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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 19 novembre 1998, n° 97-3272

NÎMES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Office d'annonces (SA)

Défendeur :

Auto Ecole Redon (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

MM. de Monredon, Eynard

Avoués :

Mes Aldebert, d'Everlange

Avocats :

Me Meyer, SCP Coulomb-Durand

TI Nîmes, du 20 mai 1997

20 mai 1997

FAITS ET PROCEDURE

Les faits sont exposés dans le jugement dont appel, auquel il convient dès lors de se reporter, et aux termes duquel Joachim Redon a été condamné à payer à la Société Office d'Annonces (ODA) une somme de 22 328, 75 F avec intérêts au taux légal à compter du 6 juin 1996, date de l'assignation au titre d'un reliquat de facture d'insertion publicitaire, ODA étant quant à elle condamnée à payer à Redon la somme de 10 000 F en réparation du préjudice conséquence de la perte d'une chance, faute d'avoir produit sa créance à la liquidation judiciaire de la société Arc en Ciel, mandataire de Redon.

ODA a interjeté appel principal de cette décision. Redon ayant formé quant à lui appel incident.

PROLEGOMENES

Il convient d'écarter du débat toutes les considérations des parties étrangères à l'instance qui se circonscrit dans la relation contractuelle Redon-ODA qui n'est pas discutée en son principe aux termes d'une convention intervenue entre ODA publicitaire et Redon annonceur.

Il n'est pas davantage discuté qu'Arc en Ciel, qui aurait curieusement démarché Redon sans intervention d'ODA, a été le mandataire de Redon ; que la rétention de sommes servies par le mandant au mandataire ne délivre pas le mandant de son obligation à l'égard du créancier dans les termes de l'article 1239 du Code civil, alors qu'en outre l'article 1998 du Code civil prescrit que le mandant (Redon) est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire (Arc en Ciel) conformément au pouvoir qui lui a été donné; qu'il convient donc d'écarter des débats comme lui étant étranger toute discussion sur l'exacte relation entre ODA et Arc en Ciel.

Qu'il suffit de relever qu'Arc en Ciel a passé commande à ODA d'une insertion publicitaire et qu'il n'est pas discuté que celle-ci a été effectuée.

Il n'est pas davantage discuté que le prix convenu entre ODA et Redon était de 48 528,75 F; qu'à ce jour ODA soutient n'avoir été réglée qu'à hauteur de 26 200 F.

PRETENTIONS DES PARTIES

ODA soutient qu'elle justifie d'une créance certaine en son principe, liquide et exigible sur Redon dans la mesure où la défaillance du mandataire auprès duquel Redon soutient s'être acquitté, ne libère pas celui-ci à l'égard de son co-contractant comme dit plus haut.

Au reste la disposition du jugement ayant condamné Redon à paiement n'est pas critiquée et pour cause; l'appel d'ODA est cantonné à la réparation du préjudice causé à Redon par l'absence de production de créance par ODA à la procédure collective d'Arc en Ciel.

Il est conclu à la réformation du jugement sur ce point, ODA sollicitant en outre le bénéfice de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Appelant incident du jugement, Redon conclut à sa réformation partielle en l'état des paiements qu'il aurait effectués.

Il est réclamé 10 000 F au titre des frais irrépétibles.

SUR QUOI

Il ne peut être imputé à ODA par l'effet des principes juridiques rappelés plus haut d'avoir omis de produire sa créance à la liquidation judiciaire d'Arc en Ciel dans la mesure constante où en droit elle ne peut et ne saurait être créancière du mandataire de Redon.

Que Joachim Redon établisse, par la production aux débats de relevés de comptes bancaires conformes aux appels de fonds et au tableau des paiements établis par Arc en Ciel, que celle-ci a été honorée par lui est hors débat par relation toujours aux mêmes principes juridiques dans la mesure où il doit établir qu'il a désintéressé son créancier qui n'est autre que l'ODA.

En contrepoint, ODA est dans l'obligation d'établir, sa position de créancier à l'égard de Redon n'étant pas discutable, qu'il n'a pas été intégralement rempli de ses droits par le mandataire de Redon.

Sur ce point ODA, par relation aux dispositions de l'article 1315 du Code civil, succombe dans l'administration de la preuve qui lui incombe.

Tout d'abord, parce qu'il est constant que n'étaient publiées que les annonces payées. Or la publicité commandée par Redon a été publiée.

Ensuite,il est établi par la lecture du jugement prononcé le 30 octobre 1997 par le Tribunal de commerce de Nîmes, aux termes duquel ODA a été condamnée au comblement du passif d'Arc en Ciel, jugement certes frappé d'appel, mais dont les termes peuvent être retenus comme corroborés par les correspondances échangées entre les parties à la présente instance et régulièrement versées aux débats, que pour aussi aberrant que cela paraisse Arc en Ciel effectuait auprès d'ODA des paiements globaux sans détail des annonceurs ayant payé et des sommes réglées par chacun d'entre eux.

Il s'ensuit dès lorsque pour l'exercice de 1994 en la cause ODA, qui au reste a par ordonnance de référé du 21 octobre 1994 obtenu qu'il soit enjoint à Arc en Ciel d'avoir à fournir un état des commandes numérotées identifiant les annonceurs et les paiements par relation à ces derniers, est en l'état d'un paiement global par Arc en Ciel à hauteur de 1 241 907,45 F hors d'état d'établir qu'il l'a ou ne l'a pas payé.

Enfin et pour comble par correspondance du 13 janvier 1995 ODA a confirmé que Redon avait soldé intégralement le coût de sa commande par l'intermédiaire d'Arc en Ciel.

Dès lors, ODA n'est pas fondée en sa demande.

La décision entreprise est donc en voie d'infirmation totale quant aux demandes principale et reconventionnelle.

Les pratiques commerciales d'ODA en ce qu'elles font courir un risque financier à ses clients, justifient qu'elle supporte l'intégralité des dépens d'une procédure injustifiée et porte à Joachim Redon 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, Dit la société Office d'Annonces et Joachim Redon partiellement fondés en leurs appels principal et incident. Infirmant, Déboute les parties de leurs demandes principales et reconventionnelles. Condamne la société Office d'Annonces aux entiers dépens d'instance et d'appel dont distraction au profit de Me d'Everlange, avoué, sur ses offres de droit et à payer à Joachim Redon 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.