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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch., 30 avril 2002, n° 01-02129

BORDEAUX

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Orthopédie Centrale (SARL)

Défendeur :

Malmezat-Prat

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Frizon de Lamotte

Conseillers :

Mlle Courbin, M. Ors

Avoués :

SCP Arsène-Henry & Lançon, SCP Labory-Moussie & Andouard

Avocats :

Mes Bougeret, Carmouse, Olhagaray

T. com. Bordeaux, du 22 sept. 2000

22 septembre 2000

La SARL Orthopédie Centrale a signé le 17 septembre 1993 avec la société en commandite par action PCV un contrat aux termes duquel celle-ci s'engageait à apporter à la première un appui en matière d'achats groupés de matériel spécialisé, un appui juridique et commercial et une aide en matière de formation. Cet accord conclu pour un an était tacitement renouvelable mais résiliable 6 mois avant son échéance.

Le 27 septembre 1995, le Tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé la liquidation judiciaire de la société PCV. Le 6 décembre 1995, la SARL Orthopédie Centrale déclarait entre les mains du mandataire liquidateur, Maître Malmezat-Prat une créance de 100 075 F composée de la rétrocession des cotisations pour les années 1994 et 1995 et de diverses factures ayant trait à des refacturations de matériels à d'autres sociétés adhérentes.

Le 21 mars 1996 Maître Malmezat-Prat donnait son accord sur les factures mais demandait que les cotisations jusqu'au mois d'août 1995 soient réglées. Elle sollicitait le règlement de diverses factures et demandait en conséquence le paiement de la somme de 199 420 F. Devant le refus de la SARL Orthopédie Centrale, Maître Malmezat-Prat, ès qualités, saisissait le Tribunal de commerce de Bordeaux.

Par une décision du 22 septembre 2000, les premiers juges ont condamné la SARL Orthopédie Centrale à payer à Maître Malmezat-Prat, ès qualités, la somme de 199 420 F.

Le 25 octobre 2000, la SARL Orthopédie Centrale a relevé appel de cette décision.

Par une décision du 13 mars 2001, Madame le Conseiller de la mise en état, constatant que l'appelante n'avait pas conclu, a ordonné la radiation de la procédure.

Elle a été remise au rôle le 25 avril 2001 à la demande de Maître Malmezat-Prat, ès qualités.

Vu les conclusions de l'appelante du 23 novembre 2001.

Vu les conclusions de Maître Malmezat-Prat, ès qualités, du 5 septembre 2001.

Sur quoi LA COUR,

Attendu que l'appelante soutient que le contrat qui la liait à la société PCV était un contrat de franchise, contrat qui ne respectait pas les dispositions de la loi du 31 décembre 1989 et du décret du 4 avril 1991, que de ce fait, il est donc nul, et sollicite en conséquence que l'intimée soit déboutée de sa demande au titre des cotisations et demande que sa créance soit admise pour la somme de 100 075 F, qu'elle ne conteste pas devoir la somme de 147 763 F au titre du matériel livré et sollicite que cette somme se compense avec celle dont elle sera reconnue créancière.

Attendu, sur l'application de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile, qu'il est exact que cette nullité n'avait pas été soulevée en première instance, la SARL Orthopédie Centrale ayant alors contesté devoir les cotisations qui lui étaient réclamées faute de contrepartie et sollicitant la compensation entre ses propres factures : 100 075 F et celles qui lui étaient opposées représentant des marchandises ou des services impayés 199 420 F.

Attendu qu'en application de ce texte, la cour ne peut connaître de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger des questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance d'un fait nouveau.

Attendu que les prétentions présentées en cause d'appel par l'appelante tendent à faire écarter une partie des prétentions adverses : le paiement des cotisations réclamées et viennent à l'appui d'une prétention déjà formulée en première instance: la rétrocession des cotisations pour les années 1994 et 1995, s'agit en conséquence de prétentions qui ne sont pas nouvelles puisqu'elles visent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, elles sont donc recevables.

Attendu, sur la qualification du contrat : par la convention du 17 septembre 1993, la société PCV s'est obligée envers son affilié à l'aider à étendre et développer son activité professionnelle dans le domaine des services et techniques de l'hospitalisation domicile en lui assurant un service d'achats groupés, une assistance technique, juridique et commerciale, une formation pour lui et le personnel qu'il aura spécialisé à cette fin..., l'affilié bénéficiant d'une exclusivité territoriale, devant verser un droit d'entrée de 50 000 F HT et une cotisation mensuelle de 6 000 F HT, bénéficiant des ristournes des fournisseurs à hauteur des 2/3 mais pas des primes de référencement, devant utiliser la marque et le graphisme PCV, devant appliquer en matière de publicité les normes et prescriptions de la centrale et s'engageant à recourir prioritairement à la centrale pour tous ses approvisionnements dans le domaine de l'hospitalisation à domicile, dans le cas où pour des matériels strictement équivalents, l'affilié obtient des offres plus avantageuses d'autres fournisseurs, il peut s'approvisionner auprès de ceux-ci, faute par le référencé, informé de s'être aligné.

Attendu que la loi du 31 décembre 1989 s'applique à toute personne qui met à la disposition d'une autre personne : un nom, une marque ou une enseigne en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité.

Attendu que, selon la définition avancée par l'intimée une centrale d'achats est un commissionnaire ayant une existence juridique propre et dont les activités de commissions, de répartitions, d'organisations, de documentations et autres services rendus sont réservées à l'usage exclusif de ses adhérents auxquels le liait le contrat d'une certaine durée.

Attendu que si la société PCV avait une activité d'une centrale d'achat, il faut relever qu'elle ne se limitait pas à cette seule activité puisqu'elle n'agissait pas comme un simple intermédiaire puisque ses affiliés avaient l'obligation d'utiliser la marque et le graphisme PCV lui appartenant et ils étaient tenus par un engagement de quasi-exclusivité puisqu'ils ne pouvaient se fournir chez un fournisseur non référencé offrant à matériel strictement équivalent à des conditions plus avantageuses que celles offertes par un fournisseur référencé, qu'après que ce dernier interrogé ait fait connaître qu'il ne pouvait aligner son prix sur celui offert par son concurrent.

Attendu, qu'en présence de la mise à disposition d'une marque et d'un graphisme en échange d'une quasi-exclusivité d'approvisionnement, la convention dont s'agit est bien soumise aux dispositions de la loi du 31 décembre 1989 et du décret du 4 avril 1991, textes qui n'ont pas été respectés puisque la société PCV a omis de remettre le document prévu aux articles 1er de cette loi et de ce décret.

Attendu, en conséquence, que la nullité de ce contrat doit être prononcée qu'il doit donc être fait droit à la demande de l'intimée tendant à la restitution des cotisations perçues et Maître Malmezat-Prat, ès qualités, doit être déboutée de sa demande en paiement des cotisations non réglées.

Attendu que l'appelante est donc créancière au titre des cotisations de la somme de 93 575,40 F.

Attendu, que les deux factures, sont contestées, que l'appelante ne rapporte pas la preuve de la réalité de leur bien fondé, que dans ces conditions, elles doivent être rejetées.

Attendu que l'appelante ne conteste pas devoir la somme de 147 763,48 F au titre des fournitures de matériels, qu'il convient en conséquence du fait du lien de connexité existant entre ces deux créances d'en ordonner la compensation et de condamner l'appelante à verser à Maître Malmezat-Prat, ès qualités, la somme de 54 188,08 F soit 8 261,63 euros.

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Attendu que la SARL Orthopédie Centrale supportera les dépens de première instance, chacune des parties supportant les dépens qu'elle a exposés devant la cour.

Par ces motifs : LA COUR, Déclare la SARL Orthopédie Centrale pour partie fondée en son appel, en conséquence, réforme la décision déférée dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau ; Prononce la nullité du contrat en date du 17 septembre 1993 ; Dit que la créance de la SARL Orthopédie Centrale s'élève à la somme de 93 575,40 F ; Dit que la créance de Maître Malmezat-Prat, ès qualités, s'élève à la somme de 147 763,48 F ; Ordonne la compensation entre ces deux sommes et condamne la SARL Orthopédie Centrale à payer à Maître Malmezat-Prat, ès qualités, la somme de 8 261,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 1998 ; Dit qu'il n'y a lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Dit que les dépens de première instance seront supportés par la SARL Orthopédie Centrale et que chacune des parties supportera les dépens qu'elle a exposés devant la cour.