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Décisions

CA Rennes, 1re ch. A, 17 avril 2001, n° 99-04764

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Guerlais

Défendeur :

TBO (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dabosville

Conseillers :

Mmes Tremoureux, Teze

Avoués :

Me Bourges, SCP Castres Colleu & Perot

Avocats :

Mes Le Mappian, Montel.

TGI Nantes, du 11 mai 1999

11 mai 1999

Faits et Procédure

Jean-Claude Guerlais qui exerce l'activité de vente au détail de bois de chauffage et accessoires de jardin, est titulaire des marques dénominatives " Bois Nantais Loisirs Jardin " et " Nantes Bois de Chauffage " déposées le 25 février 1995 pour désigner les bois de chauffage et bois bruts et dont l'enregistrement à l'INPI a été publié le 25 avril 1997.

Exposant que la société concurrente Tillaud Boisouvres, ci-après TBO, distribuait du bois de chauffage, en utilisant, d'une part, dans des annonces ou panneaux publicitaires et annuaires, la désignation " Bois de chauffage Nantais ", voisine des appellations protégées, et donc de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit du public, d'autre part, dans des journaux à diffusion gratuite, la fausse qualité de particulier afin de bénéficier d'un tarif réduit, le tout caractérisant des faits de concurrence déloyale, Jean-Claude Guerlais l'a assignée devant le Tribunal de grande instance de Nantes qui par jugement du 11 mai 1999 a :

- déclaré irrecevable comme prescrite l'action fondée sur les articles L. 712-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle,

- dit que la société TBO n'a pas commis de fait répréhensible à l'origine d'une confusion ou d'un détournement de clientèle au préjudice de M. Guerlais, en utilisant comme enseigne ou pour la désignation de ses produits l'appellation " Bois de Chauffage Nantais ",

- débouté M. Guerlais de ses demandes formées de ce chef ainsi que du fait des annonces publicitaires des 13 et 27 février 1995,

- débouté M. Guerlais de ses demandes en dommages-intérêts et indemnités,

- condamné M. Guerlais à payer à la société TBO la somme de 700 F au titre de ses frais non répétibles.

Jean-Claude Guerlais qui a formé appel de cette décision, demande à la cour, suivant conclusions signifiées le 7 août 2000, de :

- à titre principal,

* dire et juger que la société TBO exerce une concurrence déloyale à son égard, en utilisant l'appellation bois de chauffage Nantais,

* condamner la société TBO à supprimer toute référence commerciale à l'appellation "Bois de Chauffage Nantais" et à procéder à l'enlèvement de toutes pancartes et annonces publicitaires comportant une telle enseigne,

* dire et juger que cette condamnation sera assortie d'une astreinte non comminatoire de 3 000 F par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- subsidiairement,

* condamner la société TBO à lui payer la somme de 30 000 F en réparation du préjudice constitué par la concurrence déloyale,

- pour le surplus,

* condamner la société TBO à lui payer la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société TBO demande au contraire suivant conclusions déposées et signifiées le 6 décembre 1999 de :

- confirmer,

- y additant, condamner Jean-Claude Guerlais à lui payer :

* la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

* la somme de 15 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations du jugement et dernières conclusions déposées.

Motifs

Considérant qu'en dépit de la généralité de l'appel, Jean-Claude Guerlais ne critique pas le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en contrefaçon, par application de l'article L. 716-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

Que la décision sera donc confirmée de ce chef ;

Considérant sur la concurrence déloyale, qu'il résulte des factures et pages d'annuaires produites que la société TBO distribue sous l'appellation " Bois de Chauffage Nantais ", voisine des marques " Nantes Bois de Chauffage " et " Bois Nantais Loisirs Jardin " dont est titulaire Jean-Claude Guerlais, des produits identiques à ceux désignés dans l'enregistrement et commercialisés par ce dernier ;

Mais considérant tout d'abord que l'imitation incriminée de nature à créer une confusion dans l'esprit du public ne saurait être invoquée à l'appui de la concurrence déloyale, comme n'étant pas distincte des faits portant atteinte aux marques déposées;

Considérant, en second lieu, qu'alors même que la société TBO a commercialisé ses produits sous l'appellation " Bois de Chauffage Nantais " à compter de septembre-octobre 1994 ainsi que l'établissent les factures versées au dossier, Jean-Claude Guerlais ne justifie pas pour sa part d'un usage des dénominations protégées antérieur à leur dépôt en date du 25 février 1995,

Qu'il sera observé à cet égard que l'inscription de ce dernier en date du 6 janvier 1994 auprès du Centre des Formalités des Entreprises au titre de la création de l'activité de vente au détail de bois de chauffage et accessoires de jardin, sous le nom commercial de " Bois Nantais Loisirs Jardin " ainsi que sous l'enseigne " Nantes Bois de Chauffage " est inopérante, en ce qu'elle constitue une déclaration à des fins purement administratives ne caractérisant pas en soi une exploitation effective des signes distinctifs de l'entreprise ;

Que la modification apportée par l'intimée dans l'annuaire téléphonique édition 1999 où elle apparaît désormais sous la dénomination " Bois de Chauffage TBO " ne saurait constituer une reconnaissance de responsabilité ;

Que, par suite, le grief tiré d'agissements parasitaires afin de bénéficier de la notoriété attachée à l'entreprise exploitée par Jean-Claude Guerlais n'est pas fondé ;

Considérant, enfin, que l'usage par la société TBO aux fins de vente, de la fausse qualité de particulier bénéficiant d'un tarif réduit, dans un journal de publicité et d'annonces à diffusion gratuite, à trois reprises, les 13, 20 et 27 février 1995, pour critiquable qu'elle soit au regard des usages loyaux du commerce, ne saurait ouvrir droit à dommages-intérêts dès lors que Jean-Claude Guerlais ne justifie pas des répercussions préjudiciables d'une telle pratique, très ponctuelle et limitée dans le temps, sur son activité propre;

Considérant pour ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, que le jugement sera confirmé ;

Considérant qu'au regard de la discussion instaurée, la contestation élevée par Jean-Claude Guerlais ne présente pas de caractère abusif; que la société TBO sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts ;

Considérant que Jean-Claude Guerlais, partie qui succombe, supportera la charge des dépens; qu'il ne peut de ce fait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Que l'équité commande, en revanche, d'allouer sur le fondement de ce texte, la somme de 10 000 F à la société TBO ;

Par ces motifs, LA COUR : Confirme le jugement entrepris ; Y ajoutant, Condamne Jean-Claude Guerlais aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'à payer à la société Tillaud Boisouvres, la somme de 10 000 F (1 524,49 euros) sur le fondement de l'article 700 du même Code ; Déboute les parties de leurs autres demandes.