistrés sur la ville de Toulouse.
L'enquête a révélé qu'il existe à Toulouse quatre opérateurs principaux agréés : la régie municipale des pompes funèbres (PFM), la société Pompes funèbres générales (PFG) devenue OGF, la société Pompes funèbres européennes (PFE) et la société Pompes funèbres du sud-ouest (PFSO). L'activité globale de ces entreprises a couvert 91 % des décès recensés dans la ville en 1997 et 83 % des décès recensés en 1998.
Par rapport à toutes les autres entreprises qui interviennent sur le secteur, la régie municipale a assuré 64 % du total des convois en 1996, 62 % en 1997 et 46 % en 1998, dont 77 % des convois en 1997 et 61 % en 1998 sur la seule ville de Toulouse.
C. - Les pratiques constatées
1. Les conditions du regroupement de l'état civil, du service des cimetières, de la chambre funéraire et de la régie municipale dans le nouveau complexe
Dans une note jointe à la délibération du conseil municipal du 28 octobre 1994 qui a décidé le transfert des services des pompes funèbres dans le nouveau complexe, la ville de Toulouse a indiqué les raisons de ce choix :
"L'accroissement de l'activité et l'évolution de la demande des familles font que ces locaux ne répondent plus aux besoins du service, notamment au niveau du stockage des cercueils qui, faute de locaux adaptés, s'organise sur trois lieux.
De plus, la disparition de la situation du monopole en 1998 va mettre la régie municipale en concurrence avec des structures privées.
Afin de préparer cette évolution, il importe que la Ville puisse offrir aux familles un accueil de qualité qui lui permette de maintenir son activité et qu'elle dispose de locaux mieux adaptés à un fonctionnement rationnel.
C'est pourquoi, il a été décidé de transférer le service des pompes funèbres sur un terrain de 1,5 hectare, situé rue de l'abbé Lemire à Toulouse.
Sur ce terrain vont être construits des bureaux administratifs, des ateliers techniques, des salles d'accueil pour les familles et des salons funéraires, le tout pour une surface utile de 3 176 m2."
De manière plus précise, le directeur du service des pompes funèbres et des cimetières à la mairie expliquait, dans le quotidien la Dépêche du Midi du 28 janvier 1997 : "L'idée, c'est d'éviter aux familles de courir dans plusieurs services municipaux. Ici, sur ce site, la famille peut choisir, à la carte, les services dont elle a besoin (...) Nous travaillons dans de meilleures conditions. Là, la partie technique ne se chevauche pas avec l'accueil des familles comme c'était le cas rue Pargaminières".
Alors que les services achevaient leur déménagement, un responsable toulousain de la société Pompes funèbres européennes déclarait, le 28 mars 1997, dans le même quotidien : "Sous prétexte d'un meilleur confort des familles en deuil, la régie bénéficie de la sorte d'une clientèle captive qui n'a plus la liberté de choisir. La déclaration de décès est obligatoire à l'état civil. Une fois dans l'enceinte, on dirige naturellement les familles vers les services qui proposent l'ensemble des prestations funéraires, du cercueil au caveau."
Enfin, dans une déclaration recueillie par les enquêteurs, le 6 octobre 1999, la dirigeante de la société des Pompes funèbres Barrue, absorbée en 1998 par le groupe OGF, a déclaré : "D'une manière générale, nous n'avons pas de difficulté avec les services municipaux de la ville de Toulouse ni avec la régie municipale quant aux horaires qui nous sont donnés pour les inhumations ou pour les crémations, si ce n'est que pour celles-ci, il me semble que nous passons plus souvent à 8H30 qu'à un autre horaire. Cela étant, depuis que l'état civil est dans les mêmes murs que la régie municipale nous recevons des appels des familles pour que l'on s'occupe du décès et lorsque notre famille va faire la déclaration à l'état civil on ne la revoit plus étant donné qu'il y a tout sur place et qu'elles peuvent accomplir toutes les formalités et s'adresser à la régie municipale pour les obsèques."
En juillet et août 1997, trois sociétés de pompes funèbres, dont la saisissante, ont assigné la ville de Toulouse devant le juge des référés pour qu'il soit mis fin au regroupement des services et que soient prises un certain nombre de mesures de nature à garantir le respect du libre jeu de la concurrence entre la régie municipale et les autres opérateurs. Par une ordonnance du 8 octobre 1997, le juge des référés a "(...) dit que le regroupement des services contenus dans le complexe funéraire de la rue de l'Abbé Jules Lemire ne caractérisait pas, en lui même, un trouble manifestement illicite pour les sociétés demanderesses (.)" et, en conséquence, a rejeté la demande relative à l'implantation de ces services dans le complexe.
Mais en revanche, il a enjoint à la commune de Toulouse :
- de modifier les indications figurant sur le panneau apposé à l'entrée du complexe ;
- de mettre en service des lignes de communication téléphoniques distinctes pour la régie et les services municipaux ;
- de faire publier un texte, notamment, dans le quotidien la Dépêche du Midi précisant que la régie municipale des Pompes funèbres est un service distinct de ceux de l'état civil et des cimetières et qu'il "(.) s'exerce selon les règles de concurrence applicables en la matière".
2. Le fonctionnement de la régie municipale, rue de l'Abbé Lemire
Les plans des locaux et les photographies prises dans le cadre de l'enquête permettent de constater, d'une part, que les locaux de la régie municipale sont séparés de ceux affectés au service public proprement dit et, d'autre part, que la ville de Toulouse a supprimé, après quelques semaines de fonctionnement, l'entrée commune à tous les services et créé deux portes d'entrée indépendantes donnant accès, de l'extérieur, à des locaux distincts : d'un côté ceux de l'état civil et du service des cimetières, de l'autre, ceux de la régie.
Par ailleurs, l'ordonnance de référé rendue le 8 octobre 1997 indique, en ce qui concerne l'aménagement intérieur du bâtiment, que "(...) à l'intérieur la régie municipale seule est située à droite bien différenciée des autres services groupés vers la gauche ; (...) les zones gauche et droite du hall d'accueil n'ont plus d'accès commun, chacune ayant une porte distincte, et chacune étant séparée de l'autre par un vitrage". Dans un arrêt du 1er février 1999, rendu sur le recours formé contre l'ordonnance précitée, la Cour d'appel de Toulouse a précisé qu'un rapport d'enquête de la DGCCRF, daté du 21 août 1997, "(...) révèle que l'installation d'un mur vitré interdit tout passage de la zone réservée au service public à celle relative à la régie municipale des pompes funèbres".
Il a été relevé que dans la salle d'attente du service des cimetières et du bureau de règlement des obsèques, ont été installés une cabine téléphonique permettant de communiquer avec l'extérieur, ainsi qu'un panneau d'affichage comportant la liste des prestataires concurrents de la régie avec l'adresse, le téléphone et le nom du gestionnaire des huit chambres funéraires autorisées dans le département de la Haute-Garonne.
3. L'information des familles
En premier lieu, au début de l'année 1997, la ville de Toulouse a diffusé une plaquette intitulée "Pour les obsèques 3 services, 1 adresse". Les trois services énoncés étaient le service des cimetières, l'antenne de l'état civil et la régie municipale. Au dos de la plaquette, étaient décrites les prestations de type commercial proposées par la régie municipale, suivies du numéro de téléphone commun pour les trois services considérés.
L'édition à 10 000 exemplaires environ de ce dépliant publicitaire a été faite dans la période de transfert des services. Il résulte des pièces du dossier qu'un tiers des exemplaires a été distribué en différents points d'accueil de la mairie.
En deuxième lieu, en mars 1997, une ligne téléphonique unique a été affectée à l'ensemble des services regroupés dans le complexe. A cette ligne, un répondeur diffusait, aux heures de fermeture, un message présentant le nouveau centre funéraire municipal. Après le déménagement des services, la ligne a été remplacée par quatre numéros distincts et le message a été supprimé.
En troisième lieu, la ville de Toulouse a disposé à l'entrée du complexe un seul et même panneau regroupant l'indication des services publics et la régie municipale sous le logo de la ville. En exécution de l'ordonnance de référé du président du Tribunal de grande instance de Toulouse, en date du 8 octobre 1997, précitée, la ville de Toulouse, dans le délai d'un mois qui lui était imparti, a remplacé ce panneau par deux panneaux distincts mentionnant d'un côté les services de l'état civil, des cimetières et la chambre funéraire, de l'autre les divers services proposés par la régie municipale.
Par ailleurs, peu après, les anciens panneaux directionnels portant la dénomination "Pompes funèbres" ont été remplacés aux abords du complexe par des panneaux spécifiques donnant la direction des services de l'état civil, des cimetières et de la chambre funéraire.
Le dépouillement des fichiers informatiques des services de l'état civil et de la régie, réalisé pour les années 1996 à 1999, fait apparaître qu'en 1996 et 1997, respectivement, 40 % et 36 % des familles se sont adressées à la régie pour l'organisation des obsèques de leurs proches, après être venues déclarer un décès dans les anciens locaux de la rue des Lois. Lorsque les déclarations ont été faites dans le nouveau complexe, 34 % en 1998 et 33 % en 1999 des familles se sont adressées à la régie municipale.
4. L'attribution des horaires de crémation par la régie municipale
Dans une déclaration faite aux enquêteurs le 16 septembre 1999, la comptable de la société Pompes funèbres du sud-ouest, indiquait : "En ce qui concerne les incinérations, nous avons souvent des difficultés à organiser les obsèques en une seule fois et rapidement car on nous donne souvent 8H30 et 13H30 comme créneaux. Nous devons alors faire la cérémonie la veille ou dans la matinée et ramener le corps à notre chapelle ou retarder les obsèques d'un ou deux jours afin de les organiser en une seule fois (...). Ceci sont des constatations quotidiennes dont il nous est impossible d'avancer une preuve matérielle significative."...
Le 16 septembre 1999, le gérant des sociétés MC et PB qui exercent leurs activités sous l'enseigne Pompes funèbres européennes Roc'Eclerc du groupe Leclerc, a, pour sa part, déclaré aux enquêteurs : "En ce qui concerne la délivrance des différentes autorisations par les services de la mairie de Toulouse, les choses se passent normalement contrairement à ce qu'on a connu durant les années passées. Il en va de même pour les horaires de crémation pour lesquels on nous propose parfois plusieurs possibilités."
Le directeur de l'agence PFG à Toulouse a indiqué, le 30 septembre 1999 : "Depuis mon arrivée au sein de cette agence en octobre 1998, je n'ai pas rencontré de difficultés spécifiques auprès du crématorium qui est géré par la régie municipale."
L'article 5 du règlement intérieur du crématorium précise à l'égard des horaires que : "Le jour et l'heure de la crémation sont fixés par le gestionnaire du crématorium en accord avec les familles ou avec la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles" ;
L'analyse du registre des incinérations montre que sur un total de 2 261 crémations, en 1997 et 1998, les Pompes funèbres municipales (PFM) en réalisent 46,7 % contre 10,4 % aux Pompes funèbres générales (PFG), 5,4 % aux Pompes funèbres européennes (PFE) et 5 % aux Pompes funèbres du Sud-ouest (PFSO), et que la répartition des tranches horaires pour les crémations réalisées par chaque entreprise se fait de la manière indiquée dans le tableau ci-après :
<EMPLACEMENT TABLEAUX>
Sur la base des constatations qui précèdent, le rapporteur a proposé au Conseil de prononcer un non lieu à poursuivre la procédure.
II. - DISCUSSION
Aux termes des dispositions de l'article L. 462-8 du Code de commerce, "Le Conseil de la concurrence peut déclarer, par décision motivée, la saisine irrecevable (...) s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence".
La société saisissante expose que les conditions d'installation et d'exploitation de la régie municipale par la ville de Toulouse, en créant la confusion dans l'esprit des familles entre les services publics à caractère administratif liés aux obsèques et les services à caractère industriel et commercial proposés par la régie municipale, ont favorisé l'activité de cette dernière au détriment des opérateurs privés et que, de ce fait, elles seraient constitutives d'un abus de position dominante prohibé par l'article L. 420-2 du Code de commerce.
A. - Sur la compétence du conseil
Il résulte de l'article L. 410-1 du Code de commerce que : "Les règles définies au présent livre s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégations de service public".
Dans un arrêt du 18 octobre 1999, Aéroports de Paris, le tribunal des conflits a jugé que : "(.) si dans la mesure où elles effectuent des activités de production, de distribution ou de services, les personnes publiques peuvent être sanctionnées par le Conseil de la concurrence agissant sous le contrôle de l'autorité judiciaire, les décisions par lesquelles ces personnes assurent la mission de service public qui leur incombe au moyen de prérogatives de puissance publique relèvent de la compétence de la juridiction administrative pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la responsabilité encourue par ces personnes publiques".
En l'espèce, dans sa séance du 28 octobre 1994, le conseil municipal de la ville de Toulouse a décidé de construire un nouveau complexe funéraire sur un terrain acquis à cet effet pour y transférer l'ensemble des services de pompes funèbres. Il a, dans cette perspective, autorisé la transmission au préfet de la Haute-Garonne du dossier nécessaire à la réalisation de l'enquête publique.
L'acte par lequel la ville de Toulouse a décidé ce regroupement des services publics administratifs relatifs aux obsèques et des services industriels et commerciaux assurés par la régie municipale est une décision administrative, prise dans le cadre de la mission de service public exercée par la commune avec les prérogatives de puissance publique qui sont les siennes. Dans ces conditions, seule la juridiction administrative est compétente pour examiner si cette décision est ou non contraire aux dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce ; elle échappe, donc, à la compétence du Conseil de la concurrence.
De même, la pratique résultant, selon la société saisissante, de la confusion pouvant naître dans l'esprit des familles en raison des inscriptions relatives aux services administratifs et à la régie figurant sur les panneaux directionnels implantés dans la ville, relève de la gestion par la ville du domaine public dans le cadre des missions de service public ainsi que des prérogatives de puissance publique qui lui sont conférées, ce dont le Conseil ne saurait connaître.
Il convient donc, à cet égard, de faire application des dispositions de l'article L. 462-8 du Code de commerce et de constater que les faits invoqués aux paragraphes 45 et 46 n'entrent pas dans le champ de compétence du conseil de la concurrence.
En revanche, les autres pratiques dénoncées dans la présente saisine, qui concernent les conditions d'installation de la régie municipale dans le nouveau complexe funéraire, sa gestion et son fonctionnement en tant qu'offreur de prestations funéraires et qui ne sont pas mises en œuvre dans le cadre d'une mission de service public mais d'une activité économique exercée en concurrence avec d'autres opérateurs privés, relèvent de la compétence d'attribution du Conseil de la concurrence.
B. - Sur le fond
L'article L. 464-6 du Code de commerce énonce que : "Lorsqu'aucune pratique de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché n'est établie, le Conseil de la concurrence peut décider, après que l'auteur de la saisine et le commissaire du Gouvernement aient été mis à même de consulter le dossier et de faire valoir leurs observations, qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure".
Sur le marché concerné et la position de la régie municipale des pompes funèbres
Les prestations funéraires comportent les prestations du service extérieur, celles qui relèvent du service intérieur dans les édifices religieux et enfin les prestations libres. Ces diverses prestations, eu égard au comportement des familles et aux pratiques des opérateurs appelés à satisfaire la demande, sont indissociables.
Sous l'empire de la législation en vigueur au moment des faits, les familles ne pouvaient s'adresser, dès lors que le service extérieur était organisé par la commune, qu'au titulaire du monopole et les dérogations prévues par la loi du 9 janvier 1986 ne pouvaient s'appliquer que dans le cas où la commune du lieu de mise en bière n'était pas celle du domicile du défunt ou du lieu d'inhumation ou de crémation. En revanche, dans le cadre de ces dérogations, toute entreprise de pompes funèbres, soit de la commune du lieu d'inhumation ou de crémation soit de la commune du domicile du défunt, pouvait assurer les prestations du service extérieur en concurrence avec la régie détentrice du monopole.
La loi du 8 janvier 1993 a mis fin au monopole communal des pompes funèbres et a prévu une période transitoire de cinq ans au cours de laquelle les régies communales ou intercommunales pouvaient assurer seules le service extérieur des pompes funèbres. Pour la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse, le monopole a pris fin le 10 janvier 1998.
Durant la période considérée qui couvre les années 1997 et 1998, les éléments du dossier démontrent que les familles ont fait appel à des entreprises implantées localement pour l'organisation des funérailles. En effet, il résulte des éléments cités au paragraphe 19 que les 4 principales entreprises intervenant dans le secteur - la régie municipale des pompes funèbres (PFM), la société Pompes funèbres générales (PFG), la société Pompes funèbres européennes (PFE) et la société Pompes funèbres du sud-ouest (PFSO) ont assuré 91 % des convois pour les décès enregistrés à Toulouse en 1997 et 83 % en 1998.
Il résulte des données rappelées aux paragraphes 16 et 17 que les décès survenus dans l'agglomération toulousaine concernent principalement des personnes domiciliées dans cette zone. En effet, 71 % de ces décès en 1997, et 73 % en 1998, ont été enregistrés à Toulouse, compte tenu, notamment, de la présence sur le territoire de cette ville d'importantes structures hospitalières. En conséquence, le marché géographique pertinent pour l'appréciation des pratiques en cause est constitué par le secteur sanitaire comprenant la ville de Toulouse et son agglomération.
Il résulte d'une jurisprudence constante que la part de marché d'une entreprise de pompes funèbres s'évalue sur la base du nombre de convois organisés par cette entreprise par rapport au nombre total des convois organisés sur le marché pertinent. En l'espèce, la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse a réalisé 62 % du total des convois en 1997 et 46 % du total des convois en 1998. Outre ces parts de marché encore importantes à la date d'ouverture du monopole, il convient de retenir, d'une part, la structure forte des services de la régie, regroupés dans le même complexe que les services administratifs auprès desquels sont effectuées toutes les démarches liées au décès et, d'autre part, le fait que celle-ci gère la seule chambre funéraire située sur le territoire de la ville de Toulouse, ce qui lui a permis de réaliser 86,1 % des crémations en 1997 et 73,1 % des crémations en 1998 pour les personnes mises en bière à Toulouse.
Il résulte de ces éléments, qu'à l'époque des faits, c'est-à-dire durant les années 1997 et 1998, la régie municipale des Pompes funèbres de Toulouse occupait une position dominante sur le marché des pompes funèbres de Toulouse et de son agglomération.
Sur le fonctionnement matériel des installations de la régie municipale à côté des services de l'état civil et des cimetières
Les éléments cités aux paragraphes 25 et 26 montrent que la ville de Toulouse a organisé la séparation des locaux, par l'intermédiaire d'une cloison interdisant de passer, à l'intérieur du complexe, des services de l'état civil et de la chambre funéraire vers la régie municipale et que, dans la salle d'attente du service des cimetières et du bureau du règlement des obsèques, ont été installés, d'une part, un panneau d'affichage indiquant la liste des autres entreprises de pompes funèbres ainsi que l'adresse et le numéro de téléphone des chambres funéraires gérées par elles et, d'autre part, une cabine téléphonique permettant de communiquer avec l'extérieur.
A cet égard, la société saisissante oppose que si un mur vitré a effectivement été mis en place avant le prononcé du référé, la cessation de la pratique n'a pas eu pour effet de lui retirer son caractère anticoncurrentiel. Elle ajoute que la séparation mise en place n'est que relative puisque le mur vitré qui sépare le bâtiment en deux parties est seulement revêtu d'un film beige laissant passer la lumière, qu'il n'est donc pas opaque et que, de surcroît, il ne commence qu'à partir de 10 ou 20 cm du sas d'entrée.
Cependant, il convient de relever à cet égard que l'ordonnance de référé rendue le 8 octobre 1997, citée au paragraphe 24, décrit l'intérieur du bâtiment dans des termes qui démontrent que la séparation entre les services est suffisamment effective pour empêcher que se produise un amalgame dans l'esprit des familles entre les services administratifs et les services de la régie. Par ailleurs, si cette séparation n'a été effective qu'après l'ouverture du complexe, il résulte, cependant, des précisions apportées par l'arrêt de la Cour d'appel de Toulouse en date du 1er février 1999, cité au paragraphe 26, que cette séparation a été constatée par les services de la DGCCRF dès le mois d'août 1997. Enfin, le même arrêt relève qu'avant même la mise en place du mur vitré, "(...) la distribution des services à l'intérieur du bâtiment permet de séparer les activités commerciales de celles afférentes au fonctionnement du service public, en réservant à chacune d'elle une porte d'accès distincte". Dès lors, il n'est pas démontré que le défaut de séparation a été de nature à engendrer, à elle seule, une confusion dans l'esprit des familles. Au surplus, cette situation n'a été que d'une durée extrêmement limitée. Dans ces conditions et à défaut d'autres éléments, il n'est pas établi que la configuration des locaux de la régie municipale des pompes funèbres aurait constitué une pratique ayant un objet ou un effet anticoncurrentiel.
Par ailleurs, le dossier ne comporte aucun élément permettant de penser qu'une promotion commerciale de la régie municipale, soit par un affichage publicitaire ou par la présentation d'articles funéraires soit par le bénéfice du concours privilégié du personnel affecté à l'état civil et au service des cimetières, aurait été effectuée dans les locaux réservés aux services publics, ou encore que les familles venant accomplir leurs démarches administratives étaient dirigées vers les services de la régie.
La société OGF conteste ce dernier point en rappelant que la direction départementale de la concurrence de la consommation et de la Répression des Fraudes, dans des conclusions en date du 8 septembre 1997 déposées dans le cadre du référé introduit devant le président du Tribunal de grande instance de Toulouse, avait indiqué que "La régie municipale dispose, dans le complexe funéraire de deux salons d'exposition d'articles funéraires qui, s'ils sont distincts de la chambre funéraire et ne sont accessibles qu'en présence d'un conseiller funéraire dont il conviendrait de connaître exactement le statut et la nature des activités, contribuent à entretenir, dans l'esprit du public, la confusion entre service public et activité commerciale".
Cependant, il convient de relever que cette affirmation n'a nullement été confirmée par le rapport concluant l'enquête diligentée, par la suite, par les services de la DGCCRF qui, au contraire, relève que "Les pratiques dénoncées, hors le regroupement des locaux, n'ont pas été mises en évidence par des preuves matérielles" (P. 293 du rapport).
Sur les conditions d'information des familles
Il ressort des éléments figurant au dossier, cités aux paragraphes 28 à 33, que la ville de Toulouse a diffusé, aux mois de janvier et février 1997, pendant la période de transfert des locaux rue de l'Abbé Lemire, une plaquette d'information sur le déménagement des services de l'état civil et des cimetières ainsi que ceux de la régie municipale. Par ailleurs, pendant le mois de mars 1997, un seul numéro de téléphone permettait de joindre à la fois les services administratifs et ceux de la régie et, aux heures de fermeture, un message enregistré unique présentait ces divers services. Au surplus, à l'entrée du complexe, tous les services étaient mentionnés sur un même panneau d'affichage.
La diffusion d'un document publicitaire, présentant de façon unique le regroupement des services administratifs liés aux décès et ceux commerciaux de la régie municipale des pompes funèbres, pouvait engendrer une confusion, dans l'esprit des familles, préjudiciable à l'exercice d'une libre concurrence sur le marché des pompes funèbres. Toutefois, il convient de relever que cette pratique a été de très courte durée puisque le document en cause n'a été diffusé que dans certains points d'accueil de la mairie, pendant deux mois, à une période antérieure à l'installation de l'antenne de l'état civil dans le nouveau complexe et pour un total de 3 000 exemplaires environ. Dès lors, la pratique en cause ne saurait avoir affecté le marché de manière sensible et ne peut, dans ces conditions, être qualifiée d'abusive.
S'agissant du numéro de téléphone unique et du message téléphonique, il convient de relever que ces pratiques ont, elles aussi, pris fin très rapidement, puisque l'existence du message sur répondeur n'a pu être vérifiée que pour une seule journée se situant dans la période de déménagement des services et que dès le mois de novembre 1997, quatre numéros de téléphone ont été affectés à chaque service spécifiquement.
La société saisissante oppose, sur ce point, que le texte du message téléphonique de la régie municipale montre que l'amalgame entre les activités commerciales de la régie et les activités liées au service public n'a pas disparu. En particulier, elle cite le passage suivant du message en cause : "Concernant l'organisation des obsèques en France comme à l'étranger, c'est le conseiller funéraire que vous rencontrerez qui se chargera de toutes les démarches tant auprès des administrations, publiques ou d'État que des tiers intervenant comme par exemple, le clergé, le marbrier, la presse, etc.".
Toutefois, il ne saurait être reproché à la régie d'avoir annoncé sur le message de son répondeur qu'elle offrait d'accomplir, pour les familles, les démarches de déclarations nécessaires auprès des administrations publiques, alors que chaque opérateur de pompes funèbres agréé pouvait offrir la même prestation et que la saisissante, elle même, dans l'annuaire 1997-1998 de la Haute-Garonne, se présentait en mentionnant la même offre de services : "PFG - Pompes funèbres générales - Déclarations de décès et démarches assurées par nos soins, maison funéraire, monuments, caveaux, fleurs.".
Il ressort, enfin, des éléments relevés au paragraphe 31, qu'à l'entrée du complexe tous les services étaient mentionnés sur un même panneau d'affichage comportant le sigle de la mairie de Toulouse. Une telle pratique pouvait, ainsi que l'a relevé le président du Tribunal de grande instance de Toulouse dans l'ordonnance de référés du 8 octobre 1997, engendrer une confusion dans l'esprit du public et fausser le libre jeu de la concurrence.
Cependant, cette pratique a, elle aussi, été de courte durée puisqu'elle a pris fin à la suite de l'ordonnance précitée, en exécution de laquelle deux panneaux séparés ont été posés à l'entrée du complexe. Ainsi, à supposer que cette pratique ait pu avantager la régie municipale, ce dont le dossier ne comporte aucune démonstration, elle ne saurait avoir affecté le marché de manière sensible.
Enfin, le conseil relève que le dossier ne comporte aucun élément permettant de penser que les pratiques susceptibles d'engendrer une certaine confusion dans l'esprit des familles auraient été accompagnées de comportements ou de manouvres de nature à exploiter cette confusion. Dans un tel contexte, la perte des parts de marché de la régie constatée au paragraphe 19, de même que la diminution du nombre de personnes allant déclarer un décès à l'état civil et s'adressant, ensuite, à la régie pour l'organisation de funérailles, exposée au paragraphe 33, confirment encore que les pratiques en cause n'ont pu avoir un effet sensible sur le marché.
Sur l'attribution des horaires de crémation
Le registre des incinérations révèle que la régie municipale des pompes funèbres effectue davantage d'opérations dans les créneaux horaires de 10H00, 11H30 et 15H00, alors que les autres opérateurs opèrent plutôt sur les créneaux de 8H30, 13H30 et 15H00. Selon la société PFG, cette répartition démontrerait que la régie, en tant que gestionnaire, a sciemment donné à ses concurrents les tranches horaires les moins favorables pour les empêcher de développer leur activité.
Toutefois, aucun élément du dossier ne démontre que la régie municipale, en tant que gestionnaire du crématorium, n'aurait pas respecté les dispositions de l'article 5 de son règlement intérieur qui prévoit que la fixation des dates et horaires de crémation est effectuée "(...) en accord avec les familles ou avec la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles".
A cet égard, en effet, si les déclarations de la comptable de la société Pompes funèbres du sud-ouest citées au paragraphe 34 et, dans une certaine mesure, celles de la dirigeante de la société Barrue (paragraphe 23), font état de difficultés dans l'attribution des horaires, le gérant des sociétés MC et PB, ainsi que le directeur de l'agence PFG à Toulouse, cités aux paragraphes 35 et 36, ont, pour leur part, indiqué qu'ils ne rencontraient pas de difficultés particulières. En outre, aucun témoignage de famille ne vient corroborer les affirmations de la société saisissante.
De surcroît, l'importance des tranches horaires de début de matinée ou de début d'après-midi appliquées généralement aux petits opérateurs peut s'expliquer par leurs contraintes propres d'organisation et la demande de leurs clients. En effet, la réalisation d'opérations de crémation en début de demi-journée d'une part, peut permettre à ces petites entreprises de pompes funèbres de réaliser plusieurs transports de corps dans la journée avec un seul véhicule et, d'autre part, offre aux familles qui s'adressent à elles et qui viennent souvent de l'extérieur de Toulouse, voire du département, d'avoir le temps de rentrer chez elles dans la journée pour procéder à l'inhumation de l'urne ou à la dispersion des cendres.
En l'absence de tout élément objectif démontrant l'existence de pratiques discriminatoires du gestionnaire et eu égard au fait que, dans la période considérée, la part des crémations réalisées par la régie a fortement diminué, passant de 52 % à 41,6 %, aucune pratique anticoncurrentielle ne saurait, à cet égard, être retenue à l'encontre de la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse.
Il résulte de ce qui précède que les éléments du dossier ne démontrent pas que la régie municipale des pompes funèbres de Toulouse aurait abusé de sa position dominante sur le marché des pompes funèbres de Toulouse et de son agglomération et aurait enfreint les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce. Il convient donc de faire application des dispositions de l'article L. 464-6 du Code de commerce, précité.
DÉCISION
Article 1 : - La saisine en ce qu'elle porte sur la décision prise par la ville de Toulouse de regrouper des services publics administratifs relatifs aux obsèques et des services industriels et commerciaux assurés par la régie municipale, ainsi que sur l'implantation de panneaux directionnels dans la ville, est irrecevable
Article 2 : - Il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure pour le surplus.