Livv
Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 16 novembre 1999, n° 99-00186

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Nadai

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Avocat général :

M. Blanc

Conseillers :

MM. Seltensperger, Ancel

Avocats :

Mes Gabizon, Magny

TGI Paris, 31e ch., du 24 nov. 1998

24 novembre 1998

Rappel de la procédure :

La prévention

C Lionel est poursuivi pour avoir à Paris, en octobre 1996, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les qualités substantielles, la nature, les prix et les conditions de vente de biens ou de services qui font l'objet de la publicité, en l'espèce en proposant à la vente à trois reprises dans le journal De Particulier à Particulier, un deux pièces situé [adresse], en indiquant une superficie de 42 m2 alors que le logement en question a une superficie de 33,70 m2.

Le jugement

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré C Lionel coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis courant octobre 1996, à Paris, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

et, en application de ces articles

l'a condamné à 8 000 F d'amende,

a ordonné la publication du jugement dans " De Particulier à Particulier"

l'a condamné à payer à Sophie Nadai, partie civile, la somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts et en outre la somme de 3 500 F au titre de l'article 475-1 du CPP

a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

- Madame Nadai Sophie, le 4 décembre 1998 contre Monsieur C Lionel,

- Monsieur le Procureur de la République, le 4 décembre 1998 contre Monsieur C Lionel,

- Monsieur C Lionel, le 4 décembre 1998 contre Madame Nadai Sophie.

Décision

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels interjetés par le prévenu, le Ministère public et la partie civile à l'encontre du jugement entrepris auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la prévention;

Par voie de conclusions Lionel C demande au principal sa relaxe en l'absence d'élément intentionnel dans la réalisation de l'infraction et subsidiairement l'indulgence de la cour. Il indique en particulier qu'il est journaliste employé par le service public et sollicite pour cette raison la non inscription de la condamnation à intervenir au bulletin n° 2 de son casier judiciaire.

Sur les intérêts civils il fait observer que:

- postérieurement à la parution de l'annonce, les parties ont poursuivi la négociation,

- en mesurant l'appartement et en signant pas devant notaire un acte excluant la possibilité pour l'une ou l'autre des parties de se prévaloir d'une erreur de contenance, Sophie Nadai a renoncé à se prévaloir du caractère contractuel de l'annonce passée.

- le caractère du dommage qui a pu résulter pour la partie civile de la parution de l'annonce litigieuse est purement théorique.

Il demande en conséquence de ramener la condamnation prononcée par le jugement déféré à de plus justes proportions et de fixer les dommages-intérêts à un montant symbolique

Par voie de conclusions, Sophie Nadai sollicite la confirmation du jugement déféré sur la déclaration de culpabilité mais relevant appel incident sur les intérêts civils, demande qu'il lui soit alloué une somme de 200 400 F à titre de dommages-intérêts.

Elle demande enfin que Lionel C soit condamné à lui payer la somme de 11 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du CPP.

Rappel des faits :

Sophie Nadai déposait plainte le 30 juillet 1997 à la DGCCRF en indiquant qu'elle avait vu à plusieurs reprises en octobre 1996 dans le journal " De Particulier à Particulier " une annonce publicitaire relative à un deux pièces de 42 m2 situé [adresse]. Après avoir visité cet appartement en compagnie du vendeur ou de son représentant elle avait signé une promesse de vente le 29 octobre 1996 et l'acte authentique le 20 décembre 1996.

En avril 1997 elle avait fait appel à un géomètre expert qui avait établi que la surface de l'appartement était de 33,7 m2. Une tentative de règlement amiable avait échoué et elle évaluait son préjudice à la somme de 217 957 F.

Lionel C déclarait à la DGCCRF qu'il avait fait paraître cette annonce " 15e St-Charles, 2 pièces, 42 m2, au 3e sur cour, parfait état général, calme, cheminées, moulures, porte blindée, fenêtre PVC neuves. WC séparés. Bonne distribution. Interphone. Près commerces. Faibles charges. 725 000 F " en toute bonne foi, en reproduisant la surface qui lui avait été indiquée par l'agence immobilière lors de l'achat de cet appartement en 1992. Il n'avait pas lui-même mesuré cet appartement mais avait, en compagnie de Sophie Nadai procédé à un métré empirique aboutissant à une surface inférieure à 42 m2.

Lionel C sollicitait sa relaxe au motif qu'il était de bonne foi.

Sur ce,

Sur l'action publique

Considérant que par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont retenu qu'il appartenait à Lionel C en sa qualité d'annonceur, de veiller à l'exactitude des mentions qu'il faisait publieret qu'en annonçant sans le vérifier que l'appartement mis en vente par ses soins avait une superficie de 42 m2, il avait commis une faute qui constituait l'élément moral du délit de publicité trompeuse;

Considérant qu'il convient de faire, ainsi que précisé au dispositif, une application très modérée de la loi pénale au prévenu en tenant compte de ses explications et notamment du fait qu'il avait, ce qui a été confirmé devant la cour par la partie civile mesuré en compagnie de Sophie Nadai la superficie de l'appartement ce qui avait abouti à une surface inférieure à 42 m2.

Qu'il y a lieu, par ailleurs de dispenser Lionel C de la publication de la décision

Sur l'action civile

Considérant que Sophie Nadai réitère en appel sa demande en réparation du préjudice et sollicite de ce chef une somme de 200 400 F se décomposant ainsi :

- surcoût du prix d'achat : 138 333 F

- frais de notaire : 9 300 F

- coût du crédit : 50 583 F

- coût de la caution crédit logement : 1 184 F

- métrage de l'appartement : 1 000 F

Considérant que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice subi par la partie civile en retenant qu'il convenait de ne tenir compte que des conséquences de la publicité à l'exclusion de tout grief de nature contractuelle ; que la somme de 50 000 F allouée à Sophie Nadai sera confirmée par la cour;

Considérant qu'il sera alloué à la partie civile une somme de 3 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale qui s'ajoutera aux frais irrépétibles accordés par le jugement déféré;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Sur l'action publique, Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité ; l'infirme en répression : Condamne Lionel C à la peine de 5 000 F d'amende ; Dit que cette condamnation ne sera pas inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire de Lionel C ; Dispense le prévenu de la publication de la décision ; Sur l'action civile : Confirme le jugement déféré sur les intérêts civils ; Y ajoutant, Condamne Lionel C à payer à Sophie Nadai la somme de 3 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné.