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Décisions

Cass. crim., 6 février 2001, n° 00-83.283

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Blondet

Avocat général :

Mme Fromont

Avocat :

Me Ricard

TGI Grenoble, ch. corr., du 18 janv. 199…

18 janvier 1999

LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par P Joël, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 19 janvier 2000, qui, pour publicité trompeuse et infractions à la réglementation sur la publicité des prix, l'a condamné à 20 000 F d'amende et à 249 amendes de 100 F, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils; - Vu le mémoire produit; - Attendu que des agents de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont constaté par procès-verbal, le 19 septembre 1997, que la société X proposait à la vente, des articles de vêtement, en indiquant à la clientèle, par voie d'affiches apposées à l'entrée et à l'intérieur de l'établissement, qu'elle lui offrait une remise de 50 % sur chacun d'eux, et en les présentant sous un étiquetage faisant état d'un prix de référence et d'une remise de ce montant; que, lors d'un nouveau contrôle du même établissement effectué le 14 janvier 1998, pendant la période des soldes, l'un des agents précités a constaté la présence d'affiches annonçant au public une remise de 60 % à la caisse, alors que 240 articles étaient munis de la même étiquette que lors du précédent contrôle; que Joël P, gérant de la société X, a déclaré que la réduction de 60 %, se substituant à la remise de 50 % précédemment affichée, s'appliquait au prix indiqué sur l'étiquette; qu'il est poursuivi pour avoir, le 19 septembre 1997 et le 14 janvier 1998, en annonçant par voie d'affichettes, sans référence aux prix les plus bas effectivement pratiqués dans son établissement au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité, des remises de 50 puis de 60 % sur les articles vendus, effectué une publicité fausse ou de nature à induire en erreur, et pour avoir, le 14 janvier 1998, en affichant sur 249 articles des prix de référence excédant le prix le plus bas effectivement pratiqué pour ces articles dans le même établissement au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité, commis autant d'infractions à l'arrêté n° 77-105/P du 2 septembre 1977 réglementant la publicité en matière de réduction de prix;

En cet état; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5 et L. 121-6 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Joël P coupable du délit de publicité mensongère et l'a condamné à une amende de 20 000 F et à la publication de la décision dans un journal;

"aux motifs que "selon le premier procès-verbal de délit de la DGCCRF, Joël P a offert à la vente des articles avec une "remise de 50 % minimum" puis avec une "remise de 60 % à la caisse", constatée le 14 janvier 1998; que cette dernière remise de 60 % était calculée sur le prix de référence servant au calcul de la première remise; "que les pièces justificatives fournies par le prévenu permettent de connaître le prix d'achat des articles, mais que ces prix, affectés éventuellement d'un coefficient multiplicateur n'ont jamais été pratiqués dans l'établissement de Joël P; qu'ils correspondraient, selon ses allégations non démontrées, aux prix conseillés par les fournisseurs, ou aux prix résultant d'un mode d'acquisition particulier; "que ces éléments, non portés à la connaissance du consommateur dans la publicité, et l'affichage sur le lieu de vente ne permettent pas à ce dernier de savoir l'origine du prix de référence lui permettant de connaître le bénéfice qu'il peut tirer de la remise de 50 %; qu'il en est de même pour la remise de 60 %; "que, par suite, l'annonce de réduction est fausse, ou tout au moins illusoire, en l'absence de précision sur les prix auxquels sont appliquées les réductions; qu'en tout état de cause, le consommateur est induit en erreur, notamment sur les prix et les conditions de vente des biens qui font l'objet de la publicité; qu'en effet, les remises offertes sont un élément déterminant de l'achat dans un établissement qui a une pratique habituelle de réductions; que le consommateur doit, d'autant plus, être informé avec exactitude par le vendeur sur le prix avant remise; que l'absence d'éléments précis constitue une publicité mensongère, dont le prévenu avait consenti par l'affichage d'un prix de référence qu'il savait inexact; "que les premiers juges ont fait une analyse exacte des faits en déclarant le prévenu coupable des faits visés dans les poursuites; qu'il y a lieu de confirmer sur ce point leur décision; que la peine prononcée apparaît proportionnée à la gravité des faits poursuivis, et à la personnalité de l'intéressé" (cf. arrêt p. 4);

"alors qu'il est constant que les étiquettes litigieuses indiquaient des prix de référence résultant des catalogues des fournisseurs de l'année précédente ou utilisés par d'autres commerçants, les articles vendus avec remises étant des lots d'invendus des fournisseurs; qu'en constatant pourtant que l'affichage sur le lieu de vente ne permet pas au consommateur de savoir l'origine du prix de référence, lui permettant de connaître le bénéfice qu'il peut tirer de la remise de 50 % ou de la remise de 60 %, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation des textes susvisés";

Attendu que, pour déclarer Joël P coupable de publicité trompeuse, la cour d'appel relève que, selon ses propres déclarations, les prix de référence indiqués sur les articles n'ont jamais été pratiqués dans l'établissement; qu'elle ajoute que l'argumentation du prévenu, selon laquelle il aurait utilisé comme prix de référence les prix conseillés par ses fournisseurs, mentionnés dans leurs catalogues, ou couramment pratiqués par les distributeurs des mêmes produits, ne saurait être accueillie, le stock de la société étant constitué de lots d'invendus et de marchandises provenant d'entreprises en difficulté ou victimes de sinistres, qui lui ont été cédés à 30 ou 50 % de leur valeur marchande initiale et ne sont plus couramment distribués sur le marché;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que le prévenu, en annonçant des réductions de prix sans être en mesure de justifier, soit de la réalité des prix de référence indiqués dans son établissement au cours des trente derniers jours précédant le début des publicités, soit de leur effectivité dans la pratique courante des autres distributeurs des mêmes produits, n'a pas pris toutes les précautions propres à assurer la véracité des messages publicitaires, la cour d'appel a justifié sa décision; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles R 113-1 du Code de la consommation, 2 et 3 de l'arrêté n° 77-105/P du 2 septembre 1977, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Joël P coupable des contraventions de non-respect du prix de référence et l'a condamné à 249 amendes de 100 F et à la publication de la décision dans un journal;

"aux motifs que "le deuxième procès-verbal de la DGCCRF a relevé l'existence de 249 contraventions à l'article 3 de l'arrêté n 77-105 du 2 septembre 1977, qui précise les conditions d'établissement du prix de référence en cas de réduction de prix, contraventions de cinquième classe réprimées par l'article R 113-1 du Code de la consommation; "que cet arrêté a été pris en application de l'ordonnance n 45-1483 du 30 juin 1945; que cette ordonnance a été abrogée par l'article 1er de l'ordonnance du 1er décembre 1986; mais que l'article 61 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 a maintenu en vigueur à titre transitoire les arrêtés pris en application de l'ordonnance du 30 juin 1945; que cet arrêté n'était donc pas, au jour des infractions relevées, abrogé; "que, sur la pénalité, l'article R 113-1 du Code de la consommation réprime les contraventions concernant, notamment la vente des biens ou produits, faits visés dans la prévention; que, s'agissant d'une contravention de cinquième classe, le texte de répression peut relever d'un décret, comme en l'espèce; "au fond, que le texte visé précise en son alinéa 1er que le prix de référence doit être calculé en fonction du prix "effectivement pratiqué par l'annonceur pour un article ou une prestation similaire, dans le même établissement de vente au détail"; que ce texte ouvre une option entre le prix pratiqué au cours des trente derniers jours, ou selon l'article 3, le prix conseillé par le fabricant ou l'importateur; que le sens clair du texte signifie que le prix de référence est un prix utilisé par l'annonceur; "qu'en l'espèce, il résulte du dossier et des propres déclarations du prévenu qu'il n'a jamais vendu au prix de référence affiché les articles offerts; que, par suite, l'option que le prévenu déclare avoir respectée n'est pas applicable aux faits de la cause, l'infraction visée résultant de l'absence de mise en vente aux prix sur lesquels sont appliquées les remises indiquées; que, par suite, il a commis les contraventions reprochées; que les premiers juges ont fait une analyse exacte des faits en déclarant le prévenu coupable; qu'il y a lieu de confirmer sur ce point leur décision; "que les peines contraventionnelles prononcées apparaissent proportionnées à la nature des faits poursuivis; que la cour estime également devoir les confirmer; "qu'une mesure de publication paraît opportune pour l'information des consommateurs, que la décision des premiers juges sera également confirmée sur ce point" (cf. arrêt p 5);

"alors que le prix de référence, défini par l'article 3 de l'arrêté n 77-105/P du 2 septembre 1977 consiste soit dans "le prix le plus bas effectivement pratiqué par l'annonceur pour un article ou une prestation similaire dans le même établissement de vente au détail au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité", soit "le prix conseillé par le fabricant ou l'importateur du produit"; que cet article offrant une option dans la définition du prix de référence, "le prix conseillé par le fabricant" n'est pas un "prix effectivement pratiqué par l'annonceur"; qu'en déclarant que le sens clair du texte signifie que le prix de référence est toujours un prix utilisé par l'annonceur, et que l'option que le prévenu déclare avoir respectée, n'est pas applicable aux faits de la cause, l'infraction visée résultant de l'absence de mise en vente par le prévenu aux prix sur lesquels sont appliquées les remises indiquées, la cour d'appel a méconnu l'option posée par l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977 et a violé les textes susvisés";

Attendu que, pour déclarer Joël P coupable d'infractions à la réglementation de la publicité en matière de réduction de prix, les juges relèvent que les prix de référence indiqués le 14 janvier 1998 sur l'étiquetage de 249 articles, au sujet desquels il annonçait 60 % de remise, excèdent les prix les plus bas effectivement pratiqués sur les mêmes articles au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que le demandeur ne peut opposer aux constatations relatives aux prix qu'il a effectivement pratiqués l'allégation d'une référence aux prix conseillés par le fabricant ou l'importateur des produits, la cour d'appel a justifié sa décision;d'où il suit que le moyen doit être écarté;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.