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Décisions

CA Caen, 1re ch. sect. civ. et com., 21 mars 2002, n° 00-02692

CAEN

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Maillochon

Défendeur :

MDM Multimédia (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Maron

Conseillers :

MM. Le Henaff, Fabre

Avoués :

Me Tesnière, SCP Mosquet Mialon d'Oliveira Leconte

Avocats :

Mes Loygue, Doutressoulle.

T. com. Honfleur, du 21 juill. 2000

21 juillet 2000

Par acte du 19 avril 2000, la SARL MDM Multimédia a assigné Christine Maillochon en paiement de la somme principale de 18 090 F représentant le solde d'une facture impayée, avec intérêts au taux légal à compter du 7 mars 2000 date du protêt, ainsi que des sommes de 10 000 F de dommages et intérêt pour résistance abusive et 8 000 F par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SARL MDM Multimédia faisait valoir à l'appui de sa demande, que le 25 novembre 1999 Madame Maillochon avait souscrit auprès d'elle un contrat intitulé "accord de création d'un point club multimédia" portant sur la location de cent cassettes vidéo pour une durée de six mois renouvelable payable par chèque de 3 618 F à la commande, par chèque du même montant à la livraison, le solde en cinq échéances par lettre de change d'un montant respectif de 3 618 F du 10 février 2000 au 10 juin 2000.

Christine Maillochon n'ayant pas honoré les lettres de change et ayant refusé la livraison, la société MDM Multimédia faisait valoir qu'elle se trouvait fondée à invoquer la déchéance du terme contenue dans les conditions générales de vente pour solliciter le paiement du solde de la facture d'autant qu'elle justifiait avoir exécuté son obligation.

Christine Maillochon concluait au rejet de l'ensemble des demandes formées à son encontre et demandait la condamnation de la société MDM Multimédia à lui rembourser la somme de 7 236 F correspondant au montant des chèques encaissés au moment de la conclusion du contrat et de la livraison des marchandises.

Elle sollicitait en outre la condamnation de la société MDM Multimédia au paiement de la somme de 10 000 F à titre de dommages et intérêts en raison des préjudices subis ainsi qu'au paiement de la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle faisait valoir en effet que d'une part que la convention se trouvait entachée de nullité pour être en infraction à la législation sur le démarchage à domicile, que par ailleurs la convention doit être annulée pour dol en raison des manœuvres utilisées par la société MDM Multimédia pour emporter son consentement puisque celle-ci avait fait état d'un accord avec Monsieur Maillochon et s'était par ailleurs abstenue de délivrer une information suffisante pour permettre d'apprécier les intérêts économiques de l'accord qui lui était soumis.

Par le jugement déféré, en date du 21 juillet 2000, le Tribunal de commerce de Honfleur a condamné Christine Maillochon à payer à MDM Multimédia la somme de 18 090 F avec intérêt au taux légal à compter du 19 avril 2000.

Vu les conclusions des parties en date des:

* 14 décembre 2001 pour Christine Maillochon

* et 10 janvier 2002 pour MDM Multimédia.

Attendu qu'il résulte des pièces du dossier que le commerce exercé par Christine Maillochon est un petit commerce de village destiné à satisfaire les besoins fondamentaux d'une population rurale; que la location de cassettes vidéo, par la création d'un "point vidéo-club" est totalement étrangère à la destination d'un tel commerce; que dès lors, loin de constituer le prolongement de l'activité commerciale de Christine Maillochon ou même d'en assurer une complémentarité, le contrat litigieux avait pour objet la création parallèle d'une activité entièrement distincte de celle exercée dans le cadre de l'exploitation commerciale de la contractante; que dès lors, n'entrant pas dans le champ d'application de l'exclusion prévue à l'article L. 121-22 du Code de la consommation il est soumis aux prescriptions de ses articles L. 121-23 à L. 121-28;

Attendu qu'il n'est pas contesté que ces textes n'ont pas été respectés par MDM Multimédia; qu'au demeurant et surabondamment, le jour même de la signature du contrat, Christine Maillochon a manifesté la volonté de se rétracter;

Attendu en conséquence que le contrat litigieux est nul, par application de l'article L. 121-23 du Code de la consommationet que le jugement déféré doit être infirmé;

Attendu, sur la demande reconventionnelle de Christine Maillochon, que les documents versés par elle aux débats, pour l'un contemporain de la signature du contrat litigieux (pièce 12), pour l'autre actualisant la situation financière du commerce de celle-ci, justifient de la précarité de celui-ci et du fait que la menace d'exécution de la convention nulle du 25 novembre 1999 faisait peser un risque majeur de cessation des paiements;

Attendu qu'il résulte de cet élément que Christine Maillochon a subi, du fait de la demande de MDM, un préjudice moral important, justement évalué par elle à 10 000 F;

Attendu que l'équité conduit à condamnation de MDM à payer à Christine Maillochon la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Attendu que l'article L. 121-28 du Code de la consommation emporte dispositions pénales pour toute infraction aux dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24. L. 12l-25 et L. 121-26 du même code; qu'il y a lieu d'ordonner, à toutes fins, l'envoi d'une copie de la présente décision au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lisieux;

Par ces motifs: Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau; Déboute MDM Multimédia de sa demande; La condamne à payer à Christine Maillochon la somme de 1 524,49 euros de dommages-intérêts et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Ordonne, à la diligence du greffe, l'envoi d'une copie du présent arrêt au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lisieux; Condamne MDM Multimédia aux dépens qui seront recouvrés selon la loi sur l'aide juridictionnelle.