Cass. crim., 26 novembre 2002, n° 02-83.878
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Beraudo
Avocats :
SCP Delaporte, Briard.
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par A Marc, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 15 mai 2002, qui, pour tromperie, l'a condamné à 7 000 euros d'amende et a ordonné la destruction des marchandises saisies ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1 et L. 216-2 du Code de la consommation, 121-3 du Code pénal, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Marc A coupable de tromperie et, en répression, l'a condamné à une amende de 7 000 euros, et ordonné en outre la destruction, aux frais du prévenu, des 6 804 bouilloires saisies ;
"aux motifs que Marc A a importé en France, 52 000 bouilloires électriques fabriquées à Hong-Kong ; que d'une part, les analyses faites par le laboratoire de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) ont établi que ces produits n'étaient pas conformes à la norme française NF EN 60335-2-15 ni à la norme européenne en vigueur à partir du 1er septembre 1996 et il est constant que certains des échantillons étaient dangereux et qu'aucun de ces appareils n'était conforme au décret n 95- 1081 du 3 octobre 1995 sur la sécurité des matériels électriques, ce que reconnaît le prévenu ; qu'en conséquence, l'élément matériel du délit de tromperie est bien constitué puisque les défauts des bouilloires portent sur leur aptitude à l'emploi et affectent leur qualité substantielle ; que, d'autre part, le prévenu a importé en France des bouilloires fabriquées à Hong-Kong, en se contentant notamment d'un certificat de conformité établi à la seule demande du fabricant, par un laboratoire allemand agréé pour l'Union européenne ; que les investigations ont démontré que les tests avaient été faits à la fin de l'année 1996 ou au début de l'année 1997, à partir de normes trop anciennes par rapport à la date de livraison, en décembre 1997 ; que de l'aveu même du prévenu à l'audience de la cour, il n'avait fait aucun contrôle personnel ; qu'ainsi, en sa qualité d'importateur, responsable de la première mise d'un matériel électrique sur le marché européen, le prévenu était tenu de vérifier personnellement que le produit importé était conforme aux prescriptions en vigueur dans l'Espace économique européen ; que Marc A a manqué à l'obligation qui lui incombait, en prenant délibérément le risque d'introduire sur le marché français des articles inaptes à l'emploi ou présentant des dangers pour les consommateurs et s'est rendu coupable du délit de tromperie qui est caractérisé en l'espèce ; que la cour rejettera l'argument du prévenu qui soutient que d'autres clients européens avaient déjà acheté et distribué ces mêmes bouilloires dans l'Espace économique européen et en France, dès lors que les bouilloires en cause dans cette affaire ont été livrées postérieurement, que rien n'établit qu'elles provenaient de la même fabrication ; qu'au contraire, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) ayant fait observer qu'un simple contrôle visuel aurait permis de détecter les anomalies, le fait que seules les bouilloires expédiées à la société Bayard-Presse aient eu un problème technique, renforce le principe que l'importateur qui réalise la mise sur le marché européen doit pratiquer un contrôle au moment de la livraison ; qu'en conséquence, la cour constate que la tromperie, visée à la prévention, est caractérisée en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel et il convient d'infirmer le jugement déféré en déclarant Marc A coupable de ce délit ; que la contravention de mise sur le marché de matériel électrique non conforme, visée à la prévention, constitue en réalité l'élément matériel du délit de tromperie, que la cour qui constate qu'un même fait, autrement qualifié, ne peut donner lieu à une double déclaration de culpabilité, décide que l'ensemble des infractions visées à la prévention constituent en réalité le seul délit de tromperie ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré Marc A coupable de mise sur le marché de matériel électrique non conforme (arrêt, pages 9 et 10) ;
"alors que pour être punissable, la tromperie doit résulter d'une intention frauduleuse, laquelle ne résulte pas de la seule constatation de l'élément matériel du délit ; "qu'en l'espèce, pour entrer en voie de condamnation, la cour d'appel, après avoir énoncé, d'une part, que les bouilloires litigieuses étaient affectées d'un défaut portant sur leur aptitude à l'emploi, d'autre part, que le prévenu a procédé à l'importation de ces marchandises en se contentant d'un certificat de conformité établi par un laboratoire allemand agréé pour l'Union européenne, s'est déterminée par la circonstance que les investigations ont démontré que les tests avaient été faits à la fin de l'année 1996 ou au début de l'année 1997, à partir de normes trop anciennes par rapport à la date de livraison, fixée au mois de décembre 1997 ; "qu'en l'état de ces seules énonciations, sans indiquer en quoi les normes en vigueur au moment des contrôles effectués par le laboratoire allemand n'étaient plus valables au moment de la livraison ni préciser en quoi l'importateur aurait pu avoir connaissance de l'existence de normes nouvelles et du fait que les contrôles litigieux n'y auraient pas satisfait, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;
Attendu que, pour déclarer Marc A coupable de tromperie sur l'aptitude à l'emploi de bouilloires électriques importées de Hong-Kong, l'arrêt relève que, de son propre aveu, il n'a réalisé aucun contrôle personnel et a ainsi pris délibérément le risque d'introduire sur le marché des articles inaptes à l'emploi ou présentant des dangers pour les consommateurs ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a caractérisé l'élément intentionnel de l'infraction ;d'où il suit que le moyen, inopérant en ce qu'il se réfère à un prétendu certificat de conformité antérieurement établi à l'initiative du seul fabricant, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.