CA Saint-Denis de la Reunion, ch. com., 7 décembre 1999, n° 98-00875
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Compagnie Bordelaise de la Réunion (SA)
Défendeur :
Havas Overseas (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Malleval
Conseillers :
MM. Blot, Protin
Avocats :
SCP Belot Akhoun Cregut Hameroux, SCP Canale Gauthier Antelme.
FAITS ET PROCEDURE
Par jugement du 27 mai 1998 auquel il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des moyens et des prétentions des parties le Tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion saisi d'une action en paiement de prestations a fait droit à cette demande et :
- condamné la Compagnie Bordelaise de la Réunion à payer à la société Havas Overseas la somme de 95 297,85 F, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 mai 1997,
- débouté la Compagnie Bordelaise de la Réunion de sa demande reconventionnelle,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la Compagnie Bordelaise de la Réunion à payer à la société Havas Overseas la somme de 8 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
- l'a condamnée aux dépens.
Le 2 juin 1998 la Compagnie Bordelaise de la Réunion a relevé appel de cette décision. Dans les dernières conclusions qu'elle a déposées avant l'ordonnance de clôture elle soutient, après avoir exposé que la société Havas Overseas a manqué à ses obligations contractuelles souscrites dans le cadre d'une opération publicitaire, que les premiers juges ont fait une mauvaise application des règles de droit aux circonstances de la cause, que le jugement dont appel doit être annulé pour défaut de motivation de la décision de rejet de la demande reconventionnelle, que c'est légitimement qu'elle a refusé de payer les sommes qui lui ont été réclamées puisque la société Havas Overseas n'a pas exécuté les prestations prévues par le contrat, que celle-ci s'est au surplus rendue coupable d'un abus de position dominante puisqu'elle a refusé de conclure de nouveaux contrats publicitaires au motif que la dernière facture n'avait pas été payée.
La Compagnie Bordelaise de la Réunion demande donc à la cour :
- de dire son appel recevable et bien fondé,
Statuant à nouveau :
- à titre principal, d'annuler le jugement entrepris,
- subsidiairement, d'infirmer le jugement critiqué dans toutes ses dispositions,
En conséquence,
- de débouter la société Havas Overseas de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, tant sur le principal que sur l'accessoire et notamment l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Reconventionnellement,
- de condamner la société Havas Overseas à payer à la Compagnie Bordelaise de la Réunion la somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts, la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société Havas Overseas répond que la motivation aux termes de laquelle le tribunal a admis la demande principale excluait du même coup la demande reconventionnelle, que la Compagnie Bordelaise de la Réunion est de mauvaise foi lorsqu'elle soutient que la société Havas Overseas n'a pas respecté ses engagements, que ces engagements ont été, au contraire, parfaitement respectés, que la société Havas Overseas était bien fondée à refuser de conclure de nouveaux contrats publicitaires avec la Compagnie Bordelaise de la Réunion qui n'avait pas payé la facture précédente, que la cour devra en conséquence déclarer mal fondé l'appel interjeté, confirmer le jugement entrepris et condamner l'appelante au paiement de la somme de 15 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La Compagnie Bordelaise de la Réunion a saisi le Premier Président de la présente cour d'une requête tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement dont appel. Cette requête a été rejetée par ordonnance du 6 octobre 1998.
MOTIFS ET DECISION
Attendu qu'il résulte des éléments soumis à l'attention de la cour que la Compagnie Bordelaise de la Réunion a déposé des conclusions le 5 novembre 1999 c'est-à-dire postérieurement à l'ordonnance de clôture qui a été rendue le 5 octobre ; que de telles conclusions ne peuvent qu'être écartées des débats conformément aux dispositions de l'article 783 du nouveau Code de procédure civile ;
Sur la prétendue nullité du jugement
Attendu que la Compagnie Bordelaise de la Réunion soutient que le jugement entrepris serait nul faute par les premiers juges d'avoir motivé leur décision de rejeter la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts; que la société Havas Overseas fait observer avec pertinence que les motifs qui ont amené le tribunal à reconnaître le bien fondé de la demande principale en paiement excluait du même coup l'existence d'une faute qui aurait pu justifier la demande reconventionnelle que cette motivation a contrario n'est pas pour autant inexistante ; que le moyen soulevé ne peut qu'être rejeté;
Sur le bien fondé de la demande principale
Attendu qu'il est constant que la Compagnie Bordelaise de la Réunion a signé en 1995 un ordre d'insertion d'un encart publicitaire cartonné en quadrichromie placé au milieu des pages jaunes de l'annuaire;que cet ordre d'insertion pourtant identique à celui signé en 1994 s'est traduit, pour un prix presque équivalent, par des prestations beaucoup plus limitées, le format de l'encart ayant été réduit de moitié environ et l'encart lui-même déplacé dans l'annuaire ;que la Compagnie Bordelaise de la Réunion reproche donc à la société Havas Overseas d'avoir modifié unilatéralement et arbitrairement les conditions du contrat ;
Attendu qu'une telle analyse ne peut être retenue le contrat de parution pour l'année 1995 n'étant pas le renouvellement ou la reconduction de celui conclu en 1994 mais un nouveau contrat librement discuté et accepté par les parties ;que l'ordre d'insertion signé en 1994 n'indique pas à la rubrique "format" des dimensions précises mais seulement un Code ;que la société Havas Overseas établit par les documents qu'elle verse aux débats que les formats correspondant à ce Code ont été réduits indépendamment de sa volonté par l'ODA pour l'ensemble des annonceurs ;qu'elle prouve également par le témoignage de l'un de ses agents commerciaux dont rien ne permet de soupçonner la sincérité et par la production du bon à tirer en format réel spécialement redessiné que la Compagnie Bordelaise de la Réunion a eu une connaissance exacte des conditions de parution de l'encart 1995 avant de s'engager;qu'il est constant que cet encart a été inséré au milieu des Pages Jaunes de l'annuaire comme cela avait été le cas l'année précédente;qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la Compagnie Bordelaise de la Réunion ne démontre pas que la société Havas Overseas aurait manqué à ses obligations ;qu'il y a lieu en conséquence de confirmer la décision entreprise sur ce point ;
Sur la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts
Attendu que devant la cour la Compagnie Bordelaise de la Réunion soutient que la société Havas Overseas aurait abusé de sa position dominante en refusant de donner suite à des ordres de parution pour les années 1996 et 1997 ; que la société Havas Overseas n'a pas commis de faute en refusant de poursuivre des relations commerciales avec un client qui n'avait pas payé les prestations précédentes ; que la demande reconventionnelle doit donc être rejetée et la décision entreprise confirmée en toutes ses dispositions ;
Attendu que l'équité commande d'allouer à la société Havas Overseas la somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que le plaideur qui succombe doit supporter les dépens de l'instance;
Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ; En la forme reçoit l'appel interjeté; Ecarte des débats les conclusions déposées après l'ordonnance de clôture : Déclare l'appel mal fondé, le rejette en conséquence et confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise ; Condamne la Compagnie Bordelaise de la Réunion à payer à la société Havas Overseas la somme de 8 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne la Compagnie Bordelaise de la Réunion aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Canale Gauthier Antelme, avocats, qui l'a requise.